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28/11/2019 | FRANCE | N°19BX01408

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 28 novembre 2019, 19BX01408


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 12 mars 2019 par lequel le préfet de la Corrèze lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a assorti cette décision d'une interdiction de retour sur le territoire pour une durée de deux ans.

Par une ordonnance n° 1900481 du 29 mars 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a annulé l'arrêté du 12 mars 2019 du préfet de la Corrèze.

Procéd

ure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 avril 2019, le préfet de la Corrèze d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 12 mars 2019 par lequel le préfet de la Corrèze lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a assorti cette décision d'une interdiction de retour sur le territoire pour une durée de deux ans.

Par une ordonnance n° 1900481 du 29 mars 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a annulé l'arrêté du 12 mars 2019 du préfet de la Corrèze.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 avril 2019, le préfet de la Corrèze demande à la cour d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges du 29 mars 2019.

Il soutient que :

- la demande de première instance était tardive et par suite, irrecevable ;

- le juge de première instance a accueilli à tort le moyen tiré du défaut d'examen de la situation de M. C... ; il ne peut lui être reproché une erreur de fait en reprenant l'élément selon lequel il est célibataire, ni de ne pas avoir procédé pour cette raison, à un examen particulier de sa situation familiale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 septembre 2019, M. C..., représenté par Me G..., demande à la cour :

1°) de confirmer le jugement du tribunal administratif de Limoges et de rejeter la requête du préfet de la Corrèze ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Corrèze de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour en vue du dépôt de sa demande de titre de séjour ;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement à son avocat de la somme de 1 500 euros en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par le préfet n'est fondé.

Par ordonnance du 5 septembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 7 octobre 2019 à 12 heures.

M. C... a été maintenu au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 août 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... F... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... se disant Marouane C..., de nationalité marocaine, était détenu au .... Le préfet de la Corrèze relève appel de l'ordonnance du 29 mars 2019 par laquelle le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a annulé cet arrêté du 12 mars 2019.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Aux termes du II de l'article L. 512-1 du code d'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai peut, dans les quarante-huit heures suivants sa notification administrative, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision refusant un délai de départ volontaire, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant (...) ". Et aux termes de l'article L. 512-2 du même code : " Dès notification de l'obligation de quitter le territoire français, l'étranger auquel aucun délai de départ volontaire n'a été accordé est mis en mesure, dans les meilleurs délais, d'avertir un conseil, son consulat ou une personne de son choix. L'étranger est informé qu'il peut recevoir communication des principaux éléments des décisions qui lui sont notifiées en application de l'article L. 511-1 ".

3. Lorsque les conditions de la notification à un étranger en détention d'une décision portant obligation de quitter le territoire sans délai portent atteinte à son droit au recours effectif, garanti par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, elles font obstacle à ce que tout délai de recours, et notamment le délai spécial de quarante-huit heures prévu à l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, commence à courir.

4. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la décision portant obligation de quitter le territoire sans délai, qui comportait la mention des voies et délais de recours, a été notifiée à M. C... alors qu'il se trouvait incarcéré au centre de détention d'Uzerche

le vendredi 15 mars 2019 à 15 heures 50. M. C... a fait valoir toutefois devant le tribunal que, du fait de l'absence du personnel du greffe du centre pénitentiaire le week-end, il n'a pas été en mesure d'avertir son avocat ou une personne de son choix dans les meilleurs délais, de sorte qu'il n'a pu former un recours dans le délai de quarante-huit heures imparti par les dispositions précitées de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Si le préfet de la Corrèze fait valoir que la circonstance que la notification en fin de semaine ne faisait pas obstacle à ce qu'il contestât lui-même l'arrêté en se rapprochant du greffe du centre de détention par une requête qui aurait pu être complétée par la suite, cette circonstance n'est pas de nature à démontrer qu'eu égard aux conditions offertes aux personnes détenues au centre de détention d'Uzerche, il aurait pu exercer effectivement son droit au recours avant l'expiration du délai requis, et le préfet ne produit pas d'éléments pour le démontrer. Dans ces conditions, le délai de quarante-huit heures prévu à l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne pouvait lui être opposé. Par suite, ainsi que l'a jugé à bon droit le magistrat désigné par le président du tribunal administratif, sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 mars 2019, dont il avait saisi le tribunal administratif de Limoges par une requête enregistrée au greffe le lundi 18 mars 2019 à 12 heures 11, n'était pas tardive.

Sur le motif d'annulation de l'arrêté du 12 mars 2019 retenu par le premier juge :

5. Pour annuler l'arrêté attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges s'est fondé sur le défaut d'examen particulier de la situation personnelle du requérant. Il ressort des pièces du dossier et notamment de la notice de renseignements du centre de détention d'Uzerche du 2 août 2018 que M. C... a déclaré vivre en concubinage avec Mme B... et indiqué le nom et l'adresse de cette personne en qualité de responsable de son hébergement lors de sa libération. Il a également fait état de cette relation à l'audience publique du tribunal administratif. La mention de l'arrêté contesté indiquant qu'il est célibataire, sans aucune précision sur cette relation de concubinage, est de nature à entacher la décision en litige d'un défaut d'examen de la situation personnelle de l'intimé. Dès lors, c'est à bon droit que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a accueilli le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation personnelle du requérant.

6. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Corrèze n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a annulé son arrêté du 12 mars 2019.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. M. C... demande à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Corrèze de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour. Toutefois, l'exécution du présent arrêt, qui rejette l'appel du préfet, n'implique par lui-même aucune mesure d'exécution. Cette demande ne peut donc qu'être rejetée.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

8. M. C... a été maintenu au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me G..., avocat de M. C... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État le versement au conseil de M. C... d'une somme de 1 200 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de la Corrèze est rejetée.

Article 2 : L'État versera à Me G... une somme de 1 200 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. C... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. E... C... et à Me G....

Copie en sera adressée au préfet de la Corrèze.

Délibéré après l'audience du 6 novembre 2019 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme H..., présidente-assesseure,

Mme D... F..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 28 novembre 2019.

Le rapporteur,

Florence F...

Le président,

Éric Rey-Bèthbéder

La greffière,

Caroline Brunier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

[BC1]Il manque un trait en dessous mais je n'arrive pas à le faire

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N° 19BX01408


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 19BX01408
Date de la décision : 28/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Florence MADELAIGUE
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : VARIENGIEN

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-11-28;19bx01408 ?
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