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19/11/2019 | FRANCE | N°18BX00909

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 19 novembre 2019, 18BX00909


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... G... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux de condamner le centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, à lui verser une provision d'un montant

de 28 150,51 euros au titre de l'indemnité de fin de contrat prévue par les dispositions de

l'article L. 1243-8 du code du travail.

Par une ordonnance n° 1302739 du 17 octobre 2013, le juge des référés du tribunal administratif a

fait droit à cette demande.

Par une ordonnance n° 13BX02953 du 26 juin 2014, le juge des ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... G... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux de condamner le centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, à lui verser une provision d'un montant

de 28 150,51 euros au titre de l'indemnité de fin de contrat prévue par les dispositions de

l'article L. 1243-8 du code du travail.

Par une ordonnance n° 1302739 du 17 octobre 2013, le juge des référés du tribunal administratif a fait droit à cette demande.

Par une ordonnance n° 13BX02953 du 26 juin 2014, le juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel du centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande contre cette ordonnance.

Le centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande a alors demandé au tribunal administratif de Bordeaux de fixer, en application de l'article R. 541-4 du code de justice administrative, le montant de sa dette à l'égard de Mme G... au titre de 1'indemnité de fin de contrat.

Par un jugement n° 1403590 du 5 février 2015, le tribunal administratif a fixé ce montant à la somme de 28 150,51 euros.

Par un arrêt n° 15BX00642 du 24 janvier 2017, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel du centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande contre ce jugement.

Par une décision n° 409251 du 22 février 2018, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par le centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande, a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la cour.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés respectivement les 20 février et 29 mai 2015, le centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande, représenté par Me H..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1403590 du tribunal administratif de Bordeaux

du 5 février 2015 ;

2°) de fixer à zéro euro le montant de sa dette à l'égard de Mme G... ;

3°) subsidiairement, de fixer cette dette à un montant qui ne saurait être supérieur au quart de celui successivement accordé par les juges des référés de première instance et d'appel ;

4°) de mettre à la charge de Mme G... la somme de 1 200 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le recrutement d'un praticien hospitalier par contrat à durée indéterminée étant juridiquement impossible, il convient d'examiner la situation du praticien contractuel en contrat à durée déterminée au regard des possibilités ouvertes de recrutement sur concours ;

- en application des dispositions de l'article L. 1243-10 du code du travail, l'indemnité n'est pas due, dès lors, d'une part, qu'il doit être regardé comme ayant proposé un emploi permanent par l'ouverture d'un recrutement statutaire de praticien hospitalier auquel

Mme G..., lauréate du concours, s'est abstenue de présenter sa candidature, et d'autre part, que la rupture des relations contractuelles est due à l'initiative de l'intéressée.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 mai 2015, Mme G..., représentée

par Me D..., conclut :

1°) à la confirmation du jugement du tribunal administratif de Bordeaux

du 5 février 2015 ;

2°) au rejet de la requête du centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande ;

3°) à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge du centre hospitalier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'indemnité de précarité prévue à l'article L. 1243-8 du code du travail est applicable aux praticiens hospitaliers ;

- les contrats à durée déterminée signés entre elle et le centre hospitalier ne comportaient pas de clause de renouvellement automatique, de sorte qu'elle était en droit de refuser le renouvellement de son dernier contrat, d'autant que le centre hospitalier ne lui a jamais proposé de contrat à durée indéterminée ;

- elle était en droit de bénéficier du versement de l'indemnité de précarité dès lors, d'une part, qu'aucun concours ne peut être organisé au niveau local, et d'autre part, que les dispositions du code du travail n'imposent pas à un praticien hospitalier contractuel de se porter candidat au recrutement statutaire.

Après cassation :

Par un mémoire enregistré le 31 janvier 2019, Mme G... épouse E..., représentée par Me H..., demande à la cour :

1°) de confirmer le jugement n° 143590 du 5 février 2015 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le Conseil d'Etat a commis une erreur de droit en ajoutant à la loi une hypothèse non prévue de refus de versement de l'indemnité de précarité ;

- le refus de présenter sa candidature sur le poste ouvert au concours ne peut s'assimiler au refus d'accepter un contrat de travail à durée indéterminée dès lors, d'une part, que son recrutement sur le poste qu'elle occupait au centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande était incertain, et d'autre part, que la nomination statutaire par le centre national de gestion n'est pas assimilable à la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée avec un centre hospitalier ;

- à la date de non-renouvellement de son dernier contrat il n'était pas impossible de lui proposer un contrat à durée indéterminée ;

- le centre hospitalier ne justifie pas de la publication de la vacance d'un poste de praticien hospitalier dans sa spécialité ;

- dès lors qu'elle est restée dans la précarité de la fin de son dernier contrat au mois d'avril 2012, il ne peut lui être reproché d'avoir quitté le centre hospitalier de Sainte-Foy-la -Grande pour contracter avec le CHU de Bordeaux.

Par un mémoire en réplique enregistré le 11 février 2019, le centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande, représenté par la SELARL BCV Avocats, persiste dans ses précédentes conclusions et porte à 2 000 euros la somme qu'il demande au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- les motifs et le dispositif de la décision du Conseil d'Etat du 22 février 2018 ne peuvent être utilement remis en cause devant le juge d'appel auquel l'affaire est renvoyée ;

- l'abstention de Mme G... à faire acte de candidature au recrutement organisé afin de pouvoir la recruter en qualité de praticien hospitalier doit être assimilée à un refus de contrat à durée indéterminée privant l'intéressée du droit à l'indemnité de fin de contrat ;

- la rémunération de l'intéressée n'aurait pas été inférieure à celle perçue en qualité de contractuelle.

Par une ordonnance du 11 février 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 mars 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de Mme Chauvin, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant Mme G....

Considérant ce qui suit :

1. Le centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande a recruté Mme G...,

le 10 octobre 2006, en qualité de praticien hospitalier contractuel pour une durée initiale de trois ans. Ce contrat à durée déterminée a été prolongé par avenants successifs jusqu'au 31 juillet 2011, puis suivi d'un nouveau contrat à durée déterminée portant sur la période comprise entre le 1er août et le 18 septembre 2011, date à laquelle Mme G... a définitivement quitté l'établissement. L'intéressée a alors sollicité le bénéfice de l'indemnité de fin de contrat prévue à

l'article L. 1243-8 du code du travail. Mme G... a, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, demandé au juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux de condamner l'établissement à lui verser une provision de 28 150,51 euros au titre de l'indemnité de fin de contrat, assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 2011. Par une ordonnance du 17 octobre 2013, confirmée par une ordonnance du juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 26 juin 2014, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a fait droit à cette demande. A la suite de ces décisions, le centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande a demandé au tribunal administratif de Bordeaux, en application de l'article R. 541-4 du code de justice administrative, de fixer à un montant nul le montant de sa dette envers Mme G.... Le tribunal a, par jugement du 5 février 2015, fixé ce montant à la somme de 28 150,51 euros assortie des intérêts de retard pour la période du 17 octobre 2011 au 6 octobre 2014. Le centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande s'est pourvu en cassation contre l'arrêt du 24 janvier 2017 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a confirmé ce jugement. Par une décision du 22 février 2018, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la cour.

2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 1243-8 du code du travail, rendu applicable aux praticiens contractuels par 1'article R. 6152-418 du code de la santé publique : " Lorsque, à l'issue d'un contrat de travail à durée déterminée, les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par un contrat à durée indéterminée, le salarié a droit, à titre de complément de salaire, à une indemnité de fin de contrat destinée à compenser la précarité de sa situation. " Aux termes de l'article L. 1243-10 du même code : " L'indemnité de fin de contrat n'est pas due : / (...) / 3° Lorsque le salarié refuse d'accepter la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée pour occuper le même emploi ou un emploi similaire, assorti d'une rémunération au moins équivalente (...). ".

3. Lorsqu'un praticien contractuel, employé dans le cadre de contrats à durée déterminée, est recruté comme praticien hospitalier dans le cadre du statut prévu au 1° de l'article L. 6152-1 du code de la santé publique, la relation de travail se poursuit dans des conditions qui doivent être assimilées, pour l'application de l'article L. 1243-8 du code du travail, à celles qui résulteraient de la conclusion d'un contrat à durée indéterminée. Lorsque l'établissement a déclaré vacant un emploi de praticien hospitalier relevant de la spécialité du praticien contractuel, un refus de ce dernier de présenter sa candidature sur cet emploi, alors qu'il a été déclaré admis au concours national de praticien des établissements publics de santé prévu à l'article R. 6152-301 du code de la santé publique, doit être assimilé au refus d'une proposition de contrat à durée indéterminée au sens du 3° de l'article L. 1243-10 du code du travail. Par suite, sous réserve qu'eu égard aux responsabilités et conditions de travail qu'il comporte, l'emploi vacant puisse être regardé comme identique ou similaire à celui précédemment occupé en qualité de contractuel et qu'il soit assorti d'une rémunération au moins équivalente, l'indemnité de fin de contrat n'est pas due en pareille hypothèse.

4. Il ressort des pièces du dossier que le centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande, auquel les dispositions du code de la santé publique interdisaient de proposer un contrat à durée indéterminée à Mme G..., faute pour elle d'avoir atteint l'ancienneté nécessaire de six ans, a déclaré vacant un poste de praticien hospitalier titulaire dans sa spécialité de médecine gériatrique afin de rendre possible son recrutement si elle était reçue au concours de praticien hospitalier titulaire. L'intéressée, reçue à ce concours le 11 avril 2011, s'est abstenue de présenter sa candidature au poste ainsi créé, bien qu'elle y ait été invitée par un courriel du 19 avril 2011. Si elle suggère que la vacance du poste n'aurait pas été publiée par voie électronique sur le site du Centre national de gestion des praticiens hospitaliers conformément à l'article R. 6152-6 du code de la santé publique, elle ne conteste pas sérieusement l'effectivité de la création du poste, alors qu'elle n'a pas donné suite au projet de recrutement la concernant en raison de son souhait de s'installer à Bordeaux. Par ailleurs, il ressort de l'attestation de la directrice des ressources humaines produite au dossier que sa rémunération aurait été au moins équivalente à celle qu'elle percevait en qualité de contractuelle, compte-tenu de l'indemnité différentielle versée par le centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande, afin de compenser sa faible attractivité géographique, à ses praticiens contractuels dont l'intégration dans la fonction publique entraînerait une diminution de rémunération. Par suite, le centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande est fondé à soutenir qu'il n'est pas redevable de l'indemnité de fin de contrat, et, par voie de conséquence, à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 5 février 2015.

5. Mme G..., qui est la partie perdante, n'est pas fondée à demander l'allocation d'une somme au titre des frais qu'elle a exposés à l'occasion du présent litige, et il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme à sa charge, sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, au titre des frais exposés par le centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 1403590 du 5 février 2015 est annulé.

Article 2 : Il est déclaré qu'aucune somme n'est due par le centre hospitalier à Mme G... épouse E... au titre d'une indemnité de précarité.

Article 3 : Les conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande

et à Mme F... G... épouse E....

Délibéré après l'audience du 22 octobre 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

Mme A... C..., présidente-assesseure,

M. Thierry Sorin, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 novembre 2019.

La rapporteure,

Anne C...

Le président,

Catherine GiraultLa greffière,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

N° 18BX00909


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX00909
Date de la décision : 19/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Dispositions propres aux personnels hospitaliers - Personnel médical - Règles communes.

Fonctionnaires et agents publics - Agents contractuels et temporaires - Fin du contrat.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme anne MEYER
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : FERRO

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-11-19;18bx00909 ?
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