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17/10/2019 | FRANCE | N°17BX02056

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 17 octobre 2019, 17BX02056


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par un jugement n° 1500133 du 27 février 2016 le tribunal administratif de Bordeaux a solidairement condamné l'État et la société Albret TP à verser à la commune de Nérac la somme de 63 360 euros en réparation du préjudice que lui ont causés les désordres affectant la station d'épuration du hameau de Serbat.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 juillet 2017, et un mémoire, enregistré le 13 mai 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire deman

de à la cour de réformer ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 27 février 2016 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par un jugement n° 1500133 du 27 février 2016 le tribunal administratif de Bordeaux a solidairement condamné l'État et la société Albret TP à verser à la commune de Nérac la somme de 63 360 euros en réparation du préjudice que lui ont causés les désordres affectant la station d'épuration du hameau de Serbat.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 juillet 2017, et un mémoire, enregistré le 13 mai 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire demande à la cour de réformer ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 27 février 2016 en tant qu'il n'a pas limité à la somme de 42 000 euros le montant des sommes qu'il a été solidairement condamné à verser à la commune de Nérac. Il demande également que les conclusions incidentes présentées par la société Albret TP soient rejetées.

Il soutient que :

- le coût de remise en état de l'installation a été évalué à 42 000 euros par le bureau d'étude mandaté par la commune et que la transformation de cette installation correspond à des travaux d'amélioration caractérisant un enrichissement sans cause ;

- l'État n'a commis aucune faute dans la conception de la station d'épuration dont s'agit ;

- la société Albret TP est seule responsable du choix et de l'utilisation d'un sable inadapté ;

- en sa qualité de professionnel, la société Albret TP aurait dû alerter le maître d'oeuvre si celui-ci avait commis une faute dans le choix de la norme applicable aux travaux en cause ;

- les conclusions de cette société tendant à un partage de responsabilité et à ce que l'État la garantisse des condamnations prononcées à son encontre sont nouvelles en appel et, par suite irrecevables.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 10 septembre 2018 et 7 mai 2019, la commune de Nérac, aux droits de laquelle est venu le syndicat départemental d'adduction d'eau potable et d'assainissement de Lot-et-Garonne, représenté par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'État au titre des frais exposés pour l'instance.

Le syndicat soutient que les désordres relevés correspondent à plusieurs erreurs de conception et d'exécution, que le sapiteur de l'expert judiciaire préconise une réfection complète du filtre à sable avec mise en place d'un filtre planté de roseaux dont le coût a été évalué par le bureau d'étude mandaté par la commune à la somme de 60 000 euros TTC, soit à un montant inférieur à celui retenu par l'expert judiciaire, que la réutilisation du système Septodiffuseur n'est ni adaptée ni réalisable, enfin que la société Albret TP n'est pas fondée à demander, pour la première fois en appel, à être garantie des condamnations prononcées à son encontre.

Par un mémoire, enregistré le 21 novembre 2018, la société Albret TP, représentée par Me D..., conclut, à titre principal, à ce que l'État soit condamné à la garantir et la relever indemne de toute condamnation prononcée à son encontre, subsidiairement, à ce que l'État la garantisse à concurrence de 75 % des condamnations prononcées à son encontre et à ce que le jugement attaqué soit réformé en tant qu'il n'a pas limité à la somme de 42 000 euros le montant des sommes qu'elle a été solidairement condamnée à verser à la commune de Nérac, enfin et en tout état de cause, à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à charge de l'État au titre des frais qu'elle a exposés pour l'instance.

Elle soutient, d'une part, que les désordres constatés correspondent uniquement à des erreurs de conception et de suivi de travaux, d'autre part, que le coût de remise en état de l'installation a été évalué à 42 000 euros par le bureau d'étude mandaté par la commune.

Par lettre en date du 14 mai 2019, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que les conclusions d'appel de la société Albret TP, présentées après l'expiration du délai d'appel par une partie au litige de première instance, étaient irrecevables.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des marchés publics,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de M. Normand, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant le syndicat départemental d'adduction d'eau potable et d'assainissement de Lot-et-Garonne.

Considérant ce qui suit :

1. Par acte d'engagement du 11 septembre 2006, la commune de Nérac, aux droits de laquelle est venu le syndicat départemental d'adduction d'eau potable et d'assainissement de Lot-et-Garonne, a confié à la société Albret TP un marché de travaux relatif à la construction d'une station d'épuration pour le hameau de Serbat, dont la maîtrise d'oeuvre avait préalablement été confiée à la direction départementale de l'équipement du Lot-et Garonne (DDE). Ces travaux ont été réceptionnés sans réserve le 7 juin 2007. En raison de dysfonctionnements affectant la circulation des eaux usées au niveau de la zone de filtration à compter de la fin de l'année 2009, la commune de Nérac a fait procéder à un sondage qui a permis de constater un phénomène de colmatage du filtre à sable mis en place. L'expert désigné par le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux à la demande de la commune a déposé son rapport le 15 mars 2013. Le ministre de la transition écologique et solidaire demande à cour de réformer le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 27 février 2016 en tant qu'il n'a pas limité à la somme de 42 000 euros le montant des sommes qu'il a été solidairement condamné à verser à la commune de Nérac. La société Albret TP demande à la cour de condamner l'État à la garantir et relever indemne de l'intégralité, subsidiairement de 75 %, des condamnations prononcées à son encontre et de réduire à 42 000 euros le montant des sommes qu'elle a été solidairement condamnée à verser à la commune de Nérac

Sur la recevabilité des conclusions de la société Albret TP :

2. Les conclusions présentées par la société Albret TP et tendant à ce qu'elle soit garantie par l'État des condamnations mises à sa charge ont été présentées pour la première fois en appel. Par suite, le ministre de la transition écologique et solidaire est fondé à soutenir que ces conclusions nouvelles sont irrecevables.

Sur le préjudice :

3. Le ministre de la transition écologique et solidaire et la société Albret TP, qui ne remettent pas en cause l'engagement de leur responsabilité solidaire au titre de la garantie décennale, en leur qualité respective de maître d'oeuvre et d'entrepreneur chargé des travaux, soutiennent que le coût de réfection du filtre à sable de la station d'épuration dont s'agit par remplacement du sable compacté par un sable disposant d'une granulométrie conforme aux conditions d'utilisation a été évalué à 42 000 euros par le bureau d'étude Mares. Toutefois, il ressort du rapport de ce bureau d'étude que la mise en oeuvre de ces travaux de reprise est subordonnée à la possibilité de réutiliser le système d'assainissement " Septodiffuseur " mais que le ministre et la société Albret TP n'établissent pas qu'une telle possibilité existe, alors, par ailleurs et en tout état de cause, qu'il résulte de l'instruction et notamment de l'avis du sapiteur de l'expert judiciaire que " la mise en place de septodiffuseurs est difficilement acceptable " eu égard aux caractéristiques de la station d'épuration. En revanche, il résulte également de l'instruction et n'est pas contesté par la commune de Nérac que le procédé " Septodiffuseur " défaillant peut être remplacé par une micro-station d'épuration dont le coût, évalué à 54 000 euros TTC, est inférieur à celui d'un filtre planté de roseaux.

4. Par ailleurs, le ministre et la société Albret TP ne contestent pas que l'étude de faisabilité réalisée par le bureau d'étude Mares aux frais de la commune de Nérac pour une somme de 3 360 euros TTC a été utile à la solution du litige ainsi que l'ont relevé les premiers juges et, en particulier, qu'elle a permis de réduire le montant de la somme mise à leur charge.

5. Il résulte de ce qui précède, dès lors qu'il n'est établi ni que la réutilisation de ce procédé " Septodiffuseur " soit possible ni qu'elle soit adaptée aux besoins de la commune, que le ministre et la société Albret TP sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges n'ont pas limité à 57 360 euros la somme qu'ils ont été solidairement condamnés à verser à la commune de Nérac au titre de frais de reprise et à demander, la réformation, dans cette mesure, du jugement attaqué.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les sommes que demandent le syndicat départemental d'adduction d'eau potable et d'assainissement de Lot-et-Garonne ainsi que la société Albret TP soient mises à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

DÉCIDE :

Article 1er : L'État et la société Albret TP sont solidairement condamnés à verser une somme de 57 360 euros toutes taxes comprises à la commune de Nérac.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse est réformé en tant qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par la société Albret TP est rejeté.

Article 4 : Les conclusions présentées par le syndicat départemental d'adduction d'eau potable et d'assainissement de Lot-et-Garonne sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat départemental d'adduction d'eau potable et d'assainissement de Lot-et-Garonne, à la société Albret TP, au ministre de la transition écologique et solidaire.

Copie en sera adressée à la commune de Nérac.

Délibéré après l'audience du 19 septembre 2019 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, président-assesseur,

M. Manuel C..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 octobre 2019.

Le rapporteur,

Manuel C...

Le président,

Éric Rey-BèthbéderLe greffier,

Caroline Brunier

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N°17BX02056


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 17BX02056
Date de la décision : 17/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Rapports entre l'architecte - l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage - Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage - Responsabilité contractuelle.

Marchés et contrats administratifs - Rapports entre l'architecte - l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage - Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage - Responsabilité décennale.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : MAATEIS AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/11/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-17;17bx02056 ?
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