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15/10/2019 | FRANCE | N°19BX00210

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 15 octobre 2019, 19BX00210


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 4 avril 2018 par lequel le préfet de la Gironde lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1802584 du 1er octobre 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces nouvelles, enregistrée

s le 17 janvier 2019 et le 21 mars 2019, M. A... B..., représenté par Me C..., demande à la cour :...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 4 avril 2018 par lequel le préfet de la Gironde lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1802584 du 1er octobre 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces nouvelles, enregistrées le 17 janvier 2019 et le 21 mars 2019, M. A... B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n°1802584 du tribunal administratif de Bordeaux du 1er octobre 2018 ;

2°) d'annuler cet arrêté du 4 avril 2018 du préfet de la Gironde ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer le titre de séjour sollicité ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur le jugement attaqué :

- le jugement est irrégulier dès lors que le tribunal n'a pas visé le mémoire en production de pièces, produit antérieurement à la clôture d'instruction.

Sur l'arrêté du 4 avril 2018 :

- l'arrêté est insuffisamment motivé en fait révélant un défaut d'examen de sa situation ;

- le préfet a commis une erreur dans l'instruction de sa demande dès lors qu'il sollicitait un changement de statut et non le renouvellement de son titre de séjour " travailleur saisonnier " ;

- l'arrêté est illégal du fait de l'illégalité de la décision de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi lui refusant la délivrance d'une autorisation de travail ;

- le préfet de la Gironde a commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation dès lors qu'il justifiait de circonstances humanitaires et de motifs exceptionnels au regard de son ancienneté de séjour et de travail.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 avril 2019, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête en s'en remettant à ses écritures de première instance.

Par ordonnance du 11 février 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 8 avril 2019 à 12h00.

M. A... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 décembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E... F..., a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant marocain né le 1er janvier 1975, est entré en France le 21 mars 2014 sous couvert d'un visa salarié portant la mention " ouvrier agricole ". Il a bénéficié d'un titre de séjour pluriannuel en tant que travailleur saisonnier valable du 17 avril 2014 au 16 avril 2017. Le 8 mars 2017, il a sollicité auprès du préfet de la Gironde le renouvellement de son titre de séjour, et a par la suite transmis son contrat de travail à durée indéterminée, pour lequel la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Nouvelle-Aquitaine lui a refusé une autorisation de travail par arrêté du 8 décembre 2017. Par un arrêté du 4 avril 2018, le préfet de la Gironde lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... B... relève appel du jugement du 1er octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 avril 2018 du préfet de la Gironde.

Sur le jugement attaqué :

2. M. A... B... fait valoir que le tribunal administratif a omis de viser son mémoire du 3 juillet 2018, déposé antérieurement à la clôture automatique intervenue avant l'audience du 17 septembre 2018. Toutefois, une telle circonstance n'est, par elle-même, pas de nature à vicier la régularité du jugement attaqué dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que ces écritures n'apportaient aucun élément nouveau auquel il n'aurait pas été répondu dans les motifs. Le moyen doit donc être écarté.

Sur l'arrêté du 4 avril 2018 :

3. En premier lieu, si le requérant soutient que l'arrêté du préfet est insuffisamment motivé en fait révélant un défaut d'examen de sa situation, en tant qu'il ne mentionne pas sa date d'entrée en France et les 29 bulletins de salaire dont il se prévaut, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet ait ignoré ces éléments qu'il n'était pas tenu de détailler. De plus, l'arrêté du 4 avril 2018 fait mention du dernier titre de séjour en tant que " travailleur saisonnier ", et précise que le requérant ne peut se prévaloir de son ancienneté de séjour dès lors que ce statut ne permet pas de résider plus de six mois par an sur le territoire français. En outre, le préfet indique dans son arrêté que M. A... B... a présenté un contrat à durée déterminée et que l'autorisation de travail sollicitée lui a été refusée. Enfin, il est indiqué qu'il est célibataire et sans charge de famille en France, et qu'il n'a pas rompu tout lien avec son pays d'origine où résident ses parents et sept de ses huit frères et soeurs. Dans ces conditions, il ressort de la motivation de l'arrêté que le préfet de la Gironde a procédé à un examen de sa situation.

4. En deuxième lieu, M. A... B... soutient qu'il aurait sollicité de la préfecture de la Gironde la délivrance d'un titre de séjour salarié, et ainsi un changement de statut, et non le renouvellement de son titre de séjour en tant que travailleur saisonnier. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'il a sollicité lors de sa prise de rendez-vous en préfecture le renouvellement de son titre de séjour, et qu'aucun fondement n'était précisé sur la demande d'autorisation de travail pour conclure un contrat de travail avec un salarié étranger. Ainsi, la seule mention manuscrite sur la demande d'autorisation de travail à la DIRECCTE qu'un contrat à durée indéterminée devrait être conclu à l'issue du contrat à durée déterminée de 4 mois, ne suffit pas à démontrer qu'il avait sollicité un changement de statut auprès du préfet de la Gironde. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit du préfet sur le fondement de l'examen de sa demande de délivrance de titre de séjour manque en fait.

5. En troisième lieu, l'appelant excipe de l'illégalité du refus d'autorisation de travail qui a été opposé le 8 décembre 2017. Cependant, dans le cas où un refus de titre de séjour en qualité de salarié a pour fondement le défaut d'obtention par l'intéressé d'une autorisation de travail, la légalité de la décision opposant un refus de ce chef peut être invoquée par la voie de l'exception si ledit refus n'est pas lui-même devenu définitif. Or il ressort des pièces du dossier, que le refus d'autorisation de travail du 8 décembre 2017 a été notifié à M. A... B... le 8 janvier 2018 ainsi qu'il le fait valoir, et était devenu définitif lorsque l'intéressé a contesté le refus de titre de séjour. Par suite, l'exception tirée de l'illégalité de ce refus d'autorisation de travail ne peut être accueillie.

6. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ". En présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de ces dispositions, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ".

7. Il ressort des pièces du dossier que M. A... B... ne produit pas les titres de séjour antérieurs à l'année 2014 qui l'auraient autorisé à travailler, mais seulement des contrats de travail ou bulletins de paie sur une partie de l'année pour les années 2002 à 2006, un contrat d'un an à compter du 13 avril 2008, et des contrats en tant que travailleur saisonnier pour les années 2014 à 2017. S'il se prévaut d'une promesse d'embauche pour un contrat à durée indéterminée, celle-ci est postérieure à l'arrêté attaqué, et ne constitue pas un motif exceptionnel de régularisation au regard du droit au séjour. Par ailleurs, célibataire et sans enfant, il ne fait valoir aucun lien familial sur le territoire français et n'établit pas avoir tissé des relations amicales et sociales en France d'une particulière intensité. Il dispose en outre, ainsi qu'il a été dit, d'attaches familiales au Maroc où il n'est pas contesté que vivent ses parents et sept de ses huit frères et soeurs. Dans ses conditions, il ne peut dès lors être regardé comme justifiant de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels d'admission au séjour au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de cet article doit être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 avril 2018 du préfet de la Gironde. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2019 à laquelle siégeaient :

M. Dominique Naves, président,

Mme E... F..., présidente-assesseure,

Mme Déborah de Paz, premier-conseiller,

Lu en audience publique, le 15 octobre 2019.

La rapporteure,

Fabienne F...Le président,

Dominique NAVESLe greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N°19BX00210


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX00210
Date de la décision : 15/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. NAVES
Rapporteur ?: Mme Fabienne ZUCCARELLO
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : JOUTEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-15;19bx00210 ?
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