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08/10/2019 | FRANCE | N°19BX00246

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 08 octobre 2019, 19BX00246


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 26 avril 2018 par lequel le préfet de Lot-et-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n°1802835 du 18 octobre 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 janvier 2019, M. B..., représenté par Me A...,

avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 26 avril 2018 par lequel le préfet de Lot-et-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n°1802835 du 18 octobre 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 janvier 2019, M. B..., représenté par Me A..., avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 18 octobre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet de Lot-et-Garonne de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement combiné des articles L. 313-14 et L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou à défaut, dans le même délai, de réexaminer sa situation et de le munir d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler pendant le temps de ce réexamen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement au profit de son conseil de la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée au regard des exigences des dispositions de l'article L. 211-1 et suivants du code des relations entre le public et les administrations, ce qui révèle un défaut d'examen personnel approfondi de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle dès lors qu'il est installé en France depuis 2012, comme quatre de ses cinq enfants, vit avec son épouse et leurs deux enfants mineurs dont il s'occupe, et ne peut prétendre au regroupement familial compte tenu des ressources insuffisantes de son épouse ;

- cette décision porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée au regard des motifs qui lui ont été opposés ;

- elle méconnaît l'intérêt supérieur de ses enfants mineurs en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 mai 2019, le préfet de Lot-et-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens du requérant ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 14 juin 2019, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu le 9 juillet 2019 à 12 heures.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 décembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

-Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant marocain né le 1er janvier 1955, est entré irrégulièrement en France en 2012, après y avoir effectué plusieurs séjours depuis 2006, selon ses déclarations.

Il relève appel du jugement du 18 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 avril 2018 du préfet de Lot-et-Garonne portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixation du pays de renvoi.

2. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.

3. M. B... est père de cinq enfants, dont deux mineurs, Aya, née le 9 septembre 2001, âgée de 16 ans à la date de l'arrêté, et Mohamed Adam, né le 6 mars 2003, âgé de 15 ans à la date de l'arrêté. Ces derniers et leur mère, titulaire d'une carte de résident, sont entrés sur le territoire français en 2006, y sont scolarisés depuis septembre 2007 et étaient respectivement en classes de 1ère et de 3ème à la date de l'arrêté. Si le requérant n'établit la reprise d'une vie commune avec ces derniers et leur mère que depuis janvier 2017, il ressort des attestations circonstanciées de son épouse, de ses deux filles aînées majeures résidant régulièrement en France, du principal du collège où ses enfants ont poursuivi leur scolarité, du médecin traitant de ses enfants et d'un chirurgien-dentiste, ainsi que des clichés photographiques produits,

que M. B... est, depuis son arrivée en France fin 2012, impliqué dans leur éducation, les accompagne quotidiennement dans leurs établissements scolaires, suit leur scolarité et est présent lors de leurs consultations médicales. Dans ces circonstances, l'exécution de l'arrêté attaqué, qui aurait pour effet de priver ces deux enfants de la présence permanente de leur père, est contraire à leur intérêt supérieur et méconnaît les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

5. Compte tenu des motifs sur lesquels elle repose, l'annulation de l'arrêté contesté implique nécessairement que soit délivré un titre de séjour à M. B.... Il y a lieu d'enjoindre au préfet de Lot-et-Garonne de délivrer ce titre dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, la somme demandée de 1 200 euros à verser à Me A..., en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi

du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve de sa renonciation au versement de l'aide juridictionnelle.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n°1802835 du tribunal administratif de Bordeaux du 18 octobre 2018 et l'arrêté du préfet de Lot-et-Garonne du 26 avril 2018 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de Lot-et-Garonne de délivrer un titre de séjour à M. B... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me A..., avocat de M. B..., la somme de 1 200 euros, sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur, au préfet de Lot-et-Garonne et à Me A....

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

Mme Anne Meyer, président-assesseur

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 octobre 2019.

Le rapporteur,

Marie-Pierre D...Le président,

Catherine GiraultLe greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

No 19BX00246


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX00246
Date de la décision : 08/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre BEUVE-DUPUY
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : AYMARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-08;19bx00246 ?
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