Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... F... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 19 juin 2018 par lequel le préfet des Hautes-Pyrénées lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n°1801568 du 9 octobre 2018, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 12 novembre 2018, Mme A..., représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n°1801568 du tribunal administratif de Pau du 9 octobre 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 19 juin 2018 du préfet des Hautes-Pyrénées ;
3°) d'enjoindre au préfet des Hautes-Pyrénées de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 120 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le premier juge a fait une inexacte application de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en estimant que le traitement requis étaitdisponible dans le pays d'origine sans s'assurer de l'accès effectif à ce traitement ;
- le premier juge a méconnu le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme en tant qu'il n'avait pas à apprécier l'opportunité de l'intervention d'une tierce personne auprès de sa fille ;
- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation et a méconnu le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le suivi médical dans son pays d'origine de la pathologie dont elle souffre n'est pas assuré ;
- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît le 7° l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle est en France pour apporter soutien à son gendre en s'occupant de sa petite fille et de sa fille, atteinte d'une maladie dégénérative nécessitant une assistance pour tous les actes de la vie quotidienne, et qu'elle vit chez eux ;
- la décision portant refus de titre de séjour porte une atteinte disproportionnée au respect de son droit à une vie privée et familiale tel que prévu par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ;
- la décision fixant le pays de destination est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 janvier 2019, le préfet des Hautes-Pyrénées conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- son arrêté est suffisamment motivé, tous les éléments ayant servi à prendre ses décisions étant mentionnés, il aurait pris les mêmes décisions s'il avait considéré qu'elle était veuve et non célibataire, et l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle du refus de titre de séjour ;
- il n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en tant qu'il n'est pas établi que le défaut de prise en charge puisse avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité alors que l'intéressée peut voyager sans risque et qu'elle n'établit pas ne pas pouvoir bénéficier effectivement d'une prise en charge médicale dans son pays d'origine et ne fait état d'aucune circonstance exceptionnelle ;
- il n'a pas porté atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale de la requérante qui ne démontre pas que le centre de ses intérêts serait en France dès lors qu'elle ne justifie pas de l'intensité ou de la stabilité de ses liens personnels et familiaux sur le territoire national
- pour les raisons identiques, il n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination ne sont pas dépourvues de base légale.
Par une décision du 14 mars 2019 le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux a rejeté la demande d'aide juridictionnelle de Mme A....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme E... pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Paul-André Braud, premier-conseiller ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante guinéenne née le 1er janvier 1963, est entrée régulièrement en France le 9 septembre 2016 sous couvert d'un visa court séjour, et s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire français. Le 11 décembre 2017, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 19 juin 2018, le préfet des Hautes-Pyrénées a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme A... relève appel du jugement du 9 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. D'une part, la requérante semble soutenir que la réponse apportée par le tribunal au moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas suffisamment motivée. En l'espèce, le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments invoqués au soutien du moyen, a indiqué dans le point 5 les motifs pour lesquels il a écarté ce moyen en indiquant que selon l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que par ailleurs il ressort des fiches MEDCOI que la pathologie dont souffre Mme A... est traitée en Guinée. Le défaut de motivation allégué manque donc en fait.
3. D'autre part, si Mme A... critique le bien-fondé du jugement, cela est sans incidence sur sa régularité.
Sur la légalité de l'arrêté du 19 juin 2018 :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
4. En premier lieu, en vertu de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : -restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; (...) ". Selon l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
5. L'arrêté vise les articles L. 313-11 7° et 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les articles 3 et 8 de la convention européenne des droits de l'homme. De plus, il fait état de ce que Mme A... est s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire français à l'expiration de son visa court séjour, qu'elle ne justifie d'une résidence habituelle en France qu'à compter du 1er décembre 2017, postérieurement à la demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ne remplit ainsi pas les conditions de délivrance d'un titre de séjour sur ce fondement. Enfin, il est indiqué qu'elle est célibataire avec une enfant majeure en France, a vécu la majeure partie de sa vie dans son pays d'origine où elle ne démontre pas être dépourvue de tous liens familiaux dès lors que deux de ses enfants majeurs y résident, ne fait état d'aucune circonstance exceptionnelle de nature à justifier la délivrance d'un titre de séjour et n'établit pas être soumise à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine. S'agissant de son état de santé, l'arrêté indique que selon l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Cette motivation mentionnant les circonstances de droit et de fait fondant le refus de délivrance d'un titre de séjour, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...)11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. (...)". En vertu de l'article R. 313- 22 de ce code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ".
7. Si Mme A... soutient qu'elle est atteinte d'un diabète qui ne pourrait être soigné dans son pays d'origine, celle-ci ne produit en soutien à ses allégations aucun document permettant de contredire l'avis du collège de médecins de l'OFII selon lequel le défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
8. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de refus (...). L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Pour l'application des dispositions et stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
9. Mme A... soutient que le préfet a fait une inexacte appréciation de la nécessité de sa présence en France auprès de sa fille majeure atteinte d'une maladie neurologique dégénérative. Toutefois, il ressort des certificats médicaux de Mme B... que celle-ci n'était plus hospitalisée à la date de l'arrêté et que son nouveau médecin traitant dans le certificat médical le plus récent datant du 25 septembre 2017, plus d'un an après son hospitalisation, ne fait pas état de ce qu'elle aurait besoin d'une présence permanente à ses côtés. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que son entrée en France est récente, qu'elle est veuve et qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses deux autres enfants majeurs et où elle a vécu jusqu'à l'âge de 53 ans. Dans ces circonstances, et nonobstant la présence en France de sa fille et de sa petite fille, le refus litigieux n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
10. En premier lieu, il résulte des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement. Si Mme A... soutient que l'obligation de quitter le territoire français n'est pas suffisamment motivée, il ressort de ce qui est énoncé au point 5 que le refus de titre de séjour est suffisamment motivé. En outre, l'arrêté vise l'article L. 511-1-I 2°du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.
11. En second lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du défaut de base légale de l'obligation de quitter le territoire français en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour doit être écarté.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
12. En premier lieu, la décision fixant le pays de destination vise le code de l'entrée et du séjour des étrangers du droit d'asile, ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. De plus, elle indique que Mme A... n'établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ou tout autre pays où elle serait légalement admissible. Ainsi, la décision contestée énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté comme manquant en fait.
13. En second lieu, il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour.
14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 juin 2018 du préfet des Hautes-Pyrénées. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetés.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... F... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet des Hautes-Pyrénées.
Délibéré après l'audience du 2 juillet 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Pouget, président,
M. Paul-André Braud, premier-conseiller,
M. David Katz, premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 27 août 2019.
Le rapporteur,
Paul-André BraudLe président,
Marianne Pouget
Le greffier,
Florence Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No18BX03896