Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... F... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté en date du 27 juin 2017, par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1704405 du 11 juin 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 24 octobre 2018, M. F..., représenté par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 11 juin 2018 ;
2°) d'annuler cet arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 27 juin 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " en qualité d'étranger malade dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application combinée des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :
- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;
- la procédure ayant conduit à son édiction est entachée d'irrégularité dès lors qu'elle n'a pas été précédée d'une procédure contradictoire au sens de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, et qu'il a été privé de son droit d'être entendu reconnu comme un principe général du droit de l'Union européenne et consacré par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- à défaut de justification de la compétence du signataire de l'avis médical du médecin de l'agence régionale de santé, la décision est irrégulière en raison de l'irrégularité dont est entaché l'avis lui-même, lequel doit être motivé ;
- la décision est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;
- la décision est entachée d'erreur de droit car le préfet s'est cru lié par l'avis du médecin émis le 12 octobre 2016 ;
- la décision méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne pourra obtenir un traitement médical approprié à ses pathologies en Arménie ;
- la décision est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que le préfet n'a pas examiné les circonstances humanitaires exceptionnelles qu'il a fait valoir et n'a pas saisi le directeur général de l'agence régionale de santé ;
- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'irrégularité dès lors qu'elle n'a pas été précédée de la procédure contradictoire prévu à l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, et qu'il a été privé de son droit d'être entendu reconnu comme un principe général du droit de l'Union européenne et consacré par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- elle est dépourvue de base légale ;
- elle porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle.
En ce qui concerne la décision fixant un délai de départ volontaire
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux ;
- elle méconnaît l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- elle est dépourvue de base légale ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation, le préfet s'étant placé à tort dans un cas de compétence liée ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'au vu des éléments du dossier, un délai supérieur à un mois devait lui être accordé.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 avril 2019, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête en s'en remettant à ses écritures de première instance.
M. F... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 septembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le code de justice administrative ;
Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme D... B... pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique :
Considérant ce qui suit :
1. M. F..., de nationalité arménienne, né le 11 février 1955, déclare être entré en France le 21 février 2013. Il a déposé une demande d'asile le 26 février 2013 qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 30 août 2013. Le préfet de la Haute-Garonne a pris à son encontre, le 6 décembre 2013, un arrêté refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination. Seule la décision fixant le pays de destination a été annulée par un arrêt de la cour administrative d'appel de céans du 13 janvier 2015. Il a sollicité, le 8 janvier 2016, la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 27 juin 2017, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. F... relève appel du jugement du 11 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, M. F... reprend, dans des termes identiques et sans critiquer utilement le jugement, ses moyens de première instance tirés de ce que la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée, qu'elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation et d'une erreur de droit en ce que le préfet se serait cru lié par l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé le 12 octobre 2016, ainsi que les moyens tirés de son irrégularité du fait de l'incompétence du signataire de cet avis médical, de la méconnaissance du principe du contradictoire et de son droit d'être entendu, et enfin, de l'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif que le préfet n'aurait pas examiné les circonstances humanitaires exceptionnelles qu'il avait fait valoir et n'a pas saisi le directeur général de l'agence régionale de santé. Dès lors, il y a lieu, d'écarter l'ensemble de ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
3. En deuxième lieu, le requérant soutient qu'il ne pourra obtenir en Arménie un traitement médical approprié aux nombreuses pathologies dont il souffre et qu'ainsi, la décision de refus de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il fait en particulier valoir, que son retour dans son pays d'origine aggraverait sa pathologie psychiatrique et que le traitement qui lui est prescrit pour la prévention secondaire de son accident cardio-vasculaire, lequel implique notamment la prise de simvastatine et de bisoprolol, n'a pas d'équivalent en Arménie. Il invoque enfin le caractère particulièrement onéreux de ses traitements alors qu'il n'existe pas de système de sécurité sociale en Arménie. Ce faisant, le requérant se borne à reprendre son argumentation de première instance sans invoquer d'éléments de fait et de droit nouveau et sans critiquer les réponses apportées par le tribunal. Il y a dès lors lieu d'écarter ce moyen en adoptant les motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 15 de leur décision.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". En vertu de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Pour l'application des dispositions et stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
5. Si M. F... se prévaut de sa présence en France depuis quatre ans et de sa parfaite intégration, il ne fait pas état d'autres attaches familiales en France que son épouse, qui fait également l'objet d'une mesure d'éloignement, dont la légalité a été confirmée par les juridictions administratives, et n'établit pas non plus être dépourvu d'attaches familiales en Arménie, pays où il a vécu jusqu'à l'âge de 58 ans. En outre, il ressort des pièces du dossier que l'indisponibilité du traitement en Arménie n'est pas démontrée. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle ne peuvent être qu'écartés.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du défaut de base légale de la mesure d'éloignement, en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour doit être écarté.
7. En deuxième lieu, M. F... reprend, dans des termes identiques et sans critiques utiles du jugement, ses moyens de première instance tirés de ce que l'obligation de quitter le territoire français serait insuffisamment motivée et qu'elle serait intervenue en méconnaissance du principe du contradictoire et de son droit d'être entendu. Dès lors, il y a lieu, d'écarter ces moyens par adoptions des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
8. En dernier lieu, il résulte du point 5 du présent arrêt que les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur sa situation personnelle doivent être écartés.
Sur la décision fixant un délai de départ volontaire :
9. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du défaut de base légale de la décision fixant un délai de départ volontaire, en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
10. En second lieu, M. F... reprend en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance, et sans critiquer utilement la réponse apportée par les premiers juges, les moyens tirés de l'insuffisante motivation de la décision fixant un délai de départ volontaire, du défaut d'examen sérieux de sa situation, de la méconnaissance du principe du contradictoire énoncé par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, du défaut d'examen de sa situation en ce que le préfet se serait estimé en compétence liée et de l'erreur manifeste d'appréciation. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
Sur la décision fixant le pays de destination :
11. En premier lieu, M. F... reprend en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance, et sans critiquer utilement la réponse apportée par les premiers juges, les moyens tirés de l'insuffisante motivation de la décision fixant le pays de destination et du défaut d'examen sérieux de sa situation. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
13. En second lieu, M. F... ne saurait se prévaloir de l'annulation pour insuffisance de motivation, de la décision du 6 décembre 2013 fixant le pays à destination duquel il devait être renvoyé pour établir la réalité des risques auxquels il prétend être exposés en cas de retour en Arménie. En se bornant à faire état de ses fonctions au sein d'un établissement pénitentiaire et d'une condamnation à la suite de l'évasion de certains détenus de ce centre, l'intéressé, dont la demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, ne produit aucun élément de nature à établir la réalité des risques qu'il encourrait personnellement en cas de retour dans son pays d'origine. Enfin, et eu égard à ce qui a été indiqué précédemment, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un retour en Arménie l'exposerait à des risques exceptionnels pour son état de santé. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être qu'écarté, de même que celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation.
14. Il résulte de tout ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 27 juin 2017. Par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... F... et au ministre de l'Intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience public du 21 mai 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Pouget, président,
M. Paul-André A..., premier conseiller,
M. Romain Roussel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 août 2019.
Le rapporteur,
Paul-André A...Le président,
Marianne Pouget
Le greffier,
Florence Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'Intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No 18BX03717