Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2017 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination et l'arrêté du 13 août 2018 par lequel le préfet de la Gironde l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.
Par un jugement n°1803582 du 17 août 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a annulé les arrêtés du préfet de la Gironde en date du 25 septembre 2017 et du 13 août 2018, lui a enjoint de réexaminer la situation de M. E... et a rejeté le surplus de la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 13 septembre 2018, le préfet de la Gironde demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1803582 du tribunal administratif de Bordeaux en date du 13 août 2018 ;
2°) de mettre à la charge de M. C... E... la somme de 1 000 euros au profit de l'Etat en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le recours formé en première instance par M. E... à l'encontre de l'arrêté du 25 septembre 2017 était irrecevable pour tardiveté dès lors que la notification était régulière ;
- les arrêtés ne méconnaissent pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que l'entrée en France du requérant est récente, que son mariage est récent, qu'il a fait l'objet d'un refus de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi et qu'un seul de ses enfants porte son nom de famille ce qui laisse à penser qu'il n'a pas légitimé les trois autres enfants qui ne peuvent alors pas être considérés comme étant les siens.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 novembre 2018, M. E..., représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête du préfet de la Gironde.
Il soutient que :
- les écritures du préfet sont irrecevables, leur signataire étant incompétent ;
- l'arrêté en date du 25 septembre 2017 ne lui a pas été régulièrement notifié. Il n'a donc pas eu connaissance des voies et délais de recours. La signature sur l'accusé de réception produit par la préfecture n'est manifestement pas la sienne ni celle de son épouse qui nie avoir signé ce recommandé ;
- les deux arrêtés attaqués sont entachés d'incompétence de l'auteur de l'acte ;
- les deux arrêtés attaqués sont insuffisamment motivés ;
- le préfet n'a pas étudié sa situation de façon approfondie, objective et individualisée, avant de prendre les deux arrêtés contestés. Il est menacé dans son pays d'origine. Les risques qui pèsent sur lui dans son pays d'origine ne sont pas mentionnés dans la décision d'assignation à résidence ;
- l'arrêté en date du 13 août 2018 méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; le préfet n'a pas pris en compte sa création d'entreprise et la conséquence de son éloignement, à savoir le licenciement des salariés et la mise à mal des marchés qu'il a contractés pour le futur ;
- son frère souffre de nombreux syndromes post-traumatiques, il est handicapé à plus de 80 % ; s'il est indiqué comme gérant de la société, en réalité c'est lui-même qui gère cette société ;
- les deux arrêtés méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet n'a pas pris en compte sa vie privée et familiale. Il s'est marié en France en 2016, a quatre enfants en situation régulière, dont deux nés sur le territoire français ;
- il est admissible à la régularisation dans le cadre des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il répond aux critères de la circulaire du 28 novembre 2012. Il peut justifier de trois années de salaire ;
- le préfet ne pouvait opposer la faculté de recourir au regroupement familial, laquelle ne fait pas obstacle à la délivrance d'un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale. Il ne pourra pas obtenir un visa ou un passeport de la Turquie ;
- le préfet a méconnu dans les deux arrêtés l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et de l'article 24 de la Charte des droits fondamentaux de l'union européenne;
- les arrêtés sont entachés d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la mesure d'assignation à résidence est disproportionnée car il a de nombreux marchés signés en dehors du département, elle n'est pas assortit d'une autorisation de travail et la durée ne lui permet pas de gérer sa succession à la tête de son entreprise.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme G... B... pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Paul-André Braud, rapporteur ;
- et les observations de Me D..., avocat, représentant M. E... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. E..., ressortissant turc d'origine kurde né le 1er septembre 1982, est de nouveau entré en France en 2015. Par deux décisions antérieures en date du 30 juin 2006 et du 30 juillet 2007, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté ses demandes d'asile, confirmées par deux décisions de la Cour nationale du droit d'asile en date du 16 avril 2017 et du 29 avril 2008. Sa demande de réexamen a été déclarée irrecevable par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 18 avril 2016, confirmé une décision de la Cour nationale du droit d'asile en date du 5 octobre 2016. Il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour le 2 juin 2016 sur le fondement des articles L. 313-10, L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un premier arrêté du 25 novembre 2017, le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un second arrêté du 13 août 2018, le préfet de la Gironde l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. Le préfet de la Gironde relève appel du jugement du 17 août 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a annulé ces arrêtés et lui a enjoint de réexaminer la situation de M. E....
2. Aux termes de l'article R. 431-4 du code de justice administrative : " Dans les affaires où ne s'appliquent pas les dispositions de l'article R. 431-2, les requêtes et les mémoires doivent être signés par leur auteur et, dans le cas d'une personne morale, par une personne justifiant de sa qualité pour agir. " Aux termes de l'article R. 431-13 de ce code : " Sont en outre applicables devant les cours administratives d'appel les dispositions des articles (...) R. 431-4 (...) applicables devant les tribunaux administratifs. ".
3. La requête d'appel, présentée pour le préfet de la Gironde, est signée par Mme F... A..., chef du bureau de la lutte contre l'immigration irrégulière de l'ordre public et du contentieux. En dépit de la fin de non-recevoir opposée en ce sens par M. E..., le préfet de la Gironde ne produit ni même ne fait état d'une délégation l'habilitant à signer une requête au nom du préfet de la Gironde. Dans ces conditions, cette fin de non-recevoir doit être accueillie et la requête est donc irrecevable.
DECIDE :
Article 1er : La requête du préfet de la Gironde est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. C... E.... Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience public du 21 mai 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Pouget, président,
M. Paul-André Braud, premier conseiller,
M. Romain Roussel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 5 août 2019.
Le rapporteur,
Paul-André BraudLe président,
Marianne Pouget
Le greffier,
Florence Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'Intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No 18BX03383