Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...A...B...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 16 mai 2018 par lequel le préfet de la Dordogne lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n°1802922 du 30 octobre 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 30 novembre 2018, M. A...B..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) de prononcer son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 30 octobre 2018 ;
3°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Dordogne du 16 mai 2018 ;
4°) d'enjoindre au préfet de la Dordogne de procéder au réexamen de sa demande dans le délai de 15 jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision de refus de renouvellement de titre de séjour :
- elle est insuffisamment motivée ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen complet de sa situation personnelle ;
- le préfet de la Dordogne s'est estimé lié par l'avis du collège de médecins ;
- cette décision méconnaît le 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien et est entachée d'une erreur d'appréciation : il présente un diabète sévère et des troubles anxieux qui exigent un traitement qu'il ne pourrait obtenir en Algérie, surtout dans sa région d'origine ; en outre, il ne possède pas d'assurance maladie et n'a pas les ressources financières pour accéder à des injections d'insuline ; certains des médicaments prescrits qu'il se voit délivrer pour ses troubles psychiatriques ne sont pas disponibles en Algérie ; il a par ailleurs bénéficié à deux reprises d'avis favorables et rien ne démontre que son état de santé se serait amélioré ou que l'accès aux soins des diabétiques en Algérie aurait progressé ; il a été hospitalisé du 19 au 23 novembre 2018 ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors qu'il ne pourrait pas accéder en Algérie aux soins nécessités par son état de santé ;
- cette décision porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : il a noué des relations en France ; sa situation sociale et professionnelle s'explique par son état de santé ; il fait des efforts d'intégration et est fils d'un ancien combattant de la République ;
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation : en cas de retour en Algérie, il risquerait de mourir en raison du défaut de soins.
Par un mémoire défense, enregistré le 13 juin 2019, le préfet de la Dordogne conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête présentés par M. A...B...n'est fondé.
M. A...B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 janvier 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n°914-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme Béatrice Molina-Andréo pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. David Katz a été entendu au cours de l'audience publique :
Considérant ce qui suit :
1. M. C...A...B..., ressortissant algérien né le 16 avril 1975, est entré en France le 25 août 2014, selon ses déclarations. A compter du 4 février 2017, il s'est vu délivrer un certificat de résidence algérien sur le fondement du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, régulièrement renouvelé jusqu'au 3 février 2018. Le 7 décembre 2017, M. A...B...a sollicité le renouvellement de son titre de séjour. Par un arrêté du 16 mai 2018, le préfet de la Dordogne a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A...B...relève appel du jugement du 30 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle :
2. Par une décision du 24 janvier 2019, M. A...B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, ses conclusions tendant à son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet.
Sur la légalité de l'arrêté du 16 mai 2018 :
En ce qui concerne la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour :
3. En premier lieu, la décision attaquée, qui, contrairement à ce que soutient l'appelant, n'avait pas à mentionner les éléments matériels sur lesquels le collège de médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a fondé son avis du 12 avril 2018, comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elle est ainsi suffisamment motivée.
4. En deuxième lieu, il ne ressort ni de la motivation de la décision attaquée, ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet, d'une part, n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. A...B..., d'autre part, se serait cru lié par l'avis du collège de médecins de l'OFII.
5. En dernier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) ; / 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (...). ".
6. Il ressort de l'avis émis le 12 avril 2018 par le collège de médecins de l'OFII que l'état de santé de M. A...B...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans son pays d'origine, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et que son état de santé lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine. Pour contredire cet avis, l'intéressé produit des pièces médicales, postérieures à la décision attaquée, qui ne comportent aucune indication quant à la disponibilité du traitement nécessité par son état de santé dans son pays d'origine. Si l'appelant se prévaut d'un article de presse, ce dernier n'est toutefois pas daté. Ces pièces ne permettent ainsi pas de démontrer qu'il serait dans l'impossibilité d'accéder effectivement à une prise en charge médicale appropriée en Algérie. Si M. A...B...soutient également ne pas être en mesure d'accéder aux soins requis par son état de santé dès lors qu'il est sans ressources et qu'il n'a pas de couverture médicale en Algérie, il ne produit aucune pièce à l'appui de ses allégations. Dans ces conditions, la décision attaquée n'a pas méconnu les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et n'est pas entachée d'une erreur d'appréciation.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
7. En premier lieu, le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté pour les mêmes motifs que ceux qui viennent d'être exposés au point 6 du présent arrêt.
8. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
9. M. A...B...soutient qu'il a noué des relations en France où il fait d'importants efforts d'intégration, que son père est un ancien combattant de la République et se prévaut de son état de santé. Toutefois, il ne fait état d'aucune attache familiale en France alors qu'il ressort de sa demande de titre de séjour qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Algérie, pays dont il a la nationalité, où résident sa mère et ses frères et où il a vécu jusqu'à l'âge de 39 ans. Par suite, et eu égard à la durée de son séjour en France, la décision attaquée n'a pas portée une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
10. En dernier lieu, M. A...B...se prévaut de son état de santé pour soutenir que sa vie serait menacée en cas de retour en Algérie dès lors qu'il ne pourrait y être soigné, ce qui contreviendrait aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Toutefois, et comme indiqué précédemment, il n'est pas établi qu'il ne pourrait pas accéder au traitement nécessité par son état de santé en Algérie. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation ne peuvent qu'être écartés.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 mai 2018 par lequel le préfet de la Dordogne a refusé de procéder au renouvellement de son certificat de résidence algérien, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par voie de conséquence, les conclusions présentées aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle présentée par M. A...B....
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Dordogne.
Délibéré après l'audience du 2 juillet 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Pouget, président,
David Katz, premier conseiller.
M. Paul-André Braud, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 29 juillet 2019.
Le rapporteur,
David Katz
Le président,
Marianne Pouget
Le greffier,
Florence Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°18BX04162