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29/07/2019 | FRANCE | N°18BX03716

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 29 juillet 2019, 18BX03716


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 21 août 2018 du préfet de l'Ariège portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de destination.

Par un jugement n°1804338 du 11 octobre 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 21 août 2018 du préfet de l'Ariège, et lui a enjoint de réexaminer la situation de M. B... dans un délai de deux

mois à compter de la notification du jugement et de lui délivrer une autorisation provi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 21 août 2018 du préfet de l'Ariège portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de destination.

Par un jugement n°1804338 du 11 octobre 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 21 août 2018 du préfet de l'Ariège, et lui a enjoint de réexaminer la situation de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 octobre 2018, le préfet de l'Ariège demande à la cour d'annuler ce jugement n°1804338 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse du 11 octobre 2018 en tant qu'il a annulé l'arrêté du 21 août 2018 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Il soutient que :

En ce qui concerne le jugement de première instance :

- le moyen d'annulation retenu par les premiers juges est infondé dès lors qu'il produit le relevé de " Telemofpra " démontrant la notification régulière par la Cour nationale du droit d'asile de la décision de rejet de demande d'asile de M. B....

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours :

- le droit d'être entendu de M. B... n'a pas été méconnu dès lors qu'il a pu présenter ses observations dans le cadre de l'examen de sa demande d'asile ;

- son arrêté était parfaitement motivé dès lors qu'il mentionne les éléments relatifs à la situation particulière de M. B... ;

- il n'a pas porté une atteinte au respect de la vie privée et familiale de M. B... tel que prévu par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, celui-ci pouvant reconstruire sa cellule familiale en Albanie, pays où il a vécu la majeure partie de sa vie.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- la décision fixant le pays de destination n'est pas dépourvue de base légale dès lors que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas illégale ;

- il n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation de la situation de M. B... au regard de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, aucun élément nouveau ne venant démontrer une menace directe pour sa vie ou sa liberté ou qu'il soit exposé à la torture ou à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour en Albanie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 janvier 2018, M. B..., représenté par Me F..., conclut :

- à ce qu'il soit admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

- au rejet de la requête ;

- à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il fait valoir que :

En ce qui concerne le jugement de première instance :

- le jugement était fondé et régulier puisque le préfet ne démontrait pas la régularité de la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours :

- le préfet a méconnu le droit d'être entendu prévu par les articles 41 et 51 paragraphe 1 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne dès lors qu'il n'a pas pu présenter ses observations et alors qu'elle n'a pas été prise concomitamment à une décision portant refus de titre de séjour ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- cette insuffisance de motivation démontre que le préfet n'a pas réalisé un examen réel et sérieux en tant qu'il n'a pas examiné sa situation personnelle et familiale au regard des exigences de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et qu'il n'a pas tenu compte de ses efforts d'intégration ;

- le préfet d'une part, a méconnu son droit de mener une vie privée et familiale normale tel que prévu par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, et d'autre part, a commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est insuffisamment motivée en fait ;

- cette insuffisance de motivation révèle un défaut d'examen particulier de sa situation.

M. B... a été maintenu au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 mars 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme D... C... pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique :

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant albanais né le 7 juin 1996, est entré irrégulièrement en France le 23 juillet 2017 selon ses déclarations, pour rejoindre son père, l'épouse de ce dernier, et ses jeunes frères et soeur. Sa demande d'asile a été rejetée le 18 octobre 2017 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, rejet confirmé par la Cour nationale du droit d'asile le 24 juillet 2018. Par un arrêté du 21 août 2018 le préfet de l'Ariège l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Le préfet de l'Ariège relève appel du jugement du 11 octobre 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé, à la demande de M. B..., l'arrêté du 21 août 2018.

Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Par décision du 14 mars 2019 le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux a maintenu à M. B... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par voie de conséquence, les conclusions de M. B... tendant à son admission provisoire à l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Pour annuler l'arrêté du préfet de l'Ariège du 21 août 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a accueilli le moyen tiré la méconnaissance de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en l'absence de preuve de notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile.

4. Aux termes de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile (...) " Aux termes de l'article R. 733-32 du même code : " Le secrétaire général de la cour notifie la décision de la cour au requérant par lettre recommandée avec demande d'avis de réception dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 213-3. Il la notifie également au directeur général de l'office. Il informe simultanément du caractère positif ou négatif de cette décision le préfet compétent (...) " Enfin, aux termes des dispositions du III de l'article R. 723-19 de ce code : " La date de notification de la décision de l'office et, le cas échéant, de la Cour nationale du droit d'asile qui figure dans le système d'information de l'office est communiquée au préfet compétent et au directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration au moyen de traitements informatiques et fait foi jusqu'à preuve du contraire. ".

5. Il résulte de ces dispositions que l'étranger qui demande l'asile a le droit de séjourner sur le territoire national à ce titre jusqu'à ce que la décision rejetant sa demande lui ait été notifiée régulièrement par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé devant elle, par la Cour nationale du droit d'asile. En l'absence d'une telle notification, l'autorité administrative ne peut regarder l'étranger à qui l'asile a été refusé comme ne bénéficiant plus de son droit provisoire au séjour ou comme se maintenant irrégulièrement sur le territoire. En cas de contestation sur ce point, il appartient à l'autorité administrative de justifier que la décision de la Cour nationale du droit d'asile a été régulièrement notifiée à l'intéressé.

6. Le préfet produit pour la première fois en appel le relevé des informations de la base de données " TelemOfpra ", indiquant que la décision de la Cour nationale du droit d'asile en date du 24 juillet 2018 a été notifiée à l'intéressé le 8 août 2018. En application des dispositions précitées de l'article R. 723-19 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, cette mention fait foi jusqu'à preuve du contraire, et doit donc, en l'absence de tout élément contraire, être regardée comme la date effective de notification. Ainsi, M. B... ne pouvait plus se prévaloir, à la date de l'arrêté litigieux, d'un droit de se maintenir sur le territoire sur le fondement de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré de la méconnaissance de cet article ne peut donc qu'être écarté.

7. Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Ariège est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a, pour ce motif, annulé l'arrêté du 21 août 2018. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le tribunal administratif de Toulouse et la cour de céans.

Sur la légalité de l'arrêté du 21 août 2018 :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :

8. En premier lieu, le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Il n'implique toutefois pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français ou sur la décision le plaçant en rétention dans l'attente de l'exécution de la mesure d'éloignement, dès lors qu'il a pu être entendu sur l'irrégularité du séjour ou la perspective de l'éloignement.

9. D'une part, il résulte la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, invoqué par le requérant, s'adresse non aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union. Ainsi, le moyen tiré de sa violation par l'arrêté attaqué, pris par une autorité d'un Etat membre, est inopérant.

10. D'autre part, l'étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français au titre de l'asile, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement. Il lui appartient donc, lors du dépôt de sa demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur à la préfecture, de produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande, et il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Par conséquent, le droit de l'intéressé d'être entendu implique seulement que l'autorité administrative prenne en compte ces nouveaux éléments, mais n'impose pas à cette dernière, en particulier lorsque, comme en l'espèce, elle fait application du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour obliger l'intéressé à quitter le territoire français à la suite du rejet définitif de sa demande d'asile, de le mettre à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur cette mesure d'éloignement. En l'espèce, il n'est ni établi ni même allégué que, postérieurement au dépôt de sa demande d'asile, M. B... ait été empêché de présenter, par écrit ou par oral, des éléments nouveaux. Son droit d'être entendu avant toute mesure d'éloignement n'a donc pas été méconnu.

11. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1°/ restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; (...) ". Selon l'article L.211-5 du même code : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".

12. En l'espèce, l'arrêté mentionne, d'une part, les textes sur lesquels se fonde l'obligation de quitter le territoire français, notamment le 6° du I et le II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et, d'autre part ; les circonstances de fait qui en constituent le fondement en indiquant qu'il est récemment arrivé sur le territoire national et que sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile de sorte qu'il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire national. La mesure d'éloignement est ainsi suffisamment motivée. Par ailleurs, cette motivation révèle que le préfet de l'Ariège à procéder à un examen de sa situation, et ne s'est pas cru lié par les dispositions du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

13. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

14. Si M. B... se prévaut de la présence en France de sa famille, il ressort des pièces du dossier que ses parents font l'objet de mesures d'éloignement et que ses frères et soeur, qui sont scolarisés, sont mineurs. En outre, s'il se prévaut de sa relation de sa relation avec une ressortissante française, il ressort de l'attestation de cette dernière que cette relation est très récente puisqu'elle a commencé en juin 2018. Dès lors, eu égard à la durée de son séjour, l'obligation de quitter le territoire français litigieuse n'a pas porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le préfet de l'Ariège n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

15. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du défaut de base légale de la décision fixant le pays de destination en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

16. En deuxième lieu, l'arrêté vise les articles L. 513-1 à L. 513-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la convention internationale des droits de l'enfant et mentionne la nationalité de M. B.... D'autre part, l'arrêté fait mention du rejet de la demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile et de ce qu'il n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. Ainsi, l'arrêté énonce les considérations de droit et de fait fondant la décision fixant le pays de destination.

17. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Ces dispositions et stipulations font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de renvoi d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de renvoi ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée.

18. Le requérant se borne à soutenir qu'il craint pour son intégrité physique en cas de retour dans son pays d'origine sans autre précision et sans aucune pièce au soutien de son allégation. Dans ces conditions, et alors que sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peuvent être accueillis.

19. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de l'Ariège est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 21 août 2018. Par voie de conséquence, les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens présentées par M. B... doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle présentée par M. B....

Article 2 : Le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse en date du 11 octobre 2018 est annulé.

Article 3 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Toulouse et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B..., au préfet de l'Ariège et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 21 mai 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Pouget, président,

M. Paul-André A..., premier-conseiller,

M. Romain Roussel, premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 29 juillet 2019.

Le rapporteur,

Paul-André A...Le président,

Marianne Pouget

Le greffier,

Florence Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'Intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

3

N°18BX03716


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18BX03716
Date de la décision : 29/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme POUGET M.
Rapporteur ?: M. Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : MARTIN-CAMBON

Origine de la décision
Date de l'import : 27/08/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-07-29;18bx03716 ?
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