Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la mise en demeure de payer la somme de 152 869,46 euros émise à son encontre le 21 octobre 2016 par le comptable public du service des impôts de Saint-Maixent-l'Ecole en sa qualité de débiteur solidaire d'un reliquat d'impôt dû par la société Novy Planification Différée, en exécution d'un jugement du tribunal de grande instance de Niort du 7 avril 2003 confirmé le 9 juin 2009 par la cour d'appel de Poitiers.
Par un jugement n° 1700595 du 12 septembre 2017, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour administrative d'appel :
Par une requête enregistrée le 19 octobre 2017, M.A..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 12 septembre 2017 du tribunal administratif de Poitiers ;
2°) de prononcer la décharge de l'obligation de payer résultant de la mise en demeure litigieuse ;
3°) d'ordonner la restitution des sommes saisies à compter du 18 juin 2015 ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la demande de sursis de paiement reçue le 20 mars 2013 n'a produit aucun effet sur la prescription puisque le directeur départemental des finances publiques a considéré que cette demande était irrecevable pour tardiveté ;
- la demande de sursis reçue par l'administration le 3 janvier 2015 n'a pas suspendu l'exigibilité des sommes puisque cette demande était également tardive et il s'est vu notifier le 2 novembre 2016 une mise en demeure de payer qui constitue un acte de poursuite ;
- dès lors, il est constant que la prescription a commencé à courir le 18 juin 2011 et était acquise le 18 juin 2015.
Par un mémoire enregistré le 18 juin 2018, le ministre de l'action et des comptes publics (direction régionale des finances publiques de Nouvelle Aquitaine et de Gironde), conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- dans la mesure où la validité de la réclamation d'assiette du 18 mars 2013 n'a été admise que pendant l'instance d'appel devant le juge de l'impôt, le comptable des finances, dans l'incertitude de l'issue judiciaire, a préféré calculer la prescription de l'action en recouvrement sans considérer qu'elle avait eu un effet suspensif ; le point de départ du délai est bien l'avis à tiers détenteur notifié le 17 juin 2011 ; il a couru jusqu'au 29 décembre 2014, date de la réclamation d'assiette ;
- le comptable a jugé que la demande de sursis de paiement reçue le 3 janvier 2015 était recevable dans la mesure où le délai de recours contentieux n'était pas expiré ; le sursis a eu pour effet de suspendre l'exigibilité de la créance et la prescription de l'action en recouvrement ;
- M. A...a accusé réception le 2 novembre 2016 de la mise en demeure adressée par le comptable ; la décision de rejet de la réclamation d'assiette du 7 avril 2016 a été envoyée à une adresse erronée et notifiée de nouveau correctement le 1er avril 2017 ; ce nouvel envoi a modifié le décompte de la durée de suspension et de la prescription ; le délai a recommencé à courir à cette date ; une mise en demeure du 9 juin 2017 a annulé la précédente et de nouveau interrompu le délai ; en conséquence la suspension du délai de prescription a continué de courir jusqu'à la décision définitive du 28 mars 2017 ; les actes de poursuites notifiés entre le 7 avril 2016 et le 1er avril 2017 ont été annulés dans la mesure où le sursis de paiement était toujours en cours ; la demande de sursis de paiement du 23 décembre 2014 a eu pour effet de suspendre l'exigibilité de l'imposition et la mise en oeuvre de l'exécution forcée et le comptable a prononcé la mainlevée des avis à tiers détenteurs le 14 avril 2017 ; en conséquence, M. A...ne peut se prévaloir de la notification de ces actes de poursuites ;
- le contribuable a été informé de ce que sa réclamation d'assiette jugée recevable était transmise pour ce qui concerne le contentieux de l'assiette au service compétent pour le traiter et de la décision de rejet concernant le contentieux des mesures de recouvrement forcé ; le sursis légal de paiement a eu pour effet de suspendre l'exigibilité de la créance jusqu'à ce qu'une décision définitive soit rendue sur le contentieux d'assiette par l'administration, en vertu de l'article L. 211 alinéa 2 du livre des procédures fiscales ;
- la notion de délai raisonnable au sens de la jurisprudence Czabaj dépend des conditions d'espèce.
Par ordonnance du 28 janvier 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 28 février 2019 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Laurent Pouget,
- et les conclusions de Mme Déborah de Paz, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Les sociétés Novy Panification Différée et Nov'Ingénierie ont fait l'objet en 2001, parallèlement aux procédures de redressement judiciaire les concernant, de vérifications de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 1998 au 31 décembre 2000, à l'issue desquelles des rappels de taxe sur la valeur ajoutée leur ont été notifiés. Les deux sociétés ont été mises en liquidation judiciaire par un jugement du tribunal de commerce de Niort du 27 décembre 2001 confirmé le 14 mai 2002 par la cour d'appel de Poitiers et, les créances fiscales ayant été déclarées à la procédure collective, elles ont été définitivement admises à ce titre par un arrêt de la même cour du 9 septembre 2003. Le mandataire liquidateur a délivré le 17 juillet 2002 une attestation d'irrécouvrabilité de la créance au comptable des impôts de Saint-Maixent-l'Ecole, lequel a dès lors assigné en responsabilité solidaire, sur le fondement de l'article L. 267 du livre des procédures fiscales, l'ancien dirigeant des deux sociétés, M.A.... Le tribunal de grande instance de Niort, par un jugement du 7 avril 2003 confirmé en appel le 9 juin 2009, a condamné M. A...au paiement solidaire des rappels de taxe dus par les sociétés au motif d'inobservations graves et répétées de ses obligations fiscales, pour un montant total de 432 859 euros. Une mise en demeure de payer a été notifiée à l'intéressé le 7 juillet 2009, suivie de multiples avis à tiers détenteur émis jusqu'en juin 2011. M. A...a contesté le bien-fondé des impositions mises à sa charge au titre de la solidarité, dans le cadre d'une première procédure puis, en dernier lieu, par une réclamation du 23 décembre 2014. Celle-ci ayant été rejetée, une nouvelle mise en demeure de payer a été émise à l'encontre du débiteur solidaire le 21 octobre 2016 pour avoir recouvrement des sommes restant dues à cette date, soit 152 869,46 euros. M. A...a contesté en vain cet acte de poursuite devant l'administration, et il relève désormais appel du jugement du 12 septembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet acte et à la décharge de l'obligation de payer le reliquat de la dette fiscale des sociétés dont il était le dirigeant.
2. Aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable : " Les comptables du Trésor qui n'ont fait aucune poursuite contre un contribuable retardataire pendant quatre années consécutives, à partir du jour de la mise en recouvrement du rôle perdent leur recours et sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. Le délai de quatre ans mentionné au premier alinéa, par lequel se prescrit l'action en vue du recouvrement, est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous autres actes interruptifs de la prescription. ". L'article L 277 du même livre précise que : " Le contribuable qui conteste le bien-fondé ou le montant des impositions mises à sa charge est autorisé, s'il en a expressément formulé la demande dans sa réclamation et précisé le montant ou les bases du dégrèvement auquel il estime avoir droit, à différer le paiement de la partie contestée de ces impositions et des pénalités y afférentes. L'exigibilité de la créance et la prescription de l'action en recouvrement sont suspendues jusqu'à ce qu'une décision définitive ait été prise sur la réclamation soit par l'administration, soit par le tribunal compétent. (...) ". Enfin, l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce, dispose par ailleurs que : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts, doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : / a) De la mise en recouvrement du rôle ou de la notification d'un avis de mise en recouvrement (...) ".
3. M. A...s'est vu notifier le 17 juin 2011 un avis à tiers détenteur correspondant au solde non acquitté d'impositions restant dues par la SA Novy Panification différée, pour un montant de 231 664,58 euros. Il a présenté le 20 mars 2013 une première réclamation contestant le bien-fondé des impositions et assortie d'une demande de sursis de paiement sur le fondement de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales, qui a été rejetée en tous points par une décision du 15 mai 2013. Le 29 décembre 2014, il a présenté une seconde réclamation tendant aux mêmes fins que la précédente et également assortie d'une demande de sursis de paiement, qui a donné lieu, après accord du sursis sollicité, à une décision de rejet au fond le 7 avril 2016. Le requérant soutient que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, ni l'une ni l'autre de ses demandes de sursis de paiement n'ont pu avoir pour effet de suspendre l'exigibilité de la créance et la prescription de l'action en recouvrement dans la mesure où elles étaient l'une comme l'autre tardives et irrecevables. Il en tire que la prescription des impositions restant dues par la SA Novy Planification Différée et mises à sa charge en qualité de débiteur solidaire était acquise le 2 novembre 2016, date à laquelle il a accusé réception de la mise en demeure de payer du 21 octobre 2016.
4. Il résulte de l'instruction qu'un avis à tiers détenteur a été adressé le 17 juin 2011 à la société " Résidence les Scevolles " aux fins de saisir les loyers trimestriels perçus par M.A.... La réclamation d'assiette de ce dernier en date du 23 décembre 2014, reçue le 29 décembre par l'administration, a été regardée par cette dernière comme recevable et a donné lieu à une admission du sursis de paiement sur le fondement de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales. Par suite, le délai de prescription de l'action en recouvrement ouvert le 18 juin 2011 s'est trouvé suspendu à cette date du 29 décembre 2014, sans que le requérant puisse utilement faire valoir que l'administration a méconnu le principe de sécurité juridique en admettant sa réclamation plus d'un an après le moment où il a eu connaissance de l'imposition. Ainsi, contrairement à ce que prétend M. A...et sans qu'il soit besoin de s'interroger sur la recevabilité de sa réclamation du 20 mars 2013, le délai de prescription n'a pas couru sans interruption jusqu'au 18 juin 2015 mais a recommencé à courir à la date à laquelle la décision du 7 avril 2016 rejetant sa réclamation du 23 décembre 2014 a acquis un caractère définitif. Par ailleurs, si la mise en demeure litigieuse, logiquement émise par le comptable public postérieurement à l'expiration du délai de recours contentieux suivant la date de notification à M. A... de la décision rejetant sa réclamation d'assiette, s'est ensuite avérée prématurée en raison d'une irrégularité de la notification de cette décision tenant à une erreur quant à l'adresse à laquelle elle a été envoyée, il ne saurait en tout état de cause en résulter une acquisition de la prescription à la date à laquelle ladite mise en demeure a été notifiée au requérant et dont celui-ci serait fondé à se prévaloir.
5. Il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. En conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être que rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 20 juin 2019, à laquelle siégeaient :
M. Aymard de Malafosse, président,
M. Laurent Pouget, président-assesseur,
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, premier conseiller,
Lu en audience publique le 25 juillet 2019.
Le rapporteur,
Laurent POUGET Le président
Aymard de MALAFOSSE Le greffier,
Christophe PELLETIER
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No 17BX03356