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12/06/2019 | FRANCE | N°19BX00078

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre bis - (formation à 3), 12 juin 2019, 19BX00078


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 30 juillet 2018 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n°1801887 du 20 novembre 2018, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 janvier 2019, M.A..., r

eprésenté par Me Marcel, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 30 juillet 2018 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n°1801887 du 20 novembre 2018, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 janvier 2019, M.A..., représenté par Me Marcel, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 20 novembre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 juillet 2018 du préfet des Pyrénées-Atlantiques ;

3°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, au profit de son conseil, d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 alinéa 2 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté est entaché d'un vice de procédure ; si l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration comporte bien le nom du médecin rapporteur, cette inscription est manuscrite et n'est pas accompagnée de précisions permettant d'en identifier l'auteur ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- la décision portant fixation du pays de renvoi est privée de base légale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense enregistré le 8 mars 2019, le préfet des Pyrénées-Atlantiques conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 28 janvier 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er avril 2019 à 12h00.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 mars 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 5 janvier 2017, fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers, et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme Déborah de Paz pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Romain Roussel, premier conseiller ;

- et les observations de Me Marcel représentant M.A....

Considérant ce qui suit :

1. M. B...A..., ressortissant albanais, est, selon ses déclarations, entré en France le 11 février 2017. Sa demande d'asile a été définitivement rejetée par la Cour nationale du droit d'asile le 31 janvier 2018. Il a alors sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 30 juillet 2018, le préfet des Pyrénées-Atlantiques a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A...relève appel du jugement du 20 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté du 30 juillet 2018 :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ".

3. L'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ".

4. L'article R. 313-23 du même code dans sa rédaction alors en vigueur prévoit que : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...) / Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) ".

5. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que la régularité de la procédure implique, pour respecter les prescriptions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que les documents soumis à l'appréciation du préfet comportent l'avis du collège de médecins et soient établis de manière telle que, lorsqu'il statue sur la demande de titre de séjour, le préfet puisse vérifier que l'avis au regard duquel il se prononce a bien été rendu par un collège de médecins tel que prévu par le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. L'avis doit, en conséquence, permettre l'identification des médecins dont il émane. L'identification des auteurs de cet avis constitue ainsi une garantie dont la méconnaissance est susceptible d'entacher l'ensemble de la procédure. Il en résulte également que, préalablement à l'avis rendu par ce collège de médecins, un rapport médical, relatif à l'état de santé de l'intéressé et établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, doit lui être transmis et que le médecin ayant établi ce rapport médical ne doit pas siéger au sein du collège de médecins qui rend l'avis transmis au préfet. En cas de contestation devant le juge administratif portant sur ce point, il appartient à l'autorité administrative d'apporter les éléments qui permettent l'identification du médecin qui a rédigé le rapport au vu duquel le collège de médecins a émis son avis et, par suite, le contrôle de la régularité de la composition du collège de médecins.

6. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration concernant M. A...est revêtu d'une simple inscription manuscrite selon laquelle le rapport médical a été établi par le DrC..., qui ne fait pas partie des trois médecins ayant siégé au sein du collège. Toutefois, aucune pièce du dossier ne permet d'identifier l'auteur de cette mention manuscrite. Dès lors, en l'absence de tout élément permettant de vérifier que le médecin rapporteur, qui n'est donc pas identifié, n'a pas siégé au sein dudit collège en violation de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, M. A...doit être regardé comme ayant été privé d'une garantie entachant la procédure d'irrégularité.

7. L'annulation du refus de titre de séjour emporte, par voie de conséquence, l'annulation des décisions prises sur son fondement. Dès lors, l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et la décision fixant le pays de destination doivent également être annulées.

8. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués, que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Pyrénées-Atlantiques du 30 juillet 2018.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Eu égard au motif d'annulation retenu, il y a lieu d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Atlantiques de réexaminer la demande de M.A..., dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de ce réexamen.

Sur les conclusions tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

10. M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros à verser à Me Marcel, avocat de M.A..., en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Marcel renonce à la part contributive de l'État.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n°1801887 du 20 novembre 2018 du tribunal administratif de Pau et l'arrêté du 30 juillet 2018 du préfet des Pyrénées-Atlantiques sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Pyrénées-Atlantiques de réexaminer la demande de M. A...dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de ce réexamen.

Article 3 : L'État versera à Me Marcel, avocat de M.A..., une somme de 1 200 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Marcel renonce à la part contributive de l'État.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., au ministre de l'intérieur, au préfet des Pyrénées-Atlantiques et à Me Marcel.

Délibéré après l'audience du 21 mai 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Pouget, président,

M. Paul-André Braud, premier-conseiller,

M. Romain Roussel, premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 12 juin 2019.

Le rapporteur,

Romain RousselLe président

Marianne Pouget

Le greffier,

Florence Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'Intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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19BX00078


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre bis - (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 19BX00078
Date de la décision : 12/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme POUGET M.
Rapporteur ?: M. Romain ROUSSEL
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : MARCEL

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-06-12;19bx00078 ?
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