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12/06/2019 | FRANCE | N°18BX04529

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre bis - (formation à 3), 12 juin 2019, 18BX04529


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2018 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1805308 du 26 novembre 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2018, deux mémoires complémen

taires, enregistrés respectivement le 22 mars et le 11 avril 2019, et des pièces complémentaires, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2018 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1805308 du 26 novembre 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2018, deux mémoires complémentaires, enregistrés respectivement le 22 mars et le 11 avril 2019, et des pièces complémentaires, enregistrées le 22 mars, le 15 avril, le 17 avril et le 13 mai 2019, M. B... C..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 26 novembre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 26 octobre 2018 ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme du 1 500 euros, à verser à son conseil, en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier dès lors que le premier juge, pour répondre au moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet sur ses attaches familiales respectives en France et en Algérie, n'a pas apprécié sa situation au regard de l'ensemble des justificatifs produits mais a simplement repris les déclarations du préfet ;

- le signataire de l'arrêté en litige, à savoir Mme D...F..., ne bénéficiait pas de délégation suffisamment précise et publiée et il n'est pas justifié de l'empêchement de M. Jean-François Colombet ;

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé, ce qui révèle un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- l'arrêté en litige méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par trois mémoires en défense, enregistrés respectivement le 20 mars, le 2 avril et le 2 mai 2019, et des pièces complémentaires, enregistrées le 2 avril 2019, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M.C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 mars 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme Déborah de Paz pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Romain Roussel, premier conseiller ;

- et les observations de MeA..., représentant M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., ressortissant algérien né le 21 mars 1989, est entré en France en octobre 2016, selon ses déclarations. Après le rejet de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile, il a fait l'objet d'un arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 26 octobre 2018 lui faisant obligation de quitter sans délai le territoire français et fixant le pays de renvoi. M. C...relève appel du jugement du 26 novembre 2018 par lequel le magistrat désigné par le président tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Le fait pour un juge de première instance d'écarter à tort un moyen ne constitue pas une irrégularité de nature à entraîner l'annulation du jugement par le juge d'appel. Dès lors, M. C... ne peut utilement soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier au motif que, pour écarter le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet sur ses attaches familiales en France et en Algérie, le magistrat désigné par le président tribunal administratif n'aurait pas pris en compte les pièces qu'il avait produites et se serait borné à reprendre les déclarations du préfet.

Sur la légalité de l'arrêté du 26 novembre 2018 :

3. En premier lieu, le préfet de la Haute-Garonne a, par arrêté du 23 juillet 2018, régulièrement publié au recueil des actes administratifs des services de l'État dans le département, donné délégation à M. Jean-François Colombet, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer toutes décisions relevant des attributions de l'État dans le département à l'exception des arrêtés de conflit. Ce même arrêté prévoit qu'en cas d'absence ou d'empêchement de M.E..., cette délégation est exercée par Mme D...F..., sous-préfète chargée de mission et signataire de l'arrêté en litige. Si M. C...allègue que le préfet n'apporte pas la preuve de l'empêchement du secrétaire général de la préfecture, il appartient à la partie contestant la qualité du délégataire pour signer l'arrêté en litige d'établir que ce dernier n'était ni absent ni empêché. M. C...n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations et cette circonstance ne ressort pas non plus des pièces du dossier. Ces dispositions, qui sont suffisamment précises contrairement à ce que soutient M.C..., donnaient légalement compétence à Mme F...pour signer l'arrêté contesté. Ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige manque en fait et doit donc être écarté.

4. En deuxième lieu, l'arrêté en litige comporte l'énoncé des motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement. Il vise ainsi la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 3 et 8, ainsi que ceux du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicables à la situation de M.C..., en particulier le sixième alinéa du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. L'arrêté rappelle les conditions de son entrée et de son séjour en France ainsi que le rejet définitif de sa demande d'asile. Par ailleurs, le préfet de la Haute-Garonne précise que l'intéressé est célibataire et sans enfant et n'est pas dépourvu d'attaches privées et familiales dans son pays d'origine où il a vécu toute sa vie. Dès lors, le préfet de la Haute-Garonne a suffisamment motivé en droit et en fait l'arrêté faisant obligation à M. C...de quitter sans délai le territoire français et fixant le pays de renvoi. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation manque en fait et doit être écarté.

5. Il ressort de la motivation de l'arrêté en litige que le préfet de la Haute-Garonne s'est livré à un examen complet de la situation personnelle de M.C....

6. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. M.C..., entré en France selon ses déclarations en octobre 2016, à l'âge de 27 ans, se prévaut de la présence en France de son père, de sa grand-mère qui l'aurait élevé, de ses demi-frères et soeurs, dont certains ont la nationalité française, ainsi que d'un oncle et d'une tante et de leur enfant. Il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il a passé la majeure partie de sa vie en Algérie séparé d'eux. Si M. C...se prévaut également d'une relation avec une ressortissante espagnole résidant en France, il n'établit pas, par les pièces qu'il produit, l'ancienneté et l'intensité de cette relation. Il ressort encore des pièces du dossier qu'il a été condamné pour infraction routière en 2017 et pour infraction à la législation sur les stupéfiants en 2018. Dans ces conditions, quand bien même M. C...dispose d'une promesse d'embauche en qualité d'agent polyvalent dans un restaurant à Rouen, en lui faisant obligation de quitter sans délai le territoire français, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Pour les mêmes motifs, l'arrêté en litige n'est pas entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de M.C....

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 26 octobre 2018.

Sur les conclusions tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. C...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 21 mai 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Pouget, président,

M. Paul-André Braud, premier-conseiller,

M. Romain Roussel, conseiller.

Lu en audience publique, le 12 juin 2019.

Le rapporteur,

Romain RousselLe président,

Marianne Pouget

Le greffier,

Florence Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'Intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

No 18BX04529


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre bis - (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX04529
Date de la décision : 12/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme POUGET M.
Rapporteur ?: M. Romain ROUSSEL
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : SFEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-06-12;18bx04529 ?
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