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19/03/2019 | FRANCE | N°17BX02188

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 19 mars 2019, 17BX02188


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler la décision implicite par laquelle le directeur du service départemental des Pyrénées-Atlantiques de

l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) a rejeté sa demande du 14 novembre 2014, complétée le 9 décembre 2014, tendant à l'octroi de l'allocation de reconnaissance instituée en faveur des rapatriés anciens membres des formations supplétives et assimilées.

Par un jugement n° 1501284 du 11 mai

2017, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler la décision implicite par laquelle le directeur du service départemental des Pyrénées-Atlantiques de

l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) a rejeté sa demande du 14 novembre 2014, complétée le 9 décembre 2014, tendant à l'octroi de l'allocation de reconnaissance instituée en faveur des rapatriés anciens membres des formations supplétives et assimilées.

Par un jugement n° 1501284 du 11 mai 2017, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 juillet 2017 et 7 mai 2018,

M. A...D..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 11 mai 2017 ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le directeur du service départemental des Pyrénées-Atlantiques de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) a rejeté sa demande préalable du 19 novembre 2014, complétée le 9 décembre 2014, tendant à l'octroi de l'allocation de reconnaissance instituée en faveur des rapatriés anciens membres des formations supplétives et assimilées ;

3°) d'enjoindre au service départemental des Pyrénées-Atlantiques de l'ONACVG de lui accorder le bénéfice de l'allocation précitée par l'attribution d'une somme en capital de

30 000 euros, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, passé ce délai ;

4°) de mettre à la charge du service départemental des Pyrénées-Atlantiques de l'ONACVG le paiement de la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, tant en première instance que devant la cour, en application de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il remplit toutes les conditions pour bénéficier de l'allocation de reconnaissance instituée en faveur des rapatriés anciens membres des formations supplétives et assimilées ;

- les dispositions législatives qui introduisent une discrimination entre les anciens membres des formations supplétives ayant servi en Algérie en fonction de leur nationalité, au détriment de ceux relevant du statut de droit civil commun, ont été déclarées non conformes à la constitution par la décision du Conseil constitutionnel n° 2010-93 QPC du 4 février 2011 ;

- l'article 52 de la loi de programmation militaire n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 a été déclaré non-conforme à la Constitution par la décision n° 2015-522 QPC du 19 février 2016 du Conseil constitutionnel, qui s'impose à l'ONACVG.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 février 2018, l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG), représenté par la SCP Matuchansky-Poupot-Valdelièvre, conclut au rejet de la requête et, en outre, à ce qu'il soit mis à la charge

de M. D... le paiement de la somme de 2 000 euros en application de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par M. D...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- l'ordonnance n° 62-825 du 21 juillet 1962 ;

- la loi n° 87-549 du 16 juillet 1987 ;

- la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 ;

- la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 ;

- la décision n° 2010-93 QPC du Conseil constitutionnel du 4 février 2011 ;

- la décision n° 2015-504/505 QPC du Conseil constitutionnel du 4 décembre 2015 ;

- la décision n° 2015-522 QPC du Conseil constitutionnel du 19 février 2016 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M.B...,

- et les conclusions de M. Normand, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par lettre du 14 novembre 2014, dont il a été accusé réception

le 20 novembre suivant, complétée par lettre du 9 décembre 2014, M.D..., ancien membre des formations supplétives de l'armée française en Algérie au cours de la période allant du 1er juin 1959 au 28 février 1962, relevant du statut civil de droit commun, a demandé au directeur départemental des Pyrénées-Atlantiques de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG), le versement de l'allocation de reconnaissance réservée aux anciens supplétifs de droit local. Cette demande a été implicitement rejetée. M. D...relève appel du jugement du 11 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision implicite dont il soutient, sans être contredit, qu'elle résulte de son appartenance au statut de droit commun.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 9 de la loi du 16 juillet 1987 relative au règlement de l'indemnisation des rapatriés, dans sa rédaction issue de la loi du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale, et applicable au litige : " Une allocation (...) est versée, (...), aux anciens harkis, moghaznis et personnels des diverses formations supplétives de statut civil de droit local ayant servi en Algérie, qui ont fixé leur domicile en France./ En cas de décès de l'intéressé, l'allocation est versée sous les mêmes conditions au conjoint survivant. ". Aux termes de l'article 6 de la loi du 23 février 2005, dans sa rédaction alors

applicable : " I.-Les bénéficiaires de l'allocation de reconnaissance (...) peuvent opter, au choix (...) pour le versement, en lieu et place de l'allocation de reconnaissance, d'un capital de 30 000 Euros. (...) ".

3. Si par sa décision n° 2010-93 QPC du 4 février 2011, le Conseil constitutionnel avait déclaré contraires à la Constitution les dispositions antérieures qui, dans le premier alinéa de l'article 9 de la loi du 16 juillet 1987, le dernier alinéa de l'article 2 de la loi du 11 juin 1994, le paragraphe I bis de l'article 47 de la loi n° 99-1173 du 30 décembre 1999, les sixième et septième alinéas de l'article 6 et l'article 9 de la loi du 23 février 2005, mentionnaient l'acquisition ou la possession de la nationalité française, dont celles qui, par les renvois qu'elles opéraient, réservaient aux seuls ressortissants de statut civil de droit local le bénéfice de l'allocation de reconnaissance, une telle condition tenant à la nature du statut civil dont devait bénéficier le demandeur de l'allocation de reconnaissance instituée par l'article 9 de la loi du 16 juillet 1987 a été réintroduite par les dispositions du I de l'article 52 de la loi

du 18 décembre 2013 précitée.

4. Or, par une décision n° 2015-504/505 QPC du 4 décembre 2015, le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution ce I de l'article 52 en ce qu'il insérait les mots " de statut civil de droit local " au premier alinéa de l'article 9 de la loi du 16 juillet 1987. Il a notamment jugé qu'en instituant une condition relative au statut civil des personnes, le législateur avait édicté une condition d'une nature différente de la condition de nationalité qui avait été déclarée contraire à la Constitution par la décision précitée du 4 février 2011 et écartant le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité, a rappelé que " les anciens harkis et membres des formations supplétives ayant servi en Algérie qui relevaient du statut civil de droit local ne sont pas dans la même situation que les anciens harkis, moghaznis et personnels des formations supplétives ayant servi en Algérie qui relevaient du statut civil de droit commun ; qu'il ressort des travaux préparatoires de la loi du 18 décembre 2013 que le législateur a entendu indemniser non les charges entraînées par le départ d'Algérie mais le préjudice de ceux des anciens harkis, moghaznis et personnels des formations supplétives ayant servi en Algérie qui ont connu des difficultés particulières d'insertion après leur arrivée sur le territoire national ; qu'en réservant le bénéfice de l'attribution de l'allocation de reconnaissance aux anciens harkis, moghaznis et personnels des formations supplétives de statut civil de droit local ayant servi en Algérie, le législateur a retenu un critère qui est en rapport direct avec l'objet de la loi; ".

5. Par sa décision n° 2015-522 QPC du 19 février 2016, le Conseil constitutionnel a en revanche déclaré contraire à la Constitution les dispositions du II de l'article 52 de la loi du 18 décembre 2013 qui prévoyait l'application rétroactive de la condition tenant au statut local aux " aux demandes d'allocation de reconnaissance présentées avant l'entrée en vigueur de la loi du 18 décembre 2013 qui n'ont pas donné lieu à une décision de justice passée en force de chose jugée ", cette déclaration prenant effet à compter de la publication de sa décision et étant susceptible d'être invoquée dans toutes les instances introduites à cette date et non jugées définitivement. Toutefois, l'inconstitutionnalité de cette disposition a pour effet d'ouvrir droit au bénéfice de l'allocation de reconnaissance aux seules personnes qui ont formé une demande d'indemnité entre la publication de la décision n° 2010-93 QPC du Conseil constitutionnel et

le 19 décembre 2013 et qui, à la suite du refus opposé par l'administration à cette demande,

ont engagé une procédure contentieuse non définitivement close à la date de

la décision n° 2015-522 QPC du 19 février 2016.

6. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. D...a demandé le versement de l'allocation de reconnaissance le 14 novembre 2014, soit postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 18 décembre 2013. Dans ces conditions, et dès lors qu'il est constant qu'il relevait du statut civil de droit commun, il ne pouvait, compte tenu de la réintroduction de la condition relative au statut civil des anciens harkis, moghaznis et personnels des formations supplétives ayant servi en Algérie, par le I de l'article 52 de cette loi précitée, déclarée conforme à la Constitution et de la date d'introduction de sa demande, légalement prétendre au bénéfice de cette allocation. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté sa demande.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'ONACVG, qui n'est pas partie perdante à l'instance, la

somme que demande M. D...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les

dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande présentée au même titre par l'ONACVG.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'ONACVG en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D..., au ministre des Armées et à l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre.

Délibéré après l'audience du 5 février 2019 à laquelle siégeaient :

M. Didier Salvi, président,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller,

Mme Aurélie Chauvin, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 mars 2019.

L'assesseur le plus ancien,

Manuel Bourgeois Le président,

Didier B...

Le greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX02188


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX02188
Date de la décision : 19/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

46-07-04 Outre-mer. Aides aux rapatriés d'outre-mer. Diverses formes d`aide.


Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SCPA GARRETA et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-03-19;17bx02188 ?
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