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20/12/2018 | FRANCE | N°16BX04023

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 20 décembre 2018, 16BX04023


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...F...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 29 août 2014 par lequel le maire de la commune de Saint-Seurin sur l'Isle lui a infligé la sanction d'exclusion temporaire de trois jours, d'enjoindre au maire de ladite commune de le réintégrer sur le poste occupé au service des bâtiments et de le rétablir dans ses droits, de condamner la commune à lui verser la somme de 25 000 euros en réparation des préjudices subis à raison d'un harcèlement moral et de mettre à

la charge de la commune une somme de 2 000 euros en application de l'article L...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...F...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 29 août 2014 par lequel le maire de la commune de Saint-Seurin sur l'Isle lui a infligé la sanction d'exclusion temporaire de trois jours, d'enjoindre au maire de ladite commune de le réintégrer sur le poste occupé au service des bâtiments et de le rétablir dans ses droits, de condamner la commune à lui verser la somme de 25 000 euros en réparation des préjudices subis à raison d'un harcèlement moral et de mettre à la charge de la commune une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1500003 du 19 octobre 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté précité du 29 août 2014 et rejeté le surplus des demandes présentées par M. A... F...C....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 décembre 2016, M. F... C..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 19 octobre 2016 en tant qu'il a rejeté ses demandes à fin d'injonction et ses demandes indemnitaires ;

2°) de condamner la commune de Saint-Seurin sur l'Isle à lui verser la somme de 25 000 euros en réparation des préjudices qu'il a subis à raison d'un harcèlement moral ;

3°) d'enjoindre à la même commune de le réintégrer sur le poste qu'il occupait avant la sanction qui lui a été infligée et le rétablir dans ses droits ce, sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Seurin sur l'Isle la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- de nombreux éléments témoignent de ce qu'il a été victime d'un harcèlement moral ; le préjudice qui en résulte doit être réparé par une indemnité de 25 000 euros ; c'est à tort que le jugement attaqué a rejeté ses demandes indemnitaires ;

- il a été victime d'une rétrogradation, ce qui justifie la reconstitution de sa carrière et que lui soit octroyé le bénéfice d'avancements ; c'est à tort que le jugement attaqué a rejeté ses demandes d'injonction.

Par un mémoire en défense, enregistrés le 10 mars 2017, la commune de Saint-Seurin sur l'Isle, représenté par MeE..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. F... C...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à bon droit que le tribunal administratif a écarté tout harcèlement moral ;

- c'est à bon droit que le tribunal administratif a estimé que le jugement attaqué n'impliquait aucune mesure particulière d'exécution.

Par ordonnance du 22 janvier 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 22 février 2018 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi 83-64 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. David Katz,

- les conclusions de Mme Déborah de Paz, rapporteur public,

- et les observations de MeE..., représentant la commune de Saint-Seurin sur l'Isle, et de MeD..., représentant M. F...C....

Considérant ce qui suit :

1. M. F...C..., agent de maîtrise territorial, a été recruté par la commune de Saint-Seurin-sur-l'Isle en 2003. Par arrêté du 29 août 2014, le maire de cette commune lui a infligé la sanction d'exclusion temporaire de trois jours. M. F...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler cette sanction disciplinaire, d'enjoindre au maire de ladite commune de le réintégrer sur le poste qu'il occupait avant que ne soit prononcée la sanction, de le rétablir dans ses droits et de condamner la commune à lui verser la somme de 25 000 euros en réparation des préjudices subis à raison d'un harcèlement moral. Par jugement du 19 octobre 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté précité du 29 août 2014 et a rejeté le surplus des conclusions présentées par M. F...C.... Ce dernier relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses demandes indemnitaires et ses demandes à fin d'injonction.

Sur les conclusions indemnitaires de M. F...C... :

2. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

3. Il résulte de l'instruction que M. F...C...a fait l'objet de 2003 à 2010 de très bonnes appréciations par son autorité hiérarchique. Si ses notations des années 2011 à 2013 mentionnaient ses difficultés à travailler en équipe, elles relevaient à nouveau ses excellentes qualités professionnelles, M. F...C...étant encore qualifié de " très bon élément " dans sa notation afférente à l'année 2013. Puis, dans sa notation au titre de l'année 2014, il était qualifié par le maire de " menteur " et " pervers ", et comme usant de " subterfuges pour se faire passer pour une victime ". Les nombreuses attestations versées au dossier par M. F...C...tendent à montrer qu'il a fait l'objet, de la part de ses supérieurs hiérarchiques, d'une surveillance étroite visant à le prendre en faute, de brimades et de propos vexatoires. Il résulte en outre de l'instruction, notamment des certificats médicaux versés au dossier par l'intéressé, que celui-ci a souffert d'un grave état dépressif ayant entraîné des arrêts de travail à plusieurs reprises, un de ces certificats attribuant cet état anxio-dépressif réactionnel à un " harcèlement professionnel ". Ces éléments sont suffisants pour faire présumer l'existence d'un harcèlement moral. En défense, la commune de Saint-Seurin-sur-l'Isle fait valoir que le comportement de M. C...était caractérisé par l'insubordination, qu'il a participé à l'installation d'une situation délétère au sein des services techniques et qu'il a fait preuve de défiance à l'égard du maire. Toutefois, si les attestations qu'elle verse au dossier, notamment celle du responsable des services techniques de novembre 2011 à novembre 2013, tendent à montrer que M. F...C...faisait preuve d'un comportement individualiste et insuffisamment respectueux de ses supérieurs hiérarchiques, elle ne démontre pas, alors que, comme il a été dit, M. F...C...était reconnu dans ses notations comme un agent effectuant un très bon travail, que les agissements dénoncés par ce dernier sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. Il s'ensuit que M. F...C...est fondé à demander la condamnation de la commune à réparer les conséquences dommageables du harcèlement dont il été victime. Il sera fait une juste appréciation du préjudice moral subi par M. F... C...en lui allouant la somme de 5 000 euros. Par suite, M. F...C...est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté sa demande indemnitaire et la condamnation de la commune de Saint-Seurin-sur-l'Isle à lui verser la somme de 5 000 euros.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

4. Après avoir annulé la décision du 29 août 2014 portant exclusion temporaire de trois jours à l'encontre de M. F...C...au motif qu'elle était insuffisamment motivée, les premiers juges ont rejeté les conclusions tendant à la réintégration de l'intéressé sur le poste occupé au service des bâtiments et au rétablissement de ses droits, en estimant que le jugement attaqué n'impliquait aucune mesure particulière d'exécution. Devant la cour, M. F...C...soutient qu'à la suite de l'annulation de la sanction dont il a fait l'objet, l'administration était dans l'obligation de reconstituer sa carrière et que cela nécessitait des " mesures d'exécution drastiques ". Toutefois, la seule mesure d'injonction qui était impliquée par le jugement attaqué consistait en un réexamen de la situation de l'intéressé, ce à quoi la commune a procédé. Par conséquent, le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande à fin d'injonction.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. F...C..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Saint-Seurin sur l'Isle demande au titre des dispositions précitées. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la commune de Saint-Seurin sur l'Isle la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. F...C...et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1500003 du 19 octobre 2016 du tribunal administratif de Bordeaux est annulé.

Article 2 : La commune de Saint-Seurin sur l'Isle est condamnée à verser la somme de 5 000 euros à M. F...C...en réparation de ses préjudices et la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. F...C...est rejeté.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Saint-Seurin sur l'Isle au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M.A... F... C...et à la commune de Saint-Seurin sur l'Isle.

Délibéré après l'audience du 29 novembre 2018, à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

M. David Katz, premier conseiller,

Lu en audience publique le 20 décembre 2018.

Le rapporteur,

David KATZ Le président,

Aymard de MALAFOSSE Le greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 16BX04023


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX04023
Date de la décision : 20/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.

Procédure - Instruction - Preuve.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. David KATZ
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : HARFANG AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-12-20;16bx04023 ?
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