Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...D...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de la décharger des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009, 2010 et 2011 ainsi que de la taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamée au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011.
Par un jugement n° 1603657 du 29 mars 2018 le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 mai 2018, MmeD..., représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 29 mars 2018 ;
2°) de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009, 2010 et 2011 ainsi que du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011.
Elle soutient que :
- la vérification de comptabilité s'est déroulée dans des conditions irrégulières dans la mesure où l'administration a emporté des documents comptables sans son autorisation et hors sa présence et ne les lui a pas ensuite restitués ;
- par ailleurs la proposition de rectification est insuffisamment motivée, en ce qu'elle se borne à mentionner l'application d'un taux forfaitaire de charges sans donner d'explication sur la détermination de ce taux ;
- le taux de charges retenu est sans rapport avec la réalité économique, que l'administration aurait dû prendre en compte en procédant par comparaisons avec l'activité d'autres avocats et notamment en tenant compte de ce que le taux moyen des charges sur les recettes brutes des avocats inscrits au barreau de Bordeaux s'établit à 62,44 %.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 novembre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les conclusions de la requête sont irrecevables en tant qu'elles tendent à la décharge totale des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles l'appelante a été assujettie alors qu'aucun moyen n'est articulé relativement aux rehaussements effectués en matière de revenus fonciers ;
- par ailleurs, les moyens soulevés par Mme D...ne sont pas fondés.
Deux mémoires ont été présentés le 16 novembre 2018 pour MmeD....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rey-Bèthbéder, président-rapporteur,
- et les conclusions de M. Normand, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. MmeD..., qui exerce la profession d'avocat, n'a déposé aucune déclaration relative à ses bénéfices non commerciaux au titre des années 2009, 2010 et 2011 et n'a pas davantage souscrit de déclaration en matière de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011. Le service a ainsi diligenté en 2012 une vérification de comptabilité de son activité ainsi qu'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle portant sur la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011. À cette occasion un procès-verbal d'opposition à contrôle fiscal a été dressé. Puis, lui ont été notifiées des cotisations d'impôt sur le revenu et de la taxe sur la valeur ajoutée au titre des années et de la période d'imposition précitées, ces rectifications résultant notamment de l'évaluation d'office des bénéfices non commerciaux et du montant de taxe sur la valeur ajoutée effectuée à l'issue de la vérification de comptabilité. Mme D...a sollicité du tribunal administratif de Bordeaux la décharge des impositions qui trouvent leur origine dans les contrôles précités et qui résultent de cette évaluation d'office. Elle relève appel du jugement dudit tribunal du 29 mars 2018 qui a rejeté sa demande.
Sur la régularité de la procédure :
2. Aux termes de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales : " Les bases d'imposition sont évaluées d'office lorsque le contrôle fiscal ne peut avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers. ".
3. Il résulte des dispositions des articles L. 67, L. 74 et L. 76 du livre des procédures fiscales que, lorsque les bases de l'imposition d'un contribuable ont été évaluées d'office à la suite de son opposition au contrôle fiscal, le législateur a entendu priver l'intéressé, qui s'est de lui-même placé en dehors des règles applicables à la procédure d'imposition, des garanties dont bénéficient les contribuables, qu'ils soient imposés selon la procédure de redressement contradictoire ou selon une procédure d'imposition d'office.
4. Il résulte de l'instruction et notamment des explications apportées en première instance par l'administration et qui ne sont pas utilement démenties par l'appelante, que Mme D... s'est, en dehors d'un seul entretien qui a eu lieu le 27 juin 2012 et au cours duquel il a été constaté l'absence totale de comptabilité, dérobé à toutes les tentatives du vérificateur pour la rencontrer et qu'aucun document comptable n'a été présenté à ce dernier. Par conséquent, c'est à bon droit qu'a été dressé un procès-verbal d'opposition à contrôle fiscal au sens de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales. Dès lors, les moyens tirés tant de l'existence d'une irrégularité de la vérification de comptabilité qui aurait résulté d'un prétendu emport de documents comptables, du reste non assorti de précisions suffisantes, que de l'insuffisance de la motivation de la proposition de rectification, soulevés pour la première fois en appel, sont sans influence sur la régularité de la procédure à l'issue de laquelle ont été établies les impositions litigieuses.
Sur la charge de la preuve :
5. Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition" ; qu'aux termes de l'article R. 193-1 du même livre : "Dans le cas prévu à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré. ".
6. Ainsi qu'il a été dit précédemment les impositions litigieuses ont été établies à l'issue d'une procédure d'imposition d'office. Par suite, la charge de la preuve de l'exagération desdites impositions incombe à l'appelante.
Sur la reconstitution des recettes et des charges :
7. D'une part et aux termes de l'article 93 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession ". Quelle que soit la procédure d'imposition suivie à l'encontre du contribuable, il lui appartient de justifier que les sommes qu'il a déduites de son bénéfice non commercial ont constitué des dépenses nécessitées par l'exercice de sa profession.
8. D'autre part, il résulte des dispositions combinées du 1 de l'article 271, du 2 de l'article 272 et du 4 de l'article 283 du code général des impôts que la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'opérations imposables est déductible dans le cas de services facturés à l'entreprise, de la taxe à laquelle celle-ci est assujettie à raison des opérations en cours, à condition que les factures mentionnent ladite taxe, qu'elles aient été établies au nom du redevable par son fournisseur, qu'elles correspondent effectivement à l'opération dont elles font état, et que le prix indiqué soit réellement celui qui doit être acquitté par l'entreprise.
9. Comme en première instance, Mme D...soutient devant la cour que la reconstitution de ses bénéfices non commerciaux et de sa taxe sur la valeur ajoutée exigible à laquelle s'est livrée l'administration ne correspond pas à la réalité de son activité, en ce que le taux forfaitaire de charges qui a été retenu minimiserait les charges effectivement supportées, notamment au regard du niveau moyen de charges existant dans des structures comparables de la même zone d'activité.
10. Cependant et alors qu'il résulte de l'instruction et notamment des écritures de l'administration en première instance, qui n'ont fait l'objet d'aucune contestation utile, que pour déterminer les charges déductibles des recettes de l'intéressée le service a, en réalité, utilisé les factures examinées dans le cadre du contrôle de M.B..., dont l'appelante était la collaboratrice au titre des années et de la période d'imposition litigieuse, ainsi que les sommes figurant au débit du compte bancaire de MmeD..., celle-ci n'apporte au soutien de ses allégations strictement aucun élément de nature à permettre d'en vérifier l'exactitude. Par suite et comme l'ont estimé les premiers juges, elle n'établit pas le caractère exagéré des impositions qu'elle conteste.
11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...D...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 20 novembre 2018 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 18 décembre 2018.
Le président-assesseur,
Didier Salvi
Le président
Éric Rey-BèthbéderLe greffier,
Vanessa Beuzelin
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX02147