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12/12/2018 | FRANCE | N°18BX02364,18BX02365

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre bis - (formation à 3), 12 décembre 2018, 18BX02364,18BX02365


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes distinctes, M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 25 mai 2018 par lequel le préfet de la Haute-Vienne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination, d'une part, et l'arrêté du même jour par lequel la même autorité l'a assigné à résidence, d'autre part.

Par une ordonnance n° 1800890,1800891 du 8 juin 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a rejet

é ses demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 13 juin 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes distinctes, M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 25 mai 2018 par lequel le préfet de la Haute-Vienne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination, d'une part, et l'arrêté du même jour par lequel la même autorité l'a assigné à résidence, d'autre part.

Par une ordonnance n° 1800890,1800891 du 8 juin 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 13 juin 2018 sous le n° 18BX02364, M.A..., représenté par Me D...demande à la cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler cette ordonnance du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges ;

3°) d'annuler les arrêtés susmentionnés du préfet de la Haute-Vienne ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer un titre de séjour et de travail, à titre subsidiaire de prendre une décision dans un délai d'un mois, et de lui délivrer dans l'intervalle une autorisation provisoire de séjour ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 400 euros en application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'ordonnance est frappée de nullité dès lors qu'elle méconnaît le principe du caractère contradictoire de la procédure et les droits de la défense dès lors que des pièces du dossier ont été échangées entre le juge et le préfet sans lui avoir été communiquées ; elle méconnaît le droit au recours et à un juge impartial ; elle a été prise en violation de l'article R. 776-15 du code de justice administrative dès lors que contrairement à ce qu'a estimé le premier juge, les arrêtés n'ont pas été notifiés régulièrement ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'incompétence ;

- elle méconnaît le droit au mariage et l'article 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'un détournement de pouvoir ;

En ce qui concerne le refus de délai de départ volontaire :

- elle méconnaît l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée de détournement de pouvoir ;

En ce qui concerne l'assignation à résidence :

- elle est entachée d'incompétence ;

- elle est entachée de défaut de motivation en droit ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne l'obligation de pointage :

- elle est entachée d'illégalité par voie de conséquence de l'illégalité de l'assignation à résidence ;

- elle est entachée de défaut de motivation ;

- elle est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 septembre 2018, le préfet de la Haute-Vienne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 8 août 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 24 septembre 2018 à 12 heures.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 septembre 2018.

II. Par une requête enregistrée le 13 juin 2018 sous le n° 18BX02365, M.A..., représenté par Me D...demande à la cour de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, de prononcer le sursis à exécution de l'ordonnance attaquée et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Il soutient que les conditions posées par l'article R.811-17 du code de justice administrative sont fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 septembre 2018, le préfet de la Haute-Vienne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 8 août 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 24 septembre 2018 à 12 heures.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 novembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme Sabrina Ladoire pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme B...a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 25 mai 2018, le préfet de la Haute-Vienne a prononcé à l'encontre de M.A..., de nationalité cambodgienne, né le 17 mars 1979, une obligation de quitter le territoire français sans délai sur le fondement des dispositions du 2° de l'article L. 511-1-I et b) 3° de l'article L. 511-1-II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du même jour, le préfet de la Haute-Vienne l'a assigné à résidence. Par la requête susvisée n° 18BX02364, M. A...relève appel de l'ordonnance du 8 juin 2018 par laquelle le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté, pour tardiveté sur le fondement du 3° de l'article R. 776-15 du code de justice administrative, sa demande tendant à l'annulation de ces arrêtés. Par la requête susvisée n° 18BX02365, il demande à la cour de prononcer le sursis à exécution de cette ordonnance.

Sur la requête n° 18BX02364 :

Sur les conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire :

2. M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 20 septembre 2018. Par suite, les conclusions du requérant tendant à obtenir l'aide juridictionnelle à titre provisoire sont sans objet. Il n'y a pas lieu de statuer sur ces conclusions.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

3. D'une part, il résulte des dispositions combinées des articles L. 511-1 et L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des articles R. 776-1 à R. 776-17 du code de justice administrative, que lorsqu'un étranger fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des dispositions des 3°, 5° et 7° du I de l'article L. 511-1, il peut la contester, ainsi entre autres, que le refus de séjour notifié simultanément, devant le tribunal administratif qui, saisi dans les quinze jours de cette notification, statue dans les trois mois suivants dans une formation collégiale. Dans le cas où le préfet n'a accordé aucun délai de départ volontaire à l'étranger, le délai de recours dont dispose ce dernier est réduit à quarante-huit heures. En cas de placement en rétention ou d'assignation à résidence décidée sur le fondement de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lorsque ces décisions sont notifiées en même temps que l'obligation de quitter le territoire, l'étranger doit également former sa contestation dans les quarante-huit heures suivant cette notification.

4. D'autre part, aux termes des dispositions de l'article R. 776-15 du code de justice administrative, applicables en cas d'assignation à résidence : " Les jugements sont rendus, sans conclusions du rapporteur public, par le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cet effet. (...) Il peut, par ordonnance : (...) 3° Rejeter les recours entachés d'une irrecevabilité manifeste non susceptible d'être couverte en cours d'instance. ". Aux termes de l'article R. 776-18 du même code applicable en cas d'assignation à résidence : " (...) Les décisions attaquées sont produites par l'administration ".

5. Il ressort des pièces produites en première instance par le préfet de la Haute-Vienne en application des dispositions précitées de l'article R. 776-18 du code de justice administrative précité, que l'arrêté du 25 mai 2018 par lequel le préfet a prononcé à l'encontre de M. A...une obligation de quitter le territoire français sans délai a été notifié à son destinataire le jour même à 14h10. Cette notification mentionne que l'arrêté peut être contesté, devant le tribunal administratif territorialement compétent, dans un délai de quarante-huit heures suivant la notification. Il ressort des mêmes pièces que M. A... a été assigné à résidence par un second arrêté du 25 mai 2018, notifié le jour même à 14h15. Cette notification mentionne que l'intéressé dispose d'un délai de quarante-huit heures pour former un recours contentieux devant le tribunal administratif de Limoges. Les requêtes de M. A... n'ont toutefois été enregistrées au greffe du tribunal que le 7 juin 2018 à 16h58 et 16h59, soit après l'expiration du délai de quarante-huit heures. Par ordonnance du 8 juin 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a considéré que ces conclusions étaient pour ce motif tardives et dès lors irrecevables.

6. Pour contester la tardiveté qui lui a été opposée, M. A...soutient qu'au moment de la notification des décisions attaquées, son attention n'a pas été appelée sur la possibilité de former un recours. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'il a bénéficié de l'assistance d'un interprète lors de la notification des arrêtés en litige qui comportaient ainsi qu'il a été dit précédemment l'indication complète des voies et délais de recours. La seule circonstance que le tribunal administratif territorialement compétent n'ait pas été précisé dans la mention des voies et délais de recours portée sur la notification de l'obligation de quitter le territoire français n'était pas de nature à préjudicier à ses droits dans la mesure où, à supposer que sa demande ait été mal dirigée, elle aurait été transmise sans délai à la juridiction compétente, en application des dispositions de l'article R. 351-3 du code de justice administrative, ce qui lui aurait permis de conserver le bénéfice de la date initiale d'enregistrement de sa demande. Par suite, l'absence de la mention du tribunal administratif territorialement compétent n'a pu empêcher le délai de recours contentieux de courir. Il en résulte que le moyen tiré de ce que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges aurait à tort retenu la tardiveté de ses conclusions tendant à l'annulation de ces arrêtés doit être écarté.

7. Si l'appelant soutient que le rejet pour irrecevabilité de sa requête par l'ordonnance attaquée aurait méconnu son " droit à l'accès à la justice ", tel que proclamé par les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il résulte de ce qui a été dit précédemment que ce rejet ne découle que de l'application de dispositions du code de justice administrative qui n'ont ni pour objet ni pour effet de restreindre l'accès à la justice ou, en tout état de cause, de porter atteinte au droit au recours effectif.

8. Les autres moyens de la requête concernent la mesure d'éloignement et la décision d'assignation à résidence. Ils sont donc inopérants pour contester l'irrecevabilité qui a été opposée au requérant. Ils ne peuvent, par suite, qu'être écartés.

9. Il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté sa requête comme manifestement irrecevable, par application des dispositions du 3° de l'article R. 776-15 du code de justice administrative. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

Sur la requête n° 18BX02365 :

10. La cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions de la requête de M. A...tendant à l'annulation de l'ordonnance attaquée, les conclusions de sa requête n°18BX02365 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de cette ordonnance sont privées d'objet. Il n'y a pas lieu, par suite, d'y statuer.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire présentée par M. A...dans les requêtes n° 18BX02364 et n° 18BX02365.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête n° 18BX02364 de M. A...est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Vienne.

Délibéré après l'audience du 22 novembre 2018 à laquelle siégeaient :

MarianneB..., président,

Paul-André Braud, premier-conseiller,

Aurélie Chauvin, premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 12 décembre 2018.

Le premier-conseiller,

Paul-André BraudLe président-rapporteur,

Marianne B...

Le greffier,

Florence Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

4

No 18BX02364-18BX02365


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre bis - (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX02364,18BX02365
Date de la décision : 12/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme POUGET M.
Rapporteur ?: Mme Marianne POUGET M.
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : MALABRE

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-12-12;18bx02364.18bx02365 ?
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