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04/12/2018 | FRANCE | N°16BX02507

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 04 décembre 2018, 16BX02507


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...C...ont demandé au tribunal administratif de Toulouse la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011.

Par un jugement n° 1400148 du 28 juin 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 22 juillet 2016 et le 7 février 2017, M. et Mme B...C..., représentés par Me

A..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 28...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...C...ont demandé au tribunal administratif de Toulouse la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011.

Par un jugement n° 1400148 du 28 juin 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 22 juillet 2016 et le 7 février 2017, M. et Mme B...C..., représentés par MeA..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 28 juin 2016 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils sont propriétaires d'un château inscrit à l'inventaire des sites dont la conservation présente un caractère d'intérêt général à la suite d'une décision ministérielle du 6 mars 1943 ; ils y ont fait réaliser des travaux d'une grande ampleur en se conformant au cahier des charges rédigé par l'architecte des bâtiments de France ; ils ont ensuite déduit de leur revenu imposable les charges liées à ces travaux en application de l'article 156 II ter du code général des impôts ;

- c'est à tort que l'administration a remis en cause la déduction ainsi opérée au motif que la décision ministérielle de 1943 n'était pas assimilable à l'agrément du ministre prévu au code général des impôts ; il revenait au contraire à l'administration de tirer les conséquences attachées à la décision ministérielle de 1943, laquelle doit leur permettre de bénéficier du dispositif de l'article 156 II ter du code général des impôts ;

- si la décision de 1943 devait être interprétée comme ne créant pas les mêmes avantages fiscaux que ceux prévus au code général des impôts, il en résulterait une rupture de l'égalité entre les contribuables devant les charges publiques, en méconnaissance des articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

Par deux mémoires en défense, enregistré le 4 janvier 2017 et le 6 novembre 2018, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- en application de la législation, le régime spécial de déduction des charges foncières s'applique à trois catégories d'immeubles : les immeubles classés monuments historiques et ceux inscrits à l'inventaire supplémentaire, les immeubles faisant partie du patrimoine national en raison de leur caractère historique ou artistique particulier, ayant reçu un agrément spécial par le ministre chargé du budget et les immeubles faisant partie du patrimoine national en raison du label délivré par la fondation du patrimoine ;

- c'est à bon droit que le service a refusé la déductibilité des travaux litigieux au motif que le château d'Auzielle ne bénéficiait d'aucune des protections prévues par la loi ;

- dès lors que l'imposition en litige a été légalement établie, le moyen tiré de la rupture d'égalité entre les contribuables devant les charges publiques doit être écarté.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code du patrimoine ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Frédéric Faïck,

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville , rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant M. et MmeC....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C...sont propriétaires du château d'Auzielle, qui est aussi leur résidence principale, dans lequel ils ont fait réaliser des travaux de restauration. Ces travaux ont été à l'origine, pour M. et MmeC..., d'un déficit foncier d'un montant de 270 365 euros qu'ils ont déduit de leur revenu imposable au titre de l'année 2011. M. et Mme C...ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces à l'issue duquel l'administration a remis en cause cette déduction au motif que leur propriété n'avait pas le caractère d'un immeuble classé monument historique ou assimilé. M. et Mme C...ont été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2011, assorties des pénalités correspondantes, dont ils ont demandé la décharge au tribunal administratif de Toulouse. Ils relèvent appel du jugement rendu le 28 juin 2016 par lequel le tribunal a rejeté leur demande.

Sur le bien-fondé des impositions litigieuses :

2. Aux termes de l'article 156 du code général des impôts : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé eu égard aux propriétés (...) que possèdent les membres du foyer fiscal (...) sous déduction : (...) II. Des charges ci-après (...) : 1° ter. (...) les charges foncières afférentes aux immeubles classés monuments historiques ou inscrits à l'inventaire supplémentaire, ainsi qu'aux immeubles faisant partie du patrimoine national en raison de leur caractère historique ou artistique particulier et qui auront été agréés à cet effet par le ministre chargé du budget, ou en raison du label délivré par la " Fondation du patrimoine " en application de l'article L. 143-2 du code du patrimoine si ce label a été accordé sur avis favorable du service départemental de l'architecture et du patrimoine (...) ". Aux termes de l'article 1649 nonies du même code : " (...) les agréments auxquels est subordonné l'octroi d'avantages fiscaux prévus par la loi sont délivrés par le ministre chargé du budget (...) toute demande d'agrément auquel est subordonnée l'application d'un régime fiscal particulier doit être déposée préalablement à la réalisation de l'opération qui la motive (...) ". Aux termes de l'article 41 E de l'annexe III au code général des impôts : " (...) les charges foncières afférentes aux immeubles classés monuments historiques ou inscrits à l'inventaire supplémentaire et dont le propriétaire se réserve la jouissance peuvent être admises en déduction du revenu global servant de base à l'impôt sur le revenu (...) ". Aux termes de l'article 41 H de la même annexe : " L'application des articles 41 E à 41 G peut être étendue aux immeubles qui, bien que non classés parmi les monuments historiques ni inscrits à l'inventaire supplémentaire, font partie du patrimoine national à raison de leur caractère historique ou artistique particulier. Toutefois, la déduction des charges (...) est réservée à ceux de ces immeubles qui sont ouverts au public (...) Pour être admis au bénéfice des dispositions du présent article, les immeubles doivent faire l'objet d'un agrément spécial accordé par le ministre chargé du budget. ". Aux termes de l'article 17 quinquies A de l'annexe IV au code général des impôts : " L'agrément prévu à l'article 41 H de l'annexe III au code général des impôts pour l'application (...) du 1° ter du II de l'article 156 du même code est délivré par le directeur des services fiscaux du département au chef-lieu duquel est localisée la direction de contrôle fiscal dans le ressort de laquelle est situé l'immeuble concerné (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que sont déductibles du revenu imposable les charges foncières afférentes soit aux immeubles classés monuments historiques ou inscrits à l'inventaire supplémentaire, soit aux immeubles faisant partie du patrimoine national en raison de leur caractère historique ou artistique particulier et agréés à cet effet par le ministre chargé du budget ou bénéficiant du label délivré par la " Fondation du patrimoine " en application de l'article L. 143-2 du code du patrimoine. Le classement au titre des monuments historiques ou l'inscription à l'inventaire supplémentaire sont décidés sur le fondement respectivement des articles 1er et 2 de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques, désormais codifiés aux articles L. 621-1 et L. 621-25 du code du patrimoine. L'agrément fiscal des immeubles qui, n'étant ni classés au titre des monuments historiques, ni inscrits à l'inventaire des monuments historiques, font partie du patrimoine national en raison de leur caractère historique ou artistique particulier est pris sur le fondement de l'article 11 de la loi de finances pour 1965, codifié au 1 ter du II de l'article 156 du code général des impôts. Enfin, le label de la Fondation du patrimoine est délivré sur le fondement de l'article 2 de la loi du 2 juillet 1996 relative à cette fondation, aujourd'hui codifié à l'article L. 143-2 du code du patrimoine.

4. Il résulte de l'instruction que le château d'Auzielle, s'il se situe dans le site protégé d'Auzielle, ne bénéficie d'aucune protection au titre de la législation sur les monuments historiques. Il n'appartient pas non plus à la catégorie des immeubles faisant partie du patrimoine national en raison de leur caractère historique ou artistique, agréés à cet effet par le ministre chargé du budget ou bénéficiant du label délivré par la Fondation du patrimoine.

5. La décision du 6 mars 1943 par laquelle le ministre, secrétaire d'Etat à l'éducation nationale, a inscrit le château d'Auzielle " à l'inventaire des sites dont la conservation présente un intérêt général " a été prise sur le fondement de l'article 4 de la loi du 2 mai 1930 portant réorganisation la protection des monuments naturels et des sites de caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque, aujourd'hui codifié à l'article L. 341-1 du code de l'environnement. Une telle décision n'a donc ni le même objet ni le même effet qu'une décision de classement au titre des monuments historiques, une décision d'inscription à l'inventaire supplémentaire, un agrément fiscal délivré par le ministre du budget ou le label de la Fondation du patrimoine. Par suite, cette décision du 6 mars 1943 ne permet pas aux requérants de bénéficier de l'avantage fiscal prévu au 1 ter du II de l'article 156 du code général des impôts cité au point 2.

6. Dès lors que le château d'Auzielle n'entre ainsi dans aucun des cas pour lesquels la loi fiscale autorise la déduction des charges foncières du revenu imposable, les requérants ne sauraient, en tout état de cause, invoquer utilement à l'appui de leur prétention la circonstance qu'ils ont ouvert au public leur propriété.

7. Le moyen tiré de l'atteinte au principe d'égalité devant l'impôt et les charges publiques, garanti par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, est inopérant dès lors que les suppléments d'imposition litigieux ont été légalement établis.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leurs conclusions à fin de décharge. Par voie de conséquence, leurs conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B...C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...C...et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 20 novembre 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. Frédéric Faïck, premier conseiller,

Mme Florence Madelaigue, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 4 décembre 2018.

Le rapporteur,

Frédéric FaïckLe président,

Elisabeth JayatLe greffier,

Florence Deligey

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 16BX02507


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX02507
Date de la décision : 04/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-03-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Détermination du revenu imposable. Charges déductibles du revenu global.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: M. Frédéric FAÏCK
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS QUESNEL ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-12-04;16bx02507 ?
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