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20/11/2018 | FRANCE | N°16BX02415

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 20 novembre 2018, 16BX02415


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...B...ont demandé au tribunal administratif de Toulouse la décharge des cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2010.

Par un jugement n° 1401017 du 28 juin 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 juillet 2016, M. et Mme A...B..., représentés par la Selarl Quesnel et Associés, demandent à la cour :

1°) d'an

nuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 28 juin 2016 ;

2°) de prononcer la déchar...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...B...ont demandé au tribunal administratif de Toulouse la décharge des cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2010.

Par un jugement n° 1401017 du 28 juin 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 juillet 2016, M. et Mme A...B..., représentés par la Selarl Quesnel et Associés, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 28 juin 2016 ;

2°) de prononcer la décharge des contributions sociales en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les demandes de renseignements et de justifications que leur a adressées l'administration ont marqué, compte tenu de l'importance des documents sollicités, le début d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle ; il appartenait en conséquence à l'administration de respecter les règles propres à cette procédure visant à fournir des garanties au contribuable ; cette règle résulte des articles L. 12 et L. 47 du livre des procédures fiscales et de la doctrine administrative (BOI-CF-PGR-20-10 n° 10 ; BOI-CF-PGR-20-10 n° 80) ;

- ainsi, il appartenait à l'administration, avant d'engager l'examen de la situation fiscale personnelle, de leur adresser un avis de vérification ;

- il appartenait aussi à l'administration de les informer de leur droit à être assisté d'un conseil de leur choix.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 décembre 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la procédure de vérification des déclarations sur le fondement de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales n'a pas à être précédée de l'envoi d'un avis de vérification ;

- lorsque le contrôle de l'administration se limite à apprécier l'exactitude des déclarations déposées par le contribuable, son contrôle n'a pas le caractère d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ;

- en l'espèce, l'administration a demandé aux requérants de fournir les renseignements et justifications qu'appelaient leurs déclarations de revenus ; elle n'a pas cherché à vérifier la cohérence entre les revenus déclarés et le patrimoine, le train de vie des requérants ; la venue de M. B...dans les locaux de l'administration résulte d'une démarche personnelle et non d'une convocation du service ; un avis de vérification n'avait donc pas à être envoyé ;

- la proposition de rectification indique que les requérants disposaient d'un délai de trente jours pour présenter leurs observations ; ils ont été aussi informés de leur droit d'être assistés d'un conseil de leur choix, droit qu'ils ont mis en oeuvre.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Frédéric Faïck,

- et les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Après avoir été admis à la retraite le 31 décembre 2009, M. B...a, le 6 janvier 2010, cédé l'intégralité des titres qu'il détenait dans le capital de la société Sogefi, dont il était le dirigeant, en réalisant une plus value de 2 901 756 euros qu'il a mentionnée dans sa déclaration d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2010. En juillet 2011, les époux B...ont déposé une déclaration rectificative précisant que les titres ayant été détenus par eux depuis plus de huit ans, la plus-value réalisée devait bénéficier de l'exonération d'impôt prévue dans ce cas par l'article 150-O D bis du code général des impôts. En 2012, l'administration fiscale a diligenté un contrôle à l'issue duquel elle a estimé que le montant de la plus-value de cession n'avait pas été soumis aux prélèvements sociaux. Un avis de mise en recouvrement de ces prélèvements a été émis le 30 décembre 2013 pour un montant de 356 917 euros. M. et Mme B... en ont demandé la décharge devant le tribunal administratif de Toulouse et relèvent appel du jugement rendu le 28 juin 2016 ayant rejeté leur demande.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " L'administration des impôts contrôle les déclarations ainsi que les actes utilisés pour l'établissement des impôts, droits, taxes et redevances. Elle contrôle, également les documents déposés en vue d'obtenir des déductions, restitutions ou remboursements, ou d'acquitter tout ou partie d'une imposition au moyen d'une créance sur l'Etat. A cette fin, elle peut demander aux contribuables tous renseignements, justifications ou éclaircissements relatifs aux déclarations souscrites ou aux actes déposés. (...) ". Aux termes de l'article L. 12 du même livre : " Dans les conditions prévues au présent livre, l'administration des impôts peut procéder à l'examen contradictoire de la situation fiscale des personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu, qu'elles aient ou non leur domicile fiscal en France, lorsqu'elles y ont des obligations au titre de cet impôt. A l'occasion de cet examen, l'administration peut contrôler la cohérence entre, d'une part les revenus déclarés et, d'autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie des membres du foyer fiscal. (...) ". Aux termes de l'article L. 47 dudit livre : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix. L'avis envoyé ou remis au contribuable avant l'engagement d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle peut comporter une demande des relevés de compte. (...) ". Enfin, l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales dispose que : " La juridiction saisie peut, lorsqu'une erreur non substantielle a été commise dans la procédure d'imposition, prononcer, sur ce seul motif, la décharge des majorations et amendes, à l'exclusion des droits dus en principal et des intérêts de retard. Elle prononce la décharge de l'ensemble lorsque l'erreur a eu pour effet de porter atteinte aux droits de la défense ou lorsqu'elle est de celles pour lesquelles la nullité est expressément prévue par la loi ou par les engagements internationaux conclus par la France. ".

3. Il résulte de l'instruction que, par courrier du 2 mars 2012, l'administration a demandé à M. et Mme B...des renseignements sur les cessions de valeurs mobilières réalisées en 2009, les pensions alimentaires versées à une tierce personne et les revenus fonciers issus de la location de deux immeubles. L'administration a ensuite constaté que les époux B...avaient omis, dans leur déclaration, de mentionner l'imposition aux contributions sociales de la plus-value réalisée lors de la cession du 6 janvier 2010.

4. Ce faisant, l'administration a seulement effectué, conformément à l'alinéa 2 de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, un contrôle sur pièces des déclarations des époux B...dans le but d'obtenir des précisions ou des renseignements complémentaires. Alors même que les pièces sollicitées étaient nombreuses, l'administration ne peut être regardée comme ayant procédé à un examen de cohérence globale entre les revenus déclarés par les requérants, d'une part, et leur situation patrimoniale de trésorerie ainsi que les éléments de leur train de vie, d'autre part, seul de nature à caractériser un examen contradictoire de situation fiscale personnelle au sens de l'article L. 12 précité du livre des procédures fiscales. Quant à la circonstance que M. B...se soit rendu, de sa propre initiative, dans les locaux de l'administration le 10 avril 2012 en vue de remettre en main propre les pièces sollicitées, elle n'a aucune incidence sur la nature des opérations que l'administration a engagées qui relèvent bien, ainsi qu'il vient d'être dit, du contrôle sur pièces prévu à l'article L. 10 du livre des procédures fiscales.

5. Par suite, le moyen tiré de ce que la procédure d'imposition suivie est irrégulière faute d'avoir été précédée de l'envoi d'un avis de vérification, accompagné de la charte du contribuable vérifié et mentionnant la possibilité pour les requérants de se faire assister d'un conseil de leur choix, doit être écarté. En effet, une telle garantie, propre à la procédure d'examen contradictoire de situation fiscale personnelle, ne s'applique pas au contrôle sur pièces. Dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'il a été porté une atteinte aux droits de la défense justifiant la décharge des impositions litigieuses en application de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales.

6. Enfin, les termes d'une instruction relative à la procédure d'imposition ne sont pas susceptibles d'être invoqués dans le cadre de la garantie instituée par l'article L. 80 A du livre des procédures fiscale. Par suite, les requérants ne peuvent utilement invoquer, à l'appui de leur moyen, la doctrine administrative (BOI-CF-PGR-20-10 n° 250 et n° 280) qui se borne d'ailleurs à rappeler les critères permettant de distinguer le contrôle sur pièces de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...B...et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 6 novembre 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. Frédéric Faïck, premier conseiller,

Mme Florence Madelaigue, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 novembre 2018.

Le rapporteur,

Frédéric FaïckLe président,

Elisabeth JayatLe greffier,

Florence Deligey

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 16BX02415


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX02415
Date de la décision : 20/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Plus-values de cession de droits sociaux, boni de liquidation.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: M. Frédéric FAÏCK
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS QUESNEL ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-11-20;16bx02415 ?
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