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06/11/2018 | FRANCE | N°16BX02514

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 06 novembre 2018, 16BX02514


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'aménagement urbain et rural (SAUR) France a demandé au tribunal administratif de Limoges de prononcer la décharge de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1400434 du 26 mai 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 juillet 2

016, la société Saur France, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'aménagement urbain et rural (SAUR) France a demandé au tribunal administratif de Limoges de prononcer la décharge de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1400434 du 26 mai 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 juillet 2016, la société Saur France, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 26 mai 2016 ;

2°) de prononcer la décharge de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012 et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens.

Elle soutient que :

- les premiers juges n'ont pas suffisamment motivé leur jugement et n'ont pas répondu aux arguments invoqués ; ils se sont bornés à reprendre mot pour mot un jugement n° 1100791 ;

- la condition de mise à disposition des biens au sens de l'article 1467 du code général des impôts n'est pas remplie ;

- elle n'assure pas l'exploitation des immobilisations en cause mais réalise des prestations de services pour les besoins du propriétaire ;

- le critère du contrôle n'est pas rempli dès lors que la communauté d'agglomération dispose du contrôle sur la station d'épuration et l'ensemble des services d'épuration des eaux ;

- si, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal elle ne s'est pas prévalu de la lettre du 6 février 1976 adressée au président du syndicat professionnel des distributeurs d'eau et exploitants de réseaux d'assainissement, en revanche, elle remplit les conditions posées par cette doctrine administrative dès lors qu'elle ne perçoit aucune redevance de la part des usagers, et qu'elle n'a été qu'un sous-traitant de la société en charge de la construction de la station d'épuration, de sorte qu'elle ne peut être réputée avoir supporté le financement des équipements et la charge de leur remplacement ou des grosses réparations.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 décembre 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête de la société Saur France.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Florence Madelaigue ;

- et les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un contrat d'affermage à date d'effet au 1er avril 1990, la commune de Brive-la-Gaillarde a délégué à la société d'aménagement urbain et rural (SAUR), pour une durée de trente ans, l'exploitation du réseau d'assainissement collectif de la ville et de la station d'épuration situés sur son territoire. La communauté d'agglomération de Brive qui s'est substituée à la commune de Brive en décembre 2001, a créé une nouvelle station d'épuration sur le territoire de la commune de Saint-Pantaléon-de-Larche, mise en service en juillet 2007 dont elle a confié l'exploitation à la société Saur France après une procédure de marché public. La société Saur France a été assujettie à la cotisation foncière des entreprises au titre des années 2011 et 2012 à raison de l'exploitation de la station d'épuration des eaux que lui a contractuellement confiée la communauté d'agglomération de Brive par un avenant au contrat d'affermage conclu le 1er juillet 2007. Elle relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande de décharge de cette imposition et des pénalités correspondantes.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes des dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ".

3. Il ressort de la motivation du jugement, telle qu'elle ressort en particulier de ses points 2, 3 et 5, que le premier juge, qui n'est pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments avancés par les parties, a suffisamment détaillé les raisons pour lesquelles il a estimé que la société devait être assujettie à la cotisation foncière des entreprises au titre de son activité et que la valeur locative des installations et équipements de la station d'épuration devait être comprise dans la base de calcul de la cotisation foncière des entreprises, en s'appuyant notamment sur les stipulations du marché conclu par la société requérante avec la communauté d'agglomération de Brive et qui justifiait qu'elle avait la disposition de ces installations au sens des dispositions de l'article 1467 du code général des impôts. Par suite, alors même que le premier juge a repris l'argumentation d'un jugement rendu par le même tribunal le 24 janvier 2013, le moyen tiré du défaut de motivation du jugement ne peut qu'être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

4. Aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France (...) dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle ". Les immobilisations dont la valeur locative est ainsi intégrée dans l'assiette de la cotisation foncière des entreprises sont les biens placés sous le contrôle du redevable et que celui-ci utilise matériellement pour la réalisation des opérations qu'il effectue.

5. La société Saur France fait valoir qu'elle n'aurait pas la disposition des équipements de la station d'épuration au sens de cet article au motif que si elle utilise effectivement ce bien pour remplir les obligations issues du contrat de prestations de services, c'est la communauté d'agglomération qui contrôle la station.

6. Il résulte des stipulations du marché confiant l'exploitation et la gestion de la nouvelle station d'épuration conclu par la société requérante le 9 juillet 2009 pour une durée de quatre ans ainsi que des stipulations du cahier des clauses administratives particulières du marché que : " tous les ouvrages, installations et équipements de la station d'épuration (...) sont exploités " par la requérante, qui est, en outre, " entièrement responsable (...) des travaux d'entretien et de maintenance effectués par ses services ou sa conduite ". La société exploitante est également responsable des dommages qui pourraient être causés aux personnes, aux biens, ou aux installations du fait de l'exploitation des installations. Elle peut en outre librement contracter des marchés de prestations avec des intervenants extérieurs, et toutes les interventions de tiers se font sous sa responsabilité. Au regard de telles stipulations contractuelles, la société requérante, au cours des années 2011 et 2012, utilisait matériellement les équipements de la station d'épuration pour la réalisation des opérations qu'elle effectuait en exécution du marché susmentionné. Cette station d'épuration était également placée sous son contrôle et ce, alors même qu'elle n'en avait pas un contrôle exclusif, compte tenu des obligations et prérogatives demeurant à.la charge de la communauté d'agglomération de Brive qui conserve un droit de contrôle sur l'exécution du marché Dès lors, la société requérante, au sens des dispositions précitées, disposait au cours de ces années de cette station d'épuration pour les besoins de son activité professionnelle. Les circonstances qu'elle n'aurait pas été rémunérée au moyen de la perception de redevances sur les usagers et n'agirait que comme prestataire de service au profit de la collectivité sont sans influence. Par suite, elle ne saurait prétendre que la valeur locative de ces installations n'aurait pas dû être comprise dans la base de calcul de la cotisation foncière des entreprises.

En ce qui concerne le bénéfice de la doctrine administrative :

7. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente ".

8. La société requérante se prévaut de la lettre du 6 février 1976 par laquelle l'administration a fait savoir au président du syndicat professionnel des distributeurs d'eaux et exploitants de réseaux d'assainissement que, lorsqu'une société, exploitant un réseau de distribution d'eau ou d'assainissement, n'a pas financé les équipements et ne supporte pas la charge de leur renouvellement ou des grosses réparations, et que la redevance acquittée par les usagers est perçue par la commune qui rémunère la société, celle-ci doit être regardée comme se comportant " en prestataire de service ", et a admis que les équipements non financés par elle ne sont, en conséquence, pas pris en considération pour le calcul de la taxe professionnelle.

9. Si la société Saur France n'a pas financé les équipements, elle supporte la charge des travaux de renouvellement, conformément à l'article 30 du cahier des clauses techniques particulières. La société requérante n'entre donc pas dans les prévisions de la doctrine qu'elle invoque et ne peut s'en prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la société Saur France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, la somme que demande la société Saur France au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Saur France est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Saur France et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 25 septembre 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. Frédéric Faïck, premier conseiller,

Mme Florence Madelaigue, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 6 novembre 2018.

Le rapporteur,

Florence MadelaigueLe président,

Elisabeth JayatLe greffier,

Florence Deligey

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 16BX02514


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX02514
Date de la décision : 06/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-04-04 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. Taxe professionnelle. Assiette.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Florence MADELAIGUE
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS ATELEIA

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-11-06;16bx02514 ?
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