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05/11/2018 | FRANCE | N°16BX02323

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre - formation à 3, 05 novembre 2018, 16BX02323


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2014 du directeur des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de La Réunion qui a procédé à la nomination des responsables d'unité de contrôle et à l'affectation des agents de contrôle au sein de ces unités de contrôle et des sections de La Réunion.

Par un jugement n° 1500087 du 21 avril 2016, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 juillet 2016, M. B...A...dema...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2014 du directeur des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de La Réunion qui a procédé à la nomination des responsables d'unité de contrôle et à l'affectation des agents de contrôle au sein de ces unités de contrôle et des sections de La Réunion.

Par un jugement n° 1500087 du 21 avril 2016, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 juillet 2016, M. B...A...demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 21 avril 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2014 du directeur des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de La Réunion qui a procédé à la nomination des responsables d'unité de contrôle et à l'affectation des agents de contrôle au sein de ces unités de contrôle et des sections de La Réunion.

3°) à titre subsidiaire, de condamner la DIECCTE de La Réunion aux entiers dépens.

Il soutient que :

- sa requête est recevable en vertu de la jurisprudence Payet, qui veut qu'une décision doit être examinée à la fois par rapport à sa nature et aux effets qui en résultent pour la personne concernée ;

- le tribunal administratif n'a rien dit de la nature de la décision prise par le DIECCTE, alors que celui-ci ne dispose d'aucune compétence propre pour organiser, sur le territoire de La Réunion, des sections d'inspection spécialisées rattachées aux unités de contrôle normales ;

- en l'espèce, cette décision a eu des effets sur sa situation personnelle, suffisamment pour qu'ils soient examinés en détail afin de vérifier qu'il n'ait pas fait l'objet d'une sanction déguisée ou d'une discrimination syndicale ; en effet, il s'est fortement opposé à la création d'unités spécialisées dans le cadre de ses activités syndicales ;

- en refusant d'examiner sa demande, le tribunal administratif a refusé de vérifier les effets concrets que pouvait avoir la décision attaquée sur sa situation personnelle ; ainsi, son affectation sur un poste spécialisé lui a été imposée, alors que son affectation sur l'un des quatre postes pour lesquels il avait émis des voeux n'était pas incompatible avec l'organisation du service ;

- pour toutes ces raisons, la décision d'affectation dont il a fait l'objet ne peut être regardée comme une simple mesure d'ordre intérieur ;

- la procédure d'affectation à l'origine de l'arrêté du 24 juillet 2014 procédant à son affectation d'office sur la section d'inspection n° 8 de l'unité de contrôle spécialisée n'a pas respecté les formes exigées ; en effet, il y a eu non-respect de la note de service du ministère du travail prévoyant que les agents doivent se positionner sur plusieurs postes, mais pas sur tous les postes proposés ; il y a également eu absence de consultation des CAP des inspecteurs et contrôleurs du travail, ce qui n'est pas conforme aux dispositions relatives aux mutations dans la fonction publique de l'Etat, en particulier à la circulaire n° 2179 du 28 janvier 2009 ;

- l'arrêté du 24 juillet 2014 procédant à son affectation d'office est par ailleurs illégal, car il a été pris sur la base d'un autre arrêté du même jour non-conforme à la réglementation ; cet arrêté a en effet été pris en méconnaissance des dispositions du décret du 20 mars 2014 ni avec l'article D. 4711-1 du code du travail, dès lors qu'il instaure un chevauchement des compétences entre les sections d'inspection normales et les sections spécialisées ; en outre, la création de sections sectorielles ou thématiques est encadrée par l'article R. 8122-9 du code du travail, dont les modalités n'ont pas été respectées ;

- cet arrêté est également entaché de détournement de pouvoir ; la mutation d'un agent ne constitue une mesure d'ordre intérieur que si elle ne comporte aucune modification de la situation de l'agent, ce qui n'est pas le cas puisqu'il s'est vu affecté, malgré lui, à une section spécialisée ; cela contrevient à la circulaire précitée ; cette affectation se traduit par une réduction de ses compétences, auparavant généralistes et désormais réduites au secteur du BTP ; elle induit donc une modification en profondeur de ses attributions ; il s'agit donc bien d'une mutation au sens de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 ; dans ces conditions, il devait y avoir consultation préalable de la CAP compétente et prise en compte des souhaits exprimés par l'agent.

Par une ordonnance du 20 mars 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 2 mai 2017.

Un mémoire en défense, enregistré le 29 août 2018 a été présenté par le ministre du travail.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

- le décret n° 2014-359 du 20 mars 2014 relatif à l'organisation du système d'inspection du travail ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac,

- et les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B...A...est inspecteur du travail, relevant de la direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIECCTE) de La Réunion. Le 20 mars 2014, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a pris un décret n° 2014-359 relatif à l'organisation du système d'inspection du travail, prévoyant notamment une nouvelle organisation des unités de contrôle de ce corps. Un arrêté du directeur général du travail en date du 26 mai 2014 portant création et répartition des unités de contrôle de l'inspection du travail a notamment prévu que La Réunion comporterait 3 unités de contrôle dont une unité régionale de lutte contre le travail illégal. Sur ces fondements, le 24 juillet 2014, le DIECCTE de La Réunion a pris trois arrêtés, le premier relatif à la localisation et à la délimitation des unités de contrôle et des sections d'inspection du travail de La Réunion, le deuxième relatif à la nomination des responsables d'unités de contrôles et à l'affectation des agents de contrôle au sein des unités de contrôle et des sections d'inspection nouvellement créées et le troisième relatif à la nomination des inspecteurs du travail habilités à prendre les décisions administratives qui relèvent de leur compétence exclusive ainsi qu'aux règles d'intérim. Aux termes du premier de ces arrêtés, ont été créées une unité de contrôle Nord et une unité Sud ainsi qu'une unité de lutte contre le travail illégal, chacune des deux unités Nord et Sud étant composées de huit sections, dont deux sectorielles. M. A...s'est vu affecté à la section 8 de l'unité de contrôle Nord, dans une section spécialisée nouvellement créée, dont la compétence couvre les entreprises du secteur du bâtiment et des travaux publics. Contestant son affectation dans une section spécialisée, il a attaqué le second des arrêtés du 24 juillet 2014, en ce qu'il prévoit sa nomination au sein de la 8è section de l'unité de contrôle Nord. Il fait appel du jugement du tribunal administratif de La Réunion du 21 avril 2016, qui a rejeté sa demande.

2. Les mesures prises à l'égard d'agents publics qui, compte tenu de leurs effets, ne peuvent être regardées comme leur faisant grief, constituent de simples mesures d'ordre intérieur insusceptibles de recours. Il en va ainsi des mesures qui, tout en modifiant leur affectation ou les tâches qu'ils ont à accomplir, ne portent pas atteinte aux droits et prérogatives qu'ils tiennent de leur statut ou à l'exercice de leurs droits et libertés fondamentaux, ni n'emportent perte de responsabilité ou de rémunération. Le recours contre de telles mesures, à moins qu'elles ne traduisent une discrimination, est irrecevable.

3. Il ne ressort pas des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas allégué, que la nouvelle affectation de M. A...entraînerait une perte de rémunération, ou une diminution de ses responsabilités, la DIECCTE ayant fait valoir en première instance sans être contredite que les agents de contrôle disposeront au sein des nouvelles unités des mêmes moyens tant matériels que juridiques qu'antérieurement et bénéficieront en outre de nouveaux moyens d'appui et d'accompagnement. Il ressort en revanche des pièces du dossier qu'à l'issue de sa nouvelle affectation, M. A...continuera d'exercer ses fonctions à Saint-Denis, comme c'était le cas dans son précédent poste et comme il l'avait d'ailleurs demandé. A cet égard, il n'allègue au demeurant d'aucune difficulté dans sa situation personnelle qui serait entraînée par son nouveau poste. Sa nouvelle affectation n'est ainsi pas de nature à porter atteinte à ses droits statutaires, ni à ses libertés ou droits fondamentaux. Il n'est pas non plus démontré que l'affectation donnée à M. A...ait été dictée par une volonté de le sanctionner en lui faisant grief de son activité syndicale. En effet, comme le fait valoir l'administration, et alors qu'un agent public n'a aucun droit acquis au maintien du poste sur lequel il était affecté, l'affectation contestée se place dans le cadre d'une réforme globale de l'organisation territoriale des services de l'inspection du travail. M. A...n'établit ainsi pas que cette affectation ne répondrait pas au seul intérêt du service ou qu'il se verrait, dans le cadre de ses nouvelles fonctions, confier des tâches qui ne sont pas au nombre de celles qui peuvent être confiées au cadre d'emplois dont il relève. Au surplus, si M. A...excipe, par voie d'exception, de l'illégalité de l'arrêté du 26 mars 2014 au regard du décret du 20 mars 2014, il est constant que, par un arrêt du 30 décembre 2015, le Conseil d'Etat a rejeté les recours en excès de pouvoir de plusieurs syndicats, dirigés contre le décret du 20 mars 2014 mais aussi contre l'arrêté du 26 mai 2014, notamment en ce qu'ils contestaient la légalité de la nouvelle organisation mise en place. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal administratif a considéré que la mesure litigieuse constituait, non une mutation ou une sanction déguisée, mais une simple mesure d'ordre intérieur, donc insusceptible de recours.

4. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

5. Par voie de conséquence, et en tout état de cause, la conclusion présentée par M. A..., tendant à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat les entiers dépens, ne peut être accueillie.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre du travail. Copie en sera adressée à la direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de La Réunion.

Délibéré après l'audience du 8 octobre 2018 à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Pierre Bentolila, président-assesseur,

Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 novembre 2018.

Le rapporteur,

Florence Rey-GabriacLe président,

Pierre Larroumec

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre du travail, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

5

N° 16BX02323


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX02323
Date de la décision : 05/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-03-03 Fonctionnaires et agents publics. Entrée en service. Nominations.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-11-05;16bx02323 ?
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