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26/10/2018 | FRANCE | N°16BX02540

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre - formation à 3, 26 octobre 2018, 16BX02540


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...E...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 31 octobre 2012 par lequel le maire de la commune de Tournefeuille a délivré à M. D...A...le permis d'aménager qu'il avait sollicité pour un lotissement de deux lots à usage d'habitation, le permis d'aménager modificatif délivré le 22 avril 2013, ainsi que la décision rejetant implicitement le recours gracieux exercé à l'encontre du permis d'aménager modificatif.

Par un jugement n° 1304451 du 27 mai 2016, le tr

ibunal administratif de Toulouse a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...E...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 31 octobre 2012 par lequel le maire de la commune de Tournefeuille a délivré à M. D...A...le permis d'aménager qu'il avait sollicité pour un lotissement de deux lots à usage d'habitation, le permis d'aménager modificatif délivré le 22 avril 2013, ainsi que la décision rejetant implicitement le recours gracieux exercé à l'encontre du permis d'aménager modificatif.

Par un jugement n° 1304451 du 27 mai 2016, le tribunal administratif de Toulouse a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête de M. E...dirigées contre l'arrêté du 22 avril 2013 et contre la décision implicite de rejet de son recours gracieux et annulé l'arrêté du 31 octobre 2012 portant permis d'aménager.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 juillet 2016, et des mémoires complémentaires, enregistrés respectivement les 27 octobre 2016 et 1er décembre 2017, M.A..., représenté par la SCP Bouyssou et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 27 mai 2016 en tant qu'il a annulé le permis d'aménager qui lui a été délivré le 31 octobre 2012 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. E...devant le tribunal administratif de Toulouse ;

3°) de mettre à la charge de M. E...une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il a qualité pour faire appel et la requête a été enregistrée dans le délai d'appel ;

- l'appelant, défendeur en première instance, qui n'a pas produit d'observations et a été considéré pour cette raison comme ayant acquiescé aux fait allégués dans la demande, demeure recevable à contester en appel la matérialité de ces faits ;

- il peut présenter pour la première fois en appel des justifications pour contester la matérialité des faits ;

- la demande était irrecevable car tendant à l'annulation de plusieurs décisions ;

- la demande était tardive compte tenu de l'affichage régulier du permis en litige ; en outre, le demandeur a manifesté sa connaissance du permis en litige à l'occasion du recours gracieux contre le permis modificatif finalement retiré ; en outre, la tardiveté de la demande de première instance est d'ordre public ;

- les dispositions de l'article UC3 du plan local d'urbanisme relatives aux accès et voiries n'étaient pas applicables au projet en litige ;

- l'accès, la voie de desserte interne, les places de stationnement et le cheminement piétons prévus par le projet respectent les dispositions du plan local d'urbanisme et de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- le maire n'était pas lié par l'avis des services de Toulouse métropole ;

- le dossier de demande était complet ;

- le projet ne conduit pas à la moindre occupation du domaine public ; aucune disposition ne prévoit que, même en cas d'obligation de disposer d'une permission de voirie, celle-ci doive figurer dans le dossier de demande ;

- l'aire de présentation des ordures ne constitue pas une construction au sens de l'article UC6 du plan local d'urbanisme ; elle doit en outre être directement accessible depuis l'espace public en application de l'article UC4.3 du plan local d'urbanisme ;

- le permis en litige ne portant pas sur des constructions, l'article UC12 du plan local d'urbanisme est inapplicable en l'espèce ;

- les dispositions de l'article UC13 du plan local d'urbanisme invoquées par le requérant sont inapplicables en l'espèce.

Par des mémoires, enregistrés respectivement le 22 novembre 2016 et le 14 novembre 2017, la commune de Tournefeuille, représentée par le cabinet Depuy, conclut à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 27 mai 2016, au rejet de la demande de première instance de M. E...et à ce que soit mise à la charge de M. E...une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance était tardive en application de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme ;

- le demandeur ne justifiait pas d'un intérêt à agir ;

- elle n'était pas liée par l'avis rendu sur le projet par Toulouse métropole ;

- ni la voie interne du projet, ni les places de stationnement, ni l'accès à la voie publique ne posent de problèmes de sécurité ;

- le dossier de demande était complet ;

- l'obtention d'une permission de voirie n'est pas un préalable à l'obtention d'un permis d'aménager ;

- l'implantation de l'aire de présentation des ordures ménagères en limite de terrain est imposée par les articles 4 et 6 du plan local d'urbanisme ;

- le nombre et l'emplacement des places de stationnement pour les visiteurs respectent l'article UC12 du plan local d'urbanisme ;

- le projet respecte les dispositions de l'article UC13 du plan local d'urbanisme.

Par un mémoire, enregistré le 2 octobre 2017, M.E..., représenté par la SCP Courrech et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. A... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- dès lorsqu'il s'est abstenu de toute défense en première instance, M. A...doit être réputé avoir acquiescé aux faits ;

- l'appel de la commune est tardif ;

- la demande pouvait être dirigée contre plusieurs actes dès lors qu'ils avaient un lien entre eux ;

- le pétitionnaire n'établit pas que l'affichage du permis en litige a été régulier et continu pendant une période de deux mois ;

- la mention du permis initial dans le recours gracieux formé à l'encontre du permis modificatif ne saurait avoir fait courir le délai de recours concernant le permis initial ;

- les prescriptions de l'article UC3 du plan local d'urbanisme relatives aux voies sont bien applicables au projet en litige ;

- le tribunal n'a pas considéré que l'avis des services de Toulouse métropole liait le maire ;

- l'accès à la voie publique présente des risques pour les usagers, en méconnaissance de l'article UC3 du plan local d'urbanisme et de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- la notice du dossier de demande est insuffisante au regard des exigences des articles R. 441-2 à R. 441-4 du code de l'urbanisme ;

- le dossier de demande ne comportait pas l'engagement de constituer une association syndicale, en méconnaissance des articles R. 442-7 et R. 442-8 du code de l'urbanisme ;

- le pétitionnaire aurait dû solliciter et obtenir une permission de voirie avant la délivrance du permis en litige ;

- l'implantation de l'aire de présentation des ordures ménagères ne respecte pas les exigences de l'article UC6 du plan local d'urbanisme ;

- le nombre et l'emplacement des places de stationnement pour les visiteurs méconnaissent les dispositions de l'article UC12 du plan local d'urbanisme ;

- la suppression d'un arbre sans remplacement prévue par le projet méconnaît le point 2.1 de l'article UC13 du plan local d'urbanisme ;

- le projet ne prévoit pas de plantations le long de la voie structurante, en méconnaissance du point 2.3 de l'article UC13 du plan local d'urbanisme ;

- les aires de stationnement ne sont pas plantées, en méconnaissance du point 2.4 de l'article UC13 du plan local d'urbanisme ;

- le projet ne prévoit pas de jardin planté, en méconnaissance du point 2.6 de l'article UC13 du plan local d'urbanisme.

Par ordonnance du 3 octobre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 15 décembre 2017 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Romain Roussel, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Sabrina Ladoire, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant la commune de Tournefeuille, et de Me F..., représentant M.E.en litige sont rejetées

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 31 octobre 2012, le maire de Tournefeuille a délivré à M. A...le permis d'aménager qu'il avait sollicité pour la création d'un lotissement de deux lots à usage d'habitation. Par un jugement du 27 mai 2016, le tribunal administratif de Toulouse a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la demande de M. E...tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 avril 2013 portant permis d'aménager modificatif et a annulé l'arrêté du 31 octobre 2012 portant permis d'aménager initial. M. A...relève appel du jugement en tant qu'il a annulé l'arrêté du 31 octobre 2012.

Sur la recevabilité des conclusions présentées par la commune de Tournefeuille :

2. Il ressort des pièces du dossier que la commune de Tournefeuille s'est vu notifier le jugement attaqué le 2 juin 2016. Par son " mémoire en réponse ", enregistré au greffe de la cour le 22 novembre 2016, la commune de Tournefeuille a expressément conclu à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Toulouse et au rejet de la demande de première instance de M.E.en litige sont rejetées Ces conclusions d'appel, présentées après expiration du délai d'appel, sont tardives et, par suite, irrecevables.

Sur la recevabilité des conclusions présentées par M.A... :

3. En premier lieu, d'une part, aux termes du premier alinéa de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée, alors même qu'elle n'aurait produit aucune défense, peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance ". D'autre part, lorsqu'un tiers saisit un tribunal administratif d'une demande tendant à l'annulation d'une autorisation administrative individuelle, le tribunal doit appeler dans l'instance la personne qui a délivré l'autorisation attaquée ainsi que le bénéficiaire de celle-ci, la communication de la demande conférant à ces personnes, conformément aux dispositions de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, la qualité de parties en défense qui les rend recevables à faire appel du jugement annulant l'autorisation, alors même qu'elles n'auraient produit aucune défense en première instance.

4. Dans ces conditions, alors même qu'il n'avait pas produit d'observations en première instance, M. A...est recevable à faire appel du jugement attaqué.

Au fond :

5. La circonstance que le défendeur en première instance n'a pas produit d'observations, quand bien même il aurait été considéré, par application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, comme ayant acquiescé aux faits, ne lui interdit pas de contester en appel la matérialité des faits.

6. Il en résulte que M. E...peut produire, pour la première fois en appel, de nouvelles pièces tendant à établir l'expiration du délai de recours devant le tribunal.

7. Aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ". Ce dernier article dispose que " Mention du permis explicite ou tacite ou de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté ou dès la date à laquelle le permis tacite ou la décision de non-opposition à la déclaration préalable est acquis et pendant toute la durée du chantier. (...) / Cet affichage mentionne également l'obligation, prévue à peine d'irrecevabilité par l'article R. 600-1, de notifier tout recours administratif ou tout recours contentieux à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ou de la décision prise sur la déclaration préalable. (...) / Un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme règle le contenu et les formes de l'affichage ". Aux termes de l'article A. 425-15 du même code : " L'affichage sur le terrain du permis de construire, d'aménager ou de démolir explicite ou tacite ou l'affichage de la déclaration préalable, prévu par l'article R. 424-15, est assuré par les soins du bénéficiaire du permis ou du déclarant sur un panneau rectangulaire dont les dimensions sont supérieures à 80 centimètres ". Aux termes de l'article A. 424-16 : " Le panneau prévu à l'article A. 424-15 indique le nom, la raison sociale ou la dénomination sociale du bénéficiaire, le nom de l'architecte auteur du projet architectural, la date de délivrance, le numéro du permis, la nature du projet et la superficie du terrain ainsi que l'adresse de la mairie où le dossier peut être consulté. / Il indique également, en fonction de la nature du projet : (...) / b) Si le projet porte sur un lotissement, le nombre maximum de lots prévus (...) ". Aux termes de l'article A. 424-17 :

" Le panneau d'affichage comprend la mention suivante : "Droit de recours : "Le délai de recours contentieux est de deux mois à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain du présent panneau (art. R. 600-2 du code de l'urbanisme). "Tout recours administratif ou tout recours contentieux doit, à peine d'irrecevabilité, être notifié à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ou de la décision prise sur la déclaration préalable. Cette notification doit être adressée par lettre recommandée avec accusé de réception dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du recours (art. R. 600-1 du code de l'urbanisme)." ".

8. M. A...produit le constat qu'il a fait établir par un huissier de justice qui est intervenu à trois reprises, les 6 novembre 2012, 10 décembre 2012 et 7 janvier 2013, dont il ressort que l'affichage sur le terrain d'assiette du projet du permis en litige comportait l'ensemble des mentions prévues par les dispositions précitées, y compris celles relatives au droit de recours, et était visible depuis la voie publique. Si le panneau d'affichage utilisé a été amputé de sa partie supérieure sur laquelle ne figurait que la mention " permis de construire ", cette seule circonstance n' a pu avoir pour effet d'empêcher les tiers d'identifier le permis en cause et d'apprécier la consistance du projet qu'il autorise. En outre, M. E...n'apporte aucun élément à l'appui de sa contestation de la continuité de cet affichage.

9. Dans ces conditions, l'affichage du permis d'aménager en litige était complet et visible depuis la voie publique à compter du 6 novembre 2012. Dès lors, la demande de première instance, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Toulouse le 1er octobre 2013 était tardive et donc irrecevable.

10. Il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 31 octobre 2012.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M.A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. E...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de M. E...une somme de 1 500 euros à verser à M. A...sur ce même fondement. Enfin, les conclusions de la commune de Tournefeuille tendant à l'application de ces mêmes dispositions ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE

Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 27 mai 2016 sont annulés.

Article 2 : Les conclusions de la demande susvisée présentées par M. E...devant le tribunal administratif de Toulouse demeurant.en litige sont rejetées

Article 3 : M. E...versera à M. A...une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Tournefeuille et par M. E...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A..., à M. C... E...et à la commune de Tournefeuille.

Délibéré après l'audience du 28 septembre 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Pouget, présidente,

Mme Sylvande Perdu, premier conseiller,

M. Romain Roussel, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 26 octobre 2018.

Le rapporteur,

Romain Roussel

La présidente,

Marianne Pouget

La greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 16BX02540


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX02540
Date de la décision : 26/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04 Urbanisme et aménagement du territoire. Autorisations d`utilisation des sols diverses.


Composition du Tribunal
Président : Mme POUGET M.
Rapporteur ?: M. Romain ROUSSEL
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : SCP BOUYSSOU et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-10-26;16bx02540 ?
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