Vu la procédure suivante :
Par un arrêt du 28 juin 2018, la cour, avant dire droit sur la requête de Mme A...C...épouse B...dirigée contre le jugement n° 1705460 du 15 février 2018 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux rejetant sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet de la Gironde du 4 décembre 2017, a invité le préfet à produire, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, ses observations au fond sur le moyen tiré de ce que le refus de séjour opposé à Mme C...épouse B...méconnaît l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire enregistré le 19 juillet 2018, le préfet de la Gironde soutient que :
- il ne peut lui être reproché d'avoir méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile puisque le refus de séjour contesté a été pris avant que Mme C...épouse B...ne présente une demande sur le fondement de ces dispositions ;
- bien que l'intéressée n'ait produit qu'une attestation d'ordre paramédical, il a été décidé d'instruire sa demande de titre de séjour sur le fondement desdites dispositions.
Par un mémoire enregistré le 23 juillet 2018, Mme C...épouse B...maintient les conclusions de sa requête par les mêmes moyens ; elle fait valoir en outre que le préfet ne présente toujours aucune défense au fond sur le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Mme B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 avril 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridictionnelle.
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Aymard de Malafosse, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C...épouseB..., ressortissante albanaise, est entrée en France de manière irrégulière accompagnée de son époux et de leurs deux enfants et a présenté une demande d'asile qui a été définitivement rejetée le 9 novembre 2017 par la Cour nationale du droit d'asile. Par un arrêté du 4 décembre 2017, le préfet de la Gironde lui a refusé le séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi. Mme C...épouse B...a fait appel du jugement du 15 février 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Par un arrêt du 28 juin 2018, la cour, avant dire droit sur la requête de Mme C... épouse B...a invité le préfet à produire ses observations au fond sur le moyen tiré de ce que le refus de séjour opposé à la requérante méconnaît l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. L'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable dispose : " A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. ".
3. Ainsi qu'il a été dit dans l'arrêt avant dire droit du 28 juin 2018, le préfet doit être regardé comme ayant refusé, par l'arrêté contesté du 4 décembre 2017, la demande de titre de séjour de Mme C...épouse B...au regard notamment de ces dispositions, et ce, quand bien même l'intéressée n'avait pas encore, à la date de cet arrêté, présenté une telle demande. Il appartient ainsi au préfet, comme il y a été invité par cet arrêt avant dire droit, d'indiquer les motifs pour lesquels, compte tenu de l'ensemble des éléments, notamment d'ordre médical, produits devant le juge par Mme C...épouseB..., il estime que cette dernière ne peut se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. A l'appui de son moyen tiré de la méconnaissance du 11° dudit article L. 313-11, Mme C...épouse B...produit des documents émanant de praticiens du centre hospitalier Charles Perrens desquels il ressort qu'elle souffre notamment d'un stress post-traumatique avec des éléments psychotiques et que l'arrêt des soins qui lui sont actuellement prodigués aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Elle soutient en outre, en produisant un rapport d'une mission exploratoire en Albanie, qu'elle ne pourrait effectivement bénéficier dans ce pays de soins appropriés à son état. Le préfet ne défend pas au fond, contrairement à l'invitation qui lui a été faite, et ne fait état d'aucune considération qui conduirait à tenir pour inexactes les affirmations de Mme C...épouse B...et les éléments sur lesquels elle se fonde. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être accueilli, ce qui entraîne l'annulation du refus de titre de séjour opposé à Mme C...épouse B...par l'arrêté litigieux ainsi que, par voie de conséquence, l'annulation de la mesure d'éloignement avec fixation du pays de renvoi contenue dans ce même arrêté.
5. Il résulte de ce qui précède que Mme C...épouse B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Dans les circonstances de l'espèce, en l'absence d'éléments fournis par Mme C... épouse B...sur son état de santé à la date du présent arrêt, il n'y a pas lieu d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour, mais de procéder au réexamen de sa situation dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les conclusions présentées au titre du 2ème alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
7. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Le Guédard, avocate de Mme C...épouseB..., sous réserve de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de la somme de 1 200 euros au titre du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1705460 du 15 février 2018 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux et l'arrêté du préfet de la Gironde du 4 décembre 2017 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Gironde de réexaminer la situation de Mme C...épouse B...dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me Le Guédard, avocate de Mme C...épouseB..., sous réserve de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, la somme de 1 200 euros au titre du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...épouse B...au préfet de la Gironde et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 11 octobre 2018 à laquelle siégeaient :
M. Aymard de Malafosse, président,
M. Laurent Pouget, président-assesseur,
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 25 octobre 2018.
Le président-assesseur,
Laurent POUGET
Le président-rapporteur,
Aymard de MALAFOSSE Le greffier,
Christophe PELLETIER
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX01130