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09/10/2018 | FRANCE | N°16BX00395

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 09 octobre 2018, 16BX00395


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association de sauvegarde de l'église de Castels et du château de Fages a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler le certificat d'urbanisme opérationnel délivré le 13 novembre 2014 par le maire de Saint-Cyprien à M. B...E...et Mme D...C....

Par un jugement n° 1404926 du 22 décembre 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés le 29 janvier 2016, le 27 juil

let 2016 et le 13 octobre 2016, l'association de sauvegarde de l'église de Castels et du châtea...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association de sauvegarde de l'église de Castels et du château de Fages a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler le certificat d'urbanisme opérationnel délivré le 13 novembre 2014 par le maire de Saint-Cyprien à M. B...E...et Mme D...C....

Par un jugement n° 1404926 du 22 décembre 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés le 29 janvier 2016, le 27 juillet 2016 et le 13 octobre 2016, l'association de sauvegarde de l'église de Castels et du château de Fages, représentée par MeF..., demande à la cour dans le dernier état de ses conclusions :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif du 22 décembre 2015 ;

2°) de faire droit à ses conclusions de première instance ;

3°) de lui allouer la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, en ce qui concerne la régularité du jugement attaqué, que :

- le tribunal administratif a omis de statuer sur le moyen soulevé devant lui et tiré de ce que le certificat d'urbanisme en litige n'a pas mentionné l'existence d'une procédure de classement comme site protégé du secteur dans lequel se trouve le terrain d'assiette du projet.

Elle soutient, au fond, que :

- le certificat d'urbanisme a été délivré sur la base d'un avis du maire incomplet et erroné dès lors qu'il ne mentionne pas que le terrain d'assiette du projet est situé dans un espace boisé ou forestier ; c'est pourtant sur la base d'un avis comportant cette précision qu'un certificat d'urbanisme négatif a été délivré à un tiers au motif que le terrain concerné était inclus dans une zone à risque de feux de forêt ;

- le certificat d'urbanisme en litige aurait dû viser les articles L. 341-1 et L. 642-1 du code du patrimoine dans la mesure où le terrain d'assiette du projet se situe à l'intérieur d'un secteur ayant fait l'objet d'une procédure de classement au titre des sites protégés ;

- la délivrance du certificat en litige alors qu'un certificat d'urbanisme négatif a été délivré pour un autre projet révèle une atteinte au principe d'égalité ;

- le certificat d'urbanisme est illégal dès lors qu'il ne mentionne pas la possibilité pour l'autorité compétente d'opposer un sursis à statuer à la demande de permis de construire, étant donné qu'un plan local d'urbanisme était en cours d'élaboration sur le territoire de la commune ; la mention du sursis à statuer s'imposait dès lors que les travaux d'élaboration du plan local d'urbanisme étaient suffisamment avancés à la date du certificat litigieux ;

- le certificat méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, relatif à la protection de la sécurité publique, compte tenu que le terrain d'assiette du projet est soumis à un risque d'incendie.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 27 juin 2016 et le 25 août 2016, la commune de Saint-Cyprien, représentée par la SCP Noyer-Cazacarra, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'association requérante le paiement de la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, en ce qui concerne la régularité du jugement attaqué, que :

- contrairement à ce que soutient l'association requérante, le tribunal a bien répondu à son moyen tiré de l'existence d'une procédure de classement au titre des sites.

Elle soutient, au fond, que :

- les insuffisances qui entachaient éventuellement l'avis du maire n'ont pu induire en erreur le service instructeur qui a disposé d'autres pièces, et notamment du plan cadastral, pour se prononcer en toute connaissance de cause ; au demeurant, l'avis du maire n'était pas requis dès lors que le certificat a été délivré par ledit maire au nom de la commune ; et en tout état de cause, le terrain d'assiette du projet n'est pas situé en zone boisée ou forestière ;

- le certificat d'urbanisme en litige mentionne bien, en son article 1er, le projet de classement de site qui concerne la commune de Saint-Cyprien ;

- le certificat d'urbanisme négatif délivré à un tiers le 22 décembre 2015 concerne une parcelle ayant des caractéristiques différentes, au regard du risque incendie, de celles du terrain d'assiette du projet ; sa délivrance ne révèle donc pas l'illégalité du certificat contesté ;

- à la date du certificat contesté, l'élaboration du plan local d'urbanisme communal n'avait pas atteint un stade suffisamment avancé ; le certificat d'urbanisme en litige n'avait donc pas à mentionner que l'autorité compétente pour statuer sur la demande de permis avait la possibilité d'opposer à celle-ci un sursis à statuer.

Par ordonnance du 13 octobre 2016, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 18 novembre 2016 à 12h00.

Un mémoire a été présenté pour l'association de sauvegarde de l'église de Castels et du château de Fages le 16 juillet 2018, soit postérieurement à la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Frédéric Faïck,

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant la commune de Saint-Cyprien.

Considérant ce qui suit :

1. M. E...et Mme C...sont propriétaires des parcelles cadastrées section D n° 345 et 346 situées au lieu-dit " Le Querel du Meynet " sur le territoire de la commune de Saint-Cyprien. Le 18 août 2014, ils ont déposé en mairie une demande de certificat d'urbanisme opérationnel, sur le fondement des dispositions du b) de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme, afin de savoir si la réglementation d'urbanisme ne s'opposait pas à leur projet de construction d'une maison d'habitation sur leurs parcelles. Le 13 novembre 2014, le maire de Saint-Cyprien a délivré, au nom de la commune, un certificat d'urbanisme déclarant réalisable le projet de M. E...et MmeC.... L'association de sauvegarde de l'église de Castels et du château de Fages a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler le certificat d'urbanisme du 13 novembre 2014. Elle relève appel du jugement rendu le 22 décembre 2015 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. L'omission du visa d'un texte ou d'une décision ne constitue pas une irrégularité de nature à entraîner l'annulation d'un acte administratif pour excès de pouvoir. Dès lors, le tribunal n'était pas tenu de répondre au moyen, inopérant, tiré de ce que le certificat d'urbanisme du 13 novembre 2014 aurait dû viser les dispositions du code de l'environnement et la délibération du conseil municipal du 6 novembre 2013 relatifs à une procédure, alors en cours, de classement en sites d'intérêt général susceptible de concerner notamment le terrain d'assiette du projet. Au demeurant, les premiers juges ont bien répondu à ce moyen au point 4 de leur décision.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, l'avis que le maire de Saint-Cyprien a rendu le 19 août 2014 sur la demande de certificat d'urbanisme indiquait notamment que le terrain concerné est situé dans un secteur urbanisable de la carte communale, qu'il est desservi par la voirie et les réseaux, qu'il est accessible aux services d'incendie et qu'il se trouve inclus dans une zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le service chargé d'instruire la demande de certificat aurait été induit en erreur quant aux caractéristiques du terrain d'assiette du projet du seul fait que le maire n'a pas indiqué que celui-ci est situé dans une zone boisée ou forestière. Par suite, le moyen tiré du caractère incomplet ou erroné de l'avis du 19 août 2014 doit être écarté en tout état de cause.

4. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 2 que le moyen tiré de ce que le certificat en litige ne mentionne pas les dispositions du code de l'environnement applicables à l'opération " Grand Site ", en cours à la date de sa signature, est inopérant.

3. En troisième lieu, au motif qu'un certificat d'urbanisme négatif a été délivré le 22 décembre 2015 pour un autre terrain situé dans la commune de Saint-Cyprien, l'association requérante soutient que la décision contestée méconnaît le principe d'égalité. Un tel moyen est, en tout état de cause, inopérant dès lors que le terrain concerné par le certificat du 22 décembre 2015, situé à environ 1,5 km du terrain d'assiette du projet des requérants, est dans une situation différente de ce dernier.

4. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ; b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. Lorsqu'une demande d'autorisation ou une déclaration préalable est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d'un certificat d'urbanisme, les dispositions d'urbanisme, le régime des taxes et participations d'urbanisme ainsi que les limitations administratives au droit de propriété tels qu'ils existaient à la date du certificat ne peuvent être remis en cause à l'exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique. Lorsque le projet est soumis à avis ou accord d'un service de l'Etat, les certificats d'urbanisme le mentionnent expressément. Il en est de même lorsqu'un sursis à statuer serait opposable à une déclaration préalable ou à une demande de permis (...) ". Aux termes de l'article L. 111-7 dudit code : " Il peut être sursis à statuer sur toute demande d'autorisation concernant des travaux, constructions ou installations dans les cas prévus (...) par les articles L. 123-6 (...) du présent code ". Aux termes de l'article L. 123-6 de ce code : " A compter de la publication de la délibération prescrivant l'élaboration d'un plan local d'urbanisme, l'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer (...) sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan. ". Enfin, l'article A. 410-4 du code de l'urbanisme dispose que : " Le certificat d'urbanisme précise : (...) e) Si un sursis à statuer serait opposable à une déclaration préalable ou à une demande de permis (...) ".

5. Il résulte de ces dispositions que le certificat d'urbanisme a pour effet de garantir à son titulaire un droit à voir toute demande d'autorisation ou de déclaration préalable déposée dans le délai indiqué examinée au regard des règles d'urbanisme applicables à la date de la délivrance du certificat. Parmi ces règles, figure la possibilité, lorsqu'à la date de délivrance du certificat est remplie l'une des conditions prévue à l'article L. 111-7 du code l'urbanisme, d'opposer un sursis à statuer à une déclaration préalable ou à une demande de permis. L'omission de la mention d'une telle possibilité dans le certificat d'urbanisme peut être, en vertu du cinquième alinéa de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme et du e) de l'article A. 410-4 du même code, de nature à constituer un motif d'illégalité de ce certificat si, à la date de sa délivrance, le projet de plan local d'urbanisme était suffisamment avancé pour permettre à l'autorité compétente de déceler une éventuelle incompatibilité avec les travaux envisagés.

6. Le conseil municipal de la commune de Saint-Cyprien a adopté, le 7 novembre 2012, une délibération prescrivant l'adoption d'un plan local d'urbanisme sur le territoire communal. Par une nouvelle délibération du 9 octobre 2013, le conseil municipal a retenu le bureau d'études chargé d'élaborer ce nouveau plan. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'au 13 novembre 2014, date du certificat en litige, les orientations fondamentales du document d'urbanisme n'avaient pas encore été définies dans un projet d'aménagement et de développement durable et qu'un projet avancé de zonage faisait défaut. Dans ces conditions, l'autorité compétente n'était pas en mesure de déceler une incompatibilité éventuelle entre le projet décrit dans la demande de certificat et le plan local d'urbanisme en cours d'élaboration. Par suite, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que le certificat d'urbanisme du 13 novembre 2014 est illégal dès lors qu'il ne mentionne pas qu'une demande d'autorisation d'urbanisme déposée ultérieurement pourrait se voir opposer un sursis à statuer.

7. En cinquième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à (...) la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. "

8. Les parcelles n° 345 et 346 appartenant aux époux E...C..., bien que bordées sur trois de leurs côtés par des boisements, sont partiellement à l'état de prairie et directement desservies par la voie publique. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elles présenteraient une difficulté particulière en termes d'accessibilité pour les engins de lutte contre l'incendie. Dans ces conditions, en délivrant le certificat litigieux, qui par lui-même ne vaut d'ailleurs pas autorisation de construire, le maire de Saint-Cyprien n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 précité du code de l'urbanisme.

9. Il résulte de tout ce qui précède que l'association de sauvegarde de l'église de Castels et du château de Fages n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Les conclusions présentées par l'association requérante sur le fondement des dispositions rappelées ci-dessus doivent être rejetées dès lors que la commune de Saint-Cyprien n'est pas la partie perdante à l'instance d'appel. En revanche, il y a lieu de faire application de ces mêmes dispositions en mettant à la charge de l'association la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune défenderesse et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'association de sauvegarde de l'église de Castels et du château de Fages est rejetée.

Article 2 : L'association de sauvegarde de l'église de Castels et du château de Fages versera à la commune de Saint-Cyprien la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association de sauvegarde de l'église de Castels et du château de Fages, à la commune de Saint-Cyprien, à M. B...E...et à Mme D...C....

Délibéré après l'audience du 11 septembre 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. Frédéric Faïck, premier conseiller,

Mme Florence Madelaigue, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 octobre 2018.

Le rapporteur,

Frédéric FaïckLe président,

Elisabeth JayatLe greffier,

Florence Deligey

La République mande et ordonne au préfet de la Dordogne en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 16BX00395


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX00395
Date de la décision : 09/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-025 Urbanisme et aménagement du territoire. Certificat d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: M. Frédéric FAÏCK
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : CHAZEAU - PARIS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-10-09;16bx00395 ?
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