Vu la procédure suivante :
Par jugement du 10 avril 2013 le tribunal administratif de la Guyane a rejeté la requête de M. A...C...tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 novembre 2011 par lequel le président du conseil général de la Guyane l'a radié des cadres pour abandon de poste.
Par un arrêt n° 13BX01492 du 30 juin 2015, la cour a annulé ce jugement et cet arrêté et a enjoint au département de la Guyane de réintégrer M. C...à compter du
1er décembre 2011.
M. C...a saisi la cour, par lettre du 27 octobre 2016, d'une demande tendant à obtenir l'exécution de cet arrêt.
Par ordonnance du 25 avril 2017 le président de la cour administrative d'appel de Bordeaux a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle.
Par ordonnance du 16 novembre 2017 la clôture de l'instruction a été fixée
au 22 décembre 2017 à 12 h 00.
Par un mémoire, enregistré le 18 décembre 2017, M.C..., représenté par
MeB..., demande à la cour :
1°) d'enjoindre à la collectivité territoriale de Guyane, venant aux droits du département de la Guyane, de reconstituer sa carrière et de l'indemniser de ses préjudices, sous astreinte de 250 euros par jour de retard, dans un délai de huit jours à compter de l'arrêt à intervenir ;
2°) de mettre à la charge de la collectivité territoriale de Guyane une
somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il est en droit d'obtenir l'indemnisation des préjudices qu'il a subis en raison de son éviction irrégulière ;
- en l'espèce, l'administration ne semble pas disposer à lui accorder cette indemnisation ;
- en conséquence, il convient de lui ordonner d'y procéder, sous astreinte.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rey-Bèthbéder, président-rapporteur,
- et les conclusions de M. Katz, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. C...a été radié des cadres pour abandon de poste par arrêté du président du conseil général du département de la Guyane du 9 novembre 2011. Par jugement
du 10 avril 2013 le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Cependant, par un arrêt 14BX01492 du 30 juin 2015 la présente cour a annulé ce jugement et cet arrêté et a enjoint au département de la Guyane de réintégrer M.C.... Ce dernier demande à la cour d'assurer l'exécution de son arrêt en enjoignant à la collectivité territoriale de Guyane, venant aux droits du département précité, de reconstituer sa carrière en l'indemnisant des préjudices subis du fait de son éviction irrégulière.
Sur les conclusions tendant à obtenir l'exécution de l'arrêt de la cour :
2. L'article L. 911-4 du code de justice administrative dispose que : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. / (...) / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte ".
3. D'une part, il résulte de ces dispositions qu'en l'absence de définition, par le jugement ou l'arrêt dont l'exécution lui est demandée, des mesures qu'implique nécessairement cette décision, il appartient au juge saisi sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative d'y procéder lui-même en tenant compte des situations de droit et de fait existant à la date de sa décision. Si la décision faisant l'objet de la demande d'exécution prescrit déjà de telles mesures en application de l'article L. 911-1 du même code, il peut, dans l'hypothèse où elles seraient entachées d'une obscurité ou d'une ambiguïté, en préciser la portée. Le cas échéant, il lui appartient aussi d'en édicter de nouvelles en se plaçant, de même, à la date de sa décision, sans toutefois pouvoir remettre en cause celles qui ont précédemment été prescrites ni méconnaître l'autorité qui s'attache aux motifs qui sont le soutien nécessaire du dispositif de la décision juridictionnelle dont l'exécution lui est demandée. En particulier, la rectification des erreurs de droit ou de fait dont serait entachée la décision en cause ne peut procéder que de l'exercice, dans les délais fixés par les dispositions applicables, des voies de recours ouvertes contre cette décision. Il appartient, en outre, au juge saisi sur le fondement de
l'article L. 911-4 d'apprécier l'opportunité de compléter les mesures déjà prescrites ou qu'il prescrit lui-même par la fixation d'un délai d'exécution et le prononcé d'une astreinte suivi, le cas échéant, de la liquidation de celle-ci, en tenant compte tant des circonstances de droit et de fait existant à la date de sa décision que des diligences déjà accomplies par les parties tenues de procéder à l'exécution de la chose jugée ainsi que de celles qui sont encore susceptibles de l'être.
4. D'autre part et en vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre.
Sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien direct de causalité. Pour l'évaluation du montant de l'indemnité due, doit être prise en compte la perte du traitement ainsi que celle des primes et indemnités dont l'intéressé avait, pour la période en cause, une chance sérieuse de bénéficier, à l'exception de celles qui, eu égard à leur nature, à leur objet et aux conditions dans lesquelles elles sont versées, sont seulement destinées à compenser des frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif des fonctions. Il y a lieu de déduire, le cas échéant, le montant des rémunérations nettes et des allocations pour perte d'emploi qu'il a perçues au cours de la période d'éviction. La réparation intégrale du préjudice de l'intéressé peut également comprendre, à condition que l'intéressé justifie du caractère réel et certain du préjudice invoqué, celle de la réduction de droits à l'indemnisation du chômage qu'il a acquis durant la période au cours de laquelle il a été employé du fait de son éviction de son emploi avant le terme contractuellement prévu.
5. Ainsi qu'il a été dit au point 1, l'arrêté du président du conseil général du département de la Guyane du 9 novembre 2011 radiant des cadres pour abandon de
poste M. C...a été annulé par un arrêt de la cour du 10 avril 2013 qui a, de plus, enjoint à l'administration de réintégrer l'intéressé. Cette annulation et cette injonction, eu égard aux motifs qui les fondent, impliquaient nécessairement que la réintégration de M. C...fût accompagnée de la reconstitution de sa carrière et de ses droits sociaux, ce qui impliquait également de lui verser une indemnité, déterminée selon les modalités précisées au
point 4, prenant en compte la rémunération qui lui est due depuis la date de son éviction, soit
le 1er décembre 2011, jusqu'à celle de sa réintégration.
6. Il résulte de l'instruction que la collectivité territoriale de Guyane, venant aux droits du département de la Guyane, s'est bornée à réintégrer M. C...dans ses effectifs sans procéder à la reconstitution de sa carrière et de ses droits sociaux, sans lui verser quelque indemnité que ce soit et sans fournir quelque explication que ce soit à cette absence d'exécution de l'arrêt précité de la cour.
7. Dans ces conditions, il y a lieu d'enjoindre à la collectivité territoriale de Guyane de reconstituer la carrière et les droits sociaux de M. C...et de lui verser une indemnité déterminée selon les modalités précisées aux points 4 et 5. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte de 50 euros par jour de retard si cette collectivité ne justifie pas avoir, dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt, exécuté ladite injonction.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Dans les circonstances de l'espèce il y a lieu de mettre à la charge de la collectivité territoriale de Guyane une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. C...et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Il est enjoint à la collectivité territoriale de Guyane de procéder à la reconstitution de la carrière et des droits sociaux de M. C...à compter de la date de son éviction irrégulière et de lui verser une indemnité déterminée selon les modalités précisées aux points 4 et 5 du présent arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter d'un délai de quatre mois à la suite de la notification du présent arrêt.
Article 2 : La collectivité territoriale de Guyane versera à M. C...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et à la collectivité territoriale de Guyane.
Délibéré après l'audience du 25 avril 2018 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
Mme Aurélie Chauvin, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 mai 2018.
Le président-assesseur,
Didier Salvi
Le président
Éric Rey-BèthbéderLe greffier,
Vanessa Beuzelin
La République mande et ordonne au préfet de la Guyane en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 17BX01311