Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association Centre national d'enseignement agricole par correspondance (CNEAC) a demandé au tribunal administratif de Limoges de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 2008 et 2009.
Par un jugement n° 1300003 du 17 mars 2016, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 18 mai 2016, et un mémoire, enregistré le 8 mars 2016, la CNEAC, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 17 mars 2016 ;
2°) à titre principal, de prononcer la décharge des impositions en litige, et à titre subsidiaire, de prononcer la réduction des impositions litigieuses en droits, intérêts et pénalités en fonction du montant des charges justifiées ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal n'a apporté aucune réponse à son argumentation relative à la critique de la méthode mise en oeuvre par l'administration fiscale pour opérer la reconstitution du chiffre d'affaires ; il n'a pas non plus répondu aux arguments présentés au titre des frais et charges déductibles ;
- la méthode retenue par l'administration est critiquable et la détermination du chiffre d'affaires est exagérée à hauteur de 80 035 euros pour les deux exercices ;
- l'administration fiscale n'a pas pris en compte des charges déductibles dans sa reconstitution ; les chiffres retenus par son expert comptable sont plus précis ; l'ampleur des charges est confirmée par la production des bilans et comptes de résultat des années suivantes : l'administration a minimisé et n'a pas pris en compte certaines charges ; elle produit un certain nombre de factures qui n'ont pas été prises en compte par l'administration.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 novembre 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- aucune comptabilité probante n'a été retenue au cours des années en litige,
M. B...ayant détruit les documents pouvant servir de justificatifs sur la période 2007 à 2009 ; ce dernier a reconnu, au cours de l'instruction judiciaire, avoir appréhendé sur ses comptes personnels des sommes destinées à l'association ; il a ainsi délibérément confondu le patrimoine de l'association et le sien ;
- les nombreux et graves manquements constatés ont mis en évidence la gestion intéressée de l'association au sens de l'article 208 du code général des impôts ;
- compte tenu du défaut de présentation des comptes sociaux, confirmé par le rapport d'expertise et le jugement du tribunal de grande instance de Châteauroux du 11 juillet 2012, les bases d'imposition ont été taxées d'office à l'impôt sur les sociétés en s'appuyant sur les documents collectés lors des opérations de contrôle ; les éléments fournis par la requérante ne sont pas de nature à remettre en cause les impositions supplémentaires établies ; les factures produites en appel ne sont pas probantes.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 2018 :
- le rapport de Mme Marianne Pouget ;
- les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Au titre des exercices 2008 et 2009, l'administration fiscale a vérifié la comptabilité de l'association CNEAC qui exerce une activité d'enseignement privé à distance sous contrôle pédagogique de l'Etat. A l'issue de cette vérification qui a donné lieu à une proposition de vérification du 17 août 2011, le service a remis en cause la gestion désintéressée et le caractère non lucratif de l'association, et l'a assujettie à l'impôt sur les sociétés, après avoir reconstitué le bénéfice imposable de l'association. La réclamation de la requérante en date du 30 mars 2012 a été rejetée par l'administration le 31 octobre 2012. L'association CNEAC relève appel du jugement du 17 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle été assujettie.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments développés à l'appui des moyens soulevés devant eux, n'ont pas omis de répondre, pour l'écarter au point 7 du jugement attaqué, au moyen tiré de ce que la méthode d'évaluation retenue par l'administration fiscale aboutissait à une exagération du résultat comptable et à une non prise en compte de certaines charges. Par suite, le moyen relatif à l'irrégularité du jugement doit être écarté.
Sur le bien-fondé des impositions supplémentaires :
3 Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. ". Aux termes de l'article R. 193-1 du même livre : " Dans le cas prévu à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'association requérante, qui a été taxée d'office à l'impôt sur les sociétés au titre des années en litige, d'établir l'exagération des impositions mises à sa charge.
4. Il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a remis en cause le caractère désintéressé de l'association CNEAC. A supposer que l'association requérante puisse être regardée comme contestant au titre des exercices en litige le caractère lucratif de son activité et le principe de son assujettissement à l'impôt sur les sociétés, elle n'apporte à l'appui de son argumentation aucune précision qui permettrait d'en apprécier le bien-fondé.
5. En l'absence d'une comptabilité probante, le service a déterminé le résultat de l'association imposable à l'impôt sur les sociétés en se fondant sur les documents obtenus dans le cadre de son droit de communication exercé auprès du procureur de la République en application des articles L. 82 C et L. 101 du livre des procédures fiscales. Ainsi, pour reconstituer le résultat de l'association au cours de la période d'imposition en litige, le vérificateur a retenu le montant des crédits constatés sur les comptes bancaires ouverts au Crédit agricole et au Crédit mutuel au nom de l'association, desquels ont été soustraits les impayés des clients, en y ajoutant les remises de chèques sur les comptes de M.B..., son président. Par ailleurs, la reconstitution du bénéfice a été effectuée en prenant en considération les charges déductibles qui ont été justifiées soit par des virements depuis les comptes bancaires de l'association, soit par la production de factures mentionnées dans le procès-verbal d'audition n° 25, et celles qui ont été évaluées par l'administration s'agissant des frais divers de gestion et les frais de déplacements.
6. La requérante conteste la méthode retenue par le service ainsi que le montant du chiffre d'affaires arrêté pour les deux années en litige. Toutefois, elle ne produit aucun justificatif ou élément de nature à remettre en cause la méthode de la reconstitution opérée par l'administration fiscale. En particulier, elle ne démontre pas, contrairement à ses allégations, que certaines recettes auraient été comptées deux fois. De plus, elle ne peut se prévaloir du bilan comptable des années en litige établi par un cabinet d'expertise comptable postérieurement aux opérations de contrôle et qui se fonde sur des données dépourvues de valeur probante. Enfin, les éléments produits pour la première fois en appel tendant à établir que l'administration aurait omis de prendre en compte un certain nombre de charges n'ont fait l'objet d'aucun enregistrement comptable régulier et ne sont pas probants. Par suite, l'association requérante, régulièrement taxée d'office, n'apporte pas la preuve qui lui incombe, en application de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, de ce que la méthode retenue par l'administration serait radicalement viciée ou de l'exagération des impositions en litige.
7. Il résulte de tout ce qui précède que l'association CNEAC n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008 et 2009.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que l'association CNEAC demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de l'association CNEAC est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association CNEAC et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 16 mars 2018 à laquelle siégeaient :
M. Philippe Pouzoulet, président,
Mme Marianne Pouget, président-assesseur,
Mme Caroline Gaillard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 27 avril 2018.
Le rapporteur,
Marianne Pouget
Le président,
Philippe Pouzoulet
Le greffier,
Florence Deligey
La République mande et ordonne ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 16BX01649