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26/04/2018 | FRANCE | N°16BX00904

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 26 avril 2018, 16BX00904


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...G...et M. F...A...ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler la décision du 30 avril 2014 par laquelle le maire de Sauvagnon a refusé d'abroger le plan local d'urbanisme en tant qu'il classe la parcelle cadastrée section AI 203 en zone agricole.

Par un jugement n° 1401314 du 29 décembre 2015, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 10 mars 2016 et le 30 août 2017, M. G... et

M.A..., représentés par MeE..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribuna...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...G...et M. F...A...ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler la décision du 30 avril 2014 par laquelle le maire de Sauvagnon a refusé d'abroger le plan local d'urbanisme en tant qu'il classe la parcelle cadastrée section AI 203 en zone agricole.

Par un jugement n° 1401314 du 29 décembre 2015, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 10 mars 2016 et le 30 août 2017, M. G... et M.A..., représentés par MeE..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau en date du 29 décembre 2015 ;

2°) d'annuler le refus opposé par le maire de Sauvagnon le 30 avril 2014 ;

3°) d'enjoindre à la commune de Sauvagnon d'abroger le plan local d'urbanisme en tant qu'il classe la parcelle cadastrée section AI 203 en zone agricole et d'élaborer sans délai, en application de l'article L. 153-7 du code de l'urbanisme, les nouvelles dispositions de ce plan applicables à cette parcelle ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Sauvagnon la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la requête d'appel comporte une critique du bien-fondé du jugement attaqué, notamment par le moyen d'irrégularité du jugement invoqué. La fin de non-recevoir ne peut qu'être rejetée.

- l'ambiguïté de la délibération du 23 mars 2014 habilitant le maire à représenter la commune en justice ne permet pas de déterminer si le conseil municipal a entendu déléguer l'intégralité ou seulement une partie des attributions mentionnées au 16° de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales. Le maire ne peut ainsi être regardé comme ayant été régulièrement habilité pour défendre la commune dans les actions intentées contre elle. Dès lors, le tribunal aurait dû soulever d'office le défaut de qualité pour agir du maire qui ressortait de la délibération versée au dossier. Le jugement attaqué est ainsi entaché d'irrégularité ;

- la parcelle en cause, qui est à usage de prairie, ne présente pas d'intérêt agricole particulier. Elle est desservie par l'ensemble des réseaux. Elle fait partie de l'enveloppe bâtie du village et est située dans l'alignement de nombreuses constructions le long du chemin de Morlané. La circonstance qu'elle soit bordée sur sa façade sud par une vaste zone agricole est sans incidence. Seule cette parcelle est située en dehors de la zone U. Le plan d'exposition au bruit n'est pas opposé à l'édification de constructions sur ce terrain. Si la parcelle est éloignée du centre bourg, le projet d'aménagement et de développement durable rappelle que cela ne fait pas obstacle à un classement en zone constructible. Ce classement est incohérent au regard des orientations du projet d'aménagement et de développement durable, qui vise à structurer une zone urbaine cohérente autour du réseau d'assainissement. Elle constitue ainsi une dent creuse. Le commissaire enquêteur a relevé ce manque de cohérence en s'interrogeant sur la possibilité d'un classement partiel du terrain en zone U. Le classement de la parcelle cadastrée section AI 203 en zone agricole est donc entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juillet 2017, la commune de Sauvagnon, prise en la personne de son maire, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérants la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête d'appel est une copie des écritures de première instance et ne comporte aucune critique du jugement. La requête est ainsi irrecevable pour défaut de motivation ;

- la délégation habilitant le maire à représenter la commune en justice n'est pas ambigüe mais générale. Le maire étant ainsi régulièrement habilité, la fin de non-recevoir ne peut qu'être rejetée ;

- la circonstance qu'une parcelle soit desservie par les réseaux et bordée de constructions ne fait pas obstacle à son classement en zone agricole. Ce classement est justifié au regard de l'objectif du projet d'aménagement et de développement durable concernant les secteurs à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. Le fait que le terrain soit une prairie permet de reconnaître au terrain une vocation et un intérêt agricole. En outre, l'autorité administrative n'est pas liée par les remarques du commissaire enquêteur. Au demeurant, ce dernier a finalement écarté la possibilité d'un classement en zone U. Il n'y a donc pas d'erreur manifeste d'appréciation à classer ce terrain en zone agricole ;

- il résulte du rapport de présentation qu'eu égard aux projections démographiques, la commune n'avait besoin de classer en zone constructible que 52 ha alors que 90 ha étaient inoccupés. La commune a donc réduit la surface des zones constructibles. A ce titre le projet d'aménagement et de développement durable a prévu d'urbaniser essentiellement le coeur du village qui est composé de la cité historique, des commerces et services et de l'espace autour des équipements scolaires et sportifs et des logements collectifs. Or la parcelle en cause ne se trouve pas au coeur du village, son ouverture à l'urbanisation n'était donc pas une priorité. Il n'y a donc pas d'erreur manifeste d'appréciation.

Par ordonnance du 1er septembre 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 3 octobre 2017 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Paul-André Braud,

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

- les observations de MeH..., représentant MM. A...et G...et celles de Me C..., représentant la commune de Sauvagnon.

Considérant ce qui suit :

1. MM. A...et G...sont propriétaires de la parcelle cadastrée section AI 203 sise sur le territoire de la commune de Sauvagnon. Par une délibération du 2 juillet 2012, le conseil municipal de Sauvagnon a approuvé le plan local d'urbanisme, lequel classe la parcelle cadastrée section AI 203 en zone agricole. Par une décision du 30 avril 2014, le maire de Sauvagnon a rejeté la demande de MM. A...et G...tendant à l'abrogation du plan local d'urbanisme en tant qu'il classe leur parcelle en zone agricole. MM. A...et G...relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Pau en date du 29 décembre 2015 rejetant leur demande tendant à l'annulation de la décision du 30 avril 2014.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Lorsqu'une partie est une personne morale, il appartient à la juridiction administrative saisie, qui en a toujours la faculté, de s'assurer, le cas échéant, que le représentant de cette personne morale justifie de sa qualité pour agir au nom de cette partie. Tel est le cas lorsque cette qualité est contestée sérieusement par l'autre partie ou qu'au premier examen, l'absence de qualité du représentant de la personne morale semble ressortir des pièces du dossier. Aux termes de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction alors en vigueur : " Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : (...) 16° D'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle, dans les cas définis par le conseil municipal (...) ".

3. MM. A...et G...soutiennent que les premiers juges ont omis de soulever d'office le moyen d'ordre public tiré du défaut de qualité pour défendre du maire de Sauvagnon qui ressortait de la délibération du 28 mars 2014 produite par la commune de Sauvagnon. Selon cette délibération, " le conseil municipal peut déléguer au maire une partie de ses compétences (...) Les domaines concernés sont fixés par l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales (...) 16. d'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre, dans les cas définis par le conseil municipal (...) ". Il ressort des termes de cette délibération que le conseil municipal de Sauvagnon a entendu déléguer au maire l'ensemble des compétences prévues à l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales. Il lui a ainsi donné compétence générale pour ester en justice au nom de la commune pendant toute la durée de son mandat. Par suite, le maire de Sauvagnon justifiant par cette délibération de sa qualité pour défendre au nom de la commune, laquelle n'avait été contestée par aucun mémoire en réplique, les premiers juges n'avaient pas à soulever d'office un défaut de qualité pour agir du maire de Sauvagnon. Dès lors, en s'abstenant d'y procéder, les premiers juges n'ont pas entaché leur jugement d'irrégularité.

Sur la légalité de la décision du 30 avril 2014 :

4. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. S'ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, leur appréciation peut cependant être censurée par le juge administratif au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

5. L'article R.*123-7 du code de l'urbanisme prévoit que : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. En zone A peuvent seules être autorisées : / - les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ; / - les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs ou à des services publics, dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière dans l'unité foncière où elles sont implantées et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages (...) ".

6. Si, comme le soutiennent les requérants, la parcelle cadastrée section AI 203 est desservie par l'ensemble des réseaux publics et est située dans le prolongement de plusieurs constructions, la circonstance qu'au regard de ces caractéristiques, la commune de Sauvagnon aurait pu retenir légalement un classement en zone constructible ne peut être utilement invoquée pour démontrer l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation du classement en zone agricole litigieux. Au demeurant, la circonstance que la parcelle soit entourée sur trois de ses côtés par des zones bâties ne lui confère pas à elle seule le caractère de " dent creuse ", alors qu'elle est ouverte au sud sur une vaste zone agricole. En outre, il ressort des pièces du dossier, et notamment du document graphique du plan local d'urbanisme, que la parcelle en cause n'est pas située dans le centre bourg, autour duquel le plan local d'urbanisme, entend contenir le développement urbain en réduisant les zones à urbaniser. Si le projet d'aménagement et de développement durable prévoit que, comme le soutiennent les requérants, " dans des parties éloignées du centre bourg, les formes d'habitat sont plus étroitement imbriquées dans le milieu naturel et l'élément végétal. La commune souhaite continuer à y proposer quelques possibilités de construire intégrées dans leur environnement naturel et paysager ", cette orientation ne fait nullement obstacle à ce que des parcelles situées en dehors du centre bourg soient classées en zone agricole. De même, la circonstance que selon le plan d'exposition au bruit de l'aéroport Pau Pyrénées, la parcelle en cause est située en zone C où les constructions individuelles non groupées sont autorisées ne fait pas davantage obstacle à la possibilité d'un classement en zone agricole. Or, il ressort des pièces du dossier, et notamment des plans et photographies, que la parcelle en cause est en état de prairie, dépourvue de toute construction, située en dehors du centre bourg et qu'elle longe sur l'un de ses côtés une zone agricole. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que le classement de cette parcelle en zone agricole soit entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

7. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Sauvagnon, que MM. A...et G...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à l'annulation du refus d'abrogation opposé par le maire de Sauvagnon le 30 avril 2014.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Le présent arrêt, qui rejette la demande présentée par MM. A...etG..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction tendant à l'abrogation du plan local d'urbanisme en tant qu'il classe la parcelle cadastrée section AI 203 en zone agricole et à l'élaboration des nouvelles dispositions de ce plan local d'urbanisme afférentes à cette parcelle ne peuvent être accueillies.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Sauvagnon, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que MM. A...et G...demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de ces derniers une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Sauvagnon.

DECIDE :

Article 1er : La requête de MM. A...et G...est rejetée.

Article 2 : MM. A...et G...verseront à la commune de Sauvagnon une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... G..., à M. F... A...et à la commune de Sauvagnon.

Délibéré après l'audience du 15 mars 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

M. Paul-André Braud, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 avril 2018.

Le rapporteur,

Paul-André BRAUDLe président,

Catherine GIRAULT

Le greffier,

Virginie MARTY

La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Atlantiques en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

No 16BX00904


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX00904
Date de la décision : 26/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-02-02-05 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU). Application des règles fixées par les POS ou les PLU. Règles de fond. Caractéristiques des terrains.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : CAMBOT

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-04-26;16bx00904 ?
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