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06/03/2018 | FRANCE | N°15BX00885

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 06 mars 2018, 15BX00885


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Alinéa Solar France, société à responsabilité limitée, a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de condamner la commune de Goyave à lui verser la somme globale de 7 454 858 euros en réparation des préjudices résultant du refus par le maire de la commune de lui délivrer un certificat de non-opposition aux travaux qu'elle a déclarés le 22 juillet 2010 en vue de l'installation de centrales solaires, ainsi que la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justi

ce administrative.

Par un jugement n° 1100618 du 30 décembre 2014, le tribuna...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Alinéa Solar France, société à responsabilité limitée, a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de condamner la commune de Goyave à lui verser la somme globale de 7 454 858 euros en réparation des préjudices résultant du refus par le maire de la commune de lui délivrer un certificat de non-opposition aux travaux qu'elle a déclarés le 22 juillet 2010 en vue de l'installation de centrales solaires, ainsi que la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1100618 du 30 décembre 2014, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 mars 2015 et des mémoires enregistrés les 29 décembre 2015 et 8 avril 2016 ainsi qu'un mémoire en production de pièce enregistré le 26 avril 2016, la société Alinéa Solar France, représentée par Me C...puis par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 30 décembre 2014 ;

2°) de condamner la commune de Goyave à lui payer la somme globale de 8 155 766 euros en réparation de son préjudice ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Goyave la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a considéré que le refus du maire de lui délivrer un certificat de non-opposition méconnaissait l'article R. 424-13 du code de l'urbanisme et était donc illégal ; cette illégalité constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune ;

- le tribunal a aussi jugé que cette illégalité n'était pas à l'origine de son préjudice et a, sur ce point, commis une erreur d'appréciation ;

- elle avait en effet signé une promesse de bail emphytéotique avec la société immobilière de la Guadeloupe ayant pour objectif l'installation de centrales solaires sur les toitures de la cité Ti Racoon, sur la parcelle cadastrée section AL n° 652 et dont l'article 15 prévoyait une résiliation du bail en l'absence des accords et autorisations administratifs au 31 décembre 2010 ; elle se devait par ailleurs d'être en possession du certificat de non-opposition pour débuter les travaux et les investissements ; le refus du maire l'a empêchée de réaliser et d'exploiter son installation comme prévu entrainant pour elle une perte de chance de vendre son électricité à EDF aux conditions tarifaires antérieures à la publication du décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010 ;

- la possibilité de bénéficier d'un contrat d'achat à un tarif spécifique est bien subordonnée au dépôt auprès du gestionnaire de réseau d'un dossier complet ; ce dossier comporte le certificat de non-opposition aux termes de la documentation technique de référence à laquelle se réfère l'arrêté du 12 janvier 2010 ; le certificat était la seule pièce manquante de son dossier ;

- aucune négligence ne peut lui être reprochée ; le Conseil d'Etat juge que l'absence d'exercice de voies de recours contre une décision illégale ne rend pas indirect le lien de causalité entre le préjudice et l'illégalité fautive ; quand bien même elle aurait obtenu une injonction de délivrance du certificat, l'obtention du certificat aurait été trop tardive pour qu'elle puisse bénéficier du régime antérieur au décret du 9 décembre 2010 ;

- le tribunal n'a statué que sur la perte de chance de vendre l'électricité à EDF et a omis de statuer sur les autres préjudices invoqués, notamment l'engagement de frais en pure perte ;

- les frais exposés en pure perte comportent les dépenses exposées du fait de la livraison des panneaux et matériels ; de plus, ces frais s'élèvent à 107 832 euros s'agissant de l'indemnité d'immobilisation prévue par le bail et à 700 908 euros s'agissant de la redevance mensuelle prévue par la promesse de bail ; elle justifie du versement de ces sommes ;

- elle a également subi une perte de chance d'être rémunérée pour son exploitation sur 20 ans selon les tarifs en vigueur avant l'entrée en vigueur du décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010 ; si la commune avait délivré le certificat dans le délai prévu par le texte, c'est-à-dire au 1er juillet 2010, elle ne serait pas tombée sous le joug de la loi du 9 décembre 2010 ; sa perte de chance porte sur un gain économique de 5 347 026 euros sur une période de 20 ans ; à supposer qu'elle n'aurait pas perdu une chance de vendre son électricité, elle a pour le moins perdu une chance de contracter avec EDF selon des tarifs plus avantageux, le tarif de rachat étant passé de 40 centimes d'euros à 12 centimes d'euros après le décret du 9 décembre 2010 ; à un tel prix, les conditions de l'opération sont substantiellement modifiées et le projet devient inenvisageable ; elle justifie de la parte de chance qu'elle invoque ;

- la demande de réparation de son manque à gagner n'est pas nouvelle ; elle était mentionnée dans sa demande indemnitaire préalable ; l'absence de chiffrage précis ne rend pas la demande irrecevable ; cette demande figurait aussi dans ses premières écritures devant le tribunal ;

- sa demande de dommages-intérêts de 2 000 000 euros n'est pas davantage irrecevable ; elle était mentionnée dans sa demande préalable ; elle est liée à la baisse de ses actifs, à ses difficultés de trésorerie, à la mobilisation de ses salariés et d'un prestataire pour le développement du projet et au préjudice moral subi.

Par des mémoires enregistrés les 10 juillet 2015, 4 mars 2016 et 11 mai 2016, la commune de Goyave, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la société Alinéa Solar France le versement d'une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement s'est bien prononcé sur la totalité des préjudices invoqués par la société ;

- les préjudices invoqués, à les supposer établis, ont pour origine non le comportement de la commune mais l'absence de diligences de la part de la société requérante qui était titulaire d'une décision de non-opposition valant autorisation de construire ; la société n'a pas saisi le juge des référés auquel elle aurait pu demander une injonction en vue de la délivrance du certificat de non-opposition ; la production du certificat n'est pas requis pour le rachat de l'électricité par EDF ; rien ne s'opposait donc à ce que la société réalise son projet et l'exploite ; au surplus, le décret du 9 décembre 2010 n'a suspendu les opérations de vente à EDF que pour une période de trois mois ; si la société n'a pas mis en oeuvre son projet, c'est du fait de son seul comportement ; c'est à bon droit que le tribunal n'a pas retenu un lien de causalité entre l'attitude de la commune et les préjudices invoqués ;

- la société doit assumer le risque qu'elle a pris en concluant une promesse de bail et en commandant les panneaux à un moment où elle n'avait aucune assurance qu'elle serait autorisée à implanter ces panneaux et qu'une convention de rachat serait conclue avec EDF sur la base du tarif qu'elle revendique ;

- l'indemnité d'immobilisation aurait, en tout état de cause, été due en application du contrat conclu entre la société Alinéa Solar France et la société immobilière de la Guadeloupe, que la vente d'électricité ait lieu ou pas ; il ne peut s'agir d'un préjudice ouvrant droit à réparation par la commune ; ce préjudice est, de surcroit, éventuel puisque la suspension des opérations de vente à EDF n'est que de trois mois ; au surplus, le versement de la somme est intervenu près de sept mois avant la décision de refus implicite de délivrance du certificat ; ce refus n'a donc pu être la cause du versement ;

- la réalité du versement des redevances mensuelles n'est pas davantage établie ; d'ailleurs l'article 6 de la convention stipule clairement que le bail ne prendra effet qu'à compter de la mise en exploitation des installations ;

- la demande de réparation au titre d'un manque à gagner de la société requérante est irrecevable dès lors, d'une part, qu'elle ne figurait pas dans la demande indemnitaire préalable et que, d'autre part, elle a été présentée après l'expiration du délai de recours contentieux ; au surplus, le préjudice n'est qu'éventuel puisqu'il n'est pas établi que la société aurait produit de l'électricité à hauteur des quantités revendiquées et qu'EDF lui aurait racheté cette électricité pendant 20 ans ; de plus, la suspension de l'achat par EDF n'est que de trois mois aux termes du décret du 9 décembre 2010 ; le courrier d'EDF dont se prévaut la requérante n'établit pas qu'EDF aurait renoncé à acheter l'électricité fabriquée en Guadeloupe à partir de panneaux photovoltaïques ;

- la demande de dommages-intérêts à hauteur de 2 000 000 euros n'a fait l'objet d'aucune demande indemnitaire préalable ; elle n'est assortie d'aucune précision sur le préjudice visé et sur ses justifications ;

- la société demande pour la première fois dans son mémoire enregistré le 8 avril 2016 la réparation d'un préjudice lié à l'intervention d'une société d'ingénierie ; ces conclusions sont irrecevables.

Par ordonnance du 11 mai 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 13 juin 2016 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'énergie ;

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité ;

- le décret n° 2000-1196 du 6 décembre 2000 fixant par catégorie d'installations les limites de puissance des installations pouvant bénéficier de l'obligation d'achat d'électricité ;

- le décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010 suspendant l'obligation d'achat de l'électricité produite par certaines installations utilisant l'énergie radiative du soleil ;

- le code de justice administrative.

Par décision du 18 janvier 2018, le président de la cour a désigné Mme Florence Madelaigue pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Elisabeth Jayat,

- les conclusions de Mme Florence Madelaigue, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant la société Alinea Solar France.

Considérant ce qui suit :

1. Le 13 avril 2010, la société Alinea Solar France, société à responsabilité limitée, a conclu une promesse de bail emphytéotique avec la société immobilière de Guadeloupe, société anonyme d'économie mixte. Par ce contrat, la société immobilière de Guadeloupe s'est engagée à donner à bail à la société Alinea Solar France un ensemble de toits d'une superficie de 85 072 mètres carrés, pour une durée de vingt ans, en vue de l'installation de panneaux photovoltaïques reliés au réseau exploité par la société Electricité de France (EDF). Le 22 juillet 2010, la société Alinea Solar France a déposé auprès de la commune de Goyave une déclaration de travaux portant sur la pose des panneaux sur les toits des immeubles concernés. Par un courrier reçu par la commune le 17 septembre 2010, elle a sollicité la délivrance d'un certificat de non-opposition aux travaux. N'ayant pas obtenu ce certificat, le 21 mars 2011, elle a saisi la commune d'une demande indemnitaire tendant à la réparation des préjudices qu'elle impute à ce refus de délivrance d'un certificat de non-opposition. Elle relève appel du jugement du 30 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Goyave à lui verser une indemnité en réparation de ces préjudices.

Sur la régularité du jugement :

2. Il résulte de la lecture tant des visas du jugement attaqué que du point 5 de ses motifs et de l'ensemble de son dispositif, que le tribunal a statué sur l'ensemble des préjudices invoqués par la société Alinea Solar France. Les premiers juges, qui ont statué sur la totalité des conclusions dont ils étaient saisis, n'ont donc pas entaché leur jugement d'omission à statuer.

Au fond :

3. Il est constant qu'en l'absence de décision dans le délai d'un mois après le dépôt de sa déclaration de travaux, la société Alinea Solar France était titulaire, le 22 août 2010, d'une décision tacite de non-opposition aux travaux déclarés. Selon l'article R. 424-13 du code de l'urbanisme, " en cas de permis tacite ou de non-opposition à un projet ayant fait l'objet d'une déclaration, l'autorité compétente en délivre certificat sur simple demande du demandeur, du déclarant ou de ses ayants droit ". En méconnaissance de ces dispositions, la commune de Goyave n'a pas délivré le certificat sollicité par la société.

4. En principe, toute illégalité commise par l'administration constitue une faute susceptible d'engager sa responsabilité, pour autant qu'il en soit résulté un préjudice direct et certain. La responsabilité de l'administration ne saurait en revanche être engagée pour la réparation des dommages qui ne trouvent pas leur cause dans cette illégalité.

5. La société requérante soutient qu'en ne lui délivrant pas le certificat de non-opposition prévu par l'article R. 424-13 du code de l'urbanisme, la commune de Goyave lui a fait perdre une chance de réaliser son projet dans les conditions économiques qu'elle avait escomptées, dès lors que par décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010, l'obligation d'achat de l'électricité produite par certaines installations utilisant l'énergie radiative du soleil a été suspendue et que le prix de rachat de l'électricité lorsque la suspension d'une durée de trois mois a pris fin, était passé de 40 à 12 centimes d'euros par kilowatt/heure. Elle demande que la commune de Goyave lui verse une somme de 107 832 euros correspondant à l'indemnité d'immobilisation qu'elle a versée en pure perte à la société immobilière de Guadeloupe, une somme de 700 908 euros correspondant à la redevance mensuelle prévue par le contrat du 13 avril 2010, durant douze mois, et une somme de 5 347 026 euros correspondant à la perte de chance de vendre à EDF l'électricité qu'elle aurait pu produire pendant vingt ans au tarif de 40 centimes par kilowatt/heure. Elle peut également être regardée comme demandant, comme elle l'avait fait en première instance, une indemnité de 2 000 000 euros en réparation de divers préjudices économiques et d'un préjudice moral.

6. S'agissant de l'indemnité d'immobilisation de 107 832 euros qui devait être versée à la signature de la convention du 13 avril 2010, la société requérante, qui établit la réalité du versement de cette somme à la société immobilière de Guadeloupe, doit être regardée comme démontrant avoir exposé cette somme. Il résulte toutefois de l'instruction, et notamment des termes de l'article 21 de la convention, qu'au cas où le bail se réaliserait, elle serait déduite de la première annuité et qu'elle serait conservée par la société immobilière de Guadeloupe en cas de non réalisation du bail. L'article 15 de la convention prévoit que le preneur et le bailleur peuvent demander la résiliation du bail " si les accords administratifs (agréments fiscal, autorisation de la mairie, de la DIREME, la DRIRE et ERDF) n'ont pas abouti au 31/12/2010 ". Or, la société Alinea Solar France ne donne aucune précision sur l'intervention éventuelle d'une résiliation du bail ni, par conséquent, sur la possible imputation de cette indemnité sur la première annuité. Il ne peut donc être considéré que cette somme a été définitivement perdue par la société Alinea Solar France.

7. S'agissant des redevances mensuelles pour le montant de 700 908 euros correspondant à une annuité, la société qui, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, ne donne aucune précision sur la volonté des parties à la promesse de bail d'exécuter ou non le bail, ne donne pas davantage d'éléments permettant d'estimer qu'elle aurait versé ces redevances, étant précisé que le contrat du 13 avril 2010, en son article 6, fixe la prise d'effet du bail seulement au jour de la mise en exploitation des installations photovoltaïques. La réalité de ce chef de préjudice n'est donc pas établie.

8. S'agissant des divers préjudices économiques et du préjudice moral qu'elle invoque, la société Alinea Solar France n'apporte à l'appui de ses conclusions aucune précision ni aucun justificatif permettant d'en apprécier l'étendue, au regard du montant réclamé de 2 000 000 euros, ni même le caractère certain, dès lors que, comme il a été dit précédemment, elle n'établit pas avoir définitivement abandonné son projet.

9. S'agissant de son manque à gagner durant vingt ans, la société requérante, comme il a été dit précédemment, n'apporte aux débats aucune précision sur l'abandon éventuel de son projet et sur la poursuite éventuelle de l'exécution ou au contraire la résiliation du contrat qu'elle a conclu avec la société immobilière de Guadeloupe, lequel prévoyait en son article 6 que le bail était consenti pour une durée de vingt ans " prenant effet au jour de la mise en exploitation " et " au plus tard 16 mois après la signature ", sous réserve d'une prolongation expresse et écrite. Le préjudice dont elle fait état, qui résulterait d'un manque à gagner, ne présente donc pas un caractère certain.

10. En tout état de cause, à supposer même que la société soit regardée comme établissant le caractère réel et certain des préjudices qu'elle invoque, et notamment d'une perte de chance de réaliser son projet aux conditions économiques proposées par EDF avant l'entrée en vigueur du décret du 9 décembre 2010, il est constant qu'elle a été régulièrement mise en possession par la commune de Goyave d'un récépissé de sa déclaration de travaux du 22 juillet 2010, lui précisant qu'à défaut de courrier contraire dans un délai d'un mois, elle serait titulaire d'une décision de non-opposition et pourrait démarrer les travaux sous réserve d'un affichage sur le terrain dont les modalités lui étaient exposées. Il résulte également de l'instruction que, certes, le document dont se prévaut la société requérante, émanant d'Electricité Réseau Distribution France (ERDF), relatif au traitement des demandes de raccordement des installations de production d'électricité, exige la production d'un certificat de non-opposition au projet à l'appui d'une demande de raccordement d'une installation de puissance supérieure à 6 kVA, mais que la société n'avait, à la date d'entrée en vigueur du décret du 9 décembre 2010, pas contacté ERDF pour exposer ses difficultés à obtenir le certificat requis ni même finalisé le formulaire de demande de raccordement, notamment quant à la description du raccordement actuel du site au réseau. La société ne produit d'ailleurs aucun document émanant d'ERDF rejetant sa demande au motif que son dossier aurait été incomplet faute de comporter le certificat requis. De plus et surtout, il résulte également de l'instruction et notamment du document susmentionné émanant d'ERDF que, quand bien même son dossier aurait pu être complété dès le 17 septembre 2010, date à laquelle la commune de Goyave a reçu sa demande de délivrance d'un certificat de non-opposition, le délai d'instruction des demandes de raccordement peut aller jusqu'à trois mois notamment pour tenir compte de la nécessité d'une extension de réseau, selon la capacité des installations existantes. Ainsi, il ne peut être tenu pour suffisamment probable que la société, même en possession d'un certificat de non-opposition au 17 septembre 2010, aurait pu être destinataire, avant l'entrée en vigueur du décret du 9 décembre 2010, d'une proposition de raccordement et d'un contrat d'achat d'électricité, dès lors que les démarches en vue de la conclusion de ce contrat ne peuvent être engagées qu'après formalisation de la proposition de raccordement. Dans ces conditions, les préjudices dont fait état la société et notamment ceux résultant de la perte d'une chance de réaliser son projet aux conditions économiques proposées par EDF avant l'entrée en vigueur du décret du 9 décembre 2010 ne peuvent être regardées comme ayant pour origine directe le défaut de délivrance par la commune du certificat de non-opposition sollicité.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la société Alinéa Solar France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Guadeloupe a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société Alinea Solar France le versement à la commune de Goyave d'une somme de 1 500 euros au titre des frais d'instance exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Alinea Solar France est rejetée.

Article 2 : La société Alinea Solar France versera à la commune de Goyave la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Alinea Solar France et à la commune de Goyave. Copie en sera adressée à la ministre des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 6 février 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. Pierre Bentolila, président assesseur,

M. Frédéric Faïck, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 6 mars 2018.

Le président-assesseur,

Pierre Bentolila

Le président-rapporteur,

Elisabeth Jayat

Le greffier,

Florence Deligey

La République mande et ordonne à la ministre des outre-mer en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 15BX00885


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15BX00885
Date de la décision : 06/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Services de l'urbanisme.

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Préjudice - Caractère direct du préjudice - Absence.

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses - Régimes de déclaration préalable.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Elisabeth JAYAT
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : SELAS D'AVOCATS EXEME ACTION

Origine de la décision
Date de l'import : 13/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-03-06;15bx00885 ?
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