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09/02/2018 | FRANCE | N°15BX02779

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre - formation à 3, 09 février 2018, 15BX02779


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2008 au 30 avril 2010.

Par un jugement n° 1303402 du 7 juillet 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 août 2015 et 23 mai 2016, M. C..., représenté par MeB..., dem

ande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 juillet 2015 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2008 au 30 avril 2010.

Par un jugement n° 1303402 du 7 juillet 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 août 2015 et 23 mai 2016, M. C..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 juillet 2015 ;

2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes en litige ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il a exercé simultanément des opérations de courtage automobile et des opérations d'achat-revente de véhicules d'occasion ;

- l'administration fiscale a estimé à tort que dans le cadre de son activité de courtage consistant à trouver à des sociétés françaises et espagnoles pour le compte desquelles il agissait, des clients français désireux d'acquérir des véhicules d'occasion, il ne pouvait prétendre à la qualité d'intermédiaire transparent et devait, au contraire, être regardé comme un intermédiaire opaque ;

-l'administration a estimé à tort que dans le cadre de son activité de négoce l'ayant conduit à s'approvisionner en véhicules auprès de concessions automobiles locales de type mandataire et auprès de fournisseurs étranger, il n'a pu, pour un certain nombre de transactions impliquant des fournisseurs espagnols et français, appliquer le régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge, conformément aux mentions figurant sur les factures de ses fournisseurs, lesquelles l'y autorisaient.

Par un mémoire en défense, enregistré les 29 janvier 2016 et en mémoire, enregistré le 4 janvier 2017, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 1er décembre 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 5 janvier 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marianne Pouget,

- les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., qui a exercé à titre individuel une activité de négoce de véhicules automobiles, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2008 au 30 avril 2010. A l'issue de ce contrôle, l'administration lui a notifié une proposition de rectification en date du 8 septembre 2011, selon la procédure contradictoire, l'informant qu'elle entendait procéder à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'ensemble de la période vérifiée en raison de la remise en cause de la qualité d'intermédiaire transparent dont il s'était prévalu pour certaines transactions, d'une part, et du régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge qu'il avait appliqué lors de la vente en France de certains véhicules qu'il avait auparavant acquis auprès de divers fournisseurs, principalement espagnols, d'autre part. A la suite du rejet de sa réclamation, il a saisi le tribunal administratif de Bordeaux d'une demande tendant à la décharge de ces rappels de taxe et des pénalités y afférentes. Par un jugement du 7 juillet 2015, le tribunal a rejeté sa demande. M. C...relève appel de ce jugement.

En ce qui concerne la qualité de mandataire transparent :

2. Aux termes de l'article 256 bis du code général des impôts applicable aux faits du litige : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel... V. L'assujetti, agissant en son nom propre mais pour le compte d'autrui, qui s'entremet dans une acquisition intracommunautaire, est réputé avoir personnellement acquis et livré le bien ou reçu et fourni les services considérés ". Aux termes de l'article 266 du même code : " 1. La base d'imposition est constituée : / a) pour les livraisons de biens, les prestations de services et les acquisitions intracommunautaires, par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou le prestataire en contrepartie de ces opérations, de la part de l'acheteur, du preneur ou d'un tiers (...) ; / b) pour les opérations ci-après, par le montant total de la transaction : / opérations réalisées par un intermédiaire mentionné au V de l'article 256 (...) ".

3. Il ressort de la proposition de rectification du 8 septembre 2011 que pour estimer que M. C...devait être regardé, à raison de certaines transactions, comme un négociant ayant personnellement acquis les véhicules d'occasion auprès des sociétés espagnoles et en déduire qu'en vertu des dispositions précitées du code général des impôts, il était redevable de la taxe sur la valeur ajoutée sur le prix de vente total de ces véhicules, l'administration a relevé que les factures de commissions sur vente établies par M. C...n'indiquaient pas le nom des acheteurs des véhicules, que l'intéressé a déclaré ne pas connaître l'identité de ces derniers, que certains véhicules étaient entrés dans le parc de son entreprise à des fins de révision générale avant leur livraison au client, qu'il avait lui-même pris en charge le transport des véhicules et enfin qu'une dizaine de véhicules avaient été payés par M. C...alors qu'il était supposé mettre en relation les fournisseurs et les acquéreurs.

4. M. C...soutient que sa mission consistait à trouver, pour le compte de sociétés principalement espagnoles et, dans une moindre mesure, françaises, des clients français désireux d'acquérir des véhicules d'occasion d'origine étrangère en provenance d'Allemagne essentiellement. Il fait valoir que les factures étaient éditées par les fournisseurs espagnols des véhicules et libellées aux noms des acquéreurs finaux et que lui-même établissait, à destination du fournisseur espagnol, une facture de commission de vente. Toutefois, aucun mandat de vente liant M. C...à ces sociétés, pas plus que des bons de réservation de véhicules auprès de ces dernières, n'ont été présentés au vérificateur et il est constant que M.C..., alors qu'il était supposé mettre en relation les fournisseurs et les clients finaux, ne connaissait pas l'identité des acquéreurs dont les coordonnées ne figuraient pas davantage sur les factures relatives à la " commission d'apporteur d'affaires " ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que M. C...a encaissé lui-même le prix de dix ventes, qu'il organisait le transport des véhicules livrées depuis l'Allemagne sans le concours des fournisseurs et que plusieurs véhicules ont été livrés aux particuliers français après une révision générale dans son atelier. Dès lors, c'est à bon droit, qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, l'administration a regardé M. C...comme un négociant ayant personnellement acquis auprès des sociétés espagnoles et françaises, les véhicules d'occasion en provenance d'Allemagne et en a déduit qu'il était, en principe, redevable de la taxe sur la valeur ajoutée sur le prix de vente total de ces véhicules en vertu des dispositions précitées du code général des impôts.

En ce qui concerne l'applicabilité du régime de la marge à 37 opérations d'achat-revente de véhicules d'occasion :

5. Aux termes du I de l'article 256 bis du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux faits du litige : " 1° Sont également soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les acquisitions intracommunautaires de biens meubles corporels effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ou par une personne morale non assujettie lorsque le vendeur est un assujetti agissant en tant que tel et qui ne bénéficie pas dans son Etat du régime particulier de franchise des petites entreprises (...) / 2° bis Les acquisitions intracommunautaires de biens d'occasion (...) effectuées à titre onéreux par un assujetti (...) ne sont pas soumises à la taxe sur la valeur ajoutée lorsque le vendeur ou l'assujetti est un assujetti revendeur qui a appliqué dans l'Etat membre de départ de l'expédition ou du transport du bien les dispositions de la législation de cet Etat prises pour la mise en oeuvre des articles 312 à 325 ou 333 à 341 de la directive 2006/112/ CE du Conseil du 28 novembre 2006 (...)". Aux termes du I de l'article 297 A du même code : " 1° La base d'imposition des livraisons par un assujetti revendeur de biens d'occasion (...) qui lui ont été livrés par un non redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ou par une personne qui n'est pas autorisée à facturer la taxe sur la valeur ajoutée au titre de cette livraison est constituée de la différence entre le prix de vente et le prix d'achat (...) ". Aux termes de l'article 297 E du même code, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Les assujettis qui appliquent les dispositions de l'article 297 A ne peuvent pas faire apparaître la taxe sur la valeur ajoutée sur leurs factures ou tous autres documents en tenant lieu ".

6. Il résulte de ces dispositions qu'une entreprise française assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée a la qualité d'assujetti revendeur et peut appliquer le régime de taxation sur la marge prévu par l'article 297 A du code général des impôts, lorsqu'elle revend un bien d'occasion acquis auprès d'un fournisseur situé en France ou dans un autre Etat membre qui, en sa qualité d'assujetti revendeur, lui a délivré une facture conforme aux dispositions précitées de l'article 297 E du code général des impôts, et dont le fournisseur, situé quant à lui dans un autre Etat membre, a aussi cette qualité ou n'est pas assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée. L'administration peut toutefois remettre en cause l'application de ce régime lorsque l'entreprise française connaissait ou ne pouvait ignorer la circonstance que son fournisseur n'avait pas la qualité d'assujetti revendeur et n'était pas autorisé à appliquer lui-même le régime de taxation sur la marge.

7. Lorsqu'une entreprise produit des factures émanant de ses fournisseurs qui mentionnent que les ventes de véhicules s'effectuaient sous le régime de la taxe sur la marge, il incombe à l'administration, si elle s'y croit fondée, de démontrer, d'une part que les mentions portées sur ces factures sont erronées, d'autre part que le bénéficiaire de ces achats de véhicules savait ou aurait dû savoir que les opérations présentaient le caractère d'acquisitions intracommunautaires taxables sur l'intégralité du prix de revente à ses propres clients, et sans que pèse sur le contribuable l'obligation de vérifier la qualité d'assujetti revendeur de ses fournisseurs

8. D'une part, M.C..., au cours de la période contrôlée, a acquis des véhicules en provenance d'Allemagne auprès de fournisseurs situés principalement en Espagne, mais également en Bulgarie. Ses fournisseurs établissaient des factures mentionnant l'application du régime de la marge. Toutefois, l'administration fiscale soutient, sans être contredite, que les informations obtenues dans le cadre de l'assistance administrative ont permis d'établir que ces sociétés avaient acquis les véhicules en cause sous le régime des acquisitions intracommunautaires.

9. D'autre part, l'administration fiscale a constaté lors des opérations de contrôle que M. C... disposait de l'ensemble des certificats allemands d'immatriculation des véhicules dont les mentions révélaient que ces derniers avaient été immatriculés à l'état neuf en Allemagne par des sociétés de location de véhicules, des constructeurs automobiles ou des assujettis revendeurs disposant ainsi du droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée applicable aux véhicules en qualité de professionnels assujettis. Elle fait valoir en outre que le requérant assurait lui-même depuis l'Allemagne vers la France le transport ou le convoyage des véhicules qu'il avait acquis auprès de ses fournisseurs espagnols sans transiter par l'Espagne. Ainsi, ce dernier doit être regardé comme ayant maîtrisé les conditions matérielles de l'ensemble de l'opération d'achat, de revente et de livraison du bien. Dans ces conditions, en sa qualité de professionnel du négoce de véhicules d'occasion, il ne pouvait ignorer que ses fournisseurs, dont le rôle effectif n'est au demeurant pas démontré, n'avaient pas la qualité d'assujetti revendeur et n'étaient pas autorisés à appliquer eux-mêmes le régime de la taxation sur la marge. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a refusé l'application du régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge aux 37 opérations d'achat-revente en litige.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. C...la somme qu'il réclame sur ce fondement.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera délivrée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud ouest.

Délibéré après l'audience du 12 janvier 2018 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

Mme Marianne Pouget, président-assesseur,

Mme Caroline Gaillard, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 9 février 2018.

Le rapporteur,

Marianne Pouget

Le président,

Philippe Pouzoulet

Le greffier,

Florence Deligey

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

N° 15BX02779


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15BX02779
Date de la décision : 09/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: Mme Marianne POUGET M.
Rapporteur public ?: Mme MUNOZ-PAUZIES
Avocat(s) : SELARL FISCAVOC

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-02-09;15bx02779 ?
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