Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E... A...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision en date du 5 décembre 2013 par laquelle le directeur opérationnel territorial courrier Aquitaine Nord de La Poste l'a mutée à compter du 17 décembre 2013 au sein de la direction financière de la direction opérationnelle territoriale (DOTC), sur un poste de contrôleur de gestion, d'enjoindre au directeur opérationnel de la réintégrer dans ses précédentes fonctions de contrôleur opérationnel, de lui ouvrir un compte épargne temps, de lui fournir l'état de ses congés en 2013, et enfin, de condamner La Poste au paiement, premièrement, de la part variable au titre du grade ES1 Groupe A et du montant lié à la revalorisation salariale moyenne correspondant à son grade et son évaluation depuis 2008, deuxièmement, de ses congés au titre de l'année 2013 et, troisièmement, de la perte de rémunération consécutive à son congé maladie.
Par un jugement n° 1400479 du 6 octobre 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé la décision du directeur opérationnel territorial courrier Aquitaine Nord de La Poste du 5 décembre 2013 ayant prononcé la mutation de Mme A...sur un poste de contrôleur de gestion, a enjoint au directeur opérationnel de la réintégrer dans les fonctions qu'elle occupait précédemment ou sur un poste équivalent, dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement, et a rejeté le surplus de ses conclusions.
Procédure devant la cour :
La Poste a relevé appel du jugement n° 1400479 du tribunal administratif de Bordeaux par une requête enregistrée le 6 octobre 2016.
Le 23 mars 2017, Mme A...a saisi la cour administrative d'appel de Bordeaux, sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, d'une demande tendant à l'exécution du jugement du 6 octobre 2016 du tribunal administratif de Bordeaux, au motif que La Poste n'a pas procédé à sa réintégration dans les fonctions qu'elle occupait précédemment à la DOTC Aquitaine Nord de La Poste.
Par un courrier enregistré le 15 mai 2017, Mme A...a en outre sollicité la condamnation de La Poste au paiement d'une astreinte jusqu'à ce que soit exécuté ce jugement.
Par des courriers enregistrés les 6 avril et 16 juin 2017, La Poste a conclu au rejet des prétentions de MmeA..., demandé que soit mise à la charge de cette dernière une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et une indemnité de 500 euros en application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative, et à ce que soient supprimés les propos injurieux, outrageants et diffamatoires figurant dans les écritures de Mme A....
Par une ordonnance du 4 juillet 2017, la présidente de la Cour a, en application de l'article R. 921-6 du même code, décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle en vue de prescrire les mesures d'exécution du jugement du 6 octobre 2016.
Par des mémoires enregistrés les 29 septembre et 17 octobre 2017, La Poste, représentée par Me Ruffié, a réitéré les conclusions figurant dans ses courriers des 6 avril et 16 juin 2016, portant en outre à 1 500 euros le montant de la somme demandée sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- elle a relevé appel du jugement dont Mme A...demande l'exécution ;
- les conclusions de Mme A...tendant à ce que la cour " mette en garde M. B...quant aux conséquences encourues de l'usage de menaces " sont irrecevables ;
- les propos tenus à son égard et à l'égard de son conseil sont injurieux, outrageants et diffamatoires et devront être supprimés, en application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative ;
- La Poste devait l'informer que son comportement consistant à diffuser largement le jugement dont elle demande l'exécution pouvait conduire à l'engagement d'une procédure disciplinaire à son encontre ; cet élément n'a aucun lien avec la question de sa réintégration effective ;
- est également sans lien avec sa demande tendant à être réintégrée le fait qu'elle n'aurait pas obtenu de réponse à ses courriers concernant notamment son compte épargne temps, ce qui, au demeurant, est inexact ;
- Mme A...ayant été placée, à sa demande, en congé de longue maladie, sa réintégration n'était pas possible ; La Poste ne pouvait en effet déterminer ses aptitudes médicales afin de lui proposer un poste adapté à son état de santé ; alors qu'elle était placée en congé depuis le mois de novembre 2014, elle a sollicité, le 1er juillet 2016, la prolongation de son congé durant six mois. A la suite de la réunion du comité médical du 12 octobre 2016, elle a finalement été placée en congé durant quatre mois ; les 9 décembre 2016, 9 février 2017, 10 mai 2017, et 27 juillet 2017, elle a de nouveau sollicité la prolongation de son congé de longue maladie durant trois mois ; l'intéressée n'a jamais été contrainte de solliciter son placement en congé de longue maladie ni même le renouvellement de ce congé ; le fait que le comité médical se soit réuni après l'audience du tribunal est sans incidence ;
- l'exécution du jugement attaqué n'implique pas qu'elle soit rétablie dans ses précédentes fonctions de contrôleur opérationnel.
Par un mémoire enregistré le 6 octobre 2017, Mme A...s'en remet à ses conclusions présentées le 15 mai 2017 et ajoute que :
- au 6 octobre 2017, La Poste n'a toujours pas appliqué le jugement du 6 octobre 2016 ayant pourtant annulé la décision du 5 décembre 2013 ayant prononcé son déplacement d'office ;
- elle continue à être tourmentée par la direction ;
- elle n'a eu d'autre choix que de demander la prolongation de son congé de longue maladie, d'autant qu'elle reste menacée d'une procédure disciplinaire.
Par ordonnance du 18 octobre 2017, la clôture d'instruction a fixée en dernier lieu au 30 octobre 2017 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 82-451 du 28 mai 1982 ;
- le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ;
- le décret n° 94-130 du 11 février 1994 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Sabrina Ladoire,
- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public,
- les observations de MeD..., représentant Mme A...et les observations de Me C..., représentant La Poste.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A...était chargée, depuis 2008, de la gestion de crise, en qualité de contrôleur opérationnel rattaché à la direction " Risque, Qualité, Sûreté et Environnement " au sein de la direction opérationnelle territoriale courrier (DOTC) Aquitaine Nord de La Poste. A la suite de difficultés relationnelles avec certains collègues ainsi qu'avec sa hiérarchie, elle a été mutée, par une décision du directeur opérationnel territorial courrier Aquitaine Nord de La Poste en date du 5 décembre 2013, sur un poste de contrôleur de gestion rattaché à la direction financière de la DOTC Aquitaine Nord, avec une date d'effet fixée au 17 décembre suivant. Par un jugement du 6 octobre 2016, le tribunal administratif, après avoir estimé que la décision en cause constituait une sanction disciplinaire déguisée, a annulé cette décision du 5 décembre 2013 et a enjoint au directeur opérationnel de la réintégrer dans les fonctions qu'elle occupait précédemment ou sur un poste équivalent, dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement. La Poste a relevé appel de ce jugement en tant qu'il a annulé la décision du 5 décembre 2013 et en tant qu'il a enjoint au directeur opérationnel de réintégrer Mme A...dans ses précédentes fonctions. Par la présente requête, MmeA..., à défaut d'avoir été réintégrée dans ses fonctions antérieures, demande à la cour, sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, d'assurer l'exécution de ce jugement du 6 octobre 2016, sous astreinte.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative :
2. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. (...) Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte (...) ".
3. Par un arrêt rendu ce jour, sous le n° 16BX03782, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé les articles 1er et 2 du jugement susvisé du 6 octobre 2016 par lesquels le tribunal administratif de Bordeaux avait, d'une part, annulé la décision du 5 juin 2013 du directeur opérationnel territorial de La Poste et, d'autre part, lui avait enjoint de réintégrer Mme A...dans son poste de contrôleur opérationnel au sein de la direction " Risque, Qualité, Sûreté et Environnement " de la DOTC ou sur un poste équivalent. Par suite, les conclusions de Mme A...en vue d'obtenir, sous astreinte, l'exécution de l'article 2 du dispositif de ce jugement du 16 octobre 2016 sont devenues sans objet.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative :
4. Aux termes de l'article L. 741-2 du code de justice administrative : " (...) Ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux. / Pourront néanmoins les juges, saisis de la cause et statuant sur le fond, prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires, et condamner qui il appartiendra à des dommages-intérêts (...) ". Lorsqu'il met en oeuvre le pouvoir qui lui est donné, par les dispositions visées au point précédent, de prescrire la suppression de passages présentant un caractère injurieux, le juge administratif exerce un pouvoir qu'il détient en propre.
5. En premier lieu, le passage incriminé du mémoire de Mme A...du 15 mai 2017 commençant par " Qui peut faire confiance " et finissant par " machiavélisme ", et celui commençant par " qu'il prépare de toute évidence " et se finissant par " sa reprise d'activité à la DSCC ", présentent un caractère diffamatoire pour La Poste. Il y a lieu, par suite, d'en ordonner la suppression en application des dispositions précitées. En revanche, les autres expressions dont La Poste demande la suppression n'excèdent pas le droit à la libre discussion.
6. En deuxième lieu, Me Ruffié, avocat de La Poste a, comme tout tiers, intérêt à la suppression des passages de mémoires présentant à son égard un caractère personnellement injurieux ou diffamatoire. Il est donc recevable à présenter des conclusions en ce sens. En l'occurrence, les passages du mémoire de Mme A...du 15 mai 2017 commençant par " Toujours autant " et finissant par " pas professionnel ", ainsi que celui débutant par " Il est hallucinant " et se terminant par " de la Cour ", présentent un tel caractère au sens des dispositions précitées. Il y a donc lieu d'en ordonner la suppression.
7. Enfin, en l'absence d'un préjudice établi, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de La Poste tendant à obtenir le versement par Mme A...d'une somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts, en application des dispositions précitées de l'article L. 741-2 du code de justice administrative.
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les parties sur le fondement de ces dispositions.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de Mme A...tendant à l'exécution, sous astreinte, de l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 6 octobre 2016.
Article 2 : Les passages mentionnés aux points 5 et 6 du présent arrêt contenus dans les mémoires de Mme A...des 23 mars et 15 mai 2017 sont supprimés.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...A...et à La Poste.
Délibéré après l'audience du 14 décembre 2017 à laquelle siégeaient :
M. Laurent Pouget, président,
Mme Sylvie Cherrier, premier conseiller,
Mme Sabrina Ladoire, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 18 janvier 2018.
Le rapporteur,
Sabrina LADOIRE
Le président,
Laurent POUGET Le greffier,
Christophe PELLETIER
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances, de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 17BX02066