Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du préfet de la Gironde du 14 mars 2017 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1701874 du 10 juillet 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 15 septembre 2017, M.C..., représentée par Me Lanne, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 10 juillet 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté en date du 14 mars 2017 du préfet de la Gironde ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour mention " étudiant " ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le préfet a méconnu les articles L. 313-7 et R. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
-le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que la délivrance d'un titre de séjour est pour lui une nécessité lié au déroulement de ses études ; en effet, il a effectué un stage de spécialité " photo et vidéo " du 1er mai 2015 au 10 août 2015 auprès de l'entreprise Vigne Photo ; il a obtenu le certificat de formation générale délivré par le rectorat de Bordeaux, un diplôme d'études en langue française niveau A2, l'attestation de sécurité routière 1 et 2 ainsi qu'un brevet de sauveteur secouriste du travail ; il dispose d'un " projet d'orientation réfléchi " selon le coordonnateur du dispositif d'insertion des primo arrivants (DIPA) et souhaite devenir ingénieur du son depuis de nombreuses années ; en attestent le fait qu'il a effectué un stage en matière audio visuelle en Ukraine en 2013, la circonstance qu'il est membre de l'association " centre des Festivals France-Russie ", qu'il a travaillé pour l'association " Les maréchaux / Poincaré " et qu'il est inscrit depuis le 19 septembre 2016 à l'école artisanale supérieure d'ingénieur du son ; à la date à laquelle le préfet a adopté sa décision portant refus de séjour, il suivait depuis six mois déjà sa formation à l'EASIS et a obtenu 13,5/20 aux résultats de ses premiers partiels ;
- le préfet a entaché sa décision portant refus de séjour d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation familiale et a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors sa seule attache familiale, sa mère NataliaB..., vit en France avec lui au sein du foyer d'hébergement " La maison de Marie " à Bordeaux ; il est totalement dépourvu d'attaches familiales en Ukraine et n'a notamment plus aucun contact avec son père, de nationalité russe.
Par un mémoire en défense, enregistré 31 octobre 2017, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
M. C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 septembre 2017.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Philippe Pouzoulet a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.C..., né le 11 octobre 1998 à Poltova (Ukraine), est ukrainien. Il est entré régulièrement en France le 31 mars 2015 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour délivré par les autorités lituaniennes. Le 21 septembre 2016, il a sollicité son admission au séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 313-7, L. 313-11-7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il a été muni d'un récépissé de demande de séjour valable du 4 janvier 2017 au 3 mai 2017. Par un arrêté en date du 14 mars 2017, le préfet de la Gironde a rejeté cette demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. C...relève appel du jugement du 10 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité du refus de séjour et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
2. Aux termes des dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant ". En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée et sous réserve d'une entrée régulière en France. (...) ". Selon les dispositions de l'article R. 313-10 du même code : " Peut être exempté, sur décision du préfet, de l'obligation de présentation du visa de long séjour prescrite au 2° de l'article R. 313-1 : 1° L'étranger qui suit en France un enseignement ou y fait des études, en cas de nécessité liée au déroulement des études. Sauf cas particulier, l'étranger doit justifier avoir accompli quatre années d'études supérieures et être titulaire d'un diplôme, titre ou certificat au moins équivalent à celui d'un deuxième cycle universitaire ou d'un titre d'ingénieur. Il est tenu compte des motifs pour lesquels le visa de long séjour ne peut être présenté à l'appui de la demande de titre de séjour, du niveau de formation de l'intéressé, ainsi que des conséquences que présenterait un refus de séjour pour la suite de ses études ; 2° L'étranger qui a suivi une scolarité en France depuis au moins l'âge de seize ans et qui y poursuit des études supérieures. A l'appui de sa demande, l'étranger doit justifier du caractère réel et sérieux des études poursuivies ".
3. M. C...est entré en France le 31 mars 2015 alors qu'il était encore mineur, quelques jours avant le mariage de sa mère, MmeB..., avec un ressortissant français. Il a d'abord effectué un stage de spécialité photo et vidéo dans une entreprise et obtenu le certificat de formation générale dans le cadre du dispositif d'insertion des primo arrivants. Ayant manifesté très tôt la volonté de devenir ingénieur du son, il a commencé en septembre 2016 un cycle d'études de trois ans à l'école artisanale supérieure d'ingénieur du son (EASIS) en bénéficiant d'une bourse. Un bilan d'étape du directeur de l'EASIS établi en janvier 2017 indique que le requérant fait preuve de grandes capacités dans la formation qu'il a choisie et d'une assiduité exemplaire. M. C...occupe un emploi à temps partiel pour subvenir à ses besoins.
4. Il est vrai que M. C...n'est pas entré en France sous couvert d'un visa de long séjour et qu'il n'a pas suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans. A fortiori, il ne peut justifier avoir accompli quatre années d'études supérieures et être titulaire d'un diplôme, titre ou certificat au moins équivalent à celui d'un deuxième cycle universitaire ou d'un titre d'ingénieur. Toutefois, dans les circonstances de l'espèce rappelées au point précédent, compte tenu également des efforts d'intégration accomplis par M.C..., y compris dans l'apprentissage du français, en vue de lui permettre de réussir un cycle de formation commencé à la faveur de l'arrivée en France de sa mère en vue d'un mariage, le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences du refus de séjour en litige en opposant à l'intéressé qu'il n'était pas entré en France sous couvert d'un visa de long séjour. De plus, le fait que la mère de M.C..., en instance de divorce, fait quant à elle l'objet d'un refus de séjour et d'une mesure d'éloignement dont la légalité est confirmée par un arrêt 17BX03120 du même jour est sans incidence sur le droit de M. C...de solliciter un titre de séjour en vue de poursuivre ses études en France.
5. Par suite, M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus de titre de séjour. Par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi doivent être annulées.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
6. Eu égard aux motifs de l'annulation prononcée, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Gironde de procéder, dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, à un nouvel examen de la situation de M.C....
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Lanne, avocat de M.C..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1701874 du 10 juillet 2017 du tribunal administratif de Bordeaux et l'arrêté en date du 14 mars 2017 du préfet de la Gironde sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Gironde de réexaminer la situation de M. C...dans le délai deux mois à compter de la date de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me Lanne la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi n° 91-64 du 10 juillet 1991, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C...est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, au préfet de la Gironde et à Me Lanne.
Délibéré après l'audience du 1er décembre 2017 à laquelle siégeaient :
M. Philippe Pouzoulet, président,
Mme Marianne Pouget, président-assesseur,
Mme Sylvande Perdu, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 22 décembre 2017.
Le président-assesseur,
Marianne Pouget
Le président,
Philippe Pouzoulet
Le greffier,
Florence Deligey
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 17BX03122