Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge du supplément d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2009 dans la catégorie des bénéfices agricoles et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1401120 du 15 septembre 2015, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 17 novembre 2015, M.B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 15 septembre 2015 ;
2°) subsidiairement de lui accorder les plus larges délais de paiement.
Il soutient que :
- contrairement à ce qu'a estimé l'administration fiscale, l'avance consentie à la société civile d'exploitation agricole (SCEA) de Saint-Serrin ne constitue pas une libéralité ; indépendamment des liens familiaux existant entre lui et le gérant de la société, cette société, avec laquelle il entretient des relations commerciales, connaissait des difficultés ; l'entraide est une pratique du secteur agricole conformément au chapitre V du titre II du livre III du code rural et de la pêche maritime ; la société s'est trouvée dans l'impossibilité de rembourser la facture de 38 512,71 euros qui a été réintégrée dans le résultat imposable au titre de l'exercice clos au 30 juin 2009 ;
- il en va de même de l'avance consentie à la SCEA du Domaine de Guillon pour 42 723,63 euros qui faisait l'objet d'un plan de continuation homologué par le tribunal en 2005 ; il entretenait des relations commerciales fréquentes avec cette société et l'avance répondait à un souci d'entraide ; si la clôture de la liquidation pour insuffisance d'actif n'a été prononcée que le 22 août 2013, postérieurement à la clôture de l'exercice le 30 juin 2009, la liquidation a été ouverte par jugement du 6 novembre 2008 ;
- subsidiairement, les sommes avancées à ces sociétés doivent être considérées comme des créances irrécouvrables.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mai 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête de M.B....
Il soutient que les moyens invoqués à l'appui des conclusions en décharge ne sont pas fondés et que la demande tendant à l'octroi de délais de paiement relève de la juridiction gracieuse et est dépourvue d'objet dès lors qu'aucune demande en ce sens n'a été adressée à l'administration.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de commerce ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Elisabeth Jayat,
- et les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M.B..., exerçant une activité d'exploitant viticole, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ayant porté sur la période du 1er juillet 2008 au 30 juin 2011. Le vérificateur a établi un procès-verbal pour défaut de présentation de comptabilité et a reconstitué le chiffre d'affaires réalisé. A l'issue de ce contrôle, M. B...a été assujetti à un supplément d'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices agricoles au titre de l'exercice clos le 30 juin 2009, établi selon la procédure d'évaluation d'office prévue par l'article L. 73 du livre des procédures fiscales, en l'absence de dépôt par le contribuable de la déclaration de ses résultats imposables malgré une mise en demeure. Il fait appel du jugement du 15 septembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette imposition supplémentaire.
2. M.B..., comme en première instance, conteste la réintégration dans son résultat imposable, du montant de deux factures des 21 et 22 octobre 2008, de 38 512,71 euros TTC et 42 723,63 euros TTC, correspondant à des prestations de travaux agricoles réalisées par lui au profit des sociétés civiles d'exploitation agricole (SCEA) de Saint-Serrin et du Domaine de Guillon.
3. Aux termes de l'article L. 325-1 du code rural et de la pêche maritime : " L'entraide est réalisée entre agriculteurs par des échanges de services en travail et en moyens d'exploitation. / Elle peut être occasionnelle, temporaire ou intervenir d'une manière régulière. / L'entraide est un contrat à titre gratuit, même lorsque le bénéficiaire rembourse au prestataire tout ou partie des frais engagés par ce dernier (...) ".
4. Les prestations réalisées par M. B...au profit des SCEA de Saint-Serrin et du Domaine de Guillon ont donné lieu à l'établissement de factures. Dans ces conditions, et alors même que les sociétés clientes ont pour gérant le fils du contribuable et qu'elles connaissaient des difficultés financières, ces prestations ne peuvent être regardées comme réalisées dans le cadre d'un contrat à titre gratuit relevant de l'entraide entre agriculteurs.
5. En vertu des dispositions de l'article 63 du code général des impôts, le bénéfice de l'exploitation agricole est celui qui provient des revenus que l'exploitation de biens ruraux procure aux fermiers, métayers, ou aux propriétaires exploitant eux-mêmes. En application de l'article 38 du même code, auquel renvoie l'article 72 de ce code pour la détermination du bénéfice agricole, le bénéfice imposable est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale. Les abandons de créances accordés par un exploitant au profit d'un tiers ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages, l'exploitant a agi dans son propre intérêt. Il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'un abandon de créance consenti par un exploitant à un tiers constitue un acte anormal de gestion. Toutefois, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que l'entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties.
6. M. B...ne fournit aucun élément à l'appui de son affirmation selon laquelle il aurait entretenu des relations commerciales avec les sociétés de Saint-Serrin et Domaine de Guillon qui auraient justifié l'abandon des créances correspondant aux prestations facturées ou, comme il le soutient, l'avance du prix de ces prestations. A supposer même ces relations commerciales établies, il ne fait état d'aucune contrepartie dont il aurait bénéficié du fait de ces abandons de créances ou de ces avances.
7. Enfin, le caractère irrécouvrable d'une créance ne saurait résulter des seules difficultés financières du débiteur ni de la seule ouverture d'une procédure collective à l'encontre du débiteur, alors surtout que M. B...ne fait état d'aucune démarche entreprise en vue du recouvrement de ses créances et n'allègue notamment pas avoir déclaré sa créance après l'ouverture, par jugement du 6 novembre 2008, d'une procédure de liquidation judiciaire de la SCEA Domaine de Guillon, conformément aux mentions de l'annonce de publication du jugement. Les difficultés financières de la SCEA de Saint-Serrin, à les supposer établies, et l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la SCEA du Domaine de Guillon, qui n'a fait l'objet d'une clôture des opérations pour insuffisance d'actif que par jugement du 22 août 2013 pouvaient, le cas échéant, justifier la constitution de provisions, mais ne traduisent pas, à elles seules, le caractère définitif de la perte des créances concernées avant la clôture de l'exercice le 30 juin 2009. Au surplus, à supposer même ces créances irrécouvrables dès cette date, la perte correspondante ne pouvait donner lieu à déduction des résultats imposables de M. B...dès lors que, comme il a été dit ci-dessus, elles ne se rattachent pas à une gestion normale de l'exploitation.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...qui, comme l'a jugé le tribunal, supporte la charge de la preuve de l'exagération de l'imposition en litige en application de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande.
9. Enfin, il n'appartient pas au juge de l'impôt d'accorder des délais de paiement au contribuable. Ainsi que le soutient l'administration fiscale en défense, les conclusions à cette fin présentées par M. B...ne peuvent être accueillies.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera transmise au directeur du contrôle fiscal sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 28 novembre 2017 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
Mme Christine Mège, président-assesseur,
Mme Florence Madelaigue, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 19 décembre 2017.
Le président-assesseur,
Christine Mège
Le président-rapporteur,
Elisabeth Jayat
Le greffier,
Evelyne Gay-Boissières La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 15BX03685
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