Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Gestion Sécurité Privée (GSP) a demandé au tribunal administratif de Saint-Martin, d'une part, d'annuler le marché de prestations de services, passé le 27 juin 2012, par lequel le centre hospitalier Louis Constant Fleming a confié à la société Zéro Tolérance le gardiennage et la surveillance de ses locaux et, d'autre part, de condamner le centre hospitalier Louis Constant Fleming à lui verser une indemnité d'un montant de 250 000 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de la perte de chance d'obtenir ce marché public.
Par un jugement n° 1200055 du 3 décembre 2015, le tribunal administratif de Saint-Martin, après avoir déclaré la procédure d'attribution irrégulière, a prononcé la résiliation du marché litigieux à compter du 1er janvier 2016, mis à la charge du centre hospitalier de Saint-Martin la somme de 1 200 euros à verser à la société GSP sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus de sa demande.
Procédures devant la cour :
I. Par une requête sommaire, un mémoire ampliatif et un mémoire complémentaire enregistrés les 30 décembre 2015, 9 février 2016 et 10 novembre 2017, sous le n° 15BX04237, le centre hospitalier Louis Constant Fleming, représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 3 décembre 2015 du tribunal administratif de Saint-Martin ;
2°) de rejeter la demande de première instance présentée par la société Gestion Sécurité Privée (GSP) ;
3°) de mettre à la charge de la société GSP la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les écritures de MeC..., mandataire liquidateur, témoignent de ce que l'entière procédure lui a été transmise et que la juridiction d'appel a accepté de reporter tant l'audience publique que la clôture de l'instruction afin de lui permettre de présenter ses observations en défense, de sorte que le respect du principe du contradictoire a été assuré ;
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le second critère, dénommé " technique et projet d'organisation " a été suffisamment explicité pour permettre aux différents candidats d'étayer leurs offres, de sorte que la société GSP ayant obtenu une note pondérée de 0,16 et classée 5ème sur les sept candidats a été mise dans la même situation et les mêmes conditions de concurrence que les différents autres pétitionnaires ;
- à cet égard, après avoir pourtant relevé que le marché avait été conclu à l'issue de la procédure adaptée prévue à l'article 28 du code des marchés publics, les premiers juges ont exigé à tort du pouvoir adjudicateur qu'il publie non seulement les critères de sélection des offres et leur pondération, mais aussi tous les éléments qu'il attendait pour apprécier l'un des critères de sélection des offres, ce qui va au-delà de la jurisprudence du Conseil d'Etat, qui exige seulement, s'agissant de la sélection des offres, que soient portés à la connaissance des candidats les critères de jugement de leur offre et leur pondération ;
- ainsi, tant l'avis d'appel public à la concurrence que le règlement de la consultation, qui mentionnaient à la fois les critères de sélection des offres et les modalités de leur mise en oeuvre, en annonçant une pondération du critère du prix à 60 % et du critère sur la technique et le projet d'organisation à 40 %, étaient suffisants pour assurer l'information des candidats, qui pouvaient toujours solliciter des précisions complémentaires s'ils le voulaient ;
- au reste, la lecture combinée des informations détaillées contenues dans les articles 1 et 4 du règlement de la consultation permettait aux candidats de déterminer les prestations à réaliser, les obligations du prestataire ainsi que les modalités techniques de réalisation de la prestation demandée ;
- d'ailleurs, compte tenu de l'objet du marché, qui consiste uniquement en la réalisation d'une prestation de gardiennage, on se demande quelles autres précisions auraient pu être apportées par le pouvoir adjudicateur ;
- statuant sur les autres moyens soulevés en première instance par la voie de l'effet dévolutif de l'appel, la cour administrative d'appel ne pourra que les rejeter ;
- ainsi, l'allégation de la société GSP selon laquelle le centre hospitalier aurait mené une procédure de passation discriminatoire et aurait fait preuve de favoritisme ne repose sur aucun élément de fait de nature à permettre d'en apprécier le bien-fondé ;
- si la société GSP a soutenu, dans le dernier état de ses écritures, que le pouvoir adjudicateur aurait omis de procéder aux formalités de publicité et de mise en concurrence pour les marchés à procédures adaptées dépassant les seuils fixés à l'article 30 du code des marchés publics, d'une part, le défaut de publication d'un avis d'attribution n'affecte pas la légalité de la procédure de passation du contrat ou la validité du contrat et, d'autre part, le centre hospitalier a fait paraitre un avis d'attribution au BOAMP, mesure de publicité considérée comme suffisante à l'égard des concurrents évincés ;
- ainsi que l'a jugé le tribunal, le moyen de la société GSP, selon lequel le Centre hospitalier aurait faussé la concurrence en adressant un tableau Excel avec une feuille de calcul qu'elle n'aurait pas comprise, n'est pas intelligible tel qu'il est formulé ;
- enfin, si, constatant qu'une ligne manquait au tableau de réponse réclamé à tous les candidats afin d'analyser leur offre de prix, le centre hospitalier a procédé à une rectification, conformément à l'article 52 du code des marchés publics, le tableau modifié a bien été transmis à tous les candidats afin qu'ils le complètent.
Par un mémoire enregistré le 6 novembre 2017, MeC..., agissant es qualité de mandataire liquidateur de la société Gestion Sécurité Privée (GSP), conclut à l'irrecevabilité des actes de procédure dont était saisie la cour ainsi que toutes demandes en paiement dirigées contre la société GSP et à ce que soient mises à la charge du centre hospitalier Louis Constant Fleming, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, les sommes respectives de 1 200 euros et 2 000 euros au titre des frais exposés en première instance puis en appel.
Elle fait valoir que :
- la société Gestion Sécurité Privée (GSP) ayant fait l'objet d'un jugement de liquidation en 2014, les actes de procédure devant la cour étaient irrecevables à défaut d'avoir été adressés au mandataire liquidateur es qualité, conformément à l'article L. 641-9 du code de commerce ;
- pour le même motif, aucune demande en paiement ne peut être dirigée contre la société GSP, en vertu de l'article L. 622-21 du même code ;
- sur le fond, elle s'en remet à la justice.
Par ordonnance du 23 octobre 2017, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 13 novembre 2017.
II. Par une requête enregistrée le 7 janvier 2016, sous le n° 16BX00063, la société Zéro Tolérance, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement susmentionné n° 1200055 du 3 décembre 2015 du tribunal administratif de Saint-Martin ;
2°) de rejeter les demandes de la société Gestion Sécurité Privée (GSP) ;
3) de mettre à la charge de la société GSP la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- si la société GSP a soutenu que la procédure de passation suivie par le centre hospitalier ayant conduit au choix de la société Zéro Tolérance est discriminatoire, non transparente et irrégulière, elle invoque un article L. 511-13 du code de justice administrative inexistant ;
- la société GSP n'a pas démontré avoir satisfait à l'obligation de notification de son recours, pourtant prévue par les dispositions de l'article R. 551-1 du code de justice administrative, de sorte que sa demande de première instance était irrecevable ;
- sur le fond, la société Zéro Tolérance laisse le soin à la cour d'apprécier le respect des règles de passation du marché que le tribunal administratif n'a même pas pris le soin de débattre.
Par deux mémoires enregistrés les 27 octobre 2016 et 10 novembre 2017, le centre hospitalier Louis Constant Fleming, représenté par MeB..., demande à la cour de prononcer la jonction de cette seconde requête n° 16BX00063 avec la première requête n°15BX04237, d'annuler le jugement susmentionné du 3 décembre 2015 du tribunal administratif de Saint-Martin et de rejeter la demande présentée par la société Gestion Sécurité Privée (GSP).
Il fait valoir que :
- les écritures de MeC..., mandataire liquidateur, témoignent de ce que l'entière procédure lui a été transmise et que la juridiction d'appel a accepté de reporter tant l'audience publique que la clôture de l'instruction afin de lui permettre de présenter ses observations en défense, de sorte que le respect du principe du contradictoire a été assuré ;
- il entend intervenir dans la présente procédure non comme défendeur mais au soutien de la demande de la société Zéro Tolérance ;
- pour le reste, le centre hospitalier entend reprendre l'ensemble de son argumentation développée dans le cadre de sa propre requête d'appel n° 15BX04237.
Par un mémoire enregistré le 6 novembre 2017, MeC..., agissant es qualité de mandataire liquidateur de la société Gestion Sécurité Privée (GSP), conclut à l'irrecevabilité des actes de procédure dont était saisie la cour ainsi que toutes demandes en paiement dirigées contre la société GSP et à ce que soient mises à la charge du centre hospitalier Louis Constant Fleming, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés en appel.
Elle fait valoir que :
- la société Gestion Sécurité Privée (GSP) ayant fait l'objet d'un jugement de liquidation en 2014, les actes de procédure devant la Cour étaient irrecevables à défait d'avoir été adressés au mandataire liquidateur es qualité, conformément à l'article L. 641-9 du code de commerce ;
- pour le même motif, aucune demande en paiement ne peut être dirigée contre la société GSP, en vertu de l'article L. 622-21 du même code ;
- sur le fond, elle s'en remet à la justice.
Par ordonnance du 23 octobre 2017, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 13 novembre 2017.
III. Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 25 février 2016 et 10 novembre 2017 sous le n° 16BX00778, le centre hospitalier Louis Constant Fleming, représenté par MeB..., demande à la cour de prononcer le sursis à exécution du jugement susmentionné n° 1200055 du 3 décembre 2015 du tribunal administratif de Saint-Martin et de mettre à la charge de la société GSP la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- les écritures de MeC..., mandataire liquidateur, témoignent de ce que l'entière procédure lui a été transmise et que la juridiction d'appel a accepté de reporter tant l'audience publique que la clôture de l'instruction afin de lui permettre de présenter ses observations en défense, de sorte que le respect du principe du contradictoire a été assuré ;
- il est fondé à demander la mise en oeuvre des dispositions de l'article R. 811-15 du code de justice administrative sont applicables au jugement, rendu sur demande d'un candidat évincé de la conclusion d'un contrat administratif, ayant annulé ou résilié le contrat ;
- en l'espèce, la cour devra prononcer le sursis à statuer du jugement dès lors qu'il existe des moyens sérieux de nature à justifier l'annulation ou la réformation du jugement attaqué ainsi que le rejet des conclusions accueillies par le jugement, qu'elle a exposés dans le cadre de sa requête d'appel n° 15BX04237.
Par un mémoire enregistré le 28 octobre 2017, MeC..., agissant es qualité de mandataire liquidateur de la société Gestion Sécurité Privée (GSP), conclut à l'irrecevabilité des actes de procédure dont était saisie la cour ainsi que toutes demandes en paiement dirigées contre la société GSP et à ce que soient mises à la charge du centre hospitalier Louis Constant Fleming, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés en appel.
Elle fait valoir que :
- la société Gestion Sécurité Privée (GSP) ayant fait l'objet d'un jugement de liquidation en 2014, les actes de procédure devant la cour étaient irrecevables à défait d'avoir été adressés au mandataire liquidateur es qualité, conformément à l'article L. 641-9 du code de commerce ;
- pour le même motif, aucune demande en paiement ne peut être dirigée contre la société GSP, en vertu de l'article L. 622-21 du même code ;
- sur le fond, elle s'en remet à la justice.
Par ordonnance du 23 octobre 2017, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 13 novembre 2017.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- les décisions n° 358994 du 4 avril 2014 et n° 383149 du 5 février 2016 du Conseil d'Etat statuant au contentieux ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Axel Basset,
- et les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par avis d'appel public à la concurrence publié le 29 mars 2012 au journal local " Le Pélican " et le 26 mars 2012 au Bulletin officiel d'annonces des marchés publics (BOAMP), le centre hospitalier Louis Constant Fleming a, sur le fondement des dispositions de l'article 30 du code des marchés publics, lancé une procédure adaptée pour l'attribution d'un marché de prestations de services portant sur le gardiennage et la surveillance de ses locaux, attribué alors pour une durée de six mois à la société Gestion Sécurité Privée (GSP) à la suite du placement en liquidation judiciaire, en octobre 2011, de son précédent attributaire, la société Antilles Sécurité. Après examen des offres proposées par les sept entreprises candidates, sur la base des deux critères prévus par le règlement de la consultation portant sur le prix (60 %) et la technique et le projet d'organisation (40 %), le centre hospitalier a informé la société Gestion Sécurité Privée, par lettre datée du 18 juin 2012, que son offre, classée en 5ème position avec la note totale de 71,24%, n'avait pas été retenue au profit de celle de la société Zéro Tolérance, classée en première position avec la note de 84,52 %. S'estimant irrégulièrement évincée, la société Gestion Sécurité Privée (GSP) a saisi le tribunal administratif de Saint-Martin aux fins d'obtenir, d'une part, l'annulation du marché litigieux, attribué à la société Zéro Tolérance le 27 juin 2012, et, d'autre part, la condamnation du centre hospitalier Louis Constant Fleming à lui verser une indemnité de 250 000 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de la perte de chance d'obtenir ce marché public. Par un jugement du 3 décembre 2015, ce tribunal, après avoir déclaré la procédure d'attribution irrégulière, a prononcé la résiliation du marché litigieux à compter du 1er janvier 2016, mis à la charge du centre hospitalier de Saint-Martin la somme de 1 200 euros à verser à la société GSP sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus de sa demande. Le centre hospitalier Louis Constant Fleming et la société Zéro Tolérance doivent être regardés, dans les deux requêtes susvisées n° 15BX04237 et 16BX00063, comme demandant l'annulation de ce jugement en tant qu'il a prononcé la résiliation du marché. Le centre hospitalier demande également, sous la requête n° 16BX00778, d'ordonner le sursis à exécution de ce jugement.
2. Les requêtes enregistrées sous les numéros 15BX04237, 16BX00063 et 16BX00778 concernent la contestation de la validité du même marché de prestations de services et présentent à juger des questions communes. Il y a lieu, dès lors, de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur les conclusions aux fins de réformation du jugement attaqué (requêtes n°15BX04237 et 16BX00063) :
3. D'une part, indépendamment des actions dont les parties au contrat disposent devant le juge du contrat, tout concurrent évincé de la conclusion d'un contrat administratif est recevable à former devant ce même juge un recours de pleine juridiction contestant la validité de ce contrat ou de certaines de ses clauses, qui en sont divisibles, assorti, le cas échéant, de demandes indemnitaires. Ce recours doit être exercé, y compris si le contrat contesté est relatif à des travaux publics, dans un délai de deux mois à compter de l'accomplissement des mesures de publicité appropriées, notamment au moyen d'un avis mentionnant à la fois la conclusion du contrat et les modalités de sa consultation dans le respect des secrets protégés par la loi. Saisi de telles conclusions par un concurrent évincé, il appartient au juge, lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité du contrat, d'en apprécier les conséquences. Il lui revient, après avoir pris en considération la nature de l'illégalité éventuellement commise, soit de prononcer la résiliation du contrat ou de modifier certaines de ses clauses, soit de décider de la poursuite de son exécution, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation par la collectivité contractante, soit d'accorder des indemnisations en réparation des droits lésés, soit enfin, après avoir vérifié si l'annulation du contrat ne porterait pas une atteinte excessive à l'intérêt général ou aux droits des cocontractants, d'annuler, totalement ou partiellement, le cas échéant avec un effet différé, le contrat. D'autre part, la décision susvisée n° 358994 du 4 avril 2014 du Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a jugé que le recours qu'elle a défini ne trouve à s'appliquer et quelle que soit la qualité dont se prévaut le tiers, qu'à l'encontre des contrats signés à compter de la lecture de cette même décision. Il en résulte que le recours formé par la société Gestion Sécurité Privée (GSP) contre le contrat en litige, signé antérieurement à cette décision, doit être apprécié au regard des règles applicables avant ladite décision, qui permettaient à tout requérant qui aurait eu intérêt à conclure un contrat administratif d'invoquer tout moyen à l'appui de son recours contre le contrat.
S'agissant du motif d'irrégularité retenu par les premiers juges :
4. D'une part, aux termes de l'article 28 du code des marchés publics, dans sa rédaction applicable au présent marché : " I. - Lorsque leur valeur estimée est inférieure aux seuils de procédure formalisée définis à l'article 26, les marchés de fournitures, de services ou de travaux peuvent être passés selon une procédure adaptée, dont les modalités sont librement fixées par le pouvoir adjudicateur en fonction de la nature et des caractéristiques du besoin à satisfaire, du nombre ou de la localisation des opérateurs économiques susceptibles d'y répondre ainsi que des circonstances de l'achat. / Le pouvoir adjudicateur peut négocier avec les candidats ayant présenté une offre. Cette négociation peut porter sur tous les éléments de l'offre, notamment sur le prix. (...) ". En vertu de l'article 53 de ce code, alors en vigueur : " I. - Pour attribuer le marché au candidat qui a présenté l'offre économiquement la plus avantageuse, le pouvoir adjudicateur se fonde : 1° Soit sur une pluralité de critères non discriminatoires et liés à l'objet du marché, notamment la qualité, le prix, la valeur technique, (...) D'autres critères peuvent être pris en compte s'ils sont justifiés par l'objet du marché ; / 2° Soit, compte tenu de l'objet du marché, sur un seul critère, qui est celui du prix. (...) ". Aux termes de l'article 41 de ce même code, alors en vigueur : " Les documents de la consultation sont constitués de l'ensemble des documents et informations préparées par le pouvoir adjudicateur pour définir l'objet, les caractéristiques et les conditions d'exécution du marché ou de l'accord-cadre. (...) ". Aux termes de l'article 42 de ce code, alors en vigueur : " Les marchés et accords-cadres passés après mise en concurrence font l'objet d'un règlement de la consultation qui est un des documents de la consultation. Ce règlement est facultatif si les mentions qui doivent y être portées figurent dans l'avis d'appel public à la concurrence. / Pour les marchés passés selon une procédure adaptée, le règlement de la consultation peut se limiter aux caractéristiques principales de la procédure et du choix de l'offre. ".
5. Les marchés passés en application du code des marchés publics sont soumis aux principes qui découlent de l'exigence d'égal accès à la commande publique, rappelés par le II de l'article 1er de ce code. Les marchés passés selon la procédure adaptée prévue à l'article 28 du même code, applicable aux marchés mentionnés à l'article 30 du même code, sont soumis aux dispositions de son article 1er, comme tous les contrats entrant dans le champ d'application de celui-ci. Il appartient au pouvoir adjudicateur, y compris lorsqu'il met en oeuvre une telle procédure adaptée, d'assurer l'information appropriée des candidats sur les critères de sélection de ces candidatures dès l'engagement de la procédure d'attribution du marché, dans l'avis d'appel public à concurrence ou le cahier des charges tenu à la disposition des candidats. Cette information appropriée suppose que le pouvoir adjudicateur indique aussi les documents ou renseignements au vu desquels il entend opérer la sélection des candidatures.
6. D'autre part, l'article 3-10 du règlement de la consultation du marché litigieux précisait que le " contenu du dossier de la consultation (liste des pièces à fournir au candidat par l'acheteur public) " se composait des quatre documents suivants : " - règlement de la consultation (RC) ; - acte d'engagement (AE) et ses annexes éventuelles ; - cahier des clauses particulières (CCP) ; - décomposition du prix global et forfaitaire (DPGF). Aux termes de l'article 1-1 du cahier des clauses particulières du marché : " Les stipulations de ce cahier des clauses particulières (CCP) ont pour objet la réalisation des prestations de gardiennage et de surveillance permettant d'assurer la sécurité des personnes et des biens dans l'enceinte du CH Saint Martin. / Les prestations à réaliser sont énumérées ci-après : - contrôle d'accès des véhicules et des personnes ; - surveillance et de la gestion des alarmes techniques aboutissant dans un PC de sécurité (supervision) ; - interventions concernant tous les facteurs de risque (incendie, inondation, etc...) ; - rondes de sécurité à l'intérieur et à l'extérieur des bâtiments en suivant, de nuit, WE et jours fériés un trajet vérifiable par un système de rondier. Rondes à effectuer toutes les 4 heures. / Fournir en option prix pour placement de ce rondier avec 13 points de contrôle. Les rondes doivent être évaluées par un système électronique permettant l'édition des rapports d'activités sur imprimante. La maintenance du système doit pouvoir assurer son fonctionnement permanent. / Un registre journalier signalant tout incident sur le site doit être tenu et présenté toutes les semaines ou tous les jours où un évènement indésirable se produit au CH ainsi que les rapports des circuits de rondes délivrés par l'imprimante du système électronique. Les remarques faites par le CH doivent obtenir une réponse écrite, sous huitaine, de la part du prestataire. Un responsable de la société doit être joignable 24 h sur 24 par : - les responsables dûment désignés par les autorités du CH ; - les agents du titulaire du marché affectés sur le site / Les prestations faisant l'objet du présent marché doivent être conformes à la réglementation en vigueur ". Aux termes de l'article 1-4 de ce même cahier, relatif aux " prestations de base " : " Après notification du marché, le titulaire s'engage à assurer en permanence le gardiennage et la surveillance des installations techniques du CH. / Les installations comprennent : - la détection incendie ; - le contrôle d'accès anti-intrusion GTC ; - les installations d'extinction ; - les installations techniques ; / Tous les agents doivent être munis en permanence de talkies-walkies. / Le prestataire de service assurera les prestations suivantes : - examen des consignes techniques d'exploitation ; - vérification visuelle des installations ; contrôle des défauts de fonctionnement des installations (...) ". L'article 4-1 bis dudit cahier des clauses particulières, relatif aux " prestations spécifiques ", précise que : " L'administration hospitalière pourra également demander au titulaire du marché, à titre exceptionnel, une assistance complémentaire, sans frais supplémentaires, par exemple quand certaines personnalités visiteront l'établissement ". Enfin, aux termes de l'article 4-3 de ce cahier, portant sur la " remise de documentation " : " Dans les 15 jours qui suivent la notification du marché, le titulaire devra obligatoirement communiquer à l'administration, pour vérification : - la liste nominative du personnel affecté sur le site ; - le planning nominatif mensuel prévisionnel et réel ; - les attestations de formation des agents affectés sur le site ; - l'extrait de casier judiciaire n° 3 des agents affectés sur le site ; - la fiche de compétence du responsable de site. ".
7. Afin de déterminer l'offre économiquement la plus avantageuse des sept entreprises candidates au marché litigieux de gardiennage et de surveillance des locaux du centre hospitalier Louis Constant Fleming, le pouvoir adjudicateur a indiqué, à l'article 5 du règlement de la consultation, que la comparaison des offres se ferait sur la base de deux critères portant sur le prix (60 %) et la technique et le projet d'organisation (40 %). L'article 4 du règlement de la consultation indiquait également aux différents candidats les documents à produire pour soumissionner, et notamment une lettre de candidature, un projet de marché comprenant un acte d'engagement et ses annexes financières ainsi qu'une documentation technique " décrivant l'ensemble des prestations fournies ". En outre, il résulte de la combinaison de l'ensemble des stipulations, précitées au point 6, des articles 1-1, 1-4, 4-1 bis et 4-3 du cahier des clauses particulières (CCP), qui constituait l'un des documents de la consultation qui leur avait été transmis, que les entreprises candidates ont été informées de l'objet du marché, destiné à assurer la sécurité des personnes et des biens dans l'enceinte du centre hospitalier Saint Martin, du contenu exact et détaillé des prestations à réaliser à cet effet, qu'il s'agisse des prestations de base ou des prestations spécifiques, ainsi que la nature des moyens matériels et humains devant être mobilisés quotidiennement. Ainsi, les entreprises candidates pouvaient déduire de l'ensemble de ces indications, avec une précision raisonnable, les éléments qui seraient pris en compte par le centre hospitalier pour apprécier la technicité de leurs offres respectives, alors même que ni le règlement de la consultation ni le cahier des clauses particulières n'avaient expressément indiqué que ces différents éléments relevaient de ce second critère. Par suite, et contrairement à ce qu'ont relevé les premiers juges, en définissant ainsi un tel critère d'appréciation des offres, qui n'était pas imprécis, le centre hospitalier Louis Constant Fleming n'a pas porté atteinte aux principes de transparence et d'égal accès des entreprises à la commande publique. Il s'ensuit que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a déclaré, pour ce motif, la procédure d'attribution du marché litigieux irrégulière.
8. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par la société Gestion Sécurité Privée (GSP) devant le tribunal administratif de Saint-Martin.
S'agissant des autres moyens soulevés devant les premiers juges :
9. En premier lieu, en se bornant à faire valoir que " l'attribution du marché a été faite selon des critères économiques " et que la société Zéro tolérance, attributaire du marché, a repris le personnel employé anciennement par la société GSP, ce qu'elle était d'ailleurs tenue de faire en application de l'article L. 1224-1 du code du travail, la société Gestion Sécurité Privée (GSP) n'établit pas que le pouvoir adjudicateur aurait fait preuve d'un comportement discriminatoire à son égard et aurait entendu favoriser la société Zéro tolérance lors de l'examen des offres.
10. En deuxième lieu, aux termes de l'article 26 du code des marchés publics, alors en vigueur : " (...) II. - Les marchés et accords-cadres peuvent (...) être passés selon une procédure adaptée, dans les conditions définies par l'article 28, lorsque le montant estimé du besoin est inférieur aux seuils suivants : (...) 2° 200 000 euros HT pour les marchés de fournitures et de services des collectivités territoriales, des établissements publics de santé et des établissements du service de santé des armées ; (...) ". Aux termes de l'article 30 de ce même code, alors en vigueur et rendu applicable au marché en litige en vertu de l'article 3-1 du règlement de la consultation établi par le centre hospitalier : " I. - Les marchés et les accords-cadres ayant pour objet des prestations de services qui ne sont pas mentionnées à l'article 29 peuvent être passés, quel que soit leur montant, selon une procédure adaptée, dans les conditions prévues par l'article 28. (...) ".
11. Si la société GSP a soutenu, dans sa requête introductive d'instance enregistrée le 17 août 2012 au greffe du tribunal administratif de Saint-Martin, que le centre hospitalier appelant a sciemment cherché à se soustraire aux règles de passation des marchés publics en recourant à une procédure adaptée sur le fondement de l'article 30 du code des marchés publics, alors que le montant du marché en cause était supérieur à 200 000 euros, l'intéressée a reconnu elle-même, dans son mémoire complémentaire enregistré le 5 avril 2013, qu'une telle procédure adaptée était licite dès lors qu'en l'espèce, les prestations de surveillance et de gardiennage, objet du marché litigieux, ne figuraient pas à l'article 29 du même code et pouvaient ainsi être dévolues, quel que soit leur montant, selon une procédure adaptée, et ce alors même que la valeur estimée des prestations excédait le seuil de 200 000 euros fixé par le 2° du II de l'article 26 dudit code. Par suite, le moyen tiré de ce que le pouvoir adjudicateur aurait commis un détournement de pouvoir et de procédure doit être écarté.
12. En troisième lieu, aux termes de l'article 85 du code des marchés publics, alors en vigueur : " I. - Pour les marchés et accords-cadres donnant lieu à l'une des procédures formalisées et pour les marchés de services relevant de l'article 30 d'un montant égal ou supérieur à 200 000 euros HT, le pouvoir adjudicateur envoie pour publication, dans un délai maximal de quarante-huit jours à compter de la notification du marché ou de l'accord-cadre, un avis d'attribution. Le pouvoir adjudicateur est dispensé d'envoyer un avis d'attribution pour les marchés fondés sur un accord-cadre. (...) / II. - L'avis d'attribution est publié dans l'organe qui a assuré la publication de l'avis d'appel public à la concurrence et selon les mêmes modalités de transmission que celles définies à l'article 40 du présent code. (...) / IV. - Pour les marchés relevant de l'article 30 d'un montant égal ou supérieur à 200 000 euros HT, le pouvoir adjudicateur adresse l'avis d'attribution à l'Office des publications officielles de l'Union européenne et au Bulletin officiel des annonces des marchés publics en indiquant s'il en accepte la publication. (...). ".
13. Si la société GSP soutient que le pouvoir adjudicateur a négligé de transmettre pour publication l'avis d'attribution du marché litigieux au Journal officiel de l'Union européenne et au bulletin officiel des annonces de marchés publics, un tel manquement, à le supposer même établi, est postérieur à la passation du marché et, partant, sans incidence sur sa validité.
14. En quatrième et dernier lieu, le moyen soulevé par la société GSP et tiré de ce que le centre hospitalier a faussé la concurrence en lui adressant un tableau " Excell " verrouillé avec une formule de calcul qu'elle n'a pas comprise et dont les résultats ne correspondaient pas à ses propres calculs, n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé et la portée.
15. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer la fin de non-recevoir opposée par la société Zéro Tolérance à la demande de première instance, que le centre hospitalier Louis Constant Fleming et ladite société sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Martin, après avoir déclaré irrégulière la procédure d'attribution, a prononcé la résiliation du marché litigieux à compter du 1er janvier 2016.
Sur les conclusions aux fins de sursis à exécution (requête n° 16BX00778) :
16. La cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions à fin d'annulation du jugement du tribunal administratif de Saint-Martin du 3 décembre 2015, les conclusions de la requête n° 16BX00778 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du même jugement sont devenues sans objet.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
17. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier Louis Constant Fleming, qui n'est pas, dans les présentes instances, la partie perdante, une quelconque somme à verser Me C..., agissant es qualité de mandataire liquidateur de la société Gestion Sécurité Privée (GSP), au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Gestion Sécurité Privée les sommes que le centre hospitalier Louis Constant Fleming et la société Zéro Tolérance demandent sur le fondement de ces mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 16BX00778 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° 1200055 du tribunal administratif de Saint-Martin du 3 décembre 2015.
Article 2 : Le jugement n° 1200055 du tribunal administratif de Saint-Martin du 3 décembre 2015 est annulé.
Article 3 : La demande présentée par la société Gestion Sécurité Privée devant le tribunal administratif de Saint-Martin est rejetée.
Article 4 : Les conclusions du centre hospitalier Louis Constant Fleming, de la société Zéro Tolérance et de Me C...présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Me D...C...liquidateur judiciaire de la société Gestion Sécurité Privée, au centre hospitalier Louis Constant Fleming et à la société Zéro Tolérance. Copie en sera transmise au ministre des outre-mer.
Délibéré après l'audience du 27 novembre 2017, à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
M. Gil Corneaux, président assesseur,
M. Axel Basset, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 18 décembre 2017.
Le rapporteur,
Axel BassetLe président,
Pierre LarroumecLe greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre des outre-mer, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Cindy Virin
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N°s 15BX04237, 16BX00063, 16BX00778