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14/12/2017 | FRANCE | N°16BX02083

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 14 décembre 2017, 16BX02083


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Soregom a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de la décharger du supplément de cotisation foncière des entreprises auquel elle a été assujettie au titre de l'année 2013, pour un montant de 4 507 euros, à raison des installations qu'elle exploite au lieu-dit Pachin sur le territoire de la commune de Damazan, pour son activité de collecte, stockage, tri et valorisation par transformation après broyage de pneus usagés.

Par un jugement n° 1402027 du 26 avril 2016, le tribunal

administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par un...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Soregom a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de la décharger du supplément de cotisation foncière des entreprises auquel elle a été assujettie au titre de l'année 2013, pour un montant de 4 507 euros, à raison des installations qu'elle exploite au lieu-dit Pachin sur le territoire de la commune de Damazan, pour son activité de collecte, stockage, tri et valorisation par transformation après broyage de pneus usagés.

Par un jugement n° 1402027 du 26 avril 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 juin 2016, la société Soregom, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 26 avril 2016 ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

Elle soutient que :

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, l'administration a requalifié à tort d'industrielles les installations que la SCI La Confluence lui donne en location sur ce site depuis mars 2008 ; en effet, son activité principale ne consiste pas à broyer des pneumatiques usagés et à en revendre le broyat mais à collecter, trier les pneumatiques et à en assurer le recyclage, l'activité de transformation représentant moins de 15 % de son chiffre d'affaires global ; le tribunal administratif a procédé à une analyse erronée de ses chiffres d'affaires dès lors qu'il n'est pas possible d'inclure dans l'activité de transformation, le chiffre d'affaires réalisé au titre de la collecte des déchets, son activité principale de collecte n'étant pas conditionnée par le recyclage des pneumatiques sous forme de broyat ; seuls deux salariés sur les vingt-quatre qu'elle emploie à Damazan, sont affectés à l'activité de broyage ; les moyens techniques mis en oeuvre par la société pour l'ensemble de son activité ne sauraient être considérés comme prépondérants ; les moyens de collecte ainsi que les aménagements et constructions doivent être exclus de l'appréciation de l'importance des moyens techniques mis en oeuvre pour l'exercice de son activité de broyage dans la mesure où ces activités sont dissociables ;

- l'administration fiscale s'appuie sur le contrat conclu avec la société SEVIA, qui n'est pourtant pas le seul prescripteur de cette société pour en tirer la conclusion erronée selon laquelle " la collecte fait partie intégrante de l'activité et ne saurait être dissociée de l'opération de broyage-élimination " ;

- l'administration confond " valorisation " et " broyage élimination " alors que le broyage n'est que l'une des formes que peut prendre la valorisation des déchets. La société Soregom est rémunérée par la société SEVIA à raison de 145 euros par tonne valorisée, non en fonction des seuls volumes collectés ayant fait l'objet de broyage mais à chaque fois qu'elle peut justifier d'une valorisation sous les diverses formes prévues par le contrat et la législation ;

- le matériel de broyage représente moins de 25 % des moyens dont dispose la société ; les " installations techniques, matériels et outillages " ne représentent que 37 % du montant total des immobilisations corporelles, terrain et bâtiment ; la surface occupée par le matériel de broyage est infime par rapport à la surface totale du terrain.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 décembre 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- l'activité de l'entreprise consiste, à titre principal, à collecter, broyer des pneumatiques usagés et à en revendre le broyat ;

- la broyeuse, l'équipement de transformation des pneumatiques, joue un rôle central dans l'activité exercée ; son coût, de 558 142 euros au moment de l'achat, est très élevé au regard des autres immobilisations inscrites au bilan de la société ; la présence de seulement deux employés pour en assurer le fonctionnement confirme le caractère essentiel de la force motrice et de l'automatisation du site et, par suite, le caractère industriel de l'activité ; sept camions et une remorque, représentant un montant de 558 450 euros, collectent les pneumatiques usagés sur les différents sites, alimentent la broyeuse par leur chargement, puis transportent le broyat ; les camions, ainsi que l'aménagement du plateau technique, s'insèrent donc nécessairement dans le processus de transformation industrielle ; les aménagements de terrain, plateforme, conteneurs, aire de stockage sont comptabilisés pour une valeur de 810 425 euros ; c'est la totalité des moyens utilisés par l'entreprise, à l'exception des moyens généraux qui représentent 96 322 euros, qui jouent un rôle prépondérant dans le processus mis en oeuvre au sein de l'établissement ; les moyens de stockage et de broyage représentent 96 % des moyens techniques indispensables, et non 37 %, comme le soutient la requérante ;

- l'activité de transformation représente 94 % et 96 % du chiffre d'affaires total des années 2009 et 2010, le reste ne représentant que 6 % et 4 % de son chiffre d'affaires au titre de ces mêmes années ; la société a quasi exclusivement une activité de collecte et de transformation en vue du recyclage ; pour obtenir le " Draingom ", il est indispensable de procéder à la collecte et au broyage des pneus usagés, de sorte que la collecte fait partie intégrante de l'activité et ne saurait être dissociée de l'opération de broyage/élimination ;

- l'établissement a donc bien un caractère industriel, au sens de l'article 1499 du code général des impôts, tant par la nature de l'activité exercée, que par l'existence d'importants moyens de transformation mis en oeuvre à cette fin ; il doit donc être évalué pour l'assiette de la taxe foncière, selon la méthode comptable.

Par ordonnance du 12 juin 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 26 juillet 2017 à 12h00.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sabrina Ladoire,

- et les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société civile immobilière La Confluence est propriétaire à Damazan (Lot-et-Garonne) d'un terrain aménagé de 2,7 hectares, équipé de bureaux et d'un plateau technique, qui est donné depuis mars 2008 en location à la société Soregom, laquelle exerce une activité de collecte, tri, stockage et valorisation de pneumatiques usagés. La valeur locative des biens passibles de la taxe foncière a initialement été déterminée selon la méthode par comparaison prévue au 2° de l'article 1498 du code général des impôts. A l'issue d'une vérification de comptabilité, l'administration fiscale a estimé que cette valeur locative devait être évaluée selon la méthode propre aux établissements industriels, prévue à l'article 1499 du code général des impôts. La société Soregom a été en conséquence assujettie d'un supplément de cotisation foncière des entreprises au titre de l'année 2013 pour un montant de 4 507 euros. Elle relève appel du jugement n° 1402027 du 26 avril 2016, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande à fin de décharge de cette imposition.

2. Aux termes du 1° de l'article 1 447 du code général des impôts : " La cotisation foncière des entreprises est due chaque année par les personnes physiques ou morales (...) qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée (...) ". L'article 1467 de ce code dispose que : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, à l'exclusion des biens exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu des 11° et 12° de l'article 1382, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de ceux qui ont été détruis ou cédés au cours de la même période (...) ".

3. Les règles suivant lesquelles est déterminée la valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties sont différemment définies, à l'article 1496 du code général des impôts pour ce qui est des " locaux affectés à l'habitation ou servant à l'exercice d'une profession autre qu'agricole, commerciale, artisanale ou industrielle ", à l'article 1498 en ce qui concerne " tous les biens autres que les locaux d'habitation ou à usage professionnel visés à l'article 1496-1 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 ", à l'article 1499 s'agissant des " immobilisations industrielles ". Revêtent un caractère industriel, au sens de cet article, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en oeuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant.

4. Il résulte de l'instruction que la société Soregom effectue le ramassage de pneumatiques usagés dans plusieurs départements puis procède, sur son site de Damazan, au stockage de ces pneus, à leur tri, puis à leur valorisation essentiellement sous la forme de production d'un matériau obtenu par broyage dénommé " Draingom ", et livre le restant des pneus usagés aux déchetteries en vue de leur destruction. La vente de " Draingom " a représenté en 2009 et 2010 respectivement 93 et 94 % du chiffre d'affaires de la société. Comme l'a relevé le tribunal administratif, les activités de la société Soregom sont réalisées grâce à des moyens techniques importants, c'est-à-dire sept camions, une remorque, un pont bascule, trois bennes de stockage, un chariot Komatsu, un broyeur, un trieur, une plateforme trémie. L'ensemble des immobilisations affectées au transport, au stockage et au broyage des pneus collectés représente 61,28 % de l'ensemble des immobilisations comptabilisées. Ainsi que l'a encore relevé le tribunal administratif, l'activité de transformation des pneus en matériau de remblai ne peut être artificiellement séparée dans le processus de fabrication des phases préalables nécessaires de collecte, de tri, de traitement et de stockage qui mobilisent l'essentiel du personnel du site. C'est à juste titre qu'en définitive, le tribunal administratif a estimé qu'au regard de leur importance et de leur place dans les processus de valorisation par transformation des pneus usagés mis en oeuvre par la société Soregom sur le site aménagé de Damazan, par ailleurs installation classée pour la protection de l'environnement, les moyens techniques mis en oeuvre avaient un caractère prépondérant dans l'exploitation du site, de sorte que l'administration avait pu à bon droit évaluer la valeur locative des biens passibles de la taxe foncière selon la méthode applicable aux établissement industriels.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la société Soregom n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Les dispositions de l'article L. 761-l du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société Soregom au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Soregom est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Soregom et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 15 novembre 2017 à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

Mme Sabrina Ladoire, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 14 décembre 2017.

Le rapporteur,

Sabrina LADOIRE Le président,

Aymard de MALAFOSSE Le greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition certifiée conforme.

2

N° 16BX02083


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX02083
Date de la décision : 14/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-045-03-01 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Sabrina LADOIRE
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : CABINET LOYVE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-12-14;16bx02083 ?
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