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12/12/2017 | FRANCE | N°15BX04197

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 12 décembre 2017, 15BX04197


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Covéa Fleet a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Bordeaux à lui verser la somme de 87 273,63 euros.

La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Gironde a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner le CHU de Bordeaux à lui payer la somme de 43 184,95 euros en remboursement de ses débours ainsi que la somme de 1 028 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Par un jugement n° 13

04223 du 3 novembre 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné le CHU de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Covéa Fleet a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Bordeaux à lui verser la somme de 87 273,63 euros.

La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Gironde a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner le CHU de Bordeaux à lui payer la somme de 43 184,95 euros en remboursement de ses débours ainsi que la somme de 1 028 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Par un jugement n° 1304223 du 3 novembre 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné le CHU de Bordeaux à verser la somme de 66 444,55 euros à la société Covéa Fleet, subrogée dans les droits de la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde, et a rejeté les conclusions de la CPAM.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 24 décembre 2015, le 23 février et le 5 octobre 2017, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Gironde, représentée par la SELARL Bardet et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 3 novembre 2015 en tant qu'il a rejeté ses demandes ;

2°) de condamner le CHU de Bordeaux à lui verser la somme de 43 184,95 euros en remboursement de ses débours, assortie des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir, et la somme de 1 055 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par les dispositions de l'ordonnance du 24 janvier 1996 ;

3°) de mettre à la charge du CHU de Bordeaux la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La CPAM de Gironde soutient que les débours exposés pour le compte de M.D..., pour la somme de 43 184,95 euros correspondant à des prestations en nature et des frais divers, sont strictement imputables à l'infection nosocomiale qu'il a contractée au CHU de Bordeaux et non à l'accident initial dont il a été victime le 27 février 1999, ainsi qu'en atteste son médecin conseil, seul à même de justifier du bien fondé de la créance de la caisse.

Par un mémoire, enregistré le 14 juin 2016, les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles, venant aux droits de la société Covéa Fleet, représentées par MeA..., demandent à la cour :

1°) de réformer le jugement du 3 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a limité à la somme de 66 444,55 euros l'indemnité versée au bénéfice de la société Covéa Fleet à laquelle il a condamné le CHU de Bordeaux ;

2°) de porter à la somme de 87 273,63 euros le montant de l'indemnité due par le CHU de Bordeaux aux sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles et le condamner à leur rembourser les frais d'expertise ;

3°) de mettre à la charge du CHU de Bordeaux la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et le condamner aux entiers dépens.

Les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles soutiennent que :

- leur intervention volontaire est justifiée et qu'aucune condamnation ne saurait être prononcée à l'encontre de Covéa Fleet ;

- c'est à juste titre que le tribunal a estimé que Covéa Fleet devait être regardée comme subrogée à due concurrence des sommes versées dans les droits respectifs de M. D...et de la CPAM de la Gironde ;

- Covéa Fleet est bien fondée à solliciter du CHU de Bordeaux le remboursement des sommes réglées en réparation des préjudices subis par M. D...qui sont imputables à une infection nosocomiale contractée à l'hôpital ;

- elles s'opposent à l'organisation d'une nouvelle mesure d'expertise ;

- venant aux droits de Covéa Fleet, elles sont bien fondées à solliciter le remboursement des sommes versées en réparation des dommages en lien direct et certain avec la première infection nosocomiale subie par M.D..., dont la somme de 23 317,08 euros au titre des 15 jours d'hospitalisation supplémentaires en mars-avril 1999 pour le traitement de l'infection de l'hématome de cuisse et non 8 860 euros comme octroyé par le tribunal qui devra être réformé sur ce point, la somme de 4 824,92 euros au titre de l'antibiothérapie et de la surveillance du processus infectieux jusqu'en juin 1999, la somme de 28 633 euros et celle de 24 124,63 euros pour les soins, interventions et hospitalisations, la somme de 534 euros pour l'ITT du 6 janvier au 16 février 2000, la somme de 1 974 euros correspondant à l'ITT du 6 avril 1999 au 18 juin 1999 et les ITP du 17 février au 4 novembre 2000 évaluées à 20 % et à 10 % du 5 novembre 2000 au 16 janvier 2002, la somme de 4 000 euros au titre de la majoration des souffrances endurées de 2.5 sur 7 et de 400 euros au titre de la majoration du préjudice esthétique de 0,5/7, soit un total de 87 273,63 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 janvier 2017, le centre hospitalier universitaire de Bordeaux, représenté par Me E...conclut :

1°) au rejet de la requête principale de la CPAM de la Gironde et de l'appel formé par MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles ;

2°) par la voie de l'appel incident, demande :

- de réformer le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il l'a condamné à verser à la société Covéa Fleet la somme de 66 444,55 euros ;

- de réduire le montant de l'indemnité due à la société Covéa Fleet aux droits de laquelle interviennent MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles ;

3°) de mettre à la charge de la CPAM de la Gironde, des sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles la somme de 2 600 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Le CHU de Bordeaux soutient que :

- pour critiquer les sommes qui leur ont été attribuées, la requérante et les intervenantes ne peuvent se borner à faire état des sommes qu'elles ont versées à M. D...et à la caisse d'assurance maladie et qu'elles ne justifient pas au titre de divers préjudices, la transaction n'étant pas opposable au tiers responsable. Par ailleurs, seules peuvent être prises en considération celles qui ont été en relation avec les fautes qui lui sont imputées, à savoir l'infection qui n'a fait qu'aggraver le dommage résultant du traumatisme initial causé par l'accident dont M. D...a été victime ;

- le tribunal l'a, à tort, condamné à verser une somme de 52 757,63 euros sur le seul fondement que la requérante avait été payée par l'assureur, alors que certains de ces frais devaient être remboursés au titre de l'action subrogatoire exercée pour le compte de la CPAM, et d'autres représentant le remboursement de préjudices personnels de la victime devaient être comptés au titre de l'action subrogatoire exercée pour le compte de la victime pour une somme bien inférieure s'agissant de la seule imputabilité à l'infection. En outre, le décompte de la caisse s'agissant des frais médicaux et pharmaceutiques, des soins infirmiers et autres et des frais de transport ne fait aucune distinction entre ce qui relève du traitement de l'accident initial et ce qui relève de l'infection nosocomiale ;

- la caisse d'assurance maladie n'est pas fondée à faire état de frais remontant à la période 1999-2002 dès lors qu'elle a été indemnisée, pour les frais correspondant à cette période, par l'assureur du responsable de l'accident, c'est à dire la société Covéa Fleet. Pour la période 2007, à aucun moment, il n'a été reconnu que le CHU de Bordeaux fût responsable d'un préjudice lié aux soins pratiqués sur M. D...et l'expertise ordonnée par le juge judiciaire est insuffisante pour faire droit à la demande de la caisse pour la période 2007.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique,

- le code de la sécurité sociale,

- la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985,

- l'arrêté du 26 décembre 2016 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Chauvin,

- les conclusions de M. Katz, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant la société MMA Iard venant aux droits de la société Covea Fleet.

Considérant ce qui suit :

1. M.D..., né le 16 mars 1972, a été hospitalisé en urgence le 27 février 1999 au centre hospitalier universitaire (CHU) de Bordeaux après un accident impliquant un bus de la société CGFTE, assurée par la compagnie d'assurance Azur. Il y a subi, en raison d'une fracture ouverte du fémur droit, le jour même, un parage de la plaie articulaire du genou droit et une mise en traction du fémur par broche puis, le 3 mars 1999, une ostéosynthèse par enclouage centromédullaire statique. Le 17 mars 1999, un examen cytobactériologique réalisé à partir d'un prélèvement d'un hématome présent sur la cuisse droite a mis en évidence la présence de pseudomonas aeruginosa et d'un staphylocoque doré qui a conduit à une prolongation de son hospitalisation et la mise en oeuvre d'une antibiothérapie prolongée. Par jugement

du 3 novembre 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a déclaré le CHU de Bordeaux responsable des conséquences dommageables résultant de l'infection nosocomiale contractée par M. D...dans cet établissement le 3 mars 1999, a partiellement fait droit à l'action subrogatoire de la société Covéa Fleet, venue aux droits de la société Azur Assurances, laquelle avait versé une indemnité de 32 754 euros à M. D...en réparation des préjudices consécutifs à l'accident du 27 février 1999 et une somme de 93 537,77 euros à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Gironde au titre du remboursement des frais engagés à la suite de la prise en charge de cet accident et, a rejeté les conclusions présentées par la CPAM tendant au remboursement des débours exposés. Cette dernière relève appel de ce jugement. Les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles, venant aux droits de la société Covéa Fleet demandent à la cour la réformation de ce jugement en tant qu'il a limité à la somme

de 66 444,55 euros l'indemnité à laquelle il a condamné le CHU de Bordeaux et de la porter à la somme de 87 273,63 euros. Le CHU conclut au rejet de la requête de la CPAM et présente à titre incident des conclusions tendant à la réduction du montant de l'indemnité due.

Sur la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Bordeaux :

2. Il y a lieu par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'ailleurs non sérieusement contestés par les parties, de juger que la contamination de M. D...au cours de l'intervention réalisée le 3 mars 1999 au CHU de Bordeaux, révèle une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service hospitalier de nature à engager la responsabilité du CHU de Bordeaux, à qui il incombe de fournir au personnel médical un matériel et des produits stériles.

Sur l'évaluation des préjudices :

3. La nature et l'étendue des réparations incombant à une collectivité publique en raison d'une faute dont la responsabilité lui est imputée doivent être déterminées par le juge administratif compte tenu des règles relatives à la responsabilité des personnes morales de droit public et indépendamment des sommes qui ont pu être exposées à titre d'indemnité ou d'intérêts. Lorsqu'il procède à l'évaluation des préjudices subis afin de fixer le montant des indemnités dues à l'assureur subrogé dans des droits de la victime, le juge n'est ainsi pas lié par le contenu de la transaction intervenue entre l'assureur de l'auteur du dommage et les victimes à laquelle la collectivité publique n'était au demeurant pas partie.

En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :

4. Il résulte de l'instruction et en particulier du rapport du Dr C...désigné en qualité d'expert par ordonnance du tribunal administratif de Bordeaux du 6 octobre 2008, que M. D... a subi en lien direct et exclusif avec la première infection nosocomiale dont il a été victime, " quinze jours d'hospitalisation supplémentaire en mars-avril 1999, pour le traitement de l'infection de l'hématome de la cuisse, l'antibiothérapie et la surveillance du processus infectieux jusqu'en juin 1999, les soins, hospitalisations (déduction faite de 48 H), interventions· (sauf ablation du clou) antibiothérapie de fin 1999 à fin 2000 et surveillance jusqu'en début 2002 ".

5. S'agissant des frais hospitaliers, les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles demandent le remboursement de la somme de 23 317,08 euros, laquelle correspond, selon le décompte des débours produit par la CPAM de la Gironde, à la période allant du

27 février 1999 au 6 avril 1999. C'est à juste titre que les premiers juges ont condamné le

CHU de Bordeaux à verser à la société Covéa Fleet aux droits de laquelle les sociétés appelantes viennent, la somme de seulement 8 860 euros correspondant aux quinze jours d'hospitalisation supplémentaires supportées par M. D...en mars-avril 1999 pour le traitement de l'infection de l'hématome de la cuisse en lien direct et exclusif avec la faute reprochée.

6. Les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles demandent également le remboursement des frais engagés au titre de l'antibiothérapie et de la surveillance du processus infectieux jusqu'en juin 1999, pour un montant de 4 824,92 euros et pour les soins, interventions et hospitalisation de la fin de l'année 1999 à la fin de l'année 2000 et de surveillance jusqu'en début 2002, pour un montant total de 52 757,53 euros que la société Covéa Fleet soutient avoir versé à la CPAM de la Gironde.

7. Il résulte de l'instruction et notamment du rapprochement du décompte des débours remboursés par la société Azur assurance aux droits de laquelle est venue la société Covéa Fleet avec les préjudices listés dans le rapport d'expertise rappelés au point 4 et avec l'attestation d'imputabilité du médecin conseil de la caisse du 14 décembre 2009 détaillant les prestations facturées pour l'infection nosocomiale, que la CPAM a déboursé pour le compte de M. D...une somme totale de 9 604,99 euros pour son hospitalisation dans le service des maladies infectieuses du professeur Dupont du 10 novembre au 26 novembre 1999, du 13 au

14 mars 2000, du 24 au 25 août 2000, du 25 au 26 septembre 2000 et le 24 novembre 2000. Les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances sont fondées à réclamer auprès du CHU le remboursement de ces prestations en lien direct et exclusif avec l'infection nosocomiale contractée le 3 mars 1999.

8. En revanche, les pièces versées au dossier ne permettent pas de distinguer parmi les frais médicaux et pharmaceutiques acquittés auprès de la caisse pour un montant respectif de 9 532,12 euros et de 19 417,43 euros, ceux qui seraient en lien exclusif avec l'infection nosocomiale contractée par M. D...lors de l'intervention chirurgicale du 3 mars 1999. En effet, il résulte du décompte des débours précité que les frais en cause couvrent la période

du 22 mars 1999 au 16 février 2001 et du 21 avril 1999 au 16 février 2001, alors que le médecin conseil de la caisse atteste de prestations pour cette infection correspondant à des soins infirmiers au domicile pour pansements et injections du traitement antibiotique du 4 octobre 1999

au 6 janvier 2000, du matériel pour pansements facturés les 4, 9 et 27 octobre 1999,

27 novembre 1999, 17 et 23 décembre 1999, 5 janvier 2000 et des frais pharmaceutiques facturés du 25 octobre 1999 au 24 mars 2000 qui ne couvrent donc pas l'ensemble de la période concernée. La demande des sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles devra, par suite, être rejetée sur ce point.

9. Il résulte de ce qui précède que le CHU de Bordeaux est fondé, par la voie de l'appel incident, à demander la réformation du jugement attaqué. La somme qu'il a été condamné à verser à la société Covéa Fleet au titre des préjudices patrimoniaux sera ramenée à 18 464,99 euros.

En ce qui concerne les préjudices personnels :

10. Il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport d'expertise précité que M. D... a subi en relation directe avec la faute commise par le CHU de Bordeaux une période d'incapacité totale du 6 janvier au 16 février 2000 (avec déduction de quinze jours pour l'ablation du clou), puis temporaire partielle du 6 avril 1999 au 18 juin 1999 évaluée à 10 %, du 17 février 2000 au 4 novembre 2000 évaluée à 20 % durant laquelle a été mis en oeuvre une antibiothérapie par chambre implantable, et du 5 novembre 2000 au 16 janvier 2002 évaluée à 10 % correspondant à la surveillance en hôpital de jour.

11. Si les sociétés appelantes réclament au titre de l'incapacité temporaire totale de M. D... et au titre de son incapacité temporaire partielle le versement des sommes respectives de 534 et 1 440 euros, en se bornant à joindre l'offre définitive d'indemnisation signée le 4 novembre 2002 par l'intéressé, laquelle permet seulement de connaître la nature des indemnités allouées par la compagnie d'assurance en réparation de l'accident dont il a été victime le 27 février 1999, sans détailler les périodes concernées, elles ne peuvent être regardées comme établissant que les dites sommes auraient été effectivement engagées au titre des préjudices en relation avec l'infection nosocomiale. Elles ne versent aucune nouvelle pièce de nature à établir le lien de causalité entre la faute reprochée au CHU de Bordeaux et ces prestations. En l'absence de justifications, la demande de paiement des sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles ne peut, dès lors, qu'être rejetée.

12. Il en est de même de la demande de réparation de la majoration des souffrances endurées par M. D..., évaluée à 2,5/7 par l'expert en lien direct et exclusif avec l'infection nosocomiale, et du préjudice esthétique de 0,5 sur 7 en raison de la cicatrice liée à la chambre implantable, pour lesquelles les sociétés appelantes réclament le versement des sommes de 4 000 euros et 400 euros sans toutefois justifier les avoir effectivement prises à leur charge dans le cadre du protocole transactionnel. Dans ces conditions, elles ne sont pas fondées à en réclamer le remboursement.

13. Il suit de là que les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles ne sont pas fondées à soutenir que les premiers juges auraient à tort rejeté leur demande de remboursement au titre des sommes versées à M. D...en réparation de ses préjudices personnels.

Sur l'appel de la caisse primaire d'assurance maladie :

14. La CPAM de la Gironde demande le remboursement par le CHU de Bordeaux des débours exposés pour le compte de son assuré, pour la somme définitive de 43 184,95 euros correspondant, selon la liste détaillée en date du 2 décembre 2014, à des frais hospitaliers

le 17 septembre 2007 pour un montant de 1 422 euros, du 30 septembre 2007 au 26 octobre 2007 pour un montant de 30 680 euros, du 29 novembre au 6 décembre 2007 pour un montant de 8 744 euros, des frais médicaux du 4 octobre 1999 au 27 décembre 2007 pour 1 238,93 euros, des frais pharmaceutiques à la même période pour un montant de 1 062,26 euros, des frais de transport le 30 septembre 2007 pour 41,76 euros et de franchises le 27 décembre 2007. Pour justifier de l'imputabilité de ces frais avec l'infection nosocomiale dont M. D... a été victime dans les suites de l'intervention chirurgicale du 3 mars 1999, elle produit une attestation d'imputabilité de son médecin conseil en date du 14 décembre 2009 à laquelle est joint le détail de toutes les prestations facturées à l'assurance maladie, dont celle objet du présent litige, que le médecin indique être en lien direct avec cette infection nosocomiale.

15. Si le CHU de Bordeaux fait valoir que la CPAM n'est pas fondée à faire état de frais remontant à la période 1999-2002 dès lors qu'elle aurait été indemnisée pour cette période par l'assureur du responsable de l'accident, il ne résulte pas de l'instruction et notamment de la comparaison des dates et des prestations mentionnées dans la liste des débours ayant fait l'objet de l'indemnisation par la société Covéa Fleet avec celles des débours définitifs dont la caisse demande le remboursement dans la présente instance, que les prestations en cause auraient déjà fait l'objet d'un remboursement.

16. S'agissant de la période postérieure, il résulte de l'instruction et notamment du rapprochement de ces débours avec l'attestation du médecin conseil, laquelle précise que l'ablation de la chambre implantable posée pour l'administration du traitement antibiotique de l'infection en litige et réalisée lors de deux hospitalisations en septembre et novembre 2007 est à inclure dans la créance de la caisse primaire d'assurance maladie, que les prestations facturées en 2007 sont en lien direct et exclusif avec la faute commise par le CHU de Bordeaux. En effet, il n'est pas sérieusement contesté que les frais liés à l'hospitalisation de M. D...en 2007 et les frais médicaux et pharmaceutiques liés à l'ablation de la chambre implantable, qui s'est aussi compliquée d'une infection, installée afin de pouvoir administrer à l'intéressé un traitement antibiotique au long cours pour traiter l'infection contractée en 1999, n'auraient pas été engagés en l'absence de cette première infection. Aucun élément de l'instruction ne permet de mettre en doute l'attestation émanant du médecin conseil chargé du contrôle médical du régime de la sécurité sociale qui, en vertu des dispositions du décret susvisé du 24 mai 1969, n'est pas salarié de la CPAM et qui n'est pas soumis à la caisse par un lien de subordination hiérarchique. La valeur probante de l'attestation émanant de ce médecin ne saurait être remise en cause qu'en présence d'éléments contraires sérieusement établis. Par l'argumentation qu'il développe, le CHU de Bordeaux n'apporte aucun élément qui puisse remettre en cause le contenu de cette attestation et il n'apparait pas utile d'ordonner une expertise. Par suite, la CPAM de la Gironde, qui justifie que les prestations dont elle fait état sont en relation directe avec l'infection nosocomiale contractée le 3 mars 1999, dont le centre hospitalier est responsable, y compris en ce qui concerne la période postérieure à l'année 2002, est fondée à demander à être remboursée des débours qu'elle a supportés et qu'elle chiffre à la somme de 43 184,95 euros.

17. Il résulte de ce qui précède que la CPAM de la Gironde est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Dès lors, il y a lieu de condamner le CHU de Bordeaux à rembourser à la CPAM de Gironde la somme de 43 184,95 euros.

Sur les intérêts :

18. La CPAM de la Gironde a droit aux intérêts au taux légal de la somme

de 43 184,95 euros à compter de la date du présent arrêt, ainsi qu'expressément demandé dans ses écritures.

Sur l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale :

19. Aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : " (...) En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 910 euros et d'un montant minimum de 91 euros. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget (...) " ;

20. La CPAM de la Gironde a droit à l'indemnité forfaitaire régie par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, pour le montant de 1 055 euros auquel elle a été fixée par l'arrêté du 26 décembre 2016 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la CPAM, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le CHU de Bordeaux demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de ce dernier une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la caisse et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CHU de Bordeaux la somme que les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles demandent au même titre.

DÉCIDE :

Article 1er : Le centre hospitalier universitaire de Bordeaux est condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Gironde une somme de 43 184,95 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Article 2 : Le centre hospitalier universitaire de Bordeaux versera à la caisse primaire d'assurance maladie de Gironde la somme de 1 055 euros au titre de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.

Article 3 : Le centre hospitalier universitaire de Bordeaux est condamné à verser aux sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances la somme totale de 18 464,99 euros.

Article 4 : Le centre hospitalier universitaire de Bordeaux versera à la caisse primaire d'assurance maladie de Gironde une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 17 juin 2015 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié au directeur de la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde, au centre hospitalier universitaire de Bordeaux et aux sociétés MMA Iard et

MMA Iard assurances.

Délibéré après l'audience du 14 novembre 2017, à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Salvi, président assesseur,

Mme Chauvin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 12 décembre 2017

Le rapporteur,

Aurélie ChauvinLe président,

Éric Rey-BèthbéderLe greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 15BX04197


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15BX04197
Date de la décision : 12/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-05-04 Responsabilité de la puissance publique. Recours ouverts aux débiteurs de l'indemnité, aux assureurs de la victime et aux caisses de sécurité sociale. Droits des caisses de sécurité sociale.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Aurélie CHAUVIN
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : CABINET BARDET ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-12-12;15bx04197 ?
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