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27/11/2017 | FRANCE | N°17BX02530

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre - formation à 3, 27 novembre 2017, 17BX02530


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...C...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 27 septembre 2016 du préfet de la Haute-Garonne l'obligeant à quitter sans délai le territoire français et fixant le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1604378 du 4 mai 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 28 juillet et 3 octobre 2017, Mme D...A...C..., représentée par MeE..., de

mande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 4 mai 2017...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...C...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 27 septembre 2016 du préfet de la Haute-Garonne l'obligeant à quitter sans délai le territoire français et fixant le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1604378 du 4 mai 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 28 juillet et 3 octobre 2017, Mme D...A...C..., représentée par MeE..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 4 mai 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 27 septembre 2016 du préfet de la Haute-Garonne susmentionné ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer une autorisation de séjour à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour durant ce réexamen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les décisions portant obligation de quitter le territoire français, refusant de lui accorder un délai de départ volontaire et fixant le pays de renvoi sont insuffisamment motivées au regard des dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre l'administration et le public dès lors qu'elles ne font aucun état de ce qu'elle est mère d'une petite fille née en 2013, scolarisée à proximité de son domicile et de ce qu'elle entretient une relation affective stable et continue avec le père de l'enfant, ressortissant soudanais bénéficiaire de la protection internationale, et qu'elles font en outre faussement état de la naissance de sa fille au Tchad alors qu'elle est née en France ;

- l'insuffisance de motivation de ces décisions révèle un défaut d'examen complet de sa situation personnelle ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation en raison des conséquences d'une exceptionnelle gravité qu'elle emporte sur sa situation personnelle et familiale, dès lors qu'elle entretient depuis son entrée en France une relation stable et durable avec M.B..., qui détient le statut de réfugié et auprès duquel elle vit avec leur fille commune et les six enfants de ce dernier, lesquels sont tous scolarisés, de sorte que la cellule familiale ne peut se reconstituer ailleurs qu'en France ;

- contrairement à ce qu'a considéré le tribunal, les justificatifs qu'elle produit au dossier démontrent qu'elle partage bien une communauté de vie avec M.B..., qui doit être regardé comme s'occupant de leur fille qui vit avec eux ;

- cette même décision est contraire à l'intérêt supérieur de sa fille tel qu'il est garanti par les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990, dès lors qu'elle implique la séparation de sa fille et de son père, ainsi que de ses demi-frères et soeurs qui partagent sa vie ;

- la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire est entachée de plusieurs erreurs de fait dès lors que le préfet y mentionne qu'elle ne présente aucun document d'identité et qu'elle n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente à l'administration, ce qui l'a conduit à inférer à tort qu'elle ne dispose pas de garanties de représentation suffisantes ;

- cette décision, qui constitue une mesure individuelle négative et n'est pas intervenue à sa demande, est entachée d'un vice de procédure dès lors que ses observations n'ont pas été recueillies préalablement à son édiction, en violation des articles L. 121-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration ;

- les circonstances particulières de l'espèce justifiaient qu'un délai de départ volontaire lui soit accordé, de sorte que le refus d'octroi d'un délai de départ volontaire est entaché d'erreur manifeste d'appréciation et d'erreur de droit, le préfet n'étant pas tenu de prendre une telle mesure ;

- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 septembre 2017, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- à titre principal, la requête d'appel devra être rejetée comme irrecevable, faute pour l'intéressée de produire au dossier les justificatifs de ce qu'elle a sollicité l'aide juridictionnelle dans le délai légal d'un mois mentionné par l'article 38 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 à la suite de la notification du jugement attaqué ;

- à titre subsidiaire, il réitère ses observations de première instance quant au caractère infondé des moyens invoqués par l'appelante.

Par ordonnance du 17 août 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 3 octobre 2017.

Mme A...C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 juin 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 pris pour son application ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Axel Basset a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A...C..., ressortissante tchadienne née le 1er janvier 1993 à N'Djamena (Tchad), est entrée une première fois sur le territoire français au cours de l'année 2013 sous couvert d'un visa touristique puis, après avoir donné naissance, le 20 décembre 2013, à une fille issue de son union avec M.B..., ressortissant soudanais bénéficiaire en France du statut de réfugié, avec laquelle elle a rejoint le Tchad, une seconde fois au cours de l'année 2015, selon ses propres dires, munie d'un visa de court séjour d'une durée de quatre vingt dix jours. A la suite de son interpellation par les services de police à Toulouse le 27 septembre 2016, l'intéressée a fait l'objet, le jour-même, d'un arrêté du préfet de la Haute-Garonne portant obligation de quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de renvoi. Mme A...C...relève appel du jugement du 4 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté préfectoral.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; / (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. / L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office. / II. - Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité ou tout autre pays non membre de l'Union européenne ou avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où il est légalement admissible. (...) L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) / b) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2. (...) ". En vertu de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; (...) ". Selon l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".

3. L'arrêté contesté vise les dispositions précitées de l'article L. 511-1 I 2° et II 3° b) et f) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il indique que l'audition de Mme A...C...a révélé sa situation irrégulière sur le territoire national, la durée de validité de son visa ayant expiré, qu'elle réside en France depuis 2015 avec le père de son enfant, ressortissant soudanais ayant le statut de réfugié en France sans en justifier et qu'elle n'a effectué aucune démarche administrative auprès des autorités compétentes en vue de régulariser sa situation. Ce même arrêté précise qu'elle ne dispose pas de garanties de représentation suffisantes car elle ne présente aucun document d'identité et qu'elle n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente à l'administration. Cet arrêté ajoute, d'une part, qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressée compte tenu de son arrivée récente sur le territoire français du fait qu'elle n'apporte pas la preuve d'être dans l'impossibilité de poursuivre sa vie dans son pays d'origine accompagnée de son enfant et que, d'autre part, Mme A... C...n'établit pas être exposée à des traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans ce pays, vu notamment, l'absence de demande d'admission au bénéfice de l'asile. Il ressort ainsi des termes mêmes dudit arrêté que, contrairement à ce que soutient l'appelante, l'autorité préfectorale a tenu compte, avant de prendre les mesures litigieuses, de la naissance de sa fille au cours de l'année 2013 et de la relation affective avec M. B...dont elle a fait état. Ainsi, cet arrêté comporte un énoncé suffisant des considérations de droit et de fait qui fondent les décisions portant obligation de quitter le territoire français, refus de délai de départ volontaire et fixation du pays de renvoi qu'il contient, nonobstant la circonstance que le préfet de la Haute-Garonne ait indiqué à tort que la fille de l'intéressée est née au Tchad et non en France. Par suite, le moyen tiré du caractère insuffisamment motivé desdites décisions doit être écarté.

4. En deuxième lieu, il ressort de la motivation de l'arrêté contesté, telle qu'elle vient d'être rappelée au point 3, que le préfet de la Haute-Garonne a procédé à un examen particulier et attentif de la situation de Mme A...C...avant de prendre les décisions litigieuses, qui ne sont, dès lors, pas entachées d'erreur de droit.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. Pour soutenir que l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre par le préfet de la Haute-Garonne a méconnu les stipulations précités, Mme A...C...se prévaut de ce qu'elle entretient, depuis sa première entrée en France au cours de l'année 2013, une relation stable et durable avec M.B..., qui détient le statut de réfugié et auprès duquel elle vit avec leur fille commune, née le 20 décembre 2013, ainsi que les six enfants de ce dernier, lesquels sont tous scolarisés, de sorte que la cellule familiale ne peut se reconstituer ailleurs qu'en France. Toutefois, en se bornant à produire la copie de sa demande de visa déposée en 2015, sur laquelle elle n'avait pas mentionné M. B...comme personne invitante, un relevé de compte Direct énergie remis le jour de son interpellation pour justifier de son lieu de résidence, établi au seul nom de l'intéressé, des attestations de proches dont l'objectivité est sujette à caution, des certificats de scolarité des enfants de M. B...dépourvus de toute précision sur sa situation conjugale, ainsi qu'un contrat de bail daté du 30 septembre 2016 revêtu de la seule signature du bailleur et de M.B..., Mme A...C...n'établit pas l'ancienneté et l'intensité de la communauté de vie qu'elle allègue entretenir avec celui-ci. L'appelante ne produit pas davantage de pièces probantes de nature à établir que M. B...contribuerait - ainsi qu'elle le soutient - à l'entretien et à l'éducation de leur fille, qu'il n'a, d'ailleurs, reconnue que deux ans après sa naissance. En outre, Mme A...C..., qui s'est maintenue en situation irrégulière à l'expiration de la validité de son visa et ne justifie ni d'une insertion professionnelle et sociale sur le territoire français, ni être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-deux ans, ne démontre pas, en se bornant à faire état sans en justifier de ce que M. B...encourrait actuellement et personnellement des risques pour sa vie au Soudan ou au Tchad, que la cellule familiale ne pourrait être reconstituée ailleurs qu'en France. Dès lors, compte de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment des conditions de séjour en France de Mme A...C..., le préfet de la Haute Garonne n'a pas, en l'obligeant à quitter le territoire français, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, il n'a ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte ainsi de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

8. Mme A...C...soutient que la décision portant obligation de quitter le territoire aurait pour conséquence de séparer sa fille de son père, compte tenu de la protection internationale dont celui-ci bénéficie, ainsi que de ses demi-frères et soeurs qui partagent sa vie. Toutefois, et ainsi qu'il a été dit au point 6, l'appelante n'établit pas que M. B...contribuerait effectivement à l'entretien et à l'éducation de leur fille ni, davantage, que la cellule familiale, ne pourrait se reconstituer au Tchad. En outre, Mme A...C...ne démontre pas que sa fille, compte tenu de son très jeune âge, ne pourrait poursuivre sa scolarité dans ce pays. Par suite, la mesure d'éloignement litigieuse n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

9. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable. ". Aux termes de l'article L. 122-1 du même code : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix (...) ".

10. Mme A...C...soutient que la décision portant refus de délai de départ volontaire, qui constitue pourtant une mesure individuelle négative non intervenue à sa demande, est intervenue aux termes d'une procédure irrégulière, dès lors qu'elle n'a pu bénéficier de la procédure contradictoire prévue par les dispositions précitées des articles L. 121-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration. Toutefois, il résulte de l'ensemble des dispositions du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et notamment de son article L. 512-1, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises les décisions par lesquelles l'autorité administrative oblige un ressortissant étranger à quitter le territoire français, accorde - ou non - un délai de départ volontaire pour exécuter cette obligation et fixe le pays de renvoi. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du code des relations entre le public et l'administration ne peut être utilement invoqué.

11. En sixième lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme A...C...a été interpellée par les services de police le 27 septembre 2016 et qu'elle n'a pu justifier de sa domiciliation, le relevé de compte Direct énergie dont elle se prévaut ayant été établi au seul nom de M. B... et le certificat de scolarité de sa fille ne permettant pas d'établir qu'elle résidait de manière effective et permanente à l'adresse de son concubin à la date de l'édiction de l'arrêté litigieux. En outre, il est constant que l'appelante s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire français à l'expiration de la durée de validité de son visa. Dans ces conditions, le préfet de la Haute-Garonne a pu légalement estimer, pour ces seuls motifs, mentionnés par les dispositions de l'article L. 511-1 II 3°) b) et f) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il existait un risque que Mme A...C...se soustraie à la mesure d'éloignement prise à son encontre. Par suite, en refusant d'octroyer à l'intéressée un délai de départ volontaire, l'autorité préfectorale, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle se serait sentie liée par les deux critères susmentionnés, n'a pas entaché ladite décision d'erreur d'appréciation.

12. En dernier lieu, Mme A...C..., qui se borne à soutenir qu'elle est exposée à des risques en cas de retour au Tchad, ne produit aucune pièce de nature à établir la réalité et la gravité des risques qu'elle encourrait actuellement et personnellement en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, la décision fixant le pays de renvoi n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Sur les autres conclusions :

13. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par le préfet, que Mme A...C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...A...C...et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 30 octobre 2017, à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Gil Cornevaux, président assesseur,

M. Axel Basset, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 novembre 2017.

Le rapporteur,

Axel BassetLe président,

Pierre LarroumecLe greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

2

N° 17BX02530


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX02530
Date de la décision : 27/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Axel BASSET
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : BARBOT - LAFITTE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-11-27;17bx02530 ?
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