Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner solidairement la société anonyme d'économie mixte locale (SAEML) Air 12, exploitant et gestionnaire de l'aéroport de Rodez, le syndicat mixte pour l'aménagement et l'exploitation de l'aéroport de Rodez-Aveyron (SMAEARA), propriétaire des infrastructures et la société d'économie mixte (SEM) 12, respectivement maître d'ouvrage et maître d'oeuvre des travaux d'aménagement du parking de l'aéroport, à lui verser une indemnité de 22 854,51 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du mois de juin 2010 en réparation des préjudices causés par l'accident dont elle a été victime le 13 août 2008 alors qu'elle cheminait à pied sur le parc de stationnement de cet aéroport.
Par un jugement n° 1203013 du 15 décembre 2015, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée au greffe de la cour le 26 janvier 2015, MmeB..., représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1203013 du 15 décembre 2015 ;
2°) de condamner solidairement le SMAEARA, la SAEML Air 12 et la SEM 12 à lui verser la somme de 22 854,51 euros en réparation de ses préjudices, assortie des intérêts légaux à compter de la date de la première réclamation ;
3°) de les condamner solidairement aux entiers dépens, y compris les frais d'assignation en référé et ceux relatifs à l'expertise du docteur A...;
4°) de mettre à la charge solidaire de ce syndicat et ces sociétés la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, outre " les entiers dépens " comprenant la somme de 800 euros au titre des honoraires d'expertise et le remboursement des frais d'huissier.
Elle soutient que :
- la responsabilité de la SAEML AIR 12, de la SEM 12 et du SMAEARA est engagée en raison d'un mauvais entretien de la chaussée et pour un défaut de signalisation appropriée à l'occasion de travaux publics. En effet, alors qu'elle se dirigeait vers le parking et qu'il faisait nuit, elle a gravement chuté sur une surface en réparation non signalée, non éclairée et sans indication du cheminement permettant d'éviter cet obstacle. L'important écart de niveau entre la bordure et l'intérieur du trottoir non revêtu d'enrobé est corroboré par plusieurs témoins de l'accident, dont le directeur de l'aéroport ;
- si les organismes mis en cause ont invoqué en première instance une faute de la victime pour s'exonérer de leur responsabilité, on voit mal quelle imprudence elle aurait bien pu commettre en rejoignant simplement sa voiture, de nuit, dans un parking d'aéroport en travaux ne bénéficiant d'aucun éclairage ni signalisation. Elle réside en Afrique du Sud et ne fréquente pas habituellement cet aéroport : elle n'avait donc aucune connaissance des lieux. Par ailleurs, la circonstance qu'aucun autre accident n'aurait été signalé sur les lieux est sans incidence sur sa situation particulière ;
- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, il ressort à l'évidence de l'ensemble des pièces versées aux débats que sa chute et les préjudices qui en ont résulté sont dus à une dépression anormale de la chaussée sur le parking de l'aéroport. La jurisprudence considère que l'absence de " planéité parfaite " d'un espace public ou l'absence de signalisation de travaux constituent un défaut d'entretien normal engageant la responsabilité des personnes publiques compétentes. Si les premiers juges ont estimé ne pas disposer de suffisamment d'éléments permettant de déterminer les circonstances exactes de l'accident, l'état de la chaussée et notamment la profondeur de l'excavation alléguée, elle produit devant la cour les éléments supposés manquants. L'accident est survenu entre 21 h 30 et 22 heures, donc de nuit ou à tout le moins une heure où la pénombre est particulièrement prononcée et à un endroit ne disposant pas d'un éclairage artificiel fonctionnel. Les photographies prises par son époux après l'accident montrent qu'elle est tombée sur une partie recouverte de petites pierres en préparation pour recevoir une couverture finale et qui peut donc recevoir le qualificatif de " trottoir sans remplissage ", que l'excavation mesurait au moins 20 cm, que l'accès à cette zone n'était pas fermé par une banderole ou un cordon et que rien ne signalait une interdiction de passer ou un balisage permettant aux piétons d'accéder en sécurité aux véhicules garés sur le parking ;
- l'expertise médicale du docteur A...fonde ses prétentions. Son rapport demeure un élément d'information déterminant sur lequel la cour est en droit de s'appuyer, quand bien même cet expert aurait été désigné par un juge civil statuant en référé. Par ailleurs, la SAEML Air 12 ne saurait invoquer l'absence de respect du principe du contradictoire alors qu'elle a été convoquée pour assister à l'examen médical sans y faire acte de présence ou faire part de ses observations avant l'instruction de la demande au fond ;
- l'expert a bien détaillé les circonstances de l'accident et a tenu compte de ses antécédents, notamment la fracture du médio-pied droit survenue en 2000 ;
- les frais médicaux et pharmaceutiques ayant été totalement à sa charge pour un montant de 1 354,51 euros, ils pourront être indemnisés au titre des préjudices patrimoniaux. Ressortissante sud-africaine, elle ne bénéficie pas en effet de la sécurité sociale française ;
- le déficit temporaire total s'est étendu du 13 au 18 août 2008, ce qui correspond à sa période d'hospitalisation. Elle n'a ainsi pu exercer ses activités habituelles liées à son rôle de propriétaire de chambres d'hôtes en Afrique du Sud dont elle assure seule la gérance, l'entretien et la préparation des repas. Elle est ainsi fondée à réclamer une indemnité à hauteur de 1 000 euros en réparation de ce préjudice ;
- le rapport d'expertise indique qu'elle a enduré un déficit fonctionnel temporaire partiel de 50% du 19 août au 28 septembre 2008, de 25% du 29 septembre au 18 octobre 2008 et de 10% du 19 octobre 2008 au 13 avril 2009. Elle a dû après son séjour à l'hôpital résider chez sa soeur pendant six semaines, se déplaçant en fauteuil roulant puis à l'aide de cannes anglaises. Son projet de rendre visite à son fils résidant en Angleterre a dû être annulé en raison des soins quotidiens réalisés par une infirmière. Le montant de l'indemnisation réclamée à ce titre s'élève à 3 000 euros ;
- l'incapacité permanente partielle ayant été fixée par l'expert à 4%, elle peut prétendre à une réparation de ce préjudice d'un montant de 4 000 euros ;
- les souffrances endurées ont été évaluées par l'expert à 3/7, en raison de la nature des blessures subies entraînant une gêne dans ses mouvements en pleine saison d'été. Elle est donc fondée à demander la somme de 6 000 euros en réparation de ce préjudice ;
- le préjudice esthétique, arrêté à 1/7 par l'expert, peut faire l'objet d'une réparation à hauteur de la somme de 2 500 euros ;
- le préjudice d'agrément, en l'absence de reprise des activités sportives et du fait de l'annulation du séjour en Angleterre prévu pour voir son fils qui y réside, s'élève à la somme de 5 000 euros ;
- les organismes et sociétés incriminés pourront être condamnés aux dépens, comprenant notamment les frais d'huissier correspondant à l'engagement de la procédure de référé devant le juge judiciaire et les honoraires du médecin expert pour lesquels elle a dû verser, en application de l'ordonnance en date du 3 juin 2010 du président du tribunal de grande instance de Rodez, statuant en qualité de juge des référés une consignation d'un montant de 800 euros.
Par un mémoire en défense enregistré le 8 novembre 2016, la société anonyme d'économie mixte locale (SAEML) Air 12 - Aéroport de Rodez-Marcillac, prise en les personnes de ses représentants légaux et représentée par MeD..., conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce que la SEM Air 12 la garantisse de toute condamnation prononcée à son encontre et à la mise à la charge de la partie succombant de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La SAEML Air 12 fait valoir que :
- les préjudices allégués ne peuvent lui être imputés dans la mesure où les travaux qui lui ont été confiés ont été réalisés dans des conditions normales, aucun autre incident n'ayant été constaté. L'énoncé des faits laconique par l'appelante, qui par ailleurs revient sur ses déclarations lors de l'expertise médicale concernant l'horaire de l'accident, est clairement insuffisant pour établir et présumer un défaut d'entretien, d'autant que l'exécution du marché est postérieure à la date alléguée de l'accident et qu'aucun autre accident n'est à déplorer ;
- rien n'indique que l'accident ne soit pas dû à une faute de la victime ;
- le lien de causalité entre les travaux et ses blessures n'est pas plus établi. Elle ne dispose d'aucune preuve ou commencement de preuve que le défaut d'entretien de la chaussée, fut-il présumé, aurait été à l'origine de sa chute. En effet, Mme B...se borne à indiquer l'existence d'une dépression " anormale " sans qualifier précisément cette anormalité. Elle fait par ailleurs référence à de la jurisprudence non applicable en l'espèce pour des raisons de différences de contexte trop importantes. La comparaison avancée entre des excavations profondes situées sur le bas-côté de routes avec un simple trottoir n'apparaît pas pertinente. Enfin, les antécédents de sa blessure au pied droit en 2000 ont nécessairement eu une influence sur l'accident ainsi que ses conséquences ;
- l'expertise produite par Mme B...ne saurait fonder une quelconque responsabilité de sa part dès lors qu'elle a été diligentée par un juge civil, incompétent en matière de dommages de travaux publics. La demande de Mme B...devant le juge judiciaire était ainsi irrecevable et ne pouvait prospérer. En outre, les conclusions du rapport d'expertise ne sauraient être opposées à une partie qui n'a pas été associée de manière contradictoire à l'expertise. Or, elle n'a pas été convoquée à l'expertise, ni invitée à présenter ses observations sur le rapport. De surcroît, contrairement à la mission qui lui était confiée, l'expert n'a pas relaté clairement les circonstances de l'accident, en reprenant les dires de la victime au conditionnel sans expliquer comment la chute a pu causer les blessures constatées. Ainsi, les premiers juges n'ont pas été mis en capacité d'identifier un défaut d'entretien ou de signalisation, ou un lien de causalité. L'expert ne précise à aucun moment l'incidence factuelle des antécédents sur l'état de Mme B...après l'accident, ni même la nature des blessures du pied droit intervenues en 2000, en évoquant d'abord d'une fracture alors que les examens médicaux n'ont révélé qu'une fissure du cuboïde puis en mentionnant devant le juge du référé une entorse ;
- quand bien même la cour déciderait d'analyser la réalité des préjudices allégués par MmeB..., ceux-ci tant patrimoniaux qu'extrapatrimoniaux apparaissent largement contestables et démesurés ;
- les frais médicaux invoqués ne sont pas justifiés au moyen d'éléments d'une égale valeur probante, quand ils existent, s'agissant notamment de la location de béquilles ou de chaussures orthopédiques, et ne sont accompagnés ni des preuves de paiement, ni des relevés de remboursement dont elle aurait pu bénéficier en France ou par le biais de contrats conclus dans son pays d'origine, au titre par exemple de sa couverture d'assurances voyage liée à sa carte de crédit ;
- le préjudice résultant des déficits fonctionnels apparaît sans rapport avec les prétentions de la requérante. Les dommages liés à l'impossibilité d'exercer ses activités habituelles de gestion et d'entretien de chambres d'hôtes ne peuvent à l'évidence correspondre qu'à des pertes de revenus, donc à des préjudices patrimoniaux, alors que l'expert médical indique qu'il ne persiste pas de retentissement sur ses activités professionnelles. Par ailleurs, on ne peut que constater les déclarations contradictoires de MmeB..., qui invoque ce préjudice professionnel alors qu'elle indiquait avoir dû renoncer à aller rendre visite à son fils résidant en Angleterre, voyage qu'elle avait prévu d'effectuer quelques semaines après l'accident ;
- les troubles liés à un déficit fonctionnel partiel n'apparaissent pas davantage établis, le séjour de Mme B...chez sa soeur en France pendant sa convalescence et la possibilité de se rendre en Angleterre malgré ses blessures ne lui ayant causé aucun préjudice. Il en est de même du déficit fonctionnel permanent évalué à 4%, sans remise en cause de son activité liée à la gestion de chambre d'hôtes ;
- l'indemnisation du pretium doloris de Mme B...évalué à 3/7 par l'expert ne saurait, au regard de la jurisprudence, atteindre la somme de 6 000 euros qu'elle réclame ;
- le préjudice esthétique lié à la présence de cicatrices a été évalué par l'expert à 1 sur une échelle de 7 alors que rien n'est précisé quant à la longueur de ces cicatrices ou leur aspect ainsi que sur la présence de cicatrices plus anciennes ou la déformation de son pied droit liées à ses blessures survenues en 2000 ;
- Mme B...n'établit ni même n'allègue avoir exercé régulièrement une activité sportive ou récréative avant l'accident, alors que l'impossibilité de passer un séjour auprès de son fils a déjà été invoquée au titre des préjudices fonctionnels. L'expert indique dans son rapport qu'il ne " persiste aucun retentissement sur les activités de vie quotidienne exclusivement imputable à l'accident ", ni " de retentissement sur les activités personnelles ou sexuelles ". Ainsi, les prétentions de Mme B...au titre du préjudice d'agrément ne pourront qu'être rejetées ;
- dans l'hypothèse où la cour retiendrait sa responsabilité sur le fondement d'un défaut d'entretien et de signalisation de l'ouvrage public, la société SEM 12, en sa qualité de maître d'oeuvre des travaux incriminés, devra la garantir des condamnations mises à sa charge, qu'il s'agisse du principal, des intérêts ou des frais éventuels. La réception définitive et sans réserve des travaux par le Syndicat mixte pour l'aménagement de l'aéroport de Rodez-Marcillac, maître d'ouvrage, ne lui est pas opposable dans la mesure où, délégataire de la gestion du service public aéroportuaire, elle n'avait aucun rapport contractuel avec la SEM 12 dans le cadre de ces travaux. Si Mme B...soutient que sa chute serait due à l'absence de signalisation de travaux, d'éclairage et d'indication des chemins devant être empruntés sur le parking, ces mesures incombaient normalement à la SEM 12 dans le cadre du marché de travaux dont elle a été désignée maître d'oeuvre par le propriétaire des infrastructures.
Par un mémoire en défense enregistré le 28 juin 2017, le syndicat mixte pour l'aménagement et l'exploitation de l'aéroport Rodez-Aveyron (SMAEARA), pris en la personne de son président en exercice et représenté par MeF..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme B...de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Le syndicat fait valoir que :
- MmeB..., en sa qualité d'usager de la voie publique, en 1'occurrence une aire de stationnement en cours de travaux placés sous la responsabilité du maître d'oeuvre la SEM 12, ne pourrait le cas échéant demander l'engagement de la responsabilité du maître d'ouvrage desdits travaux que si elle apporte la preuve d'un lien de causalité entre les travaux ou 1'ouvrage public et le dommage dont elle demande réparation. Le tribunal a estimé à juste titre qu'une telle preuve n'était pas en 1'espèce rapportée. Les témoignages sur lesquels elle se fonde émanant de sa soeur et d'un ami chez lesquels elle résidait pendant son séjour en France apparaissent dépourvus de caractère probant et ne permettent pas en tout état de cause de circonscrire l'emplacement exact de sa chute ou de mettre en évidence un défaut d'entretien normal. L'attestation du directeur de l'aéroport non datée ne contient pas les mentions obligatoires prévues par le code de procédure civile et ne fait état en aucune manière d'un témoignage direct relatant les circonstances de l'accident. Ces éléments ne permettent donc pas à eux seuls d'administrer la preuve nécessaire de l'existence d'un lien de causalité direct et certains entre les travaux publics en cours et le dommage subi par Mme B...;
- Mme B...n'a pas fait usage de toute la prudence nécessaire dans son déplacement. Si elle indique s'être blessée lors du retour à son véhicule, aux alentours de 21 heures, elle avait forcément connaissance des lieux en se rendant à l'aérogare avant la tombée de la nuit et avait pu ainsi constater l'existence de travaux sur le parking de l'aéroport. Les témoignages dont elle se prévaut n'indiquent au demeurant pas une visibilité réduite du fait de l'heure nocturne à laquelle l'accident a eu lieu. Cette faute serait exonératoire de toute responsabilité ;
- si par extraordinaire la cour devait entrer en voie de réformation, sa responsabilité ne pourrait être retenue dans la mesure où la SEM 12 était alors en charge d'une mission de maîtrise d'oeuvre et de direction des travaux. La réception des travaux n'était pas encore prononcée et la mission de maîtrise d'oeuvre n'était pas achevée. De toute évidence, la chute n'a pu survenir, le cas échéant, que du chef d'une défaillance du maître d'oeuvre.
Par une ordonnance du 29 juin 2017, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 14 août 2017 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Paul-André Braud,
- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public,
- et les observations de MeF..., représentant le syndicat mixte pour l'aménagement et l'exploitation de l'aéroport de Rodez Aveyron.
Considérant ce qui suit :
1. Le 13 août 2008, aux environs de 21 heures, alors qu'elle regagnait un véhicule garé sur le parking de l'aéroport Rodez-Aveyron, Mme E...B...a, selon ses déclarations, mis le pied dans une dépression du sol causée par des travaux et a lourdement chuté sur la chaussée, occasionnant notamment une fracture bimalléolaire de la cheville gauche, une entorse de la cheville droite et une incapacité temporaire de travail de trente jours. A sa demande, le juge des référés du tribunal de grande instance de Rodez a missionné par une ordonnance du 3 juin 2010, le DrA..., expert, aux fins notamment d'analyser l'imputabilité à l'accident des lésions constatées, le caractère direct et certain de cette imputabilité et d'évaluer l'ensemble des préjudices subis par Mme B...à la suite de cet accident. L'expert a rendu son rapport le 1er octobre 2010. Mme B...a alors assigné le 14 janvier 2011 devant ce même tribunal la société anonyme d'économie mixte locale (SAEML) Air 12, exploitant et gestionnaire de la plate-forme aéroportuaire, afin d'obtenir sa condamnation à réparer l'ensemble de ses préjudices. Le tribunal de grande instance de Rodez, par une ordonnance du juge de la mise en état en date du 20 octobre 2011, s'est déclaré incompétent en présence d'un dommage de travaux publics et a invité la plaignante à mieux se pourvoir. Après avoir adressé le 18 juin 2012 une demande préalable d'indemnisation à l'exploitant précité restée sans réponse, Mme B...a recherché devant le tribunal administratif de Toulouse la responsabilité solidaire du gestionnaire de la plate-forme, la SAEML Air 12, du syndicat mixte d'aménagement et d'exploitation de l'aéroport Rodez-Aveyron (SMAEARA) et de la société d'économie mixte (SEM) 12, respectivement maître d'ouvrage et maître d'oeuvre des travaux d'aménagement du parking de l'aéroport, en invoquant un défaut d'entretien de l'ouvrage public et un manquement aux obligations de signalisation et de sécurité des travaux incriminés, et a demandé leur condamnation à lui verser la somme de 22 854,51 euros en réparation de ses préjudices. Mme B...relève appel du jugement du 15 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
2. Il appartient à la victime d'un dommage survenu à l'occasion de l'utilisation d'un ouvrage public d'apporter la preuve du lien de causalité entre l'ouvrage public dont elle était usager et le dommage dont elle se prévaut. Dès lors, même sans faute de sa part, le maître de l'ouvrage est intégralement responsable des dommages causés aux usagers par les ouvrages publics dont il a la garde, à moins qu'il ne démontre avoir normalement entretenu l'ouvrage ou que ces dommages soient, au moins partiellement, imputables à une faute de la victime ou à un cas de force majeure.
3. Le tribunal a rejeté la demande de Mme B...au motif qu' en se bornant à produire deux attestations d'une soeur et d'un ami qui l'accompagnaient indiquant qu'elle " a chuté sur la bordure du trottoir en travaux et non éclairé ni balisé " et une attestation du directeur de l'aéroport, dont il n'est pas contesté qu'il n'était pas témoin de l'accident et en l'absence de tout autre élément permettant de déterminer et de comprendre les circonstances exactes de l'accident notamment le lieu, l'état de la chaussée, la nature d'une éventuelle excavation dans le trottoir et sa profondeur, elle n'établissait pas le lien de causalité direct et certain entre les dommages subis et la défectuosité de l'ouvrage public incriminé, quand bien même des travaux d'aménagement de la voirie de la plate-forme aéroportuaire sur le parc de stationnement des véhicules étaient effectivement en cours de réalisation. Cependant, les photographies de l'ouvrage en cause, le caractère concordant des attestations produites et la circonstance que l'une des attestations, par ailleurs assez circonstanciée, émane d'une personne ne présentant ni de lien de parenté ou d'alliance avec la victime, ni de lien de subordination ni de communauté d'intérêts directs avec elles, en l'occurrence un ami de la soeur de MmeB..., permet de considérer comme établi le lien de causalité entre la chute de Mme B...et le rebord du trottoir en travaux.
4. Toutefois, il résulte de l'instruction, et notamment des photographies produites, que, à supposer que comme elle le soutient et l'indiquent les attestations, Mme B...ait chuté sur la bordure du trottoir en travaux, la dénivellation d'une dizaine de centimètres résultant de cet aménagement des lieux était parfaitement visible et de la nature de celles que tout piéton peut s'attendre à rencontrer de sorte qu'elle ne nécessitait aucune signalisation particulière. En outre, si Mme B...soutient que l'accident s'est produit de nuit, ses déclarations changeantes sur l'horaire de l'accident et l'absence d'éléments probants permettant d'établir cet horaire ne permettent pas de regarder cette circonstance comme établie. Dans ces conditions, la chute de Mme B...doit être imputée non à un défaut d'entretien normal de la chaussée, mais uniquement à l'inattention et à l'imprudence de la victime.
5. Il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par conséquent, ses conclusions tendant au paiement des dépens et des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées.
6. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la SAEML Air 12 et du SMAEARA présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le SMAEARA et la SAEML Air 12 sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...B..., à la société anonyme d'économie mixte locale Air 12, au syndicat mixte pour l'aménagement et l'exploitation de l'aéroport de Rodez-Aveyron et à la société d'économie mixte 12.
Délibéré après l'audience du 12 octobre 2017 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, président,
M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,
M. Paul-André Braud, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 novembre 2017.
Le rapporteur,
Paul-André BRAUDLe président,
Catherine GIRAULT
Le greffier,
Virginie MARTY
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No 16BX00343