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14/11/2017 | FRANCE | N°15BX01437

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 14 novembre 2017, 15BX01437


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société La Grappe, société à responsabilité limitée, a demandé au tribunal administratif de Bordeaux la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des années 2008 et 2009, ainsi que des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1400701 du 5 mars 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a prononcé la réduction des cotisations supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée

et d'impôt sur les sociétés mises à la charge de la société La Grappe au titre des années 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société La Grappe, société à responsabilité limitée, a demandé au tribunal administratif de Bordeaux la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des années 2008 et 2009, ainsi que des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1400701 du 5 mars 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a prononcé la réduction des cotisations supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et d'impôt sur les sociétés mises à la charge de la société La Grappe au titre des années 2008 et 2009, ainsi que des pénalités correspondantes, à raison de la prise en compte, pour les recettes du bar, d'une contenance de 0,75 litre des bouteilles d'alcool vendues au verre et d'une perte de 2 %, et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 27 avril et le 26 octobre 2015, la société La Grappe, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 5 mars 2015 en tant qu'il a limité la décharge à la prise en compte d'une erreur dans la commercialisation des alcools et de conversion du nombre de bouteilles en verres ;

2°) de désigner un expert à l'effet d'établir les bases d'imposition selon la méthode qu'elle préconise et subsidiairement, de corriger la méthode de l'administration ;

3°) de prononcer la décharge du surplus des impositions auxquelles elle a été assujettie ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le remboursement des frais irrépétibles engagés tant en première instance qu'en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le montant du dégrèvement après un calcul des corrections qui auraient dues être effectuées après le jugement du tribunal aurait dû s'élever à 93 544 euros ; l'avis de dégrèvement émis par l'administration fiscale à hauteur de 82 893 euros est dès lors insuffisant ;

- la procédure d'imposition est irrégulière au motif que les interventions du vérificateur se sont déroulées chez l'expert comptable sans son accord ;

- la proposition de rectification, complexe dans sa partie calcul, est incompréhensible et ne permet pas de formuler des observations en méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

- le délai qui lui a été imparti pour répondre est trop bref alors que le vérificateur a disposé de onze mois pour adresser la proposition de rectification ;

- le rejet de la comptabilité n'est pas justifié ; l'administration n'a pas tenu compte des données remises sur 46 disquettes qui contenaient les sauvegardes et justificatifs comptables ;

- la méthode de reconstitution des recettes adoptée par le vérificateur est sujette à critiques ; elle est également irréaliste et inadaptée ; elle aboutit enfin à un résultat incohérent ;

- elle proposait une méthode plus pertinente fondée sur la reconstitution de l'ensemble des vins et alcools vendus au verre selon la répartition figurant sur les tickets " Z " de la caisse du bar ;

- un expert doit être désigné afin d'établir une nouvelle méthode de reconstitution.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 9 septembre 2015 et 9 octobre 2017, le ministre des finances et des comptes publics (direction spécialisée de contrôle fiscal Sud Ouest) conclut au non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements prononcés pour des montants de 644 euros en matière de taxe sur la valeur ajoutée et de 1 054 euros au titre de l'impôt sur les sociétés de l'exercice 2009, et au rejet du surplus des conclusions de la requête.

Il soutient que :

- la procédure d'imposition est régulière ;

- la comptabilité présentée n'était pas probante eu égard au nombre d'anomalies et d'irrégularités graves constatées ;

- la méthode de reconstitution est pertinente ; elle n'est ni excessivement sommaire ni radicalement viciée ; les résultats de cette reconstitution n'apparaissent ni irréalistes ni exagérés ;

- contrairement à ce que soutient la requérante, les dégrèvements prononcés en exécution du jugement du tribunal administratif ne sont pas insuffisants ;

- en revanche, le service accepte d'exclure les crèmes de fruit pour la reconstitution du chiffre d'affaires généré par la vente d'alcool au verre ce qui se traduit par des dégrèvements de 644 euros en matière de taxe sur la valeur ajoutée et de 1 054 euros au titre de l'impôt sur les sociétés de l'exercice 2009.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Florence Madelaigue ;

- et les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société La Grappe, qui exploite un bar-restaurant à Lège-Cap-Ferret (Gironde), a fait l'objet en 2011 d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009 en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée. Après avoir écarté la comptabilité comme non probante, le vérificateur a procédé à une reconstitution de recettes à l'issue de laquelle des impositions supplémentaires ont été mises à la charge de la société pour les exercices 2008 et 2009. Par jugement du 5 mars 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a prononcé la réduction des cotisations supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et d'impôt sur les sociétés mises à la charge de la société La Grappe au titre des années 2008 et 2009, ainsi que des pénalités correspondantes, à raison de la prise en compte, pour les recettes du bar, d'une contenance de 0,75 litre des bouteilles d'alcool vendues au verre et d'une perte de 2 %, et a rejeté le surplus des conclusions de la demande. En exécution de ce jugement, l'administration fiscale a prononcé un dégrèvement par décision du 21 avril 2015. La société La Grappe relève appel du jugement du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il n'a que partiellement accueilli sa demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 2008 et 2009 et conteste le montant du dégrèvement prononcé par l'administration en exécution du jugement.

Sur l'étendue du litige :

2. L'administration a accordé le 2 octobre 2017, postérieurement à l'introduction de la requête, le dégrèvement de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle a été assujettie la société La Grappe au titre de l'année 2009 pour un montant de 1 054 euros en droits et pénalités, ainsi que le dégrèvement, à hauteur de 644 euros, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été également assujettie, en tant que ces rehaussements procédaient de la prise en compte pour les achats revendus de digestifs, des bouteilles de crèmes de fruit, alors qu'elles ont été utilisées en tant qu'additifs aux verres d'alcool vendus. Les conclusions de la requête sont, dans cette mesure, devenues sans objet, et il n'y a plus lieu d'y statuer.

Sur la contestation du dégrèvement du 21 avril 2015 :

3. Par le jugement contesté, le tribunal administratif de Bordeaux a prononcé la réduction des cotisations supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et d'impôt sur les sociétés mises à la charge de la société La Grappe au titre des années 2008 et 2009, ainsi que des pénalités correspondantes, à raison de la prise en compte, pour les recettes du bar provenant de la vente d'alcools au verre, d'une contenance de 0,75 litre et non d'un litre des bouteilles d'alcool vendues au verre et d'une perte de 2 % sur la commercialisation de ces produits. La société La Grappe soutient que le montant du dégrèvement qui aurait dû être prononcé en exécution du jugement du tribunal aurait dû être de 93 544 euros et non de 82 893 euros. Toutefois, il ressort de la motivation du jugement du tribunal que les premiers juges ont entendu limiter la décharge prononcée au calcul des recettes du bar. La société requérante, dont les calculs reposent sur le nombre total de bouteilles et de verres d'alcools considérés comme revendus à la fois au restaurant et au bar et sur l'application d'un prix moyen uniforme alors que des prix différents ont été appliqués selon les alcools, n'apporte pas d'éléments permettant d'estimer que le calcul de l'administration serait erroné.

Sur le surplus des conclusions à fin de décharge :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables ". Aux termes de l'article R. 13 du même livre : " Les vérifications de comptabilité mentionnées à l'article L. 13 comportent notamment : a) La comparaison des déclarations souscrites par les contribuables avec les écritures comptables et avec les registres et documents de toute nature, notamment ceux dont la tenue est prévue par le code général des impôts et par le code de commerce ; b) L'examen de la régularité, de la sincérité et du caractère probant de la comptabilité à l'aide particulièrement des renseignements recueillis à l'occasion de l'exercice du droit de communication, et de contrôles matériels. ".

5. Si ces dispositions ont pour conséquence que toute vérification de comptabilité doit en principe se dérouler dans les locaux de l'entreprise vérifiée, la vérification n'est toutefois pas nécessairement entachée d'irrégularité du seul fait qu'elle ne s'est pas déroulée dans ces locaux. Il en va ainsi lorsque, notamment, la comptabilité ne se trouve pas dans l'entreprise et que, d'un commun accord entre le vérificateur et les représentants de l'entreprise, les opérations de vérification se déroulent au lieu où se trouve la comptabilité, dès lors que cette circonstance ne fait, par elle-même, pas obstacle à ce que la possibilité d'engager avec le vérificateur un débat oral et contradictoire demeure offerte aux représentants de l'entreprise vérifiée.

6. Il résulte de l'instruction qu'alors que la société La Grappe a, par avis daté du 16 décembre 2010, été informée de l'engagement d'une vérification de comptabilité, par une première entrevue prévue au siège social de l'entreprise le 12 janvier 2011, le gérant a verbalement demandé que la vérification soit réalisée dans les locaux du comptable où étaient détenus les documents ainsi qu'il est mentionné dans la proposition de rectification du 19 décembre 2011. En outre, il résulte de l'instruction qu'un entretien s'est déroulé chez le comptable le 22 mars 2011 et que deux autres entretiens en présence du représentant légal ont eu lieu dans les locaux de l'entreprise le 6 juillet et le 10 novembre 2011 au cours desquels le représentant légal a apporté des précisions sur certaines appellations de vins et produit des disquettes de sauvegarde et où les conclusions de la reconstitution de recettes lui ont été présentées, en même temps que les manquants en nombre de bouteilles constatés. Si la société requérante fait valoir qu'elle n'a ni demandé ni accepté que les opérations soient réalisées en dehors de ses propres locaux et qu'elle conteste le fait qu'elle ait été représentée au cabinet du comptable, elle a rencontré à plusieurs reprises le vérificateur dans les locaux du service, sans émettre la moindre réserve sur le lieu de la vérification. Les conditions d'intervention du vérificateur, dont il ne résulte pas de l'instruction qu'il se serait opposé à tout échange de vues, ne peuvent dès lors être regardées, par elles-mêmes, comme ayant été de nature à faire obstacle à la possibilité d'engager un débat oral et contradictoire. Par suite, la société La Grappe n'est pas fondée à soutenir que la procédure de vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet serait irrégulière.

7. En second lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. Sur demande du contribuable reçue par l'administration avant l'expiration du délai mentionné à l'article L. 11, ce délai est prorogé de trente jours / (...) ". Aux termes de l'article L. 11 du même livre : " A moins qu'un délai plus long ne soit prévu par le présent livre, le délai accordé aux contribuables pour répondre aux demandes de renseignements, de justifications ou d'éclaircissements et, d'une manière générale, à toute notification émanant d'un agent de l'administration des impôts est fixé à trente jours à compter de la réception de cette notification ".

8. Au soutien du moyen tiré du caractère incompréhensible de la proposition de rectification qui ne lui aurait pas permis de formuler des observations en application de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, la société La Grappe ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas la réponse apportée par le tribunal administratif. Il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.

9. Si la société La Grappe soutient avoir été mise dans l'impossibilité de présenter des observations en réponse à la procédure de rectification, faute d'avoir pu bénéficier d'un délai suffisant, il résulte toutefois de l'instruction, qu'après en avoir fait la demande, la société requérante a bénéficié d'une prorogation du délai de réponse de trente jours sur le fondement de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, et à titre exceptionnel, de trente jours supplémentaires. La société La Grappe a ainsi pu bénéficier d'un délai total de quatre-vingt-dix jours courant à compter de la réception de la proposition de rectification pour présenter ses observations. Ce moyen doit, dès lors, être écarté.

En ce qui concerne le bien fondé des impositions :

S'agissant de la valeur probante de la comptabilité :

10. Il résulte de l'instruction, notamment de la proposition de rectification, que le vérificateur a constaté l'absence de caisse enregistreuse sur une partie de l'activité et en particulier pour les ventes de verres au bar extérieur, ainsi que des anomalies de fonctionnement de la caisse enregistreuse du bar intérieur, alors qu'aucun double des tickets de caisse délivrés aux clients n'avaient été conservés, ce qui faisait obstacle à la vérification de la concordance des ventes avec les achats comptabilisés. L'agent vérificateur a également constaté l'existence d'anomalies des inventaires de stocks pour les boissons non alcoolisées et les ingrédients de cuisine qui n'étaient pas inventoriés, la présentation de stocks de boissons alcoolisées hors vins identiques en 2008 et 2009, des discordances entre les achats revendus et les ventes effectives de boissons sur quatre vins identifiables sur les tickets " Z " et sur l'ensemble des liquides. Il n'est pas contesté enfin que les 46 disquettes remises au vérificateur ne couvrent pas l'ensemble de la période vérifiée et ne provenaient que de la caisse enregistreuse du bar intérieur. Dans ces conditions, l'administration a pu rejeter la comptabilité présentée par la société La Grappe comme dépourvue de caractère probant et procéder à la reconstitution de recettes de la société.

S'agissant de la reconstitution de recettes :

11. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge (...) ".

12. Ainsi qu'il a été dit précédemment, la comptabilité présentée par la société La Grappe est entachée de graves irrégularités. Les impositions en litige ont été établies conformément à l'avis rendu le 16 novembre 2012 par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. En conséquence, et en vertu des dispositions précitées de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, la société requérante supporte la preuve de l'exagération des redressements.

13. Pour procéder à la reconstitution de recettes de l'entreprise, le vérificateur s'est basé sur des données propres de l'exploitation en déterminant les recettes de la partie bar à partir des achats revendus des différents liquides et en tenant compte des répartitions figurant sur les enregistrements de la caisse du bar intérieur à partir d'avril 2009, date à laquelle une nouvelle caisse enregistreuse avait été mise en place. Pour reconstituer le chiffre d'affaires du bar, incluant les vins et champagnes vendus au verre, le vérificateur a déduit les boissons additionnelles consommées au restaurant et a considéré que les bouteilles d'alcool non comptabilisées avaient été vendues au verre sur la base d'un dosage moyen de 4 cl par verre et d'un prix déterminé à partir des indications figurant sur les tickets " Z " de l'année 2009. Une déduction de 10 % a également été appliquée à l'ensemble des boissons vendues à la dose et en bouteille, afin de tenir compte des offerts. Le vérificateur a utilisé la méthode des vins pour reconstituer le chiffre d'affaires du restaurant à partir du montant des achats revendus de vins, après déduction de la part de l'activité bar déterminée en fonction des indications issues de la nouvelle caisse du bar intérieur et après application d'abattements pour tenir compte de l'utilisation de vin en cuisine, de la consommation du personnel, des offerts, de la casse et des bouteilles bouchonnées, auquel il a été appliqué un coefficient déterminé à partir des tickets " Z " du restaurant. Dans la mesure où l'activité globale de la société est demeurée identique au cours des deux années vérifiées, les pourcentages obtenus ont été appliqués à l'exercice 2008.

14. Il résulte de ce qui précède que le vérificateur s'est basé, pour reconstituer le chiffre d'affaires sur les seuls achats qu'il pouvait retracer avec un minimum de précision, sur les éléments disponibles de la comptabilité comme les factures fournisseurs d'achat de liquide, et sur les déclarations de son gérant lors de la vérification, relatives notamment au mode de fonctionnement de la société, et à la répartition de l'activité dans chacun des secteurs, bar et restaurant. Ainsi, au regard des graves lacunes de sa comptabilité, la société n'est pas fondée à soutenir que la méthode appliquée par le vérificateur, qui est basée autant que possible sur les éléments produits par elle, et qui, ainsi qu'il sera dit ci-après, n'aboutit pas à des résultats irréalistes, serait radicalement viciée ou excessivement sommaire.

15. La société soutient que les impositions procédant de la reconstitution du chiffre d'affaires de son activité seraient exagérées.

16. D'une part, s'agissant de la méthode alternative basée sur la conversion de l'ensemble des bouteilles revendues en verre en retenant la répartition qui ressort des tickets " Z " issus de la caisse du bar, la société La Grappe ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance concernant cette méthode et ne critique pas la réponse apportée par le tribunal administratif pour l'écarter. Par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges, cette méthode ne peut être retenue.

17. D'autre part, si la société requérante conteste la méthode des vins retenue comme étant inadaptée et empreinte de nombreuses erreurs et imprécisions aboutissant à une ventilation hypothétique de la consommation du vin entre le bar et le restaurant, elle n'apporte aucun élément tangible lié à ses circonstances particulières d'exploitation, alors que les coefficients et montants retenus par l'administration ont été déterminés sur la base de ses données d'exploitation et des constatations et informations recueillies lors de la vérification. Et dès lors qu'aucune vente de bouteilles de vin n'apparaissait sur les tickets "Z" du bar, les écarts constatés au niveau des bouteilles de vin ont été à juste titre affectés au secteur restaurant. Si la société revendique la prise en compte d'un taux d'offerts de 10 % pour les vins consommés au restaurant au lieu de 7,46% en 2008 et 7,09% pour 2009, de 5 % pour la consommation du personnel, de 2 % pour la part de casse et de 3 % pour les vins bouchonnés, elle se borne à faire référence aux normes qui seraient appliquées dans la profession, ou aux habitudes du personnel sans apporter d'éléments précis liés à ses circonstances particulières d'exploitation, alors que les coefficients et montants retenus par l'administration ont été déterminés sur la base de ses données d'exploitation et des constatations et informations recueillies lors de la vérification. En particulier, ainsi que l'indique le tribunal, les offerts, qui ne sont jamais tapés sur la caisse enregistreuse, ont été évalués sur la base des déclarations du gérant selon lesquelles il offrait aux habitués tantôt un verre de vin, un apéritif, un digestif ou un café et correspondent à une consommation offerte par couvert, la consommation du personnel a été déterminée sur la base des quantités autorisées déclarées par le gérant, et les chiffres de casse et de vins bouchonnés ont été augmentés pour tenir compte de ses observations. Si la société requérante demande également la déduction de 80 bouteilles de vin rouge en 2008 et 110 en 2010, elle n'apporte aucun élément probant à l'appui de ses allégations alors que, interrogée sur ce point en cours de contrôle, elle n'avait fait état, pour la cuisine, que d'une consommation de 78 bouteilles d'un vin blanc spécifique en 2008 et de 102 bouteilles en 2009, ainsi que d'un certain nombre d'alcools, pour des quantités prises en compte par le vérificateur. S'agissant des recettes du bar, si la société revendique l'application d'un taux de perte de 16 % au lieu des 10 % retenus par l'administration pour les alcools et le champagne, elle n'en justifie pas davantage. Il suit de là que la société n'établit pas, sur les points qui viennent d'être évoqués, que les impositions procédant de la reconstitution du chiffre d'affaires de son activité seraient exagérées. Par ailleurs, le dégrèvement prononcé par l'administration à l'issue de la procédure devant les premiers juges n'est pas non plus de nature à révéler l'exagération dudit bénéfice.

18. Enfin, au soutien du moyen relatif au caractère irréaliste du résultat reconstitué qui fait apparaître un taux de paiement en espèces de plus de 21 %, très supérieur à celui de 10 % correspondant " aux normes de la profession ", la société requérante se borne à reprendre les arguments qu'elle avait présentés en première instance et ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à cette argumentation. Il y a lieu, par suite, pour la cour d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.

19. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de nommer un expert, que la société La Grappe n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté le surplus de sa demande, ni à contester le montant du dégrèvement prononcé en exécution de ce jugement.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

20. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de quelque somme que ce soit au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête tendant à la décharge des impositions contestées à concurrence des dégrèvements prononcés le 2 octobre 2017 par le directeur régional des finances publiques de la région Nouvelle-Aquitaine et du département de la Gironde.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société La Grappe est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société La Grappe et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 17 octobre 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

Mme Christine Mège, président-assesseur,

Mme Florence Madelaigue, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 14 novembre 2017.

Le rapporteur,

Florence Madelaigue

Le président,

Elisabeth JayatLe greffier,

Evelyne Gay-Boissières

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 15BX01437


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