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13/11/2017 | FRANCE | N°15BX01422

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre - formation à 3, 13 novembre 2017, 15BX01422


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...B...épouse A...a été recrutée par le département de la Gironde le 16 avril 1973 en qualité d'agent non-titulaire, puis titularisée dans différents grades relevant de différents cadres d'emplois, et en dernier lieu, au grade d'adjoint administratif de 1ère classe le

1er janvier 2010. Mme A...a présenté, le 28 juin 2013, une demande auprès du président du conseil départemental de la Gironde tendant à sa nomination au grade de rédacteur territorial avec effet rétroactif à compter du

1er janvier 1990, à la reconstitution de sa carrière et à l'indemnisation du préjudice ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...B...épouse A...a été recrutée par le département de la Gironde le 16 avril 1973 en qualité d'agent non-titulaire, puis titularisée dans différents grades relevant de différents cadres d'emplois, et en dernier lieu, au grade d'adjoint administratif de 1ère classe le

1er janvier 2010. Mme A...a présenté, le 28 juin 2013, une demande auprès du président du conseil départemental de la Gironde tendant à sa nomination au grade de rédacteur territorial avec effet rétroactif à compter du 1er janvier 1990, à la reconstitution de sa carrière et à l'indemnisation du préjudice subi du fait du retard pris dans le déroulement de sa carrière. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux l'annulation de la décision du 11 septembre 2013, par laquelle le président du conseil départemental de la Gironde a rejeté sa demande du 28 juin 2013, d'enjoindre au président du conseil départemental de la Gironde de la nommer rédacteur cadre B avec effet rétroactif à compter du 1er janvier 1990, de reconstituer sa carrière dans un délai de deux mois et la condamnation du département de la Gironde à lui verser 57 100 euros en réparation du préjudice financier et 10 000 euros en réparation du préjudice moral subi du fait du retard de déroulement de sa carrière.

Par un jugement n° 1303590 du 7 avril 2015 le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête du 24 avril 2015, MmeA..., représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 7 avril 2015 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler la décision du 11 septembre 2013 par laquelle le président du conseil départemental de la Gironde a rejeté sa demande du 28 juin 2013 tendant à sa nomination au grade de rédacteur territorial avec effet rétroactif à compter du 1er janvier 1990, à la reconstitution de sa carrière et à l'indemnisation du préjudice subi du fait du retard de déroulement de sa carrière ;

3°) d'enjoindre au président du conseil départemental de la Gironde de la nommer rédacteur cadre B avec effet rétroactif à compter du 1er janvier 1990 et de reconstituer sa carrière dans un délai de deux mois à compter de l'intervention de l'arrêt de la Cour ;

4°) de condamner le département de la Gironde à lui verser la somme de 57 100 euros en réparation du préjudice financier subi du fait du retard dans le déroulement de sa carrière et 10 000 euros en réparation du préjudice moral subi du fait de ce retard ;

5°) de mettre à la charge du département de la Gironde la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugement du tribunal administratif est entaché d'erreur de fait, dans sa motivation, et d'erreur de droit, dès lors que le tribunal administratif a considéré à tort que sa demande de reconstitution de carrière était subordonnée à l'existence d'illégalités fautives des décisions prises par l'administration ;

- elle est entrée le 1er avril 1973 dans les services du département en qualité d'adjoint de 1ère classe, et a été nommée en qualité d'adjoint principal 1ère classe au 1er janvier 2010, et ne progresse plus depuis, alors qu'au regard de son ancienneté, et de son expérience professionnelle, elle aurait du avancer au grade de rédacteur depuis 1990 dès lors qu'elle a été proposée à cet avancement depuis 1990 ;

- elle plafonne au dernier échelon du grade d'adjoint principal de 1ère classe, alors que d'autres agents qui se trouvent dans des situations identiques à la sienne, ont bénéficié d'avancements de grade normaux, qui correspondent à ceux qu'elle aurait du obtenir ;

- le président du conseil départemental reconnait que les agents qui sont entrés en même temps qu'elle dans les services du département, ont bénéficié d'un avancement supérieur à celui dont elle a bénéficié ;

- si la décision lui refusant un refus d'avancement au grade de rédacteur territorial, est fondée sur le décret du 30 juillet 2012, qui exclut de l'avancement au grade de rédacteur territorial au titre de la promotion interne, les fonctionnaires relevant du cadre d'emplois des adjoints territoriaux, ce décret n'a aucune incidence en ce qui la concerne dès lors qu'à la date du 1er janvier 1990 à compter de laquelle elle se prévaut d'un droit à l'avancement au grade de rédacteur territorial, le décret du 30 juillet 2012 n'était pas encore intervenu et qu'il n'existait aucune impossibilité d'accéder au grade de rédacteur territorial ;

- le critère de choix pour l'avancement ne signifie pas une totale liberté de choix, ce choix devant être justifié par des considérations objectives et non par des décisions arbitraires, d'autant que la requérante a toujours rempli ses fonctions avec rigueur et efficacité ;

- en l'espèce, le président du conseil départemental de la Gironde ne justifie pas les raisons de son choix ; les trois motifs invoqués par l'administration selon lesquels elle a connu un déroulement de carrière favorable, l'avancement de grade ne serait pas un droit et l'autorité territoriale serait contrainte par des règles de quotas, ne constituent pas des raisons objectives valables justifiant un refus d'avancement ; contrairement à ce qu'a considéré le tribunal administratif, elle n'a jamais bénéficié d'un avancement d'échelon à l'ancienneté minimale, ayant avancé d'échelon en fonction de la durée moyenne ou de la durée maximale ; en ce qui concerne le motif qui lui est opposé tenant à l'existence d'un avis réservé de sa hiérarchie quant à un avancement au grade de rédacteur territorial, c'est seulement en 1997 qu'un avis réservé lui a été opposé, et non pour les autres années, pour lesquelles elle a bénéficié d'avis favorables à son avancement au grade de rédacteur territorial ;

- le département n'a jamais apporté de justifications quant au fait qu'elle n'a pas bénéficié d'un avancement de grade, pendant une période de vingt ans ;

- s'il est exact que depuis trois ou quatre ans, seuls 30 % des agents bénéficiaient d'une promotion, ce taux était de 70 % pour les années précédentes ;

- elle a toujours donné satisfaction dans son travail, comme le démontrent ses notations ;

- il lui a été proposé -même si elle n'est pas en mesure de le prouver- d'obtenir une promotion au grade de rédacteur territorial, sous condition de prendre sa retraite à l'âge de soixante ans, ce qu'elle a refusé ;

- le préjudice financier subi par la requérante du fait de son absence d'avancement est constitué d'une perte de rémunération de l'ordre de 500 euros par mois sur une période de treize ans, soit la somme de 78 000 euros, d'un préjudice de 57 100 euros relatif à la perte de droits à la retraite, alors qu'elle a par ailleurs subi un préjudice moral pouvant être évalué à la somme de 10 000 euros ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 novembre 2015, le département de la Gironde, représenté par MeD..., conclut au rejet de la requête de MmeA... et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- comme l'a jugé le tribunal administratif, le refus de reconstitution de carrière n'est fautif que s'il est entaché d'illégalités, et en l'espèce, le département n'a pris à l'égard de Mme A..., aucune mesure illégale ou irrégulière ;

- en matière de promotion interne, le choix de la collectivité à l'égard des fonctionnaires qui remplissent les conditions statutaires et l'avancement de grade n'est pas un droit pour les agents même si ces agents bénéficient de bonnes notations ;

- en l'espèce, si Mme A...a toujours été évaluée de façon satisfaisante, cela n'était pas suffisant pour prétendre à un avancement au grade de rédacteur territorial et en 1997, elle a fait l'objet d'un avis réservé quant à cette promotion ;

- le grade de rédacteur territorial est attribué après examen particulier du dossier, conformément à un règlement d'avancement validé en comité technique paritaire ;

- les promotions internes sont limitées par les quotas et ainsi, en 2013, 8 agents ont pu être promus, sur les 83 agents promouvables.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pierre Bentolila,

- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,

- les observations de MeC..., représentant Mme A...et de MeD..., représentant le département de la Gironde.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A...a été recrutée par le département de la Gironde, en qualité d'agent non-titulaire, le 16 avril 1973 puis titularisée dans différents grades et en dernier lieu, au grade d'adjoint administratif de 1ère classe depuis le 1er janvier 2010. Mme A...estimant qu'elle n'avait pas bénéficié des avancements de grade auxquels elle était en droit de prétendre, a présenté, le 28 juin 2013, auprès du département, une demande tendant à sa nomination au grade de rédacteur territorial avec effet rétroactif au 1er janvier 1990, à la reconstitution de sa carrière et à l'indemnisation du préjudice subi du fait du retard de déroulement de sa carrière. Mme A...relève appel du jugement du tribunal du 7 avril 2015, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa requête tendant à l' annulation de la décision du 11 septembre 2013, de rejet de sa demande du 28 juin 2013, à ce qu'il soit enjoint au département de la nommer rédacteur cadre B avec effet rétroactif à compter du 1er janvier 1990 et à la condamnation du département de la Gironde à l'indemniser des préjudices subis du fait des retards dans le déroulement de sa carrière.

Sur les conclusions en annulation :

2. Si Mme A...demande l'annulation de la décision de rejet de sa demande tendant à bénéficier d'une reconstitution de sa carrière en qualité de rédacteur territorial, elle n'invoque à l'appui de sa requête aucune disposition législative ou réglementaire, qui aurait été méconnue, qui lui aurait permis dans les différents grades des différents cadres d'emploi qu'elle a occupés en qualité de titulaire de bénéficier d'un avancement au grade de rédacteur territorial. Contrairement à ce que soutient la requérante, seules des illégalités fautives sont susceptibles d'entacher la décision du 11 septembre 2013, par laquelle le président du conseil départemental de la Gironde a rejeté sa demande du 28 juin 2013, de reconstitution de sa carrière au grade de rédacteur territorial avec effet rétroactif à compter du 1er janvier 1990.

3. Si la requérante invoque à l'appui de ses conclusions en annulation, une rupture d'égalité à son détriment au regard de la situation de différents fonctionnaires qui auraient accédé au grade de rédacteur territorial, elle ne justifie pas se trouver dans la même situation que ces agents.

4. Les circonstances invoquées selon lesquelles elle n'aurait fait l'objet d'un avis réservé pour son avancement au grade de rédacteur territorial que pour l'année 1997 et celle selon laquelle, c'est seulement à compter de l'intervention du décret du 30 juillet 2012 que la nomination au grade de rédacteur de fonctionnaire relevant du cadre d'emplois des adjoints administratifs, n'aurait plus été rendue possible, sont insuffisantes pour établir l'illégalité de la décision du 11 septembre 2013 portant refus de reconstitution de sa carrière.

Sur les conclusions indemnitaires :

5. Contrairement à ce que soutient la requérante, seules des illégalités fautives sont susceptibles d'entacher les décisions de refus de promotion au grade de rédacteur territorial. Mme A...qui se borne à faire état de ses propres mérites, sans établir que ce serait par une inexacte appréciation de ses mérites professionnels que le département de la Gironde ne l'a pas fait bénéficier de cet avancement, ne peut par cette simple circonstance établir l'existence de manquements fautifs qui entraineraient un engagement de la responsabilité de cette collectivité. Par ailleurs, Mme A...ne peut utilement se prévaloir, en l'absence d'un régime de responsabilité sans faute applicable au déroulement de carrière des agents publics, de la seule circonstance qu'elle n'ait pas été promue, contrairement à de nombreux autres agents remplissant les conditions statutaires, comme de nature à engager la responsabilité du département de la Gironde.

6. Mme A...n'est donc pas fondée à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Bordeaux.

Sur les conclusions en injonction et les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Compte tenu du rejet des conclusions en annulation présentées par MmeA..., les conclusions en injonction et les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par Mme A...ne peuvent être que rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...A...et au département de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 16 octobre 2017, à laquelle siégeaient :

M. Gil Cornevaux, président,

M. Pierre Bentolila, premier conseiller,

Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 novembre 2017.

Le rapporteur,

Pierre Bentolila

Le président,

Gil CornevauxLe greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

2

N° 15BX01422


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15BX01422
Date de la décision : 13/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-06-02-01 Fonctionnaires et agents publics. Notation et avancement. Avancement. Avancement de grade.


Composition du Tribunal
Président : M. CORNEVAUX
Rapporteur ?: M. Pierre BENTOLILA
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : DIROU

Origine de la décision
Date de l'import : 21/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-11-13;15bx01422 ?
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