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02/11/2017 | FRANCE | N°17BX01928

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 02 novembre 2017, 17BX01928


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 16 janvier 2017 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1700708 du 22 mars 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Procédure devan

t la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 juin 2017, M. A...C..., représenté par MeB......

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 16 janvier 2017 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1700708 du 22 mars 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 juin 2017, M. A...C..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 22 mars 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Gironde en date du 16 janvier 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 80 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la motivation factuelle du refus de titre de séjour est succincte. Elle révèle un défaut d'examen sérieux de sa situation puisqu'il n'a même pas été convoqué pour présenter des observations, ce qui aurait été utile au regard de son état de santé ;

- depuis le mois de mai 2016, il fait l'objet d'un suivi psychologique. Il a en outre fait l'objet d'une hospitalisation psychiatrique du 2 au 13 décembre 2016, et suit depuis un traitement lourd. Il est également atteint de l'hépatite B. Son état de santé nécessite l'ouverture d'un dossier étranger malade et cet état est antérieur au refus de titre de séjour litigieux. Il est hébergé par Mme D...et sa fille et s'est intégrée à cette famille. Le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation ;

- l'obligation de quitter le territoire français ne fait pas mention des considérations de fait qui la fondent, en méconnaissance de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la loi du 11 juillet 1979 ;

- eu égard à son état de santé, l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation pour les mêmes motifs que ceux énoncés pour le refus de titre de séjour ;

- la décision fixant le pays de renvoi ne comporte aucun élément de fait propre à sa situation ;

- il encourt de graves risques au Kosovo où il sera confronté à l'absence de traitement médical. En outre, il a fait l'objet de représailles de la part de la famille de sa compagne. Ils ont été agressés et ce n'est que sous la contrainte que sa compagne a déclaré à la police qu'elle ne souhaitait plus vivre avec lui. La décision fixant le pays de renvoi méconnaît donc l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 août 2017, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête en s'en rapportant à ses écritures de première instance dont il joint une copie.

Par ordonnance du 21 juillet 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 31 août 2017 à 12 heures.

M. A...C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 1er juin 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Paul-André Braud a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., ressortissant kosovar né le 1er janvier 1991, est entré en France le 13 décembre 2014. A la suite du rejet de sa demande d'asile, présentée en décembre 2015, par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 31 mars 2016 puis par la Cour nationale du droit d'asile le 4 novembre 2016, le préfet de la Gironde a, par un arrêté du 16 janvier 2017, refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. C...relève appel du jugement du magistrat désigné par le président tribunal administratif de Bordeaux en date du 22 mars 2017 rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, M. C...semble soutenir que cette décision n'est pas suffisamment motivée en fait. Cependant en indiquant que la demande d'asile de M. C...a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile et qu'il ne pouvait de ce fait se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement des articles L. 313-13 et L. 314-11 8° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et en ajoutant qu'étant entré récemment en France, étant célibataire et sans charge de famille en France et n'établissant pas être isolé dans son pays d'origine, il n'entre dans aucun autre cas d'attribution d'un titre de séjour, le préfet de la Gironde a suffisamment énoncé les circonstances de fait fondant son refus de titre de séjour.

3. En deuxième lieu, le requérant soutient que le préfet de la Gironde n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation faute de l'avoir convoqué, ce qui lui aurait permis d'exposer les éléments afférents à son état de santé. Cependant M.C..., qui avait déjà été reçu par les services de la préfecture pour le dépôt de sa demande d'asile, puis le renouvellement de ses récépissés, n'établit ni même n'allègue avoir sollicité un entretien pour présenter des observations, alors que son suivi médical remonterait au mois de mai 2016. Dans ces circonstances, aucune disposition législative ou règlementaire n'imposait au préfet de convoquer M. C...avant de statuer sur son droit au séjour. Dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté.

4. En troisième lieu, M. C...fait valoir qu'il souffre d'une hépatite B et fait l'objet d'un suivi psychologique depuis mai 2016, avec un traitement lourd à la suite de son hospitalisation en décembre 2016. Cependant, si les pièces produites corroborent les déclarations du requérant, elles ne permettent d'établir ni que le défaut de traitement entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni que le traitement requis ne serait pas disponible au Kosovo. Par ailleurs, si M. C...soutient s'être intégré à la famille qui l'héberge à titre gracieux, il est célibataire et sans attache familiale en France, et la seule attestation d'hébergement ne permet d'établir aucun lien stable et durable. Dans ces circonstances, et eu égard à la durée de son séjour en France, le préfet de la Gironde a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation, légalement refuser de lui délivrer un titre de séjour.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

5. En premier lieu, il résulte des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement. Si M. C...soutient que l'obligation de quitter le territoire français n'est pas suffisamment motivée en fait, il résulte de ce qui est énoncé au point 2 que le refus de titre de séjour énonce suffisamment les considérations de fait sur lesquelles il se fonde. Par suite, le moyen ne peut qu'être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Il résulte de ce qui est indiqué au point 4 que M. C...n'établit pas se trouver dans la situation décrite au 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut qu'être écarté.

7. En troisième lieu, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation doit être écarté pour les motifs énoncés au point 4.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

8. En premier lieu, l'arrêté précise que la demande d'asile de M. C...a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile et qu'il " n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ". Dès lors que M. C...n'établit ni même n'allègue avoir avisé les services d'un risque précis en cas de retour au Kosovo, une telle motivation factuelle de la décision fixant le pays de renvoi doit être regardée comme suffisante. Le défaut invoqué de motivation en fait de cette décision doit donc être écarté.

9. En second lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de cette convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ". Ces dispositions et stipulations font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de renvoi d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de renvoi ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée.

10. M. C...se prévaut à ce titre du risque qu'il encourt eu égard à son état de santé, mais comme indiqué précédemment il n'est nullement établi que le traitement requis ne soit pas disponible au Kosovo. Le requérant soutient également qu'il a été victime d'une agression du père et des frères de sa compagne, laquelle l'a quitté sous la pression de sa famille. Cependant le requérant ne produit aucune pièce au soutien de ses allégations, de sorte que l'existence d'un risque actuel et personnel en cas de retour au Kosovo n'est pas établi. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut être accueilli.

11. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance, M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 janvier 2017 du préfet de la Gironde. Par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M.A... C... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 28 septembre 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

M. Paul-André Braud, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 novembre 2017.

Le rapporteur,

Paul-André BRAUDLe président,

Catherine GIRAULT

Le greffier,

Virginie MARTY

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

No 17BX01928


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX01928
Date de la décision : 02/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SCP ASTIE-BARAKE-POULET-MEYNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 14/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-11-02;17bx01928 ?
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