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27/10/2017 | FRANCE | N°15BX02755

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre - formation à 3, 27 octobre 2017, 15BX02755


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé par requête du 23 décembre 2013 au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2003, 2004 et 2005.

Par un jugement n° 1302262 du 4 juin 2015, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 août 2015, M.B..., représenté par Me A..., demande à la cour

:

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 4 juin 2015 ;

2°) de prononcer ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé par requête du 23 décembre 2013 au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2003, 2004 et 2005.

Par un jugement n° 1302262 du 4 juin 2015, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 août 2015, M.B..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 4 juin 2015 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions susmentionnées ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la procédure ayant conduit aux rectifications d'impôt sur le revenu et de contributions sociales pour les années 2003, 2004 et 2005 est entachée de détournement de procédure dès lors qu'elle résulte d'éléments recueillis au cours de l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle (ESFP) effectué au titre des années 2007 et 2008 ; le tribunal a dénaturé les faits et a commis une erreur de droit ; en effet contrairement à ce qu'il indique, la procédure de rectification au titre des années 2003, 2004 et 2005, qualifiée de contrôle sur pièce n'a pas été menée par le service local mais par le service en charge de l'ESFP et résulte donc de cette dernière procédure ; d'ailleurs, l'administration a procédé à la vérification de la cohérence des revenus déclarés avec son patrimoine ;

- il a été privé du droit au débat oral et contradictoire et du droit de saisir l'interlocuteur départemental ;

- la proposition de rectification n'est pas motivée concernant les rappels opérés sur la somme de 300 000 livres soit 150 000 euros pour lui au titre de la quote-part de mobilier lui appartenant ;

- la taxation de la plus-value de cession en 2003 est prescrite car l'article L. 170 du livre des procédures fiscales n'est pas applicable : aucune instance devant un tribunal judiciaire n'était ouverte quand l'administration a procédé en 2010 aux rectifications en litige ;

- en tout état de cause, la prescription était acquise dès lors que l'acte constatant la cession a été réalisé en 2001 et non en 2003 au sens des articles 150-0 A du code général des impôts et de l'article 1583 du code civil ;

- la cession de parts sociales intervenue en 2001 a été réalisée en Angleterre de sorte qu'elle n'était pas passible de l'impôt sur le revenu et des cotisations sociales en France en 2003, en application du 4 de l'article 13 de la convention fiscale franco-britannique du 22 mai 1968 ;

- subsidiairement, l'administration a commis une erreur dans le calcul de l'assiette servant de base de calcul de la plus-value de cession des parts sociales, en y incluant à tort la valeur des meubles meublant le château de Mont, cédés concomitamment à la cession de la société Le Papillon Rouge à l'acquéreur ; elle a, ce faisant, dénaturé les termes du contrat de cession ; l'administration ne justifie pas la quote-part de la plus-value résultant du mobilier ;

- la taxation des revenus de capitaux mobiliers perçus sur l'Ile de Man au titre des années 2003, 2004, 2005 et 2007 est illégale car elle conduit à une double imposition : ces revenus relèvent de la directive n° 2003/48/CE du 3 juin 2003 dite " directive Epargne " laquelle prévoit en son article 14 l'application d'une retenue à la source ; en conséquence, ces revenus qui ont supporté une retenue à la source en application de cette directive, ne pouvaient être imposés sans l'obtention d'un crédit d'impôt correspondant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 janvier 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par ordonnance du 12 août 2016, la clôture d'instruction a été fixée, au 20 septembre 2016 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention fiscale franco-britannique du 22 mai 1968 modifiée ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Caroline Gaillard ;

- et les conclusions de Mme Munoz-Pauzies, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B...était associé pour moitié d'une société de droit britannique dénommée " Le papillon rouge " dont l'objet social était l'acquisition et la location du château de Mont (Pyrénées-Atlantiques). A la suite d'une perquisition de domicile et de l'exercice du droit de communication par l'administration fiscale auprès du procureur de la République, M. B...a fait l'objet d'une imposition sur la plus-value réalisée en 2003 et non déclarée à la cession des parts de la société ainsi révélée et de l'imposition de revenus de capitaux mobiliers non déclarés perçus en 2004 et 2005 sur un compte ouvert dans une banque sur l'île de Man. M. B...a encore fait l'objet d'un examen contradictoire de situation fiscale personnelle à l'issue duquel des contributions sociales ont été mises à sa charge au titre de l'année 2007. M. B...fait appel du jugement en date du 4 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur le principe de l'assujettissement en France :

2. Aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. ". Aux termes de l'article 4 B du même code : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal (...) ". Aux termes du 1 de l'article 150-0 A du code général des impôts : " (...) les gains nets retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement, par personne interposée ou par l'intermédiaire d'une fiducie, de valeurs mobilières, de droits sociaux, de titres mentionnés au 1° de l'article 118 et aux 6° et 7° de l'article 120, de droits portant sur ces valeurs, droits ou titres ou de titres représentatifs des mêmes valeurs, droits ou titres, sont soumis à l'impôt sur le revenu ".

3. Aux termes de l'article 13 de la convention fiscale franco-britannique du 22 mai 1968, abrogée à la suite de l'entrée en vigueur le 18 décembre 2009 de la nouvelle convention fiscale bilatérale du 19 juin 2008, mais qui était applicable aux faits du litige, dans la rédaction de l'accord issue du quatrième avenant du 15 octobre 1987 : " 4. Nonobstant les dispositions du paragraphe 3, les gains réalisés par une personne physique qui est un résident d'un Etat contractant lors de l'aliénation de plus de 25 p. cent des parts détenues, seule ou avec des personnes apparentées, directement ou indirectement, dans une société qui est un résident de l'autre Etat contractant sont imposables dans cet autre Etat. Les dispositions du présent paragraphe ne s'appliquent que si : a) La personne physique a la nationalité de l'autre Etat contractant sans avoir la nationalité du premier Etat contractant ; et b) La personne physique a été un résident de l'autre Etat contractant pendant une période quelconque au cours des cinq années précédant immédiatement l'aliénation des parts. "

4. En premier lieu, il est constant que M. B...était domicilié en Franceau cours des années en litige. M. B...ne justifie ni de sa nationalité ni non plus d'une résidence au Royaume-Uni dans les cinq années ayant précédé celles des impositions qu'il conteste. Il n'est donc pas fondé à soutenir que la cession des parts de la société " Le papillon rouge " établie au Royaume-Uni n'était imposable que dans cet Etat.

5. En second lieu, il résulte de l'article 29 de la convention fiscale franco-britannique du 22 mai 1968, en l'absence de tout avenant stipulant l'extension de l'accord, que celle-ci n'est pas applicable à l'île de Man.

6. M. B...n'est ainsi pas fondé à contester l'application de la loi fiscale française dans le présent litige.

Sur la procédure d'imposition :

7. En premier lieu, il résulte de l'instruction, ainsi que le mentionne la proposition de rectification du 6 décembre 2010, que les impositions auxquelles M. B...a été assujetti au titre des années 2003 à 2005 ne procèdent que d'un contrôle sur pièces résultant de l'exploitation des informations obtenues par l'exercice du droit de communication en date du 22 février 2010 auprès du procureur de la République dans le cadre d'une procédure pénale engagée à la suite d'une perquisition de domicile qui a permis au service de prendre connaissance de la cession des parts sociales de la société " Le papillon rouge " et de l'encaissement du produit de la cession sur un compte bancaire dans l'île de Man. La seule circonstance que ces informations ont été exploitées alors que le service procédait parallèlement à l'examen de la situation fiscale de M. B...au titre des années 2007 et 2008 n'est pas de nature à entacher la procédure d'imposition d'irrégularité ni, a fortiori, ne caractérise un détournement de la procédure d'imposition, aucun examen de la situation fiscale de l'intéressé n'ayant été entrepris au titre des années 2003 à 2005. Par suite le moyen selon lequel M. B...a été privé d'un débat contradictoire et n'a pas pu saisir l'interlocuteur départemental ne peut qu'être écarté.

8. En second lieu, la proposition de rectification du 6 décembre 2010 adressée à M. B...et établie selon la procédure contradictoire informe M. B...de la teneur et de l'origine des renseignements sur lesquels il s'est fondé pour établir les rectifications et mentionne que la plus-value imposée au titre de la cession en 2003 des parts sociales de la société " Le papillon rouge " détenues pour moitié par M. B...est calculée en fonction des transferts de fonds opérés le 12 mars 2003 et le 30 juillet 2003 sur un compte bancaire dans l'île de Man. Contrairement à ce qu'affirme M. B...la proposition de rectification indique précisément le calcul de la plus-value, la base juridique et les taux de taxation, le montant des revenus de capitaux mobiliers imposés au titre des années 2004 et 2005 vérifiées et les taux et montants des contributions sociales. La proposition de rectification était suffisamment motivée pour permettre au requérant de présenter utilement ses observations, ce qu'il a d'ailleurs fait le 24 octobre 2013. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales doit être écarté.

Sur la date de la cession et le délai de reprise :

9. M. B...produit un contrat de cession rédigé en anglais et affirme que la cession a eu lieu en 2001 et non en 2003, de sorte que la plus-value n'était pas imposable en 2003. Toutefois, l'acte produit ne comporte aucune date précise et certaine. Il ne justifie donc pas d'une autre date de cession des parts que celle identifiée par le service et coïncidant avec le transfert du règlement de la cession sur son compte bancaire dans l'île de Man.

10. Aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ; " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. (...) ". Aux termes de l'article L. 170 du même livre applicable aux faits du litige : " Même si les délais de reprise prévus à l'article L. 169 sont écoulés, les omissions ou insuffisances d'imposition révélées par une instance devant les tribunaux ou par une réclamation contentieuse peuvent être réparées par l'administration des impôts jusqu'à la fin de l'année suivant celle de la décision qui a clos l'instance et au plus tard jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due ".

11. Ainsi qu'il a été dit, l'omission de déclaration de la plus-value a été révélée à la suite de l'exercice du droit de communication auprès du procureur de la République. M.B..., en se bornant à soutenir qu'aucun tribunal n'était saisi, ne conteste pas que le ministère public avait saisi le juge d'instruction, comme l'affirme l'administration, et que des poursuites étaient effectivement engagées en 2010. Dans ces conditions, le délai exceptionnel de reprise fixé par l'article L. 170 du livre des procédures fiscales était applicable.

Sur le montant de la plus-value :

12. Aux termes de l'article 150-0 D du code général des impôts : " 1. Les gains nets mentionnés au I de l'article 150-0 A sont constitués par la différence entre le prix effectif de cession des titres ou droits, net des frais et taxes acquittés par le cédant, et leur prix effectif d'acquisition par celui-ci diminué, le cas échéant, des réductions d'impôt effectivement obtenues dans les conditions prévues à l'article 199 terdecies-0 A (...) ".

13. M. B...soutient que l'administration a inclus à tort dans l'assiette servant de base d'imposition de la plus-value de cession des parts sociales de la société " Le Papillon Rouge " les biens meublant le château de Mont cédés concomitamment à l'acquéreur. Mais aucun des actes qu'il produit, ni l'acte de 2001 qui ne peut pas être regardé comme l'acte formel de cession en litige, ainsi qu'il a été dit au point 9, ni les deux inventaires réalisés le 28 octobre 1998 et le 28 février 2001, ne permettent d'établir que la société dont la moitié des parts sociales ont été cédées par M. B...n'était pas propriétaire des meubles installés au château de Mont lors de la cession alors que le château avait été acquis par la société en 1998 garni de meubles. Dès lors, en l'absence d'élément probant, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'administration a commis une erreur dans le calcul de l'assiette servant de base à l'imposition de la plus-value de cession.

Sur les revenus de capitaux mobiliers perçus en 2003, 2004 et 2005 :

14. Enfin, M. B...soutient que les rectifications en litige ont entraîné une double imposition en méconnaissance des stipulations de l'article 14 de la directive 2003/48/CE du 3 juin 2003 dite " directive épargne " entrée en vigueur le 1er juillet 2005. Cependant, il ne saurait utilement se prévaloir directement d'une directive dont les mesures de transposition ont été prises en droit français. Et en tout état de cause, il ne justifie nullement avoir acquitté une imposition sur les revenus de capitaux mobiliers perçus dans l'île de Man. Le moyen relatif à la double imposition, qui manque en fait, ne peut qu'être rejeté.

15. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions en litige. Par voie de conséquence, sa demande tendant au paiement des frais de procès ne peut qu'être rejetée.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera délivrée au directeur du contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 29 septembre 2017 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

Mme Marianne Pouget, président-assesseur,

Mme Caroline Gaillard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 octobre 2017.

Le rapporteur,

Caroline Gaillard

Le président,

Philippe Pouzoulet

Le greffier,

Florence Deligey

La République mande et ordonne ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 15BX02755


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15BX02755
Date de la décision : 27/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Textes fiscaux - Conventions internationales.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu - Lieu d'imposition.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Évaluation de l'actif - Plus et moins-values de cession.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: Mme Caroline GAILLARD
Rapporteur public ?: Mme MUNOZ-PAUZIES
Avocat(s) : GABET

Origine de la décision
Date de l'import : 14/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-10-27;15bx02755 ?
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