Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme A...C..., par une requête enregistrée le 2 décembre 2013 et une réclamation soumise d'office au tribunal par l'administration le 5 décembre 2014, ont demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010 et des pénalités y afférentes.
Par un jugement n° 1302075-1402507 du 4 juin 2015, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 31 juillet 2015, M. et MmeC..., représentés par Me B..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 4 juin 2015 ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010 et des pénalités y afférentes ;
3°) de condamner l'Etat au paiement des dépens et à leur verser la somme de 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la procédure de contrôle de la société AS Location s'est déroulée dans des conditions irrégulières dès lors que lors de sa visite le 18 avril 2012, un inspecteur de la direction de la concurrence de la consommation et de la répression des fraudes accompagnait le vérificateur ; les gérants n'ont pas été prévenus de sa venue par un avis de passage ni informés de sa qualité et des raisons de sa présence ; ce manque de transparence a préjudicié aux garanties de leurs droits de contribuables et ne leur a pas permis de bénéficier de la présence d'un conseil pour assurer une meilleure défense de leurs droits ;
- s'agissant des rectifications au titre des revenus distribués établies sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts, la charge de la preuve de leur bien-fondé est objective : or, l'administration se borne a rejeter les documents établissant la réalité des frais de déplacement déclarés sans apporter aucune preuve de leur inexactitude ; en effet les kilométrages facturés ont été justifiés par les agendas des gérants comportant la date le lieu de rendez-vous et le kilométrage effectué et un relevé de frais correspondant ainsi que des copies de factures d'entretien des véhicules ; ces documents permettent de justifier des frais de déplacement en litige ;
- rien n'indique que le barème kilométrique publié annuellement par l'administration pour le calcul par les sociétés des frais d'utilisation de leur véhicule personnel ne s'applique pas aux véhicules loués par l'un des dirigeants :
- le rejet total par l'administration des frais de déplacement est une ineptie économique, la société AS Location ne pouvant fonctionner sans procéder à des démarches commerciales ou de représentation nécessitant l'utilisation d'un véhicule ;
- la société AS Location a fait l'objet d'un contrôle fiscal au titre des années antérieures à 2009 et 2010 au cours duquel les frais de déplacements comptabilisés n'ont pas été remis en cause ; dès lors l'administration doit être regardée comme ayant pris position formellement sur ce point en application des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales ;
- la majoration de 40 % qui a été appliquée est injustifiée ;
- la majoration de 10 % appliquée au titre de l'année 2009 sur le fondement de l'article 1728-1 du code général des impôts qui tient compte de la bonne foi de l'intéressé est contradictoire avec la majoration pour manquement délibéré précitée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 décembre 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les demandes excédant le quantum demandé lors de la réclamation préalable est irrecevable et qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par ordonnance du 15 décembre 2016, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 17 janvier 2017 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Caroline Gaillard ;
- et les conclusions de Mme Munoz-Pauzies, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. A la suite d'une vérification de comptabilité effectuée dans la société AS Location, qui exploite une activité de location de machines, équipements et biens divers, a fait l'objet, l'administration fiscale a réintégré dans ses résultats imposables, au titre des exercices clos en 2009 et 2010, les frais de déplacement remboursés à M. A...C..., son co-gérant et dirigeant. Par voie de conséquence des rehaussements apportés aux résultats déclarés par la société, M. et Mme C...ont été assujettis, au titre des mêmes années et pour les bénéfices industriels et commerciaux correspondant perçus selon le service par M.C..., à des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales qui ont été assortis des majorations prévues par l'article 1729 du code général des impôts. Ils font appel du jugement du 4 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. En raison du principe de l'indépendance des procédures de rectification menées à l'encontre de la société d'une part et du foyer fiscal de M. C...d'autre part, M. et Mme C...ne peuvent utilement se prévaloir des irrégularités de procédure susceptibles d'avoir entaché la procédure menée à l'encontre de la société.
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
3. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...). Toutefois, les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu. Cette disposition s'applique à toutes les rémunérations directes ou indirectes, y compris les indemnités, allocations, avantages en nature et remboursements de frais (...) ". En vertu du c) de l'article 111 du même code, sont notamment considérés comme revenus distribués les rémunérations et avantages occultes.
4. Ainsi qu'il a été dit, à la suite de la vérification de comptabilité dans la société AS Location, le service a adressé à M.C..., une proposition de rectification en date du 16 octobre 2012 par laquelle il a remis en cause le remboursement de frais de déplacements professionnels effectués par l'intéressé au titre des années 2009 et 2010 avec deux véhicules personnels (Audi et Range Rover), un véhicule loué par l'intéressé (Mercedes) et un véhicule loué par la société (Volkswagen Touareg) pour des montants s'élevant à 60 337 euros au titre de 2009 et 26 095 euros au titre de 2010. Ces montants, déterminés selon le barème kilométrique édité annuellement par l'administration, correspondent à 103 295 kilomètres déclarés parcourus pour l'année 2009 et 48 700 kilomètres pour l'année 2010. En se bornant à produire des agendas dont les mentions sont imprécises et des factures d'entretien des véhicules, les requérants, à qui incombe la charge de la preuve des faits qu'ils sont seuls en mesure de justifier, n'établissent pas la réalité des kilométrages parcourus dans le cadre de déplacements de caractère professionnel. En outre, aucun élément ne permet d'établir que des frais auraient été engagés par M. C...pour l'entretien ou l'utilisation du véhicule Touareg, dans le cadre de son activité au service de la société AS Location, alors que la location de la voiture était déjà à la charge de la société AS Location. Dès lors, les montants remboursés par la société à M. C...ne peuvent pas être regardés comme correspondant à des frais engagés dans un cadre professionnel. Par suite, ces remboursements, constitutifs de rémunérations et avantages à caractère occulte étaient imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers prévue au c) de l'article 111 du code général des impôts.
En ce qui concerne l'existence d'une prise de position formelle par l'administration :
5. En se bornant à soutenir que, lors de contrôles antérieurs opérés dans la société, le service n'a pas remis en cause les remboursements par la société de frais de déplacement au bénéfice de M.C..., M. et Mme C...n'établissent pas l'existence d'une prise de position formelle par l'administration sur l'appréciation d'une situation de fait dont ils pourraient se prévaloir sur le fondement des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales.
Sur les pénalités :
6. En premier lieu, aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : .a. 10 % en l'absence de mise en demeure ou en cas de dépôt de la déclaration ou de l'acte dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai. ".
7. M. et Mme C...ne contestent pas avoir déclaré leur revenu global au titre de l'année 2009 le 28 juillet 2010 soit après la date limite de dépôt des déclarations fixée au 31 mai 2010. Par suite, ils ne sont en tout état de cause pas fondés à contester la majoration de 10 % appliquée qui ne se rapporte pas aux rectifications en litige mais à l'imposition initiale.
8. En second lieu, l'article 1729 du code général des impôts dispose : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : /a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ".
9. Pour justifier de la pénalité appliquée pour mauvaise foi, l'administration s'est bornée à indiquer dans la proposition de rectification adressée à M. et MmeC..., que " les dirigeants de la SARL AS Location se sont fait rembourser des frais de déplacements injustifiés " et à compléter cette mention par deux extraits de décisions du Conseil d'Etat, sans toutefois expliciter les motifs pour lesquels le manquement délibéré était en l'espèce établi. Les requérants sont fondés à soutenir que la proposition de rectification n'était pas suffisamment motivée sur ce point.
10. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme C...sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à la décharge de la pénalité de 40 % mise à leur charge.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ". Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 500 euros en application de ces dispositions.
DECIDE :
Article 1er : M. et Mme A...C...sont déchargés de la pénalité de 40 % dont ont été assortis les suppléments d'impôt sur le revenu auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010 sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts.
Article 2 : Le jugement n° 1302075, 1402507 du 4 juin 2015 du tribunal administratif de Pau est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme C...la somme de 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme C...est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...C...et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera délivrée au directeur du contrôle fiscal sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 29 septembre 2017 à laquelle siégeaient :
M. Philippe Pouzoulet, président,
Mme Marianne Pouget, président-assesseur,
Mme Caroline Gaillard, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 27 octobre 2017.
Le rapporteur,
Caroline GaillardLe président,
Philippe PouzouletLe greffier,
Florence Deligey
La République mande et ordonne ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 15BX02668