La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/10/2017 | FRANCE | N°17BX00174

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 17 octobre 2017, 17BX00174


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté

du 8 août 2016 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à l'issue de ce délai.

Par un jugement n° 1604080 du 22 décembre 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Pa

r une requête, enregistrée le 17 janvier 2017, M.A..., représenté par

MeC..., demande à la cour :

1°) d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté

du 8 août 2016 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à l'issue de ce délai.

Par un jugement n° 1604080 du 22 décembre 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 janvier 2017, M.A..., représenté par

MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 22 décembre 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 8 août 2016 susvisé ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, passé ce délai, subsidiairement de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement au profit de son conseil d'une

somme de 1 500 euros, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

- elle est entachée d'un défaut de motivation et d'examen réel et sérieux de sa situation ; le préfet n'a pas tenu compte de l'ensemble des éléments fournis ;

- le préfet a commis une erreur de fait en estimant qu'il n'avait pas produit, malgré sa lettre du 2 décembre 2015, les documents indispensables à l'instruction de sa demande ;

- le préfet a commis une erreur de droit en retenant qu'il ne dispose pas d'un visa de long séjour pour lui refuser le titre de séjour sollicité ;

- le tribunal ne pouvait procéder à une neutralisation du motif tiré de ce qu'il ne disposait pas d'un visa de long séjour pour solliciter un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 1° et du 2° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que les autres motifs de ladite décision étaient également infondés ;

- le préfet a commis une erreur de droit au regard des dispositions du 2° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français, il soutient que :

- elle est privée de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 mars 2017, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- l'intéressé n'apporte aucune pièce probante à l'appui de sa requête d'appel ;

- il s'en remet à ses écritures de première instance.

Par ordonnance du 10 février 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 10 mars 2017.

Des pièces nouvelles, présentées par M.A..., ont été enregistrées le 15 mars 2017.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision

du 26 janvier 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Didier Salvi a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., ressortissant chinois né le 26 janvier 1985, est entré sur le territoire français le 25 octobre 2008 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour. Il a bénéficié, à compter du 1er décembre 2008, d'un titre de séjour temporaire portant la mention " étudiant " régulièrement renouvelé jusqu'au 30 novembre 2013. Le 25 mars 2013, il a demandé à changer de statut et à être admis au séjour sur le fondement des dispositions du 2° de

l'article L. 313-l 0 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en vue d'exercer une activité artistique relevant des arts plastiques et infographistes, ainsi que du dépannage informatique. Après l'avis réservé émis le 28 août 2013 par le trésorier-payeur général sur la viabilité économique de son projet, M. A...a été invité, par lettre

du 10 octobre 2013, à compléter son dossier et à demander le renouvellement de sa carte de séjour en qualité d'étudiant. Le 2 décembre 2013, l'intéressé a de nouveau demandé son changement de statut et son admission au séjour en qualité d'artisan. Le 16 juillet 2014, le préfet de la Haute-Garonne a pris à son encontre un arrêté refusant de l'admettre au séjour et 1'obligeant à quitter le territoire français qui a été annulé par jugement du tribunal administratif de Toulouse du 11 décembre 2014. M. A...a demandé le réexamen de sa situation en demandant son admission dans un premier temps, le 16 février 2015, en qualité de salarié, puis, dans un second temps, le 23 novembre 2015, en qualité de commerçant. Le trésorier-payeur général a émis un avis réservé le 5 janvier 2015. M. A...relève appel du jugement n° 1604080 du 22 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 8 août 2016 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il serait reconduit à l'issue de ce délai.

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, M. A...reprend en appel les moyens déjà invoqués en première instance et tirés de ce que la décision de refus de délivrance de titre de séjour est entachée d'un défaut de motivation et d'examen sérieux de sa situation. Toutefois, la décision litigieuse mentionne, avec une précision suffisante pour permettre à l'appelant d'en comprendre les motifs et dépourvue de caractère stéréotypé, les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, les moyens tirés du défaut de motivation et d'examen sérieux de sa situation doivent être écartés.

3. En deuxième lieu, au soutien du moyen tiré de ce que la décision susvisée est entachée d'un défaut d'instruction de sa demande, M. A...affirme que, le préfet l'ayant invité par lettre du 2 décembre 2015 à produire les documents indispensables à l'instruction de sa demande, il a fourni l'ensemble des pièces sollicitées par courrier du 16 décembre 2015 reçu par l'administration le 21 décembre 2015. Toutefois, il n'apporte devant la cour aucune précision, ni pièce nouvelle de nature à modifier l'appréciation portée par les premiers juges sur le bien-fondé de ce moyen invoqué en première instance. Dans ces conditions, il y a lieu, par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges, d'écarter ce moyen.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour " compétences et talents " sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois. " . Aux termes de l'article L. 313-10 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : (...) 2° A l'étranger qui vient exercer une profession commerciale, industrielle ou artisanale à condition notamment qu'il justifie d'une activité économique viable et compatible avec la sécurité, la salubrité et la tranquillité publiques et qu'il respecte les obligations imposées aux nationaux pour l'exercice de la profession envisagée (... ) ". Aux termes de l'article R. 311-2 de ce code : " La demande est présentée par l'intéressé dans les deux mois de son entrée en France. S'il y séjournait déjà, il présente sa demande : (...) 4° Soit dans le courant des deux derniers mois précédant l'expiration de la carte de séjour dont il est titulaire (...) A l'échéance de ce délai et en l'absence de présentation de demande de renouvellement de sa carte de séjour, il justifie à nouveau des conditions requises pour l'entrée sur le territoire national lorsque la possession d'un visa est requise pour la première délivrance de la carte de séjour. ".

L'article R. 313-16-1 dudit code dispose que l'étranger " qui envisage de créer une activité ou une entreprise doit présenter à l'appui de sa demande les justificatifs permettant d'évaluer la viabilité économique du projet. L'étranger qui envisage de participer à une activité ou une entreprise existante doit présenter les justificatifs permettant de s'assurer de son effectivité et d'apprécier la capacité de cette activité ou de cette société à lui procurer des ressources au moins équivalentes au salaire minimum de croissance correspondant à un emploi à temps plein. Dans tous les cas, l'étranger doit justifier qu'il respecte la réglementation en vigueur dans le domaine d'activité en cause. Un arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé des finances fixe la liste des pièces justificatives que l'étranger doit produire.". Et aux termes de l'article R. 313-16-2 du même code : " Lorsque l'étranger présente un projet tendant à la création d'une activité ou d'une entreprise, l'autorité diplomatique ou consulaire ou le préfet compétent saisit pour avis le directeur départemental ou, le cas échéant, régional des finances publiques du département dans lequel l'étranger souhaite réaliser son projet ".

5. Si M. A...a demandé un changement de statut en qualité de commerçant en se prévalant d'un projet de création d'une société de dépannage informatique et de création de sites web et s'il fournit un bilan prévisionnel faisant état d'un bilan financier positif, l'origine des recettes demeure inconnue. Les pièces du dossier ne permettent pas plus de déterminer la rémunération attribuée au gérant. Le requérant ne justifie pas davantage de son expérience professionnelle dans l'activité de dépannage informatique. Au surplus, il ressort, notamment, de l'avis réservé du trésorier payeur général du 5 janvier 2016 que le budget prévisionnel fourni par M. A...ne répond pas aux exigences comptables requises. Ainsi, les pièces produites au dossier ne permettent pas de tenir pour établie la viabilité de son projet. Dès lors, à supposer même que le préfet de la Haute-Garonne se serait fondé sur le motif erroné que M. A...n'a pas produit, malgré son courrier du 2 décembre 2015, les documents indispensables à l'instruction de sa demande, le préfet aurait pris la même décision en se fondant seulement sur le motif tiré de l'absence de preuve d'une activité économique viable pour rejeter la demande de titre de séjour de l'intéressé.

6. Ainsi qu'il vient d'être dit, le préfet pouvait légalement, au seul motif que

M. A...n'établissait pas la viabilité économique de son projet, refuser de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 2° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ainsi, l'appelant ne peut utilement se prévaloir de ce que le préfet aurait commis une erreur de droit en retenant qu'il devait justifier d'un visa de long séjour pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement de ces mêmes dispositions.

7. En quatrième et dernier lieu, M. A...soutient que la décision portant refus de délivrance de titre de séjour est entachée d'une erreur de droit au regard des dispositions du 2° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'une erreur manifeste d'appréciation. Toutefois, il n'apporte devant la cour aucune précision ni pièce nouvelle de nature à modifier l'appréciation portée par les premiers juges sur le bien-fondé de ces moyens invoqués en première instance. Dans ces conditions, il y a lieu, par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges, d'écarter ces moyens.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que l'appelant n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la mesure d'éloignement prise à son encontre.

9. En second lieu, pour l'application des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

10. Si M. A...soutient qu'il est entré en France le 25 octobre 2008 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour et qu'il a fondé un projet d'activité économique pour lequel il a investi 10 000 euros dans l'acquisition d'un bail commercial, il ne démontre, ni même n'allègue avoir noué des liens personnels et familiaux en France alors qu'il est célibataire et sans enfant. Il ne justifie pas davantage être dépourvu de tout lien familial dans son pays d'origine où vivent ses parents. Dans ces conditions, la mesure d'éloignement attaquée n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas plus entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M.A....

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

11. Il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que la décision susvisée est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté litigieux du préfet de la Haute-Garonne du 8 août 2016. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 19 septembre 2017 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

Mme Aurélie Chauvin, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 17 octobre 2017,

Le rapporteur,

Didier SalviLe président,

Éric Rey-BèthbéderLe greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présen arrêt.

N° 17BX00174


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX00174
Date de la décision : 17/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : DIALEKTIK AVOCATS AARPI

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-10-17;17bx00174 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award