Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme G...B...a demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner le centre hospitalier Gabriel Martin de Saint-Paul à lui verser la somme de 450 727,64 euros en réparation du préjudice résultant de l'intervention chirurgicale qu'elle a subie le 22 avril 2011.
Par un jugement n° 1301209 du 30 juillet 2015, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa requête.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 novembre 2015 et 21 février 2017, MmeB..., représentée par MeE..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 30 juillet 2015 ;
2°) de condamner le centre hospitalier Gabriel Martin à lui verser la somme totale de 527 603,21 euros en réparation des préjudices subis et une somme de 19 275,65 euros par an au titre de l'assistance par une tierce personne ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier Gabriel Martin la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ainsi que les dépens.
Elle soutient que :
- à titre liminaire, le rapport d'expertise est régulier ;
- le centre hospitalier Gabriel Martin a commis des erreurs qui ont conduit aux complications qu'elle a subies, en n'encadrant pas correctement son suivi postopératoire, du fait de la maladresse commise par le Dr C...en n'identifiant pas la brèche séro-musculaire et en raison du choix ne pas réaliser une ventilation prolongée qui aurait pu aboutir à une autre issue ;
- le centre hospitalier est responsable des préjudices subis dont elle demande réparation à hauteur :
de 15 150,97 euros pour la perte de gains professionnels actuels résultant de l'incapacité permanente totale du 21 avril 2011 au 27 septembre 2011 durant laquelle elle n'a pu exercer en qualité de collaboratrice son activité d'infirmière libérale ;
de 3 780 euros correspondant à des frais divers liés à la réduction de son autonomie ;
de 379 702,24 euros au titre de l'incidence professionnelle résultant de l'impossibilité d'exercer l'emploi qu'elle occupait et de la baisse significative de ses droits à la retraite ;
de 19 275,65 euros par an pour l'assistance par une tierce personne dont elle a besoin pour les gestes de la vie courante ;
de 4 095 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire subi d'avril 2011 à septembre 2011 ;
de 15 000 euros pour les souffrances endurées ;
de 94 875 euros au titre du déficit fonctionnel permanent dont le taux a été fixé à 55 % par l'expert ;
de 5 000 euros concernant le préjudice esthétique permanent évalué à 2,5/7 ;
et 10 000 euros pour le préjudice d'agrément.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 janvier 2017, le centre hospitalier de
Saint-Paul de La Réunion conclut au rejet de la requête.
Il soutient que le moyen soulevé par Mme B...tenant à la faute commise dans la prise en charge tardive, d'une part, et dans l'absence de ventilation prolongée, d'autre part, n'est pas fondé. À titre subsidiaire, il soutient que les demandes indemnitaires formées par
Mme B...ne sont fondées ni dans leur principe ni dans leur montant.
Par ordonnance du 23 janvier 2017, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 27 février 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de MmeD...,
- les conclusions de M. Katz, rapporteur public,
- et les observations de MeE..., représentant MmeB....
Considérant ce qui suit :
1. Mme B...a subi, le 22 avril 2011, au centre hospitalier Gabriel Martin de Saint-Paul une intervention de cure d'éventration survenue sur une cicatrice antérieure, avec mise en place d'une plaque intra-péritonéale. Ayant présenté, le 26 avril 2011, des douleurs importantes ainsi qu'une hyperthermie, un scanner réalisé le jour même a mis en évidence un syndrome péritonéal et a conduit à une nouvelle intervention chirurgicale consistant en une toilette péritonéale abondante associée à une suture primitive de la perforation du colon et un drainage dans les gouttières pariéto-coliques. Mme B...a ensuite séjourné, du 28 avril au 24 mai, au service des soins intensifs du centre hospitalier où elle a présenté un choc septique, une décompensation cardiogénique et une insuffisance rénale fonctionnelle, avant d'être transférée en service de chirurgie jusqu'au 6 juin et enfin, au centre de soins des Tamarins jusqu'au 27 septembre 2011. À la suite de ces hospitalisations, elle n'a pas repris son activité d'infirmière libérale et est restée dans un état de santé très affaibli. Une expertise a été ordonnée à sa demande par le juge des référés du tribunal administratif de La Réunion. Puis, MmeB..., a formé, le 22 juillet 2013, auprès du centre hospitalier Gabriel Martin une demande d'indemnisation des préjudices dont elle souffre depuis l'opération du 22 avril 2011. En l'absence de réponse à sa réclamation, elle a recherché la responsabilité de ce centre hospitalier devant le tribunal administratif de La Réunion et interjette appel du jugement rendu par ce dernier le 30 juillet 2015, rejetant sa requête.
Sur la responsabilité du centre hospitalier :
2. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute (...) ".
3. En premier lieu, il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expertise ordonnée par le juge des référés, établi le 23 novembre 2012 par le DrA..., dont la régularité n'est pas critiquée par l'appelante, qu'au cours de l'intervention du 22 avril 2011 subie par Mme B..., une brèche séro musculaire du colon transverse, apparue vraisemblablement lors de la dissection, pendant la libération des adhérences, première étape de l'intervention de cure de l'éventration dont l'orifice était en l'espèce de dix centimètres, a engendré une péritonite stercorale avec comme corollaire un choc septique, un séjour en soins intensifs et une décompensation multi viscérale ainsi qu'une pathologie de réanimation. Si cette brèche n'a pas été décelée par le chirurgien, lequel indique avoir vérifié tout l'intestin en fin d'opération, il ne résulte pas des conclusions de l'expert que cette complication ait constitué, dans les circonstances de l'espèce, une méconnaissance des règles de l'art. Il résulte en effet de l'instruction et notamment des dires non sérieusement contredits du DrF..., que " il s'agissait selon toute probabilité d'une atteinte partielle de la paroi du colon au niveau de sa couche superficielle sero-musculaire laissant encore la couche interne de la muqueuse intacte assurer l'étanchéité. Ainsi, lors du contrôle en fin d'intervention de tout l'intestin, le docteur C...ne pouvait pas matériellement détecter une fuite ou une brèche colique. La brèche a dû se constituer quelques heures voire un jour après la fermeture de la paroi ". Ainsi, eu égard à l'absence probable de perforation de la couche interne de la muqueuse au moment de l'intervention et à la possibilité non contestée que l'orifice ait d'abord été bouché, l'absence de détection de cette brèche, que l'expert qualifie de " maladresse ", n'est pas constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier. Mme B...n'est, dès lors, pas fondée à soutenir qu'un geste médical fautif serait à l'origine du dommage dont elle demande réparation.
4. En deuxième lieu, Mme B...soutient à l'appui du défaut dans l'organisation du service qu'elle invoque, que le personnel du centre hospitalier aurait manqué de vigilance et d'attention à son égard durant les quatre jours qui ont suivi l'intervention et aurait tardé à réaliser un examen tomodensitométrique permettant de poser le diagnostic de la péritonite, lui faisant ainsi perdre une chance de prise en charge plus précoce. Toutefois, elle n'établit pas, par les seules attestations qu'elle produit, avoir alerté après l'intervention, ainsi qu'elle le soutient, le personnel soignant de douleurs différentes de celles attendues en post opératoire, alors, d'ailleurs, qu'elle a déclaré lors de l'expertise que ses premiers souvenirs dataient de sa sortie du service de réanimation, c'est-à-dire le 24 mai. Il n'est pas davantage avéré que son état justifiait, avant le 26 avril 2011, qu'il fût procédé à des examens complémentaires. En outre, et ainsi qu'il a été dit au point 3, il est possible que l'orifice à l'origine de l'infection ait été bouché pendant un temps avant que la distension due à l'occlusion du colon ne fasse apparaître les symptômes nécessaires pour le diagnostic, lesquels ont pu survenir avec un décalage de 48 heures. Il ne résulte ainsi pas de l'instruction que la brèche séro-musculaire du colon transverse de
Mme B...aurait pu être diagnostiquée dès le lendemain de l'intervention en litige. Le défaut de surveillance allégué de l'intéressée à l'origine d'un éventuel retard de diagnostic n'est, en conséquence, pas démontré.
5. Il résulte enfin de l'instruction et notamment du rapport d'expertise du
23 novembre 2012 que la prise en charge post-opératoire des complications subies par Mme B..., dont l'état de santé a nécessité une ventilation assistée pendant quatorze jours, a été consciencieuse et conforme aux données de la science médicale. L'appelante ne peut, dès lors, utilement soutenir que le centre hospitalier aurait commis une faute relative à une absence de ventilation prolongée.
6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'aucune faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier Gabriel Martin n'avait été commise et ont rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
Sur les dépens :
7. Il y a lieu de maintenir à la charge définitive de Mme B...les frais d'expertise liquidés et taxés par une ordonnance du président du tribunal administratif de La Réunion en date du 21 juin 2013, à la somme de 1 200 euros.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G...B..., au centre hospitalier Gabriel Martin et à la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion.
Délibéré après l'audience du 19 septembre 2017 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
Mme Aurélie Chauvin, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 17 octobre 2017
Le rapporteur,
Aurélie D...Le président,
Éric Rey-BèthbéderLe greffier,
Vanessa Beuzelin
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 15BX03568