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16/10/2017 | FRANCE | N°15BX03899

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre - formation à 3, 16 octobre 2017, 15BX03899


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La communauté de communes du canton de Massat a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du maire de Teuillac du 30 octobre 2014 reconnaissant comme imputable au service la pathologie dont souffre Mme A...alors qu'elle était employée par la communauté de communes du canton de Massat.

Par un jugement n° 1405181 du 13 octobre 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la demande de la communauté de communes du canton de Massat.

Procédure devant la cour :>
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 7 décembre 2015, le 13 juillet 2016, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La communauté de communes du canton de Massat a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du maire de Teuillac du 30 octobre 2014 reconnaissant comme imputable au service la pathologie dont souffre Mme A...alors qu'elle était employée par la communauté de communes du canton de Massat.

Par un jugement n° 1405181 du 13 octobre 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la demande de la communauté de communes du canton de Massat.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 7 décembre 2015, le 13 juillet 2016, le 30 septembre 2016 et le 1er juin 2017, la communauté de communes Couserans-Pyrénées venant aux droits de la communauté de communes du canton de Massat, représentée par la SCP Goguyer Lalande-Degioanni, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 13 octobre 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté d'imputabilité précité du 30 octobre 2014 ;

3°) d'ordonner si besoin une expertise médicale afin de rechercher l'origine et la date de la maladie dont souffre Mme A...et de mettre les frais de cette expertise à la charge de la commune de Teuillac ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Teuillac la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a entaché son jugement d'une contradiction de motifs, entre les considérants 4 et 7 ; il a ainsi estimé qu'une décision qui porte grief à une collectivité territoriale peut être prise sans que cette collectivité puisse présenter des observations pour assurer la défense de ses intérêts ;

- la commune de Teuillac devait simplement se prononcer sur l'imputabilité au service, en vertu du tableau 53, mais il n'entrait pas dans ses attributions d'imputer la maladie professionnelle au service accompli par l'agent auprès de la communauté de communes ; l'arrêté est entaché d'incompétence ;

- le contradictoire ayant été méconnu, elle n'a pas pu formuler des observations notamment au regard des conditions de prise en charge prévues par le tableau 53 du code de la sécurité sociale ; en tout état de cause, la commune ne pouvait prendre cet arrêté sur la seule base de l'avis de la commission de réforme sans même chercher à vérifier si les conditions de prise en charge du tableau étaient bien remplies ;

- or, en l'espèce, la condition de l'existence d'un lien direct et certain des troubles avec le service n'est pas établie ; la maladie professionnelle n'a été déclaré que le 23 décembre 2009, alors que l'agent n'était plus affectée au service de la communauté de communes depuis juillet 2007 ;

- l'école de Soulan est correctement clôturée, les animaux ne peuvent y pénétrer et les élèves ne peuvent sortir de son enceinte ; c'est une école rurale très bien entretenue ; elle n'a jamais connu de problèmes sanitaires ; les inspections se sont toujours bien déroulées ; rien n'établit que Mme A...ait respecté les règles fondamentales d'hygiène ; ce n'était pas elle qui procédait au nettoyage des salles ou du sol ; en 2006, elle a été en voyage scolaire en ferme pédagogique et il est possible que la maladie ait été contractée pendant ce séjour, la ferme en question relevant de l'éducation nationale ; au total, l'imputabilité au service n'est pas démontrée, comme le montre d'ailleurs le rapport d'expertise du DrC... ; l'imputabilité repose sur de simples hypothèses ;

- en outre, il y a une certaine incertitude sur la période à laquelle la maladie a débuté ; le lieu et le mode de transmission ne peuvent donc être déterminés avec certitude ; en outre, la maladie peut être transmise par inhalation ou par ingestion, et avec d'autres animaux que des bovins ; aucun cas de même nature n'a jamais été signalé dans cette école, ni avant ni après la période suspectée ; il est donc impossible d'affirmer que la maladie litigieuse a été contractée alors que Mme A...exerçait ses fonctions auprès de l'école de Soulan ; c'est pourquoi, elle s'associe à la demande de la commune de Teuillac sollicitant une mesure d'expertise médicale afin que soient recherchées l'origine et la date de la maladie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juillet 2016, la commune de Teuillac, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête, à titre subsidiaire à ce qu'il soit ordonné une nouvelle expertise aux fins de déterminer l'origine de la maladie de Mme A...et la date à laquelle elle l'a contractée et à ce qu'il soit mis à la charge de la communauté de communes du canton de Massat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, les frais d'expertise, ainsi que les entiers dépens.

Elle fait valoir que :

- les moyens soulevés par la communauté de communes ne sont pas fondés ; le tribunal a fait une bonne lecture des dispositions de l'article 57-2 de la loi du 26 janvier 1984 ; la communauté de communes peut toujours former un recours en responsabilité contre la commune de Teuillac, qui s'est en tout état de cause bien conformée aux dispositions précitées ; la commune s'est appuyée sur des éléments médicaux solides, à savoir l'existence de la pathologie et la chronologie de son apparition ; la communautés de communes peut toujours demander la désignation d'un expert judiciaire pour apprécier l'origine et la date d'apparition de la pathologie de MmeA..., bien que les constatations médicales figurant au dossier soient suffisamment claires.

Par des mémoires, enregistrés le 7 novembre 2016 et le 22 décembre 2016, Mme A..., représentée par MeE..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la communauté de communes du canton de Massat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par la communauté de communes ne sont pas fondés ; le jugement n'est entaché d'aucune contradiction ; la commune de Teuillac a fait une exacte application des dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 ; elle était pleinement compétente pour prendre l'arrêté d'imputabilité contesté ; la demande d'expertise de la communauté de communes doit être rejetée, dès lors qu'elle a été suffisamment expertisée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.*

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac,

- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,

- et les observations de MeF..., représentant la communauté de communes Couserans-Pyrénées, de MeB..., représentant la commune de Teuillac et de Me E..., représentant MmeA....

Considérant ce qui suit :

1. Mme D...A..., agent territorial spécialisé des écoles maternelles (ATSEM), titularisée par un arrêté du 10 août 2005 du président de la communauté de communes du canton de Massat (Ariège), a présenté, au début de l'année 2006, des épisodes de diarrhées et d'infections rhino-pharyngées fébriles, puis, à partir de juin 2006, des paresthésies des deux mains puis des membres inférieurs, symptomatiques de ce qui a alors été diagnostiqué comme une méningo-radiculite. Mme A...a été recrutée le 3 juillet 2007, par voie de mutation, par la commune de Teuillac (Gironde) et y a exercé ses fonctions à compter du 1er août 2007. Cependant, sa méningo-radiculite a évolué en polyradiculonévrite aiguë puis chronique, affection neuropathique dont elle a subi des poussées récidivantes aux mois de novembre et décembre 2007. Elle a été placée en congé maladie ordinaire à compter du 9 décembre 2007, puis en congé de longue maladie à compter du 7 janvier 2013, après avoir été reconnue travailleur handicapé le 1er septembre 2009 par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées. Par un jugement du 4 février 2013, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé un premier arrêté du maire de Teuillac du 29 avril 2010 ayant refusé, en se fondant sur un avis défavorable de la commission départementale de réforme du 14 avril 2010, de reconnaître comme imputable au service la pathologie contractée par Mme A...et lui a enjoint de réexaminer la demande de l'intéressée en ce sens. L'expertise médicale réalisée le 29 octobre 2013 a conclu à une contamination bactérienne, classiquement d'origine animale et notamment bovine, par coxiellia burnetii, responsable d'une coxielliose également appelée " fièvre Q " dont une forme rare et grave peut donner des manifestations neurologiques telles que méningites et neuropathies périphériques, en faisant le lien avec les fonctions exercées par Mme A...au sein de l'école de Soulan (Ariège), située en milieu rural de montagne. Par un jugement du 26 mai 2014, le juge des référés du même tribunal a ordonné la suspension d'un second arrêté du maire de Teuillac du 4 avril 2014 ayant une nouvelle fois rejeté la demande de Mme A...d'imputabilité au service de sa pathologie, jugement à l'encontre duquel le pourvoi en cassation formé par la commune n'a pas été admis par le Conseil d 'Etat, mais qui a cependant donné lieu à un litige d'exécution, tranché en faveur de Mme A...par un jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 21 octobre 2014. Dans l'intervalle, la commission départementale de réforme, saisie une nouvelle fois par la commune de Teuillac a, le 22 janvier 2014, reconnu l'imputabilité au service de la maladie contractée par Mme A...et ce, à compter du 1er janvier 2006. Par un troisième arrêté du 30 octobre 2014, le maire de la commune de Teuillac a reconnu comme imputable au service la pathologie affectant MmeA..., en précisant qu'il s'agissait du service accompli par elle au sein de la communauté de communes du canton de Massat, antérieurement à son entrée au service de la commune de Teuillac. La communauté de communes Couserans-Pyrénées venant aux droits de la communauté de communes du canton de Massat fait appel du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 13 octobre 2015, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce dernier arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable à la date de l'arrêté attaqué : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. / La collectivité est subrogée dans les droits éventuels du fonctionnaire victime d'un accident provoqué par un tiers jusqu'à concurrence du montant des charges qu'elle a supportées ou supporte du fait de cet accident. Elle est admise à poursuivre directement contre le responsable du dommage ou son assureur le remboursement des charges patronales afférentes aux rémunérations maintenues ou versées audit fonctionnaire pendant la période d'indisponibilité de celui-ci par dérogation aux dispositions de l'article 2 de l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile de l'Etat et de certaines autres personnes publiques ; (...) ". Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à l'existence de troubles présentant un lien direct et certain avec l'accident de service.

3. En premier lieu, la compétence des chefs de service, auxquels il appartient, même en l'absence de texte, de prendre les mesures nécessaires au bon fonctionnement des administrations placées sous leur autorité, ainsi que la faculté qu'ont les autorités publiques de s'entourer, avant de prendre les décisions relevant de leur compétence, des avis qu'elles estiment utile de recueillir, ne peuvent légalement s'exercer lorsqu'une disposition législative ou réglementaire a déterminé les conditions dans lesquelles ces décisions doivent être prises.

4. A cet égard, c'est à bon droit que les premiers juges ont relevé que les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 et du décret du 16 juillet 1987 ayant déterminé les conditions dans lesquelles est appréciée l'imputabilité au service des accidents et maladies des fonctionnaires territoriaux, la communauté de communes du canton de Massat, qui n'était pas l'autorité employant l'agent territorial auteur de la demande de reconnaissance d'imputabilité au service à la date à laquelle la demande a été formulée, n'était pas fondée à soutenir que l'arrêté du maire de la commune de Teuillac serait irrégulier au motif qu'elle n'aurait pas été, préalablement à son édiction, associée à l'instruction du dossier de demande de reconnaissance d'imputabilité au service de la maladie dont souffre MmeA... et mise à même de présenter ses observations. Par suite, le moyen tiré de ce que le principe du contradictoire aurait été méconnu ne peut qu'être écarté.

5. En deuxième lieu, au nombre des causes exceptionnelles prévues à l'article 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite figure la circonstance où " le fonctionnaire civil (...) se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées (...) en service, (...) ". La reconnaissance d'une maladie contractée ou aggravée en service au sens de ces dispositions n'est pas subordonnée à l'inscription de cette maladie sur les tableaux des maladies professionnelles prévus à l'article L. 461-2 du code de la sécurité sociale.

6. Aucune disposition ne rend applicable aux fonctionnaires relevant de la fonction publique territoriale, qui demandent le bénéfice des dispositions combinées du 2° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 et de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, les dispositions de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale instituant une présomption d'origine professionnelle pour toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans des conditions mentionnées à ce tableau. (CE, cne de Roissy-en-Brie, 27 avril 2015, B) Par suite, la communauté de communes requérante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté en litige, qui ne vise pas le tableau n° 53 des maladies professionnelles, est entaché d'une erreur de droit, ou encore que le maire de Teuillac aurait commis une erreur de droit dans la mesure où la pathologie en cause ne fait pas partie de celles inscrites audit tableau.

7. En troisième lieu, en application des dispositions précitées au point 2, la collectivité au service de laquelle se trouvait l'agent lors de l'accident de service ou de la maladie contractée en service doit supporter les conséquences financières consécutive à cet accident ou à cette maladie, alors même que celle-ci a été constatée alors qu'il était au service d'une nouvelle collectivité. La collectivité qui employait l'agent à la date de l'accident où à la date à laquelle la maladie a été contractée doit ainsi prendre en charge non seulement les honoraires médicaux et les frais exposés par celui-ci qui sont directement la conséquence mais aussi le remboursement des traitements qui lui ont été versés par la collectivité qui l'emploie à raison de son placement en congé de longue maladie, dès lors que ce placement a pour seule cause la survenue de la rechute consécutive à l'accident de service ou de la maladie contractée en service alors qu'il était employé par la collectivité précédente. Si la collectivité qui l'emploie est tenue de verser à son agent les traitements qui lui sont dus, elle est cependant fondée à demander à la collectivité qui l'employait à la date de l'accident, par une action récursoire, le remboursement des traitements qu'elle lui a versés consécutivement à sa rechute, ce jusqu'à la reprise de son service par l'agent ou jusqu'à sa mise à la retraite. (CE, commune de Roissy-en-Brie, 336635, 28 nov 2011, 336635, B)

8. La communauté de communes du canton de Massat, collectivité employeur de Mme A...du 1er septembre 2005 au 30 juillet 2007, conteste l'arrêté du maire de la commune de Teuillac, nouvel employeur de celle-ci à compter du 1er août 2007, reconnaissant l'imputabilité au service de la maladie contractée par MmeA..., dès lors que cet arrêté indique que " la maladie professionnelle de Mme D...A...est reconnue imputable au service, étant précisé qu'il s'agit du service accompli par elle au sein de la communauté de communes du canton de Massat (Ariège) antérieurement à son entrée au service de la commune de Teuillac ", en faisant valoir qu'un lien direct et certain des troubles dont est atteinte Mme A...n'est pas établi avec l'exercice de ses fonctions au sein de l'école de Soulan et réclame une nouvelle expertise destinée à déterminer l'origine et la date de l'infection. Elle soutient en particulier que la contraction de l'infection pourrait être antérieure au 1er septembre 2005 ou postérieure au 30 juillet 2007, ou encore, extérieure au milieu professionnel pendant cette période.

9. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport d'expertise établi par le docteurC..., neurologue, qui a examiné Mme A...le 29 octobre 2013, que les premiers symptômes d'une méningo-radiculite sont apparus chez l'intéressée début 2006 et que le diagnostic d'une fièvre Q, responsable de cette forme rare de méningite qui conduit à une inflammation des nerfs rachidiens, a été posé après une authentification par sérologie positive à coxiella burnetii à la suite de rechutes intervenues sous forme de polyradiculonévrite récidivante. Cette affection est fortement invalidante, puisque Mme A...souffre d'atteintes neurologiques périphériques de type polyradiculonévrite chronique liées aux suites de l'infection à coxiella burnetii et présente d'une part, une paraparésie avec un déficit des 4/5è des membres inférieurs, une aréflexie complète, un cutané plantaire en flexion, des troubles de la sensibilité superficielle et profonde rendant la marche difficile et d'autre part, une atteinte des membres supérieurs certes moins marquée, mais avec également aréflexie et hypoesthésie distale, état de santé qui a justifié, en 2009, sa reconnaissance comme travailleur handicapé. Mme A...fait en outre valoir qu'elle souffre de douleurs importantes qui entraînent des difficultés à marcher ou même à demeurer debout, d'une grande fatigabilité et de pertes de mémoire. Il ressort également tant de cette expertise que des pièces du dossier que la fièvre Q est classiquement une maladie liée aux activités professionnelles des éleveurs et des vétérinaires, mais aussi aux populations voisines d'exploitations bovines.

10. Il ressort également des pièces du dossier et notamment des nombreuses attestations produites, émanant tant du directeur de l'école primaire que de ses collègues, que l'école de Soulan où Mme A...exerçait ses fonctions d'ATSEM, est entourée par trois exploitations agricoles d'élevage laitier, que plusieurs fois par jour celle-ci devait aider les enfants de maternelle-CP à retirer ou remettre leurs chaussures qui étaient fréquemment souillées de déjections bovines du fait de leurs trajets pour se rendre à la cantine ou à la garderie situées à l'extérieur de l'école dans les locaux de la salle polyvalente et qu'elle nettoyait également ce qui avait été souillé par le passage des enfants avant le retrait de leurs chaussures, qu'elle emmenait de temps à autre les enfants en pique-nique ou en " sorties pédagogiques de proximité ", et encore que l'eau du robinet présentait fréquemment à Soulan, en particulier en 2006, une mauvaise qualité bactériologique la rendant impropre à la consommation. Par suite, même si la communauté de communes du canton de Massat, dont relève l'école primaire de Soulan, avait mis en place une distribution d'eau en bouteille, d'une part aux termes de deux attestations, dont celle d'une assistante de vie scolaire, il pouvait exister un décalage entre les analyses de la qualité de l'eau et la fourniture des bouteilles et, d'autre part, l'eau de l'adduction a été nécessairement utilisée pour le nettoyage des locaux et notamment des sols souillés par les semelles des chaussures des enfants. En outre, Mme A...ne résidait pas sur le territoire communal, mais à Saint-Girons, soit en milieu urbain.

11. Contrairement à ce qu'affirme la communauté de communes, le rapport d'expertise précité établit un lien suffisant entre la pathologie développée par Mme A...et l'exercice de ses fonctions à l'école de Soulan, dès lors qu'il relève que " pour ce qui est de l'imputabilité au service, on peut simplement reconnaître que la fièvre Q s'est développée alors même qu'elle était en contact étroit dans le milieu rural avec des déjections de bovins, et bien que la relation de cause à effet indiscutable soit très difficile à démontrer, il est tout de même suffisamment probable que l'infection à coxiella burnetii résulte du contact répété de la patiente dans son activité professionnelle avec les produits fermiers dont étaient porteuses notamment les chaussures des enfants ". De son côté, la commission départementale de réforme a reconnu le caractère imputable au service de la pathologie de Mme A...à compter du 1er janvier 2006. Les circonstances que Mme A...ait accompagné les enfants lors de la visite d'une ferme pédagogique en juin 2006 ou encore celle que sa pathologie n'ait été formellement diagnostiquée qu'en 2009 à l'occasion d'une nouvelle rechute et d'une nouvelle sérologie sont sans incidence, dès lors que tant le rapport d'expertise que l'avis de la commission de réforme considèrent que les premiers symptômes de la fièvre Q sont apparus au tout début 2006 et que les manifestations ultérieures sont des rechutes d'une infection contractée à cette époque, qui s'est chronicisée.

12. Dans ces conditions, il y a lieu de regarder la pathologie contractée par Mme A... comme présentant un lien direct et certain avec le service. Ainsi, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré, sans entacher leur jugement d'une contradiction de motifs, que la communauté de communes du canton de Massat n'était pas fondée à soutenir que le maire de la commune de Teuillac aurait entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ou une erreur de droit en reconnaissant comme imputable au service la maladie dont souffre MmeA..., en relevant que la maladie avait été contractée début 2006, époque où l'intéressée exerçait ses fonctions au sein de la communauté de communes, dès lors que, comme cela a été dit ci-dessus, les troubles de santé qu'elle a présentés après juillet 2007 ont été identifiés comme des rechutes de l'infection initiale.

13. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise avant-dire droit, que la communauté de communes Couserans-Pyrénées n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Teuillac, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la communauté de communes Couserans-Pyrénées sur ce fondement. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière une somme de 1 500 euros que demande la commune de Teuillac et la somme de 1 500 euros que demande Mme A...sur le même fondement.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la communauté de communes Couserans-Pyrénées est rejetée.

Article 2 : La communauté de communes Couserans-Pyrénées versera la somme de 1 500 euros à la commune de Teuillac et la somme de 1 500 euros à Mme A...sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté de communes Couserans-Pyrénées venant aux doits de la communauté de communes du canton de Massat, à la commune de Teuillac et à Mme D...A....

Délibéré après l'audience du 18 septembre 2017 à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Gil Cornevaux, président-assesseur,

Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 octobre 2017.

Le rapporteur,

Florence Rey-GabriacLe président,

Pierre Larroumec

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

2

N° 15BX03899


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15BX03899
Date de la décision : 16/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01-03 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés de maladie. Accidents de service.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : SCP GOGUYER-LALANDE DEGIOANNI

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-10-16;15bx03899 ?
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