La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/09/2017 | FRANCE | N°17BX01364

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 28 septembre 2017, 17BX01364


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de Mayotte d'annuler l'arrêté du 18 août 2015 par lequel le préfet de Mayotte a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1600250 du 30 janvier 2017, le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 avril 2017, MmeC..., représentée p

ar MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...C...a demandé au tribunal administratif de Mayotte d'annuler l'arrêté du 18 août 2015 par lequel le préfet de Mayotte a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1600250 du 30 janvier 2017, le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 avril 2017, MmeC..., représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet de Mayotte de procéder au réexamen de sa demande et ce, dans le délai de trois mois à compter de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Elle soutient que :

- l'arrêté dans son ensemble a été adopté par une autorité incompétente en l'absence de délégation de pouvoir ou de signature ;

En ce qui concerne le refus de séjour :

- contrairement à ce qu'a estimé le préfet, elle justifie contribuer à l'éducation et à l'entretien de ses enfants depuis leur naissance au sens et pour l'application des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; même si ces enfants aînés poursuivent leur scolarité en métropole, ils retournent passer leurs vacances à Mayotte à son domicile ; le fait que des adresses de domicile différentes apparaîtraient sur les certificats de scolarité des enfants ne prouvent pas qu'ils ne vivraient pas avec elle, en effet, les étrangers en situation irrégulière sont contraint d'utiliser des noms et adresses des personnes chez qui ils louent, les propriétaires étant seuls admis à recevoir du courrier dès lors qu'ils sont les seuls à pouvoir fournir les justificatifs ;

- le préfet a méconnu son droit au respect de sa vie privée et familiale tel que protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que contrairement à ce qu'a estimé le préfet, elle justifie d'une présence continue à Mayotte entre 1992 et 2015, que deux de ses enfants sont de nationalité française, qu'elle a trois autres enfants vivant avec elle à Mayotte, qu'elle ne disposait aux Comores que d'attaches familiales avec ses parents qui sont aujourd'hui décédés ;

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ne procédant pas à la saisine de la commission du titre de séjour dès lors qu'elle justifie vivre à Mayotte depuis au plus tard l'année 2005 ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour sur lequel elle est fondée ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :

- le préfet de Mayotte a commis une erreur d'appréciation en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours.

Par ordonnance du 15 mai 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 juin 2017 à 12h00.

Un mémoire en défense présenté par le préfet de Mayotte a été enregistré le 28 août 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Laurent Pouget a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. MmeC..., de nationalité comorienne, dit être entrée en France pour la première fois en 1991 et y séjourner à tout le moins de manière continue depuis 2005. Elle a sollicité le 4 juillet 2014 la délivrance d'un titre de séjour au titre de la vie privée et familiale. Par un arrêté en date du 18 août 2015, le préfet de Mayotte a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays de renvoi. Mme C...relève appel du jugement du 30 janvier 2017 par lequel le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'arrêté pris dans son ensemble :

2. Mme C...reprend en appel le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté, déjà soulevé devant le tribunal, sans se prévaloir d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance, ni critiquer la motivation du jugement sur ce point. Il y a lieu, par suite, d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

3. Si, en vertu des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission du titre de séjour la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans, il ressort des pièces du dossier que Mme C...n'a, en tout état de cause, pas sollicité son admission au séjour sur le fondement de ces dispositions et que le préfet de Mayotte, qui n'y était pas tenu, n'a pas examiné si l'intéressée pouvait prétendre à une admission exceptionnelle au séjour à ce titre. Il ne saurait donc lui être reproché de ne pas avoir saisi pour avis la commission du titre de séjour.

4. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ".

5. Si Mme C...est mère de deux enfants de nationalité française, Raphaël Nassim et Soifidine Nassim, ceux-ci, qui suivent des études en métropole, sont nés respectivement les 3 avril 1992 et 24 mai 1994, et étaient donc majeurs à la date de l'arrêté contesté du 18 août 2015. Il ressort des pièces du dossier que les autres enfants de la requérante, nés en 1999, 2002 et 2003, sont quant à eux de nationalité comorienne. Dans ces conditions, et quand bien même Mme C...pourvoirait effectivement à l'éducation et à l'entretien de ses enfants, elle ne remplit pas les conditions pour bénéficier de la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. L'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

7. Se prévalant de son droit au respect de sa vie privée et familiale, Mme C...fait état de sa présence continue en France depuis 1991, indique qu'elle est mère de deux enfants de nationalité française, que trois autres de ses enfants vivent avec elle à Mayotte et qu'elle ne dispose plus d'attaches familiales aux Comores depuis le décès de ses parents. Cependant la requérante, qui a elle-même précédemment déclaré être entrée en France en 2005 et dont deux des enfants sont d'ailleurs nés aux Comores en 1999 et 2003, ne justifie, par les pièces qu'elle produit, que d'une présence sporadique en France et non d'une présence continue, tout au moins avant 2009. Si Mme C...justifie de la scolarisation en France depuis cette date de ses enfants de nationalité comorienne, elle indique que le père de deux de ces enfants réside aux Comores et il n'est pas soutenu que le père comorien du troisième résiderait régulièrement et de manière stable en France. Rien ne fait donc obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue aux Comores. Quant aux enfants français de la requérante, tous deux majeurs, ils se sont établis en métropole pour y suivre des études. Mme C...n'établit pas ne plus disposer d'attaches familiales aux Comores. Enfin, elle ne fait pas montre d'une intégration professionnelle ou sociale particulièrement aboutie en France. Dans ces conditions, la décision de refus de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée eu égard aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a ainsi méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

8. Compte tenu de ce qui précède, le moyen invoqué à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, tiré par voie d'exception de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté.

9. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7 du présent arrêt, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que le préfet de Mayonne a méconnu, en prenant la mesure d'éloignement, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, il n'a pas davantage méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ni entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de l'intéressée.

En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :

10. L'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " (...) II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité ou tout autre pays non membre de l'Union européenne ou avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où il est légalement admissible (...) Le délai de départ volontaire accordé à l'étranger peut faire l'objet d'une prolongation par l'autorité administrative pour une durée appropriée s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas ".

11. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les circonstances de l'espèce justifiaient qu'un délai supérieur à trente jours dût être accordé à Mme C... pour exécuter la mesure d'éloignement dont elle a fait l'objet. La décision d'octroi d'un délai de départ volontaire de trente jours n'est donc pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral attaqué.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

13. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par le requérant, n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction ne peuvent être accueillies.

Sur les conclusions présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

14. L'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Mayotte et au ministre des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 31 août 2017 à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

Mme Sylvie Cherrier, premier conseiller,

Lu en audience publique le 28 septembre 2017.

Le rapporteur,

Laurent POUGET Le président,

Aymard de MALAFOSSE Le greffier,

Virginie MARTY

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

4

N° 17BX01364


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX01364
Date de la décision : 28/09/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET L.
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : IDRISS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-09-28;17bx01364 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award