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11/07/2017 | FRANCE | N°17BX01312

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 11 juillet 2017, 17BX01312


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...E...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 18 août 2016 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1604695 du 23 janvier 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 avril 2017, et des pièces nouvelles enregistrées le 2 juin 2017, M.C...,

représenté par MeB..., demande à la cour d'annuler ce jugement du 23 janvier 2017 du tribunal adm...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...E...C...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 18 août 2016 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1604695 du 23 janvier 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 avril 2017, et des pièces nouvelles enregistrées le 2 juin 2017, M.C..., représenté par MeB..., demande à la cour d'annuler ce jugement du 23 janvier 2017 du tribunal administratif de Bordeaux, d'annuler les décisions du 18 août 2016, d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention "vie privée et familiale", subsidiairement de réexaminer sa demande, enfin de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- M.D..., sous-préfet de l'arrondissement de Blaye, a signé la décision contestée en qualité de secrétaire général de la préfecture ; ces mentions ne permettent pas d'identifier sans ambiguïté l'auteur de cet acte, et notamment de savoir s'il a été signé par M. D...ou par le secrétaire général ;

- il vit en France depuis décembre 2014 et son épouse depuis juillet 2014, ses deux enfants sont scolarisés, l'un en 5° avec de bons résultats, et l'autre en CM1 ; ce dernier rencontre d'importantes difficultés de compréhension, de concentration et d'apprentissage ainsi que des difficultés relationnelles, ce qui est justifié notamment par un certificat médical ; il bénéficie, alors qu'aucune solution n'avait été proposée en Algérie, d'une prise en charge médicale et scolaire adaptée en ULIS, participe à des ateliers et activités périscolaires ; cet accompagnement va bien au-delà du simple soutien scolaire ; un dossier est en cours depuis le 29 juillet en vue d'une orientation vers une intégration scolaire collective ; les procédures mises en place ont permis une amélioration notable de sa situation mais il est nécessaire d'appuyer celle-ci et de soutenir les efforts de l'enfant ; tant l'enfant que les parents sont particulièrement demandeurs du soutien apporté constatant les progrès accomplis, ce qui est confirmé par les enseignants et les intervenants sociaux ; ces méthodes et ce soutien ne sont pas disponibles en Algérie comme en témoigne une connaissance du couple ; au demeurant, il n'en bénéficiait pas en Algérie où sa situation de handicap n'avait pas même été diagnostiquée ; s'il devait retourner dans ce pays, il ne pourrait suivre une scolarité normale et adaptée et régresserait sans aucune chance de réussite scolaire, professionnelle, sociale et personnelle, ce qui révèle des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; le 11 janvier 2017, la MDPH a décidé de l'orientation de l'enfant en ULIS du 4 janvier 2017 au 31 juillet 2018 ; la famille est bien intégrée ; il a une activité bénévole au centre d'insertion sociale et économique comme en atteste celui-ci, qui témoigne également de la bonne intégration de Madame, des projets professionnels du couple et de leur bonne connaissance du français ; son épouse est adhérente de l'association Didée et titulaire d'un diplôme de psychologie qui lui permettra de trouver un emploi ; il a un projet de commerce ; sa plus proche famille vit en France, sa mère, veuve, titulaire d'une carte de 10 ans et ses deux frères, dont l'un est Français ; le refus de séjour porte une atteinte excessive au droit au respect de sa vie privée et familiale, qui est établie en France ; l'annulation de la décision au profit de l'un des époux doit aboutir à l'annulation de celle infligée à l'autre époux ;

- compte tenu de l'ancienneté de son séjour, de l'intégration de sa famille et des difficultés rencontrées par son enfant handicapé, qui ne pourra être pris en charge en Algérie le refus de séjour résulte d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la scolarité de ses enfants et la situation de son enfant handicapé révèlent la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention sur les droits de l'enfant ;

- entrant dans les catégories ouvrant de plein droit à l'octroi d'un titre de séjour, il était protégé contre toute mesure d'éloignement ; cette mesure porte une atteinte excessive au droit et au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et méconnaît l'intérêt supérieur de son enfant handicapé.

Par une ordonnance du 15 mai 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 2 juin suivant.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 mai 2017, le préfet de la Gironde sollicite la jonction des affaires et se réfère en l'absence d'élément nouveau, à ses écritures de première instance.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 avril 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Marie-Thérèse Lacau. a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. De nationalité algérienne, M. C...relève appel du jugement du 23 janvier 2017 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 août 2016 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi.

2. En premier lieu, par un arrêté du 24 mars 2016, le préfet de la Gironde a consenti une délégation de signature à M. Suquet, secrétaire général de la préfecture de la Gironde, à l'effet de signer tous actes concernant les attributions de l'État dans le département, notamment les décisions relevant des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Si l'arrêté contesté a été signé par M.D..., sous-préfet de l'arrondissement de Blaye, l'arrêté du 22 juillet 2016 publié le même jour au recueil des actes administratifs prévoyait que M. D...prendrait la suppléance du secrétaire général du 16 au 31 août 2016 et lui accordait également une délégation à l'effet de signer les actes susmentionnés. Le moyen tiré de l'incompétence de D...manque donc en fait. Le moyen tiré sans autres précisions de droit de ce que " ces mentions ne permettent pas d'identifier sans ambiguïté l'auteur de cet acte, et notamment de savoir s'il a été signé par M. D...ou par le secrétaire général de la Préfecture " ne peut également qu'être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales (...) ". En vertu du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit au ressortissant algérien dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée.

4. M. C...se prévaut de sa présence depuis l'année 2014 en France où il vit avec son épouse et leurs deux jeunes enfants et fait en particulier valoir que le cadet présente un handicap cognitif nécessitant une prise en charge globale, notamment scolaire, adaptée, ce qui est établi par les pièces qu'il produit. A cette date, l'enfant inscrit dans un " programme de réussite éducative " depuis le mois de février 2016 bénéficiait notamment d'une séance hebdomadaire d'orthophonie et d'ateliers collectifs spécialisés. Le 29 juillet 2016, un dossier était déposé en vue d'une orientation en Unité Localisée pour l'Inclusion Scolaire, d'ailleurs accordée le 11 janvier 2017 jusqu'au 31 juillet 2018, postérieurement à la décision préfectorale. Eu égard notamment au jeune âge de l'enfant, la circonstance alléguée que son handicap n'a pas été décelé en Algérie, au demeurant contredite par l'attestation non datée intitulée " constat sur l'état de l'enfant " émanant de la direction de l'éducation Alger Ouest, faisant état notamment de son manque de contacts et de son déficit de concentration et d'attention au cours de l'année scolaire 2012/2013, ne révèle pas l'absence de toute prise en charge spécifique dans ce pays. Aucune des attestations produites, notamment celle du 2 décembre 2016, postérieure à la décision contestée, établie par l'orthophoniste selon laquelle " une interruption du traitement serait préjudiciable à la progression de l'enfant " ne peut davantage justifier de l'absence de possibilité de prise en charge adaptée en Algérie. Dans ces conditions, rien ne s'oppose à ce que M. C...poursuive sa vie familiale hors de France avec son épouse, de même nationalité, qui a également fait l'objet d'un refus de séjour assorti d'une mesure d'éloignement, et leurs enfants. Dans les circonstances de l'affaire, en dépit de l'intégration non contestée de la famille au sein de la société française, des diplômes et perspectives professionnelles du ménage et de la présence de la mère et des deux frères de M.C..., dont l'un est de nationalité française, le préfet n'a pas porté, compte tenu tant de la durée que des conditions du séjour en France de l'intéressé, une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations et les dispositions précitées. Si le requérant invoque, outre les éléments susmentionnés, l'intégration du ménage, ses activités bénévoles et associatives, ses projets professionnels respectifs et sa maîtrise de la langue française, le préfet ne s'est pas livré à une appréciation manifestement erronée des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé.

5. En troisième lieu, en l'absence de circonstance faisant obstacle à ce que les deux enfants de M. C...repartent avec leurs parents, le préfet n'a pas porté atteinte à l'intérêt supérieur de ces enfants au sens de l'article 3-1 de la convention du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant.

6. Enfin, dans les circonstances précédemment exposées, le moyen tiré de ce que le droit au bénéfice d'un titre de séjour faisait obstacle à l'édiction d'une mesure d'éloignement doit être écarté. Il en va de même des moyens tirés par M. C...de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur sa situation personnelle et de l'intérêt supérieur de son enfant handicapé garanti par l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent être accueillies.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...E...C...et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 13 juin 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. Gil Cornevaux, président assesseur,

Mme Marie-Thérèse Lacau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 juillet 2017.

Le rapporteur,

Marie-Thérèse Lacau Le président,

Elisabeth Jayat Le greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX01312


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX01312
Date de la décision : 11/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Marie-Thérèse LACAU
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : CESSO

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-07-11;17bx01312 ?
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