Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La Sarl ADS Neptune a demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2006 et des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1202739 du 2 juillet 2015, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 1er septembre 2015, la Sarl ADS Neptune, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers ;
2°) de prononcer la décharge sollicitée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le débat oral et contradictoire a été méconnu dans la mesure où l'administration a écarté la comptabilité jugée non sincère et non probante sans préciser la nature des pièces manquantes ni les motifs conduisant à écarter la comptabilité ; l'administration n'a pas communiqué le taux de vente à emporter constaté dans le même secteur géographique pour des activités similaires ;
- l'avis de mise en recouvrement est irrégulier car il a été adressé à la SCI Adjil alors que seule la société ADS Neptune a fait l'objet d'une procédure de rectification ;
- l'administration doit en outre justifier que l'agent ayant signé l'avis de mise en recouvrement bénéficiait de la délégation de signature nécessaire ;
- c'est à tort que l'administration a imposé la totalité des ventes au taux normal de TVA ; l'administration ne démontre pas que le montant des ventes à emporter a été minoré ;
- l'application des majorations de 40 % n'est pas justifiée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 février 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la société ADS Neptune ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Florence Madelaigue,
- les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public,
Considérant ce qui suit :
1. La Sarl ADS Neptune, qui exploite une activité de restauration à Royan, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2006 à l'issue de laquelle une proposition de rectification lui a été notifiée le 1er juillet 2008. Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée résultant de ce contrôle ont été mis en recouvrement le 12 novembre 2008. La Sarl ADS Neptune relève appel du jugement du tribunal administratif de Poitiers qui a rejeté sa demande en décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2006 et des pénalités correspondantes.
Sur la procédure de vérification :
2. Aux termes de l'article de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " L'administration des impôts contrôle les déclarations ainsi que les actes utilisés pour l'établissement des impôts, droits, taxes et redevances. / Elle contrôle, également les documents déposés en vue d'obtenir des déductions, restitutions ou remboursements, ou d'acquitter tout ou partie d'une imposition au moyen d'une créance sur l'Etat. / A cette fin, elle peut demander aux contribuables tous renseignements, justifications ou éclaircissements relatifs aux déclarations souscrites ou aux actes déposés. / Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration. ".
3. Dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une entreprise a été effectuée, comme il est de règle, dans ses propres locaux, il appartient au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur, de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat.
4. Il résulte de l'instruction que les opérations de vérification se sont déroulées dans les locaux de la société. Il lui appartient donc d'établir que le vérificateur se serait refusé à tout échange avec son représentant. Si la société requérante se prévaut d'un défaut de débat oral et contradictoire s'agissant de l'absence de précision sur la nature des pièces manquantes, elle ne l'établit pas et il résulte de l'instruction qu'un procès-verbal de défaut de présentation de comptabilité mentionnant les documents non communiqués par la société a été établi par le vérificateur le 17 juin 2008 d'ailleurs signé par la contribuable. La société requérante n'apporte en outre aucune précision sur le déroulement des entretiens, et n'établit pas que le vérificateur se serait opposé à tout échange de vue avec les représentants de la société au cours de la vérification au sujet des écarts constatés sur les montants de ventes comptabilisées taxées au taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée. Par suite, si la société a entendu le soulever, le moyen tiré du défaut de débat oral et contradictoire doit être écarté.
Sur la régularité de l'avis de mise en recouvrement :
5. Aux termes de l'article L. 256 du livre des procédures fiscales : "Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public à tout redevable des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date d'exigibilité. (...) ". Aux termes de l'article L. 257 A du même code, dans sa rédaction applicable : " Les avis de mises en recouvrement peuvent être signés et rendus exécutoires et les mises en demeure peuvent être signées, sous l'autorité et la responsabilité du comptable, par les agents du service des impôts ayant au moins le grade de contrôleur. " L'article R. 256-6 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable au litige prévoit que : " La notification de l'avis de mise en recouvrement comporte l'envoi au redevable, soit au lieu de son domicile, de sa résidence ou de son siège, soit à l'adresse qu'il a lui-même fait connaître au service des impôts ou au service des douanes et droits indirects compétent, de l'"ampliation" prévue à l'article R.256-3. (...) ".
6. Il résulte de l'instruction que l'avis de mise en recouvrement du 12 novembre 2008 a été signé par Mme C...B..., contrôleur des impôts au service des impôts des entreprises de Royan. L'avis comportait ainsi des mentions suffisantes permettant à la Sarl ADS Neptune de vérifier que le signataire de l'avis avait au moins le grade de contrôleur sans que ce dernier, eu égard aux termes mêmes de l'article L. 257 A précité du livre des procédures fiscales, n'eût à justifier d'aucune délégation de signature. Si l'avis a été envoyé à l'adresse de la SCI Adjil pour la Sarl ADS Neptune, 35 Front de Mer à Royan, il n'est ni soutenu ni a fortiori allégué que cette adresse n'est pas celle indiquée par la société au service et que la Sarl ADS Neptune n'aurait pas reçu l'avis. A fortiori les mentions portées sur l'avis de mise en recouvrement ne sont de nature à faire naître aucun doute sur le fait que les rappels de taxe et les pénalités en litige étaient mis à la charge de la Sarl ADS Neptune. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de mise en recouvrement doit être écarté.
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
7. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. (...) ". Aux termes de l'article 278 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Le taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée est fixé à 19,60 % ". Aux termes de l'article 278 bis de ce code : " La taxe sur la valeur ajoutée (...) est perçue au taux réduit de 5,50 % en ce qui concerne les opérations d'achat, d'importation, d'acquisition intracommunautaire, de vente, de livraison, de commission, de courtage ou de façon portant sur les produits suivants : / 1° Eau et boissons non alcooliques ; / 2° Produits destinés à l'alimentation humaine (...) " Il résulte de ces dispositions que les ventes à emporter de produits alimentaires bénéficient du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée. Ne figurant pas dans l'énumération de l'article 278 bis du code général des impôts, les ventes de produits destinés à être consommés sur place présentent le caractère d'une prestation de services passible du taux normal de taxe sur la valeur ajoutée.
8. Par suite, lorsque des établissements effectuent des ventes à emporter passibles du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée, ceux-ci doivent être en mesure d'apporter la preuve de la réalité de ces ventes et de leur montant en justifiant la ventilation opérée entre les ventes à emporter et les ventes sur place. Lorsque la comptabilité de l'établissement ne permet pas de justifier une telle ventilation, le redevable est passible de la taxe au taux le plus élevé sur la totalité des recettes de l'établissement.
9. Au cours de ses investigations le vérificateur a constaté que le total des ventes à emporter figurant sur les tickets Z avant rectifications manuelles de sa comptabilité par la société ne correspondait pas à celui comptabilisé à taux réduit. Selon les tickets Z délivrés par la caisse enregistreuse, les ventes à emporter ne représentaient que, seulement, 3 912 euros en 2005 et 552 euros en 2006 tandis qu'après corrections manuelles, la société avait déclaré un montant de ventes à taux réduit de 133 615 euros en 2005 et de 75 054 euros en 2006.
10. La société ne produit aucun élément pour justifier des corrections d'une ampleur bien supérieure à ce qui pourrait être admis au titre des erreurs humaines à l'enregistrement des recettes au moment de l'encaissement, et qui privent sa comptabilité de toute valeur probante. Elle ne justifie pas non plus les montants déclarés en se bornant à affirmer sans aucune précision qu'elle enregistre une proportion de ventes à emporter similaire à celle constatée dans des commerces de restauration voisins sur le front de mer de Royan, et que le mode d'encaissement de la vente n'est pas connu au moment de l'établissement du ticket, alors que le mode de consommation du produit, sur place ou emporté, peut être quant à lui déterminé sans aucune difficulté, dès l'enregistrement de la vente en caisse, en interrogeant le client. C'est dès lors à bon droit que l'administration a soumis la totalité des recettes de la société au taux normal de la taxe.
Sur les pénalités :
11. L'article 1729 du code général des impôts prévoit que : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : (/) a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) ".
12. L'administration a assorti les rectifications en matière de taxe sur la valeur ajoutée de la pénalité de 40 % prévue par l'article 1729 précité. L'administration établit qu'eu égard aux montants des insuffisances de déclaration constatées, sur les deux exercices et de leur caractère répété, ces manquements révèlent une intention délibérée d'éluder l'impôt. La société ADS Neptune n'est, par suite, pas fondée à soutenir que les pénalités pour manquement délibéré ne seraient pas justifiées.
13. Il résulte de ce qui précède que la société ADS Neptune n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Les conclusions de sa requête, y compris celles au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.
DECIDE
Article 1er : La requête de la Sarl ADS Neptune est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la Sarl ADS Neptune et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction du contrôle fiscal sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 15 juin 2017 à laquelle siégeaient :
M. Philippe Pouzoulet, président,
Mme Marianne Pouget, président-assesseur,
Mme Florence Madelaigue, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 29 juin 2017.
Le rapporteur,
Florence Madelaigue
Le président,
Philippe Pouzoulet
Le greffier,
Florence Deligey
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 15BX02948