Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme G...C..., agissant en qualité de représentante légale de son fils I...F...-C..., a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner la commune de Moissac à lui verser la somme de 57 734,26 euros, avec intérêts à compter du 5 septembre 2013, en réparation des préjudices résultant des dégâts subis par les immeubles situés 7 rue Cul Roussol et 8 rue de l'abbaye à Moissac à la suite de travaux d'aménagement d'un parc de stationnement public et du jardin public Sliman Azem.
Par un jugement n° 1305041 du 3 février 2015, le tribunal administratif de Toulouse a admis partiellement sa demande et a condamné la commune de Moissac à lui verser la somme de 4 250 euros portant intérêt au taux légal à compter du 5 septembre 2013.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 avril 2015 et 7 novembre 2016, Mme G...C...agissant en qualité de représentante légale de son fils I...F...-C... ayant droit de M. D...F..., représentée par Me A...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1305041 du 3 février 2015 du tribunal administratif de Toulouse en ce qu'il a limité à la somme 4 250 euros l'indemnité que la commune de Moissac a été condamnée à lui verser en réparation du préjudice résultant des dégâts subis par les immeubles situés 7 rue Cul Roussol et 8 rue de l'abbaye à Moissac, à la suite de travaux d'aménagement d'un parc de stationnement et du jardin public " Sliman Azem " ;
2°) de condamner la commune de Moissac à lui verser la somme de 57 734,56 euros majorée des intérêts de droit à compter du 5 septembre 2013, date de la première demande d'indemnisation ;
3°) de mettre les frais d'expertise à la charge de la commune de Moissac ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Moissac la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- conformément aux conclusions de l'expertise, les premiers juges auraient dû retenir la responsabilité de la commune de Moissac non seulement pour les désordres affectant l'immeuble situé à l'angle de la rue Cul Roussol et du jardin Sliman Azem mais ceux aussi touchant l'immeuble situé à l'angle de la rue de l'abbaye et du jardin Sliman Azem ; s'agissant des désordres affectant les immeubles de la rue Cul Roussol et de la rue de l'abbaye, il ressort du rapport d'expertise que la conception des travaux d'aménagement du jardin Sliman Azem a été mauvaise et a détruit le système d'évacuation des eaux d'infiltration de cette zone, lequel s'effectuait par une canalisation enterrée débouchant sous l'escalier en béton construit à 1'occasion de ces aménagements, ce qui a engendré des sinistres au niveau des habitations qui 1'entourent ; la commune est également responsable des désordres engendrés par un if, situé dans le jardin Sliman Azem, dont les aiguilles ont endommagé la toiture de l'immeuble situé rue Cul Roussol ;
- le tribunal, en ne retenant qu'une indemnisation s'élevant à 4 250 euros, a sous-évalué les préjudices subis ; elle évalue à la somme de 7 350 euros les travaux de réhabilitation de l'appartement inondé dans l'impasse Cul de Roussol ; les sommes de 1 795 euros, de 262,16 euros et de 8 000 euros doivent lui être allouées respectivement pour le nettoyage du toit, pour des frais de réparation de la gouttière et pour la reprise du mur séparant l'immeuble situé rue de l'Abbaye et les jardins du musée qui tombent en ruine ; les sommes de 1 427,10 euros et de 6 500 euros doivent également lui être allouées pour la reprise de la charpente endommagée par le reflux de la gouttière et la reprise des travaux de reprise du mur d'enceinte endommagé par les racines d'un arbre ; enfin, les pertes de loyer subies pour la vacance d'un local commercial situé 7 rue Cul Roussol peuvent être évaluées à 32 400 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 janvier 2016, la commune de Moissac représentée par MeH..., conclut au rejet de la requête et par la voie de l'appel incident à ce que le jugement du tribunal du 3 février 2015 de Toulouse soit annulé en tant qu'il reconnait la responsabilité de la commune de Moissac. Elle demande également à ce que soit mise à la charge de Mme C...la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse a reconnu sa responsabilité alors que le lien de causalité entre l'inondation de l'appartement du 7 rue Cul Roussol survenue en décembre 2001 et les travaux réalisés en 1994 n'est pas établi ; la responsabilité de la commune a été mise en cause par l'expert sur le seul fondement des déclarations de l'ancien propriétaire de l'immeuble, sans que des vérifications sur la date et la consistance des travaux d'aménagement du jardin ou sur la localisation précise du système d'évacuation des eaux aient été effectuées ; le système d'évacuation des eaux n'a été ni détruit ni endommagé lors de la réalisation des travaux d'aménagement ; si l'expert estime que le sinistre de l'immeuble est lié au fait que le sol du jardin public est au même niveau que les fenêtres de l'appartement, il ne le démontre pas ; l'absence de sinistre malgré la fréquence des précipitations entre 1994 et 2001 suffit à démontrer l'absence de lien de causalité entre les désordres affectant l'immeuble situé 7 rue du Cul Roussol et la conception du jardin et la prétendue destruction du système d'évacuation des eaux ; enfin, le préjudice invoqué n'est pas certain ; l'étendue des désordres affectant l'immeuble n'est pas établie ; il n'est pas démontré que les travaux effectués aient été exclusivement destinés à remédier aux désordres causés à l'immeuble à la suite des fortes pluies survenues en 2001 ; le chiffrage du préjudice, lequel fixe aléatoirement le coût de la main d'oeuvre, est infondé ;
- les effets destructeurs de la présence d'aiguilles de pins sur la toiture ne sont pas établis ; en outre, ce dommage constitue un inconvénient usuel de voisinage ne donnant pas lieu à réparation ;
- aucun élément du dossier ne permet d'établir que le pincement de la gouttière aurait pour origine la réalisation des travaux d'aménagement du jardin public ; l'écoulement entre les travaux de la charpente effectués en novembre 2010 et la réparation de celle-ci intervenue en 2006 confirme l'absence de liens entre le dysfonctionnement de la gouttière et les infiltrations de la charpente ; la dégradation de la gouttière correspond à son usure normale dont les dépenses incombent à MmeC... ; en outre, il ressort du rapport d'expertise que l'assurance de la requérante a déjà pris en charge le remboursement de ces désordres ;
- les causes des infiltrations dans la charpente et de l'étranglement de la gouttière qui en serait à 1'origine ne sont pas établies ;
- en l'absence d'éléments permettant d'identifier les dommages causés au mur de clôture de l'immeuble rue de l'abbaye et au mur d'enceinte, et le rôle joué par la commune de Moissac dans ces désordres, les sommes de 8 000 et 6 500 euros sollicitées ne peuvent pas être allouées ;
- le préjudice lié à la perte de loyers du local du 7 rue Cul Roussol n'est pas caractérisé ; il n'est pas justifié du lien entre les travaux menés en 1994 et la vacance du local, laquelle est antérieure à cette date ; en tout état de cause, la requérante ne produit pas de contrat de bail justifiant la perception d'un loyer entre 1989 et 2013 ;
Par ordonnance du 15 novembre 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 15 décembre 2016 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Cécile Cabanne ;
- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. M. D...F...était propriétaire d'un immeuble situé 8 rue de l'abbaye sur la parcelle cadastrée n° 963 et d'un immeuble situé 7 rue de Cul Roussol cadastré n° 965 à Moissac. Le 23 juin 1989, il a cédé deux parcelles cadastrées n° 962 et 964 à la commune de Moissac pour la création du jardin public Sliman Azem et d'un parc public de stationnement. Après la réalisation des travaux en 1994, des désordres sont apparus. Ils ont été constatés par huissier le 23 mars 2000 et ont fait l'objet de réclamations auprès de la commune de Moissac les 13 mars 2002, 5 juin 2003 et 29 septembre 2004. A la demande de M.F..., un expert a ensuite été désigné par le tribunal administratif de Toulouse par ordonnance du 17 février 2005 aux fins, notamment, de décrire la nature et l'étendue des désordres affectant les appartements situés 7 rue Cul Roussol et 8 rue de l'Abbaye à Moissac. Le rapport d'expertise a été déposé le 9 juin 2005 par M.E.... A la suite du décès de M. F...survenu en 2005, son fils mineur, I...F...-C..., par 1'intermédiaire de son représentant légal, MmeC..., a présenté, le 30 juin 2009, une nouvelle demande d'expertise, qui a été ordonnée le 27 octobre 2009. Cette expertise, qui avait entre autre objet de dire dans quelle mesure les dommages s'étaient aggravés depuis le premier rapport, a été étendue par ordonnance du 10 mai 2010 afin de décrire le système d'évacuation des eaux pluviales à la date des travaux d'aménagement du jardin public réalisé par la commune. A la suite du dépôt du rapport d'expertise le 9 mars 2011 par M. E...et le rejet implicite de sa demande d'indemnisation présentée le 5 septembre 2013, Mme C...représentante légale de son fils mineur héritier de M. F...a alors saisi le tribunal administratif de Toulouse d'une demande tendant à la condamnation de la commune de Moissac à lui verser la somme de 57 734,26 euros avec intérêts à compter du 5 septembre 2013 en réparation du préjudice résultant des dégâts subis par ces immeubles. Par un jugement en date du 3 février 2015, les premiers juges ont reconnu partiellement la responsabilité de la commune de Moissac et l'ont condamnée à verser à Mme C...la somme de 4 250 euros, portant intérêt au taux légal à compter du 5 septembre 2013. Celle-ci interjette appel de ce jugement en tant que le tribunal n'a pas fait droit entièrement à sa demande. La commune de Moissac, par la voie de l'appel incident, demande l'annulation de ce jugement.
Sur la responsabilité de la commune de Moissac :
En ce qui concerne les désordres affectant l'immeuble situé rue Cul Roussol :
2. En premier lieu, il résulte de l'instruction que le 17 décembre 2001, à la suite de fortes pluies, le rez-de-chaussée de l'immeuble situé 7 rue Cul Roussol a été inondé. Cette inondation a pour cause le rehaussement du sol des allées du jardin Sliman Azem, de sorte qu'il effleure les fenêtres de cette habitation. Or, le terrain étant en pente douce du nord vers le sud, les eaux de ruissellement sont venues s'appuyer sur la façade nord de la propriété de MmeC..., laquelle n'est pas protégée, puis s'infiltrer par les fenêtres. Il ressort également des constations de l'expert que les travaux ont également occasionné la destruction du système de drainage des eaux du jardin, lesquels sont également à l'origine de l'inondation. Dans ces conditions, la responsabilité de la commune de Moissac est engagée à raison des dommages que ces désordres ont occasionné à la propriété de la requérante.
3. Mme C...soutient que les frais de remise en état de son appartement à la suite de l'inondation survenue le 17 décembre 2001 s'élèvent à 7 350 euros. Toutefois, le montant total des factures produites s'élèvent à 1 845,54 euros. L'expert indique que les travaux effectués par M. F...lui-même correspondent à un montant au moins égal au double du prix d'achat de ces matériaux. Dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en l'évaluant à 6 000 euros.
4. En deuxième lieu, MmeC..., estimant que des désordres affectant sa toiture sont dus à la chute des aiguilles d'un if présent dans le jardin public Sliman Azem, sollicite la somme de 1 795 euros correspondant à son nettoyage. Il résulte de l'instruction, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, que l'if a été abattu mais que la toiture n'a pas été nettoyée des aiguilles qui s'y trouvaient en quantité importante. Si la commune se prévaut de l'état de vétusté du toit, elle ne produit aucun élément de nature à établir sa fragilité. Il résulte au contraire de l'instruction que le toit avait été rénové en mars 2000. Ainsi, la chute des aiguilles de l'if à la suite de son abattage a excédé les sujétions normales résultant de son voisinage. L'expert, sur la base d'un devis établi par une entreprise et qui ne se limite pas au nettoyage du toit, a évalué le coût des travaux à la somme 1 795 euros. Il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en évaluant à la somme de 500 euros le montant de l'indemnité à mettre à la charge de la commune.
5. En troisième lieu, Mme C...soutient que la construction d'un escalier en béton dans l'impasse de Cul Roussol a eu pour effet d'obstruer l'entrée d'un local commercial lui appartenant et a engendré des pertes de loyer du fait de sa vacance qu'elle évalue à 32 400 euros. S'il résulte de l'instruction que la réalisation de l'escalier a effectivement obstrué un des accès de son immeuble, l'extrait K bis qu'elle produit révèle que l'exploitation de ce local a cessé en 1982, soit bien avant la réalisation des travaux en 1994. En outre, Mme C...ne produit aucun élément de nature à démontrer que la location du local, lequel dispose de plusieurs accès, aurait été rendue impossible du fait de la présence de cet escalier. L'indemnisation de ce chef de préjudice doit par suite être écartée.
En ce qui concerne les désordres affectant l'immeuble situé rue de l'abbaye :
6. En premier lieu, les premiers juges ont relevé qu'aucun élément du dossier ne permettait d'établir que le pincement de la gouttière affectant l'immeuble situé rue de l'Abbaye aurait pour origine des travaux réalisés par la commune. En se bornant à solliciter le versement des sommes de 262,16 euros et 1 427,10 euros en réparation respectivement de la gouttière et de la charpente endommagée par le reflux de la gouttière, MmeC..., qui ne se prévaut d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif, ne remet pas utilement en cause l'appréciation portée par les premiers juges. Il y a lieu par conséquent de rejeter cette demande par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.
7. En deuxième lieu, Mme C...sollicite la somme de 8 000 euros au titre des travaux de réparation du mur séparant les jardins du musée de l'immeuble situé rue de l'abbaye. Toutefois, si la commune reconnait être intervenue sur le mur, lors des travaux de 1994, afin de réaliser un réseau d'évacuation des eaux recueillies dans le jardin, il ne résulte pas de l'instruction que l'état de ruine partielle du mur puisse être imputé à ces travaux.
8. En troisième lieu, Mme C...demande une indemnisation de 6 500 euros pour les travaux de reprise du mur d'enceinte dont elle allègue qu'il aurait été endommagé par les racines d'un arbre appartenant à la commune. Cependant, si les photos produites permettent d'établir la présence d'un arbre à proximité du mur d'enceinte, lequel apparaît au demeurant très ancien, les termes du rapport d'expertise, qui ne décrit pas l'arbre incriminé avec exactitude, sont trop imprécis pour établir que ses racines sont à l'origine des dégradations causées au mur de la propriété de MmeC.... Quand bien même la commune a envoyé une équipe pour nettoyer cette partie du jardin, aucun autre élément du dossier ne permet de démontrer que le préjudice invoqué résulterait de la présence de l'arbre.
9. Il résulte de ce qui précède d'une part, que le montant des préjudices dont Mme C...est fondée à demander l'indemnisation doit être porté à la somme totale de 6 500 euros avec intérêts au taux légal à compter du 5 septembre 2003 et d'autre part que les conclusions d'appel incident de la commune de Moissac doivent être rejetées.
Sur les conclusions tendant à l'application des articles R. 761-1 et L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de maintenir la charge des frais d'expertise telle qu'elle a été fixée par le tribunal administratif.
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de MmeC..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande la commune de Moissac au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de Mme C...et de lui allouer la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La somme que la commune de Moissac a été condamnée à verser à Mme C...par l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Toulouse est portée à 6 500 (six mille cinq cents) euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 5 septembre 2003.
Article 2 : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Toulouse est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : La commune de Moissac versera à Mme C...la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C...est rejeté.
Article 5 : Les conclusions de la commune de Moissac sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C...et à la commune de Moissac. Copie en sera adressé à M.E..., expert.
Délibéré après l'audience du 11 mai 2017 à laquelle siégeaient :
M. Jean-Claude Pauziès, président,
M. Paul-André Braud, premier conseiller,
Mme Cécile Cabanne, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 juin 2017.
Le rapporteur,
Cécile CABANNE Le président,
Jean-Claude PAUZIÈS
Le greffier,
Delphine CÉRON
La République mande et ordonne au ministre la cohésion des territoires et des collectivités territoriales en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15BX01154