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04/05/2017 | FRANCE | N°16BX04209

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre - formation à 3, 04 mai 2017, 16BX04209


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 28 octobre 2016 par lequel le préfet des Hautes-Pyrénées a décidé sa remise aux autorités bulgares, responsables de sa demande d'asile et d'enjoindre au préfet des Hautes-Pyrénées de réexaminer sa demande d'admission provisoire au séjour au titre de l'asile dans un délai de cinq jours, sous astreinte de 200 euros par jour de retard.

Par un jugement n°1602168 du 21 novembre 2016, le tribunal administratif de Pau a rejeté

ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 décem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 28 octobre 2016 par lequel le préfet des Hautes-Pyrénées a décidé sa remise aux autorités bulgares, responsables de sa demande d'asile et d'enjoindre au préfet des Hautes-Pyrénées de réexaminer sa demande d'admission provisoire au séjour au titre de l'asile dans un délai de cinq jours, sous astreinte de 200 euros par jour de retard.

Par un jugement n°1602168 du 21 novembre 2016, le tribunal administratif de Pau a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 décembre 2016 sous le n° 16BX04209, M.B..., représenté par Me A...demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 21 novembre 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 28 octobre 2016 par lequel le préfet des Hautes-Pyrénées a décidé sa remise aux autorités bulgares, responsables de sa demande d'asile ;

3°) d'enjoindre au préfet des Hautes-Pyrénées de réexaminer sa demande d'admission provisoire au séjour au titre de l'asile du requérant dans un délai de quinze jours ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal administratif a commis une erreur de droit au regard du 1 de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 dès lors qu'il ressort de la lecture de l'arrêt attaqué que le préfet n'a pas examiné la possibilité laissée à la France d'examiner sa demande d'asile ;

- en refusant d'exercer la faculté d'examen prévu à l'article 17.1 du règlement précité, le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- le tribunal administratif a fait une mauvaise application du 2 de l'article 3 du règlement n° 604/2013.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 février 2017, le préfet des Hautes-Pyrénées conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 20 janvier 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 27 février 2017 à 12h00.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 janvier 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marianne Pouget,

- les conclusions de Mme. Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., représentant M.B....

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., de nationalité afghane, est entré en France le 1er avril 2016 et a déposé une demande d'asile le 20 juillet 2016. Dans le cadre de l'instruction de cette demande, le relevé de ses empreintes digitales, réalisé le 28 juillet 2016, a révélé l'existence d'une demande d'asile antérieure, déposée auprès des autorités bulgares. Le 12 octobre 2016, celles-ci ont accepté la demande de prise en charge émanant des autorités françaises. Par arrêté du 28 octobre 2016, le préfet des Hautes-Pyrénées a décidé sa remise aux autorités bulgares, responsables de l'examen de sa demande d'asile en application de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. B...relève appel du jugement du 21 novembre 2016 par lequel le président du tribunal administratif de Pau, saisi sur le fondement de l'article L. 742-4 du même code, a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

2. Aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 susvisé : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) 2. L'Etat membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'Etat membre responsable, ou l'Etat membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre Etat membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre Etat membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. Les personnes concernées doivent exprimer leur consentement par écrit " ;

3. La faculté laissée à chaque Etat membre, par l'article 17 de ce règlement, de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.

4. En premier lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, il ne ressort pas des termes mêmes de la décision que le préfet des Hautes-Pyrénées se serait abstenu d'apprécier la possibilité pour lui de faire usage de la clause discrétionnaire prévue à l'article 17 du règlement (UE) du 26 juin 2013 susvisé.

5. En second lieu, en l'absence de toute précision de la part du requérant sur les éléments qui auraient dû conduire le préfet à mettre en oeuvre la procédure contradictoire prévu à l'article 17 du règlement (UE) du 26 juin 2013 susvisé, le moyen tiré de ce que le préfet, en décidant de le transférer aux autorités bulgares, aurait entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation, doit être écarté.

6. Aux termes du 2 de l'article 3 du règlement (UE) du 26 juin 2013 : " (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable. / Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un État membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier État membre auprès duquel la demande a été introduite, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable devient l'État membre responsable (...) " ;

7. Il résulte des dispositions précitées que la présomption selon laquelle un Etat respecte ses obligations découlant de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne est renversée lorsqu'il existe de sérieuses raisons de croire qu'il existe, dans " l'Etat membre responsable " de la demande d'asile au sens du règlement précité, des défaillances systémiques de la procédure d'asile et des conditions d'accueil des demandeurs d'asile impliquant pour ces derniers un risque d'être soumis à des traitements inhumains ou dégradants.

8. Si la Bulgarie est un Etat membre de l'Union européenne, partie à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complété par le protocole de New-York, et à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il appartient néanmoins à l'administration d'apprécier dans chaque cas, au vu des pièces qui lui sont soumises et sous le contrôle du juge, si les conditions dans lesquelles un dossier particulier est traité par les autorités de ce pays répondent à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. A la suite des recommandations issues du rapport du Haut commissariat aux réfugiés édictées au mois de janvier 2014 et demandant la suspension temporaire des réadmissions vers la Bulgarie, ce pays a reçu des crédits supplémentaires de l'Union européenne pour le traitement des demandes d'asile et a bénéficié d'un soutien du Bureau européen en matière d'asile. Le Haut commissariat aux réfugiés a suspendu sa recommandation en avril 2014, tout en émettant des réserves " pour transfert de certains groupes vulnérables ", dont M. D... n'établit pas faire partie. Dans ces conditions, il n'est pas établi que la réadmission de l'intéressé vers la Bulgarie serait, par elle-même, constitutive d'une atteinte au droit d'asile. Le requérant n'établit pas, par le seul document qu'il produit, un unique rapport annuel d'Amnesty International pour l'année 2015 et 2016 et un article de presse, que les autorités bulgares ne traiteraient pas sa demande d'asile dans le respect du droit d'asile et qu'au jour de la décision contestée, soit le 28 octobre 2016, il existerait en Bulgarie des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs. Par suite, le préfet des Hautes-Pyrénéés n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet des Hautes-Pyrénées.

Délibéré après l'audience du 23 mars 2017 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

Mme. Marianne Pouget, président-assesseur,

Mme Florence Madelaigue, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 4 mai 2017.

Le rapporteur,

Marianne PougetLe président,

Philippe PouzouletLe greffier,

Florence Deligey La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 16BX04209


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX04209
Date de la décision : 04/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: Mme Marianne POUGET M.
Rapporteur public ?: Mme MUNOZ-PAUZIES
Avocat(s) : GEORGES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-05-04;16bx04209 ?
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